Lignes directrices sur l’application de la loi concernant les accords de fixation des salaires et de non-débauchage

Projet pour consultation publique

Les présentes lignes directrices sont destinées à une consultation publique et décrivent l’approche que suivra le Bureau pour appliquer le paragraphe 45(1.1). Elles complètent les Lignes directrices sur la collaboration entre concurrents (les LDCC). En cas d’incohérence, seuls les renseignements contenus dans les présentes lignes directrices s’appliquent au paragraphe 45(1.1).

Cette consultation a lieu entre le 18 janvier 2023 et le 24 mars 2023 (23 h 59, heure du Pacifique). Les parties intéressées sont invitées à soumettre leurs points de vue sur les lignes directrices en remplissant notre formulaire de commentaires en ligne.

Sur cette page :

Préface

Le Bureau de la concurrence est un organisme d’application de la loi indépendant responsable d’assurer et de contrôler l’application de la Loi sur la concurrence. La Loi est une loi d’application générale qui établit les principes fondamentaux de la conduite des affaires au Canada. Le Bureau contribue à la prospérité des Canadiennes et des Canadiens en protégeant et en promouvant des marchés concurrentiels et en permettant aux consommateurs de faire des choix éclairés.

En juin 2022, le gouvernement du Canada a modifié la Loi, notamment en ajoutant le paragraphe 45(1.1) aux dispositions actuelles sur le complot criminel. Ce nouveau paragraphe protège la concurrence sur les marchés du travail en interdisant les accords entre les employeurs visant à fixer les salaires et à restreindre la mobilité d’emploi.

À l’instar des accords de fixation des prix, de partage des marchés et de restriction de la production entre concurrents, les accords de fixation des salaires et de non-débauchage nuisent à la concurrence et à l’attribution efficace de ressources. Le fait de maintenir et d’encourager la concurrence entre les employeurs se traduit par des salaires plus élevés, ainsi que par de meilleures conditions d’emploi et perspectives professionnelles pour les employés.

Le paragraphe 45(1.1) entrera en vigueur le 23 juin 2023. À compter de cette date, les employeurs non affiliés commettront une infraction s’ils s’accordent en vue de fixer, de maintenir, de diminuer ou de contrôler les salaires, les traitements ou d’autres conditions d’emploi, ou de ne pas solliciter ou embaucher les employés de l’autre employeur. La disposition s’appliquera uniquement aux nouveaux accords conclus par les employeurs à compter du 23 juin 2023 (inclusivement), ainsi qu’aux comportements qui confirment ou mettent en œuvre des accords conclus antérieurement.

Il incombe au commissaire de la concurrence et au Bureau de faire enquête sur toute question qui pourrait constituer une infraction en vertu de la Loi. En cas de preuve d’infraction, le commissaire peut renvoyer l’affaire au directeur des poursuites pénales (le « DPP ») pour qu’il prenne les mesures souhaitées. Les présentes lignes directrices ne visent pas à reformuler la loi et elles n’engagent pas le commissaire ou le DPP quant à la façon dont ils exerceront leur pouvoir discrétionnaire dans une situation donnée. Les décisions du commissaire et du DPP visant respectivement l’application de la loi et les poursuites, ainsi que la façon dont sont en définitive réglées les questions qui surviennent, dépendront des circonstances particulières en cause.

Le Bureau pourrait revenir sur certains aspects de ces lignes directrices, selon les circonstances et les décisions des tribunaux.

1. L’interdiction

1.1 Aperçu

Le Bureau peut passer en revue les accords de fixation des salaires et de non-débauchage en vertu de l’article 90.1 de la Loi, soit la disposition sur les accords civils. En vertu de l’article 90.1, le Bureau doit démontrer, selon la prépondérance des probabilités, que l’accord a ou aura vraisemblablement pour effet d’empêcher ou de diminuer sensiblement la concurrence. Lorsque le paragraphe 45(1.1) entrera en vigueur, les accords de fixation des salaires et de non-débauchage seront désormais illégaux en soiNote de bas de page 1, nécessiteront la présentation d’une preuve au-delà de tout doute raisonnable, et seront passibles de lourdes sanctions au criminel.

Le paragraphe 45(1.1) vise les « restrictions pures et simples » à la concurrence, c’est-à-dire les restrictions salariales ou à la mobilité professionnelle qui ne sont pas mises en œuvre dans le cadre d’une collaboration, d’une alliance stratégique ou d’une coentreprise légitime.

Le nouveau paragraphe prescrit que :

45 (1.1) Commet une infraction une personne qui est un employeur qui, avec un employeur qui ne lui est pas affilié, complote ou conclut un accord ou un arrangement :

  1. pour fixer, maintenir, réduire ou contrôler les salaires, les traitements ou les conditions d’emploi;
  2. pour ne pas solliciter ou embaucher les employés de l’autre employeur.

L’approche du Bureau concernant l’application de cette nouvelle disposition est décrite ci-dessous.

1.2 Principes généraux

1.2.1 Affiliation

Le paragraphe s’applique aux accords entre employeurs non affiliésNote de bas de page 2. Il ne s’applique pas aux accords conclus entre employeurs affiliés. Par exemple, les accords de fixation des salaires ou de non-débauchage entre deux entreprises ou plus contrôlées par la même société mère n’enfreignent pas la disposition.

1.2.2 Employeurs

Contrairement au paragraphe 45(1) qui s’applique uniquement aux concurrents, le paragraphe 45(1.1) s’applique aux accords mettant en cause deux employeurs non affiliés ou plus, qu’ils se fassent concurrence ou non dans la fourniture d’un produitNote de bas de page 3. Les « employeurs » comprennent les administrateurs, les dirigeants, ainsi que les employés ou agents, tels que les professionnels en ressources humaines. Par conséquent, par exemple, un accord conclu entre un dirigeant d’une entreprise et un administrateur d’une autre entreprise est traité comme un accord entre employeurs aux fins du paragraphe 45(1.1). Dans ces circonstances, les personnes ayant conclu l’accord s’exposent à des poursuitesNote de bas de page 4. De plus, les entreprises elles-mêmes pourraient s’exposer à des poursuites pour un accord conclu entre leurs employés respectifs si ceux-ci agissent à titre de cadres supérieursNote de bas de page 5.

1.2.3 Relation d’emploi

Le paragraphe s’applique à certains accords entre employeurs non affiliés concernant leurs employés. L’existence ou non d’une relation employeur-employé entre les parties dépend des lois et des circonstances dans lesquelles la relation a été conclue.

1.2.4 Partage de renseignements

Le « parallélisme conscient » se produit lorsqu’une entreprise agit de façon indépendante tout en étant consciente de la réponse probable de ses concurrents ou en réaction aux comportements de ses concurrents. Le Bureau ne considère pas un simple « parallélisme conscient » comme étant une infraction à l’article 45Note de bas de page 6. Cependant, des comportements parallèles combinés à des pratiques facilitantes, par exemple le fait pour des employeurs de partager des renseignements délicats liés à l’emploi ou de prendre des mesures pour surveiller mutuellement leurs pratiques d’emploi, pourraient suffire pour démontrer qu’un accord a été conclu entre les parties. Comme l’indique le paragraphe 45(3), un tel comportement pourrait amener le Bureau à déduire qu’il existe un accord entre les parties, en infraction au paragraphe 45(1.1).

Les employeurs devraient être prudents lorsqu’ils partagent des renseignements entre eux dans le cadre d’activités de collaboration, comme l’analyse comparative des conditions d’emploi, afin de s’assurer que ce comportement ne soulève aucune préoccupation relative au paragraphe 45(1.1) de la LoiNote de bas de page 7.

2. Types d’accords interdits

2.1 Accords de fixation des salaires

L’alinéa 45(1.1)a) de la Loi interdit les accords entre employeurs non affiliés pour « fixer, maintenir, réduire ou contrôler les salaires, les traitements ou les conditions d’emploi ». Par conséquent, les accords suivants entre employeurs sont interdits en vertu de cette disposition :

  • les accords pour fixer, maintenir, réduire ou contrôler les salaires;
  • les accords pour fixer, maintenir, réduire ou contrôler les traitements;
  • les accords pour fixer, maintenir, réduireNote de bas de page 8 ou contrôler les conditions d’emploi, ce qui s’entend notamment des responsabilités, politiques et avantages associés à un emploi. Cela peut comprendre les descriptions de poste, les allocations telles que les indemnités quotidiennes et le remboursement des déplacements, la rémunération non monétaire, les heures de travail, le lieu de travail, et les dispositions de non-concurrence ou autres directives susceptibles de restreindre les perspectives d’emploi d’une personne. L’application par le Bureau se limite généralement aux « conditions » pouvant influer sur la décision d’une personne d’accepter un contrat d’emploi ou de le conserver.

2.2 Accords de non-débauchage

L’alinéa 45(1.1)b) de la Loi interdit les accords entre employeurs non affiliés « pour ne pas solliciter ou embaucher les employés de l’autre employeur ». Cette disposition interdit toutes les formes d’accords entre employeurs qui limitent les possibilités pour leurs employés d’être embauchés par l’autre employeur. Cela comprend le fait de limiter la communication de renseignements en lien avec les offres d’emploi et d’adopter des mécanismes d’embauche, tels que des systèmes de points, conçus pour que les employés ne puissent pas se faire recruter ou embaucher par un autre employeur participant à cet accordNote de bas de page 9.

L’alinéa 45(1.1)b) limite l’infraction aux cas où des employeurs conviennent ou font en sorte de ne pas solliciter ou embaucher des employés « de l’autre » employeur. Autrement dit, il ne s’agit pas d’une infraction si une seule partie convient de ne pas débaucher les employés de l’autre employeur. Cependant, si les parties ont des conditions mutuelles de non-débauchage dans des accords distincts, le Bureau pourrait prendre les mesures d’application de la loi appropriées. Pour déterminer s’il existe un accord, le Bureau tiendra compte de la question de savoir si les parties au prétendu accord ou arrangement sont parvenues à un consensus, explicitement ou tacitement.

3. Défenses

3.1 Défense fondée sur les restrictions accessoires

Le Bureau fait la distinction entre des restrictions pures et simples et des « restrictions accessoires ». Le paragraphe 45(4) prévoit la défense fondée sur les restrictions accessoires. Comme il est décrit dans les LDCC, la défense fondée sur les restrictions accessoires (DRA) peut être invoquée lorsque certaines transactions ou collaborations commerciales désirables nécessitent des restrictions explicites à la concurrence pour les rendre efficaces, voire possibles. La DRA peut être invoquée lorsque :

  1. la restriction est accessoire à un accord plus large ou distinct entre les mêmes parties, ou en découle;
  2. la restriction est directement liée à l’objectif de l’accord plus large ou distinct évoqué ci-dessus en (a) et est raisonnablement nécessaire à sa réalisation;
  3. l’accord plus large ou distinct évoqué ci-dessus en (a), considéré indépendamment de la restriction, ne contrevient pas au paragraphe 45(1.1).

Pour être admissible à la défense prévue au paragraphe 45(4), la restriction en question doit être accessoire à un accord plus large ou distinct qui vise les mêmes parties. Comme il est décrit plus en détail dans les LDCC, le Bureau pourrait examiner les modalités de l’accord, la forme de l’accord, la relation fonctionnelle ou l’absence d’une telle relation entre la restriction et l’accord principal, et la façon dont la restriction rend l’accord principal plus efficace dans la réalisation de son objectif. Outre les autres considérations abordées dans les LDCC, le Bureau tiendra compte des éléments suivants :

  • si la disposition relative aux restrictions accessoires est « directement liée et raisonnablement nécessaire » pour donner effet à l’objectif de l’accord plus large. Le Bureau ne remettra pas en question le choix des parties eu égard à quelque autre option qui aurait été moins restrictive de façon négligeable. Toutefois, dans l’éventualité où il aurait été possible pour les parties de parvenir à un accord équivalent ou comparable en ayant recours à des moyens pratiques sensiblement moins restrictifs qui leur étaient raisonnablement accessibles au moment où l’accord a été conclu, le Bureau jugera que la restriction n’était pas raisonnablement nécessaire;
  • la durée de la restriction accessoire, l’objet de la restriction et la portée géographique de la restriction (p. ex., si elle s’applique ou non à des employés n’ayant pas de lien avec la collaboration), afin de déterminer si elle est raisonnablement nécessaire pour réaliser l’objectif de l’accord plus large;
  • si, en l’absence de la restriction, l’accord pouvait seulement être mis en œuvre dans un contexte sensiblement plus incertain, à un coût sensiblement plus élevé ou sur une période sensiblement plus longue.

Le Bureau examinera les circonstances ayant mené à l’adoption de la restriction, y compris les observations des parties présentées au Bureau, les éléments de preuve issus de l’évaluation et de la négociation de l’accord démontrant les objectifs dudit accord ainsi que toute indication sur les options envisagées par les parties lors de la négociation de l’accord.

Le Bureau reconnaît l’importance que peuvent avoir les clauses de non-sollicitation dans de nombreux accords visant l’achat d’une entreprise. Conformément à l’approche décrite dans les LDCC, il n’évaluera généralement pas les clauses de fixation des salaires ou de non-débauchage qui sont accessoires aux transactions de fusion, aux coentreprises ou aux alliances stratégiques en vertu du volet pénal. Une exception serait faite lorsque ces clauses sont clairement plus larges que nécessaire en ce qui concerne la durée, les territoires ou les employés couverts, ou lorsque la fusion, la coentreprise ou l’alliance stratégique est une imposture.

Lorsque la DRA s’applique, le Bureau peut toujours examiner l’accord en vertu des dispositions sur les affaires pouvant faire l’objet d’un examen de la partie VIII de la Loi, y compris la disposition sur les accords civils de l’article 90.1.

3.2 Autres défenses et exceptions

Les employeurs devraient savoir que d’autres défenses juridiques et exceptions pourraient s’appliquer, par exemple la défense fondée sur des actes réglementés et les accords entre employeurs dans le cadre des négociations de conventions collectives. Les employeurs devraient consulter les LDCC du Bureau ainsi que la jurisprudence et les autres lois applicables. Lorsque les parties invoquent une défense, le Bureau en examinera la validité avant de décider de renvoyer ou non cette affaire au DPP.

4. Sanctions

Si le commissaire conclut qu’une infraction a été commise en vertu de l’article 45, les éléments de preuve pourraient être renvoyés au DPP avec une recommandation de porter des accusations au criminel. Le DPP décidera alors d’intenter ou non des poursuites, en vertu des critères établis dans le Guide du Service des poursuites pénales du Canada.

Dans le cadre des modifications apportées à la Loi en 2022, les sanctions visant les infractions aux dispositions sur les complots ont été actualisées. À compter du 23 juin 2023, une personne déclarée coupable d’une infraction en vertu des paragraphes 45(1) et (1.1) s’expose à une peine d’emprisonnement maximale de 14 ans, ou à une amende déterminée par le tribunal, ou les deux.

Les LDCC offrent de plus amples renseignements sur les autres sanctions et recours à la disposition du Bureau et des personnes ayant subi des pertes ou des dommages en raison d’une infraction.

5. Immunité et clémence

Les programmes d’immunité et de clémence du Bureau sont disponibles pour les infractions décrites au paragraphe 45(1.1). Pour y être admissibles, les demandeurs devront fournir suffisamment de renseignements pertinents en lien avec la ou les infractions en question, y compris les renseignements relatifs aux pratiques d’embauche et à la rémunération des employés.

Vous trouverez d’autres renseignements sur les pages des programmes d’immunité et de clémence du Bureau. Ces programmes font actuellement l’objet d’une mise à jour afin de tenir compte des changements apportés à l’article 45 en 2022.

Exemples :

Exemple 1 : Accords de fixation des salaires

Mme X est propriétaire d’un laboratoire médical privé. Lors d’un dîner d’affaires avec M. Y, qui est propriétaire d’un laboratoire d’essais de substances chimiques, les deux employeurs conviennent de limiter les primes annuelles de chaque employé à 5 % de leur salaire brut respectif.

Analyse

Cet accord susciterait vraisemblablement des préoccupations relatives à l’alinéa 45(1.1)a). Cette disposition interdit tout accord entre deux employeurs ou plus pour fixer, maintenir, réduire ou contrôler les salaires, les traitements ou les conditions d’emploi. Il n’est pas nécessaire de se demander si les employeurs se font concurrence en matière de prestation de services de laboratoire. Dans le cas présent, les deux employeurs ont des employés qui gagnent un salaire et qui reçoivent normalement chacun, à la fin de l’année, une prime basée sur leur rendement individuel. Les accords pour fixer, maintenir, réduire ou contrôler les « primes » sont interdits par la disposition.

Exemple 2 : Accords de non-débauchage et détachement d’employés

L’entreprise A est une société de conseil qui intègre ses employés dans les entreprises de ses clients pendant une période déterminée. Dans le cadre d’un contrat de consultance, l’entreprise B accepte de ne pas embaucher les employés intégrés de l’entreprise A pendant une période d’un an après la fin du contrat. L’entreprise A ne conclut pas le même accord concernant les employés de l’entreprise B.

Analyse

L’accord de non-débauchage a été conclu par deux employeurs pour empêcher les employés de l’entreprise A d’être embauchés par l’entreprise B. Puisque la restriction contenue dans l’accord ne s’applique qu’aux employés de l’entreprise A, il s’agit d’un accord « à sens unique » qui ne s’applique pas aux employés de « l’autre » et, par conséquent, il n’enfreint pas l’alinéa 45(1.1)b).

Exemple 3 : Accords de non-débauchage et agences de recrutement

L’entreprise de dotation X offre des services de dotation et de recrutement. Elle a conclu un accord de dotation avec l’entreprise Y pour lui fournir des travailleurs spécialisés pour une brève période. Dans le cadre du contrat, les entreprises X et Y conviennent de ne pas embaucher d’employés de l’autre employeur tant que le contrat est en vigueur.

Analyse

Les entreprises X et Y sont toutes deux des employeurs et ont vraisemblablement conclu un accord de non-débauchage, à l’encontre de l’alinéa 45(1.1)b). Dans ce scénario, les parties pourraient être en mesure d’invoquer la défense fondée sur les restrictions accessoires (DRA) prévue au paragraphe 45(4) si elles peuvent démontrer : (i) que cet accord est accessoire à l’accord de dotation plus large, et (ii) qu’il est directement lié à l’accord plus large et est raisonnablement nécessaire à la réalisation de cet objectif. Dans cet exemple, l’accord de non-débauchage est en vigueur seulement pour la durée du contrat. Bien que la DRA puisse s’appliquer dans ces circonstances, les employeurs devraient savoir que la durée ou les autres conditions liées aux restrictions accessoires, par exemple leur portée géographique, seront examinées pour déterminer si elles sont bel et bien « raisonnablement nécessaires ».

Exemple 4 : Accords de non-débauchage et contrats de franchise

L’entreprise A accorde des franchises à des lieux de restauration rapide partout au Canada. Former de nouveaux employés nécessite beaucoup de temps et d’argent de la part de l’entreprise A et de chaque franchisé. C’est pourquoi les contrats de franchise conclus par l’entreprise A et par chaque franchisé comprennent une disposition de non-débauchage, en vertu de laquelle le franchiseur et le franchisé s’engagent chacun à n’embaucher aucune personne qui est actuellement employée par le franchiseur ou par d’autres franchisés. Chaque franchisé s’attend à ce que l’embauche de ses employés par une autre franchise ou par l’entreprise A soit interdite.

Analyse

L’accord de non-débauchage susciterait vraisemblablement des préoccupations relatives à l’alinéa 45(1.1)b). D’habitude, les franchiseurs et les franchisés ne sont pas affiliés et les employeurs dans une relation de franchise ne peuvent miser sur l’exception d’affiliation prévue au paragraphe 45(1.1). De plus, le paragraphe précise qu’il est interdit à deux employeurs ou plus de convenir de ne pas solliciter ou embaucher des employés de l’autre employeur. Comme les franchisés et l’entreprise A sont tous des employeurs, l’alinéa 45(1.1)b) s’applique. Il n’est pas nécessaire de déterminer si les franchisés se font concurrence ou font concurrence à l’entreprise A sur le plan de la fourniture d’un produit.

Deux différents types de relations d’affaires sont relevés dans ce scénario :

  • les accords ou l’entente entre les franchisés;
  • les accords entre le franchiseur et chaque franchisé.

Il paraît moins probable que la DRA prévue au paragraphe 45(4) s’applique aux accords entre les franchisés, puisqu’il pourrait s’agir d’une restriction inutile qui aurait des répercussions sur les perspectives d’emploi des employés. Son applicabilité à l’accord entre l’entreprise A et chaque franchisé dépendra également de la situation précise et si les employeurs peuvent prouver que la clause de non-débauchage est nécessaire et découle de l’accord de franchise plus large. Si les éléments de la DRA ou de toute autre défense sont respectés, le Bureau peut alors examiner l’accord en vertu de la partie VIII de la Loi et s’adresser au Tribunal de la concurrence pour obtenir une mesure corrective, le cas échéant.