Mémoire du Réseau des services de santé en français de l’Est de l’Ontario

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Les documents suivants contiennent les observations écrites reçues par le Bureau de la concurrence en réponse à son avis d’étude de marché, qui a été publié le 8 avril 2021. Toutes les observations reçues sont disponibles au public sauf s’il y a eu une demande de confidentialité.

Objet : Étude de marché sur le secteur des soins de santé au Canada

Présenté au Bureau de la concurrence, le 8 octobre 2020

Table des matières

Contexte

Dans le cadre de son Étude de marché sur le secteur des soins de santé au Canada, le Bureau de la concurrence mène une consultation sur la « façon de soutenir les services de santé numériques au Canada grâce à des politiques favorisant la concurrence Note de bas de page 1 ». Cette consultation vise également à « déterminer s'il y a lieu d'apporter aux politiques des changements qui favoriseraient l'émergence et l'élargissement de nouvelles façons d'offrir des produits et services de manière plus efficiente Note de bas de page 2 ».

Dans ce mémoire, le Réseau des services de santé en français de l’Est de l’Ontario (le Réseau) démontrera en quoi l’absence de données probantes sur l’utilisation des services de santé numériques par les francophones est un facteur qui restreint accès aux services de santé numériques par ceux-ci et qui nuit à l’innovation quant à l'offre de services virtuels offerts en français.

Afin de régler ce problème, le Réseau met de l’avant les deux recommandations suivantes :

  1. Que le Bureau de la concurrence veille à ce que les systèmes de santé numériques procèdent à l’identification linguistique des patients en leur demandant explicitement quelle est la première langue officielle qu’ils ont apprise.
  2. Que le Bureau de la concurrence tienne compte de la faible concurrence et de ses impacts négatifs pour les consommateurs, notamment en ce qui a trait à l’innovation en matière de services de santé pour les francophones.

Ces recommandations sont émises par le Réseau afin de favoriser une offre efficiente de services de santé numériques fondée sur des données probantes ; elles visent à ce que les francophones du Canada aient accès aux services numériques dont ils ont besoin, et ce dans leur langue.

L’accès aux services de santé en français : un facteur de qualité des soins et de sécurité pour les patients francophones

En tant que communauté de langue officielle en situation minoritaire (CLOSM), les francophones n’ont pas toujours accès à des services de santé dans leur langue maternelle. Or, lorsqu’il est question de services de santé, les barrières linguistiques peuvent affecter négativement la qualité et la sécurité des soins prodigués aux patientsNote de bas de page 3. En effet, comme le démontrent nombre d’études sur le sujet, un patient qui a de la difficulté à communiquer avec

son équipe soignante risque de recevoir un diagnostic mal établiNote de bas de page 4 ou d’être victime d’erreurs médicalesNote de bas de page 5. Inversement, le fait de recevoir des services dans sa langue maternelle permet au patient de mieux comprendre les renseignements médicaux transmis et d’adhérer à un plan de soinsNote de bas de page 6, favorise le rétablissement (notamment en santé mentalNote de bas de page 7) et la prise en charge de sa santéNote de bas de page 8, et facilite l’établissement d’un rapport professionnel basé sur la confianceNote de bas de page 9.

Depuis plus de 20 ans, le Réseau oeuvre à l’amélioration des services de santé en français dans l’Est et le Sud-Est de l’Ontario. À titre d’Entité de planification des services de santé en français, nous collaborons avec les autorités locales de santé, les fournisseurs de services et les francophones afin de favoriser une planification de services de santé qui réponde aux besoins de notre communauté. En nous appuyant sur des analyses de données probantes, ainsi que des consultations et des initiatives d’engagement communautaire, nous conseillons le système de santé dans la planification de services de santé en français dans les régions de Champlain et du Sud-Est, et ce sur l’ensemble du continuum de soins.

Depuis 2017-2018, le Réseau mène également des activités de collecte et d’analyse de données probantes. Grâce à un partenariat avec le ministère de la Santé de l’Ontario et les 14 Réseaux locaux d’intégration des services de santé (RLISS), nous avons colligé et analysé des données sur les services en français offerts par plus de 1400 fournisseurs de services de santé en Ontario ; un exercice que nous avons répété en 2018-2019 et en 2019-2020. Ces données nous ont permis de dresser un portrait global de la capacité en matière de services de santé en français à l’échelle de la province. Elles viennent également éclairer la planification locale des services de santé sur l’ensemble du continuum de soins.

C’est donc en vertu de cette expérience et de cette expertise que nous vous écrivons aujourd’hui pour vous faire part d’un enjeu ayant une incidence importante sur la santé et le bien-être des communautés francophones au Canada : l’absence de données probantes sur les besoins de santé des patients francophones.

Les données sur la santé des francophones : l’angle mort de la santé numérique

À l’heure actuelle, il existe peu d’information sur l’état de santé des francophones en situation minoritaire, ainsi que sur leur utilisation des services de santé – incluant les services de santé numériques. Dans de telles circonstances, il demeure donc impossible, par exemple, de déterminer combien de francophones ont accès à un médecin famille, ou encore de déterminer si la prévalence de certaines maladies est plus élevée chez les francophones.

Cette absence de données probantes pose problème dans la mesure où elle réduit considérablement la possibilité d’analyse des besoins de santé des individus et des communautés francophones. Cette situation entrave également la planification judicieuse de services de santé répondant aux besoins des francophones, puisque cet exercice repose essentiellement sur le recours aux données probantesNote de bas de page 10. En effet, comment peut-on déterminer si le système de santé a la capacité de répondre aux besoins des francophones si on ignore quels sont ces besoins ?

Soutenir l’accès des francophones aux services de santé numériques grâce à la collecte de l’identité linguistique

Dans le cadre de cette consultation, nous demandons donc au Bureau de la concurrence d’accorder une attention particulière à la question de la collecte de l’identité linguistique (la première langue officielle parlée par un individu).

À l’heure actuelle, cette variable n’est pas prise en compte par les systèmes de services de santé numériques. Cette absence de données entrave la conception d’outils et de services numériques adaptés aux besoins et aux réalités des communautés francophones.

Pour cette raison, nous demandons au Bureau de la concurrence de veiller à ce que les systèmes retenus pour offrir des services de santé numériques aux Canadiens procèdent à l’identification linguistique de leurs patients en leur demandant explicitement quelle est la première langue officielle qu’ils ont apprise.

En colligeant cette variable, il serait possible de savoir avec précision quels sont les services de santé numériques utilisés par les francophones, et par conséquent, de veiller à ce que ceux-ci soient offerts en français. Ces données probantes viendraient ainsi appuyer le développement d’une offre de services basée sur la demande.

Favoriser la concurrence et l’innovation

Il convient de noter qu’à l’heure actuelle, très peu d’entreprises offrent des services de santé numériques. En effet, le marché est occupé par quelques gros joueurs (Meditech, Luma Health, Cerner, etc.).

Ce quasi-monopole favorise la mise en place d’une relation asymétrique entre les concepteurs de systèmes de santé numériques (les entreprises) et les consommateurs (la population canadienne) et rend très difficile tout changement souhaité par ces derniers (tel que la collecte de l’identité linguistique).

Nous demandons donc au Bureau de la concurrence de tenir compte des impacts négatifs de cette faible concurrence pour les consommateurs (ici, les patients francophones qui ont recours aux services de santé numériques) ; nous sommes d’avis qu’il est nécessaire de mettre en place des politiques qui soutiendront l’innovation et favoriseront l’accès aux services de santé numériques pour les francophones.

Conclusion

Le Canada compte des communautés francophones d’un océan à l’autre. Dans un contexte fortement minoritaire, les services de santé numériques représentent une avenue intéressante afin de permettre à celles-ci d’accéder à des services en français malgré les distances géographiques. De même, la pandémie de COVID-19 ne cesse de nous rappeler la pertinence d’offrir des services de santé virtuels.

Or, pour que les francophones puissent recevoir des services de santé numériques adaptés à leurs besoins, il faut disposer de données probantes sur leur santé ; et ces données ne peuvent exister si elles ne sont systématiquement colligées.

En veillant à ce que les fournisseurs de services de santé numériques colligent l’identité linguistique de leurs patients, le Bureau de la concurrence appuierait l’innovation en santé. Il veillerait également à ce que les francophones du Canada ne soient pas limités dans leur accès aux services de santé virtuels. Enfin, il contribuerait à la qualité et à la sécurité des services de santé numériques pour les communautés de langue officielle en situation minoritaire.


Pour plus d’informations :

Jacinthe Desaulniers
Présidente-directrice générale
Réseau des services de santé en français de l’Est de l’Ontario
1173, chemin Cyrville, bureau 300
Ottawa (Ontario) K1J 7S6
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