Énoncé du Bureau de la concurrence concernant l’acquisition de Terrapure par GFL

Énoncé de position

Voir le communiqué de presse qui correspond à cet énoncé de position.


GATINEAU (Québec), le 24 mai 2022 – À la suite d’un processus de médiation mené par l’honorable Jocelyne Gagné, juge en chef adjointe de la Cour fédérale du Canada et membre judiciaire du Tribunal de la concurrence, le commissaire et GFL Environmental Inc. (avec ses sociétés affiliées, GFL) ont conclu un consentement relatif à l’acquisition par GFL de Terrapure Environmental Ltd. (avec ses sociétés affiliées, Terrapure) (l’acquisition), qui a été enregistré auprès du Tribunal le 13 avril 2022.

Ce consentement, qui oblige GFL à se départir de sept installations qui fournissent des services de gestion des déchets industriels (SGDI) et/ou des services de recyclage des huiles (SRH), répond aux préoccupations du commissaire et met fin à l’action en justice du commissaire contre GFL. Les sept installations qui doivent être vendues par GFL en vertu du consentement (collectivement, les installations visées par le dessaisissement) sont situées dans les villes suivantes :

  • Nanaimo (Colombie-Britannique);
  • Prince George (Colombie-Britannique);
  • Big Valley (Alberta);
  • Nobleford (Alberta);
  • Lloydminster (Alberta);
  • Maidstone (Saskatchewan);
  • Kelowna (Colombie-Britannique).

L’acquisition a été annoncée le 15 mars 2021, pour un prix d’achat total d’environ 927,5 millions de dollars canadiens. GFL a conclu l’acquisition le 17 août 2021.

Cette médiation découle de la demande déposée par le commissaire en novembre 2021 auprès du Tribunal de la concurrence, alléguant que l’acquisition de Terrapure par GFL entraînerait vraisemblablement un empêchement ou une diminution sensible de la concurrence dans la prestation de SGDI et de SRH, tant pour la collecte que pour le traitement, dans plusieurs marchés de l’Ouest canadien. Le commissaire est convaincu que la mise en œuvre de cette entente est nécessaire pour faire en sorte que la diminution sensible de la concurrence soit résolue. De plus, en survenant à un stade précoce du litige, l’entente résoudra la diminution sensible de la concurrence dans un délai plus court que celui qui aurait été nécessaire si le litige avait suivi son cours.

L’enquête du Bureau s’est appuyée sur des renseignements quantitatifs et qualitatifs obtenus auprès de GFL, de Terrapure et de nombreux autres intervenants, y compris des clients et des concurrents des deux entreprises.

Sur cette page :

Contexte

GFL et l’ancienne entreprise Terrapure (collectivement, les parties) sont des entreprises de services de gestion des déchets industriels qui offrent une gamme de services environnementaux à une grande variété de clients, y compris des clients des secteurs public et privé, partout au Canada. Bien que les parties offrent de multiples services différents dans de nombreux marchés locaux et régionaux au Canada, l’examen de l’acquisition réalisé par le Bureau s’est finalement concentré sur la prestation de SGDI et de SRH dans l’Ouest canadien. Ces services comprennent la collecte, le traitement et l’élimination finale de nombreux flux de déchets générés par les entreprises canadiennes d’une manière conforme aux règlements environnementaux.

Le Bureau a examiné un certain nombre de chevauchements concurrentiels entre les parties dans l’ensemble du Canada. En plus des SGDI et des SRH dans l’Ouest du Canada, qui faisaient l’objet de la demande, GFL et Terrapure se faisaient concurrence dans l’Est et le Centre du Canada également, pour les SGDI, les SRH et d’autres secteurs d’activité comme les déchets marins.

En fin de compte, après un examen approfondi de la preuve, la demande a été limitée aux SGDI et aux SRH dans certains marchés de l’Ouest canadien. Les marchés qui n’ont finalement pas été inclus dans la demande ne sont pas discutés plus avant dans le présent document.

Marchés pertinents

Marchés de produits

D’une part, les SGDI ont trait à la collecte, au traitement et à l’élimination des déchets industriels, qui comprennent divers flux de déchets dangereux et non dangereux générés principalement par les secteurs industriels et manufacturiers du Canada. D’autre part, les SRH regroupent la collecte, le traitement et la revente d’huiles usées et de matériaux connexes, tels que les filtres à huile, l’antigel et les contenants d’huile et d’antigel. L’huile recyclée est souvent vendue comme mazout industriel ou raffinée en lubrifiants. Après examen, le Bureau a déterminé que les marchés de produits en cause se subdivisaient ainsi : pour les SGDI, d’une part la collecte, et d’autre part le traitement; pour les SRH, d’une première part la collecte, d’une deuxième part le traitement, et d’une troisième part la revente.

Les entreprises de services de gestion des déchets industriels, telles que les parties, vendent des solutions axées sur les SGDI et les SRH à leurs clients, qu’il s’agisse de services étroitement ciblés sur un type particulier de déchets à un seul endroit ou d’ensembles de services comprenant de nombreuses activités différentes pour les SGDI et les SRH sur de nombreux sites clients. Les clients comptent généralement sur les entreprises de SGDI, comme les parties, pour collecter, traiter et éliminer leurs déchets d’une manière efficace et conforme aux lois, notamment en matière d’environnement. Le Bureau a constaté que seul un nombre limité de grands clients industriels disposent d’installations d’élimination sur place, qui pourraient leur permettre de réduire leur dépendance à l’égard de fournisseurs de services, comme les Parties.

En raison des règles et règlements en matière d’environnement, il n’existe effectivement aucun substitut aux SGDI. En ce qui concerne les SRH, de nombreuses provinces canadiennes perçoivent des écofrais auprès des consommateurs au point d’achat lorsqu’ils achètent de l’huile à moteur et d’autres produits. Dans ces provinces, des organismes d’intendance, comme l’Alberta Resource Management Association (ARMA), la Saskatchewan Association for Resource Recovery Corporation (SARRC) et la British Columbia Used Oil Management Authority (BCUOMA), distribuent ces écofrais à titre d’incitatifs aux transformateurs d’huile usée. Les collecteurs et transformateurs du secteur des SRH, comme GFL et Terrapure, sont inscrits auprès de ces organismes de gestion, ce qui leur permet de recevoir des paiements incitatifs.

Marchés géographiques

De nombreux clients des SGDI et des SRH ont besoin d’un service régulier de collecte de déchets et, par conséquent, les fournisseurs de services de gestion des déchets industriels ont avantage à disposer d’emplacements proches de leurs clients. Les concurrents situés plus loin des clients doivent faire face à des coûts de transport plus élevés, ce qui rend la concurrence sur les prix plus difficile. Les entreprises, comme les parties, disposant de plusieurs installations situées stratégiquement à travers le Canada sont en mesure d’offrir un meilleur service avec des coûts de transport plus bas. De même, le mazout industriel est principalement acheté par les entreprises de pavage routier et les usines de pâtes et papiers, qui dépendent d’un approvisionnement fiable et abordable en mazout industriel pour le brûler dans leurs processus de production. Cela nécessite généralement un fournisseur relativement proche afin de minimiser les coûts de transport et de garantir que la production ne soit pas perturbée.

Par conséquent, le Bureau a déterminé que les marchés géographiques pertinents sont de nature régionale.

Effets concurrentiels

Comme mentionné ci-dessus, GFL et Terrapure étaient toutes deux des fournisseurs de premier plan de SGDI et de SRH dans de nombreuses régions du Canada avant l’acquisition. Après un examen approfondi, le Bureau a conclu que la concurrence avait vraisemblablement connu une diminution sensible dans trois marchés régionaux en Colombie-Britannique et en Alberta pour les SGDI, et dans plusieurs marchés régionaux en Colombie Britannique, en Alberta et en Saskatchewan pour les SRH.

Le Bureau a constaté que les parties étaient des rivaux féroces dans les marchés en question et que l’acquisition a éliminé un concurrent dynamique et efficace. GFL et Terrapure se sont livré une concurrence vigoureuse pour les clients qui produisent des déchets ou achètent du mazout industriel, ainsi que pour les collecteurs indépendants nécessitant des services de traitement offerts par des tiers. Cette rivalité, qui comprenait une concurrence étroite sur les prix, la qualité du service et le regroupement des services, a profité de manière significative aux clients. Les éléments de preuve recueillis par le Bureau démontrent que les parties évaluaient régulièrement la compétitivité de l’autre lorsqu’elles se disputaient des clients importants sur les marchés en cause, et qu’elles réduisaient leurs prix en réponse directe à l’autre. Avec la clôture de l’acquisition en août 2021, cette rivalité et ses avantages pour l’économie canadienne ont été perdus.

Le Bureau a également déterminé que la concurrence restante dans les marchés en question n’était pas suffisante pour limiter le pouvoir de marché de GFL. En fait, dans certains marchés visés par le consentement, le Bureau a constaté que la concurrence restante est minime, voire inexistante. À titre d’exemple, avant l’acquisition, GFL et Terrapure exploitaient des installations de traitement situées en face l’une de l’autre à Prince George, en Colombie-Britannique, sans aucune autre installation concurrente comparable dans la région.

Par conséquent, le Bureau a conclu que la concurrence a vraisemblablement connu une diminution sensible dans les marchés concernés en raison de la perte de la rivalité intense entre GFL et Terrapure, qui a été éliminée par l’acquisition, et du niveau insuffisant de concurrence restante.

Obstacles à l’entrée et à l’expansion

Le Bureau a constaté que les obstacles à l’entrée et à l’expansion sur les marchés en cause sont élevés. Les nouveaux venus potentiels sont confrontés à des défis découlant d’obstacles réglementaires pluriannuels associés à l’obtention de permis, aux coûts d’investissement irrécupérables substantiels nécessaires à la construction d’installations de traitement, aux coûts irrécupérables associés à la réalisation d’économies d’échelle, à la maturité et au déclin prévu du marché du mazout industriel, ainsi qu’à la position dominante d’entreprises établies comme les parties.

En raison de ces importants obstacles à l’entrée, la principale méthode utilisée par les entreprises pour entrer et se développer sur de nouveaux marchés est l’acquisition d’autres entreprises, plutôt que la construction de nouvelles installations. L’entrée par acquisition a été l’un des principaux moteurs de la croissance de GFL. Selon son rapport annuel de 2021, GFL a conclu 46 acquisitions au cours de la seule année 2021, y compris l’acquisition de Terrapure et de certains secteurs d’activité de Stericycle, une entreprise qui était auparavant en concurrence avec GFL et Terrapure sur le marché des SGDI. Cette tendance était bien visible sur l’île de Vancouver, où GFL et Terrapure avaient déjà acquis la quasi-totalité des concurrents indépendants sur le marché des SGDI et des SRH basés sur l’île avant l’acquisition.

Le Bureau a également constaté que les nouveaux venus avaient intérêt à avoir une envergure considérable s’ils souhaitaient concurrencer de façon crédible des entités comme GFL. Les entreprises peuvent plus facilement atteindre cet objectif par le biais d’acquisitions, ce qui leur permet de tirer profit d’une clientèle plus dense et d’une offre de services plus diversifiée.

Par conséquent, le Bureau a conclu que ces obstacles considérables font en sorte que l’entrée sur ces marchés ne sera vraisemblablement pas suffisante ou opportune.

Mesure corrective

Aux termes d’un consentement enregistré auprès du Tribunal de la concurrence le 13 avril 2022, GFL est tenue de vendre les installations visées par le dessaisissement à un ou plusieurs acheteurs indépendants devant être approuvés par le commissaire. À l’exception de l’installation de Kelowna, ces cessions comprendront l’ensemble des activités de SGDI et de SRH qui étaient effectuées depuis ces installations avant l’acquisition. La vente de l’installation de GFL à Kelowna comprendra les permis, l’infrastructure physique et l’équipement, mais pas les employés ni les clients.

Le consentement exige en outre que GFL maintienne la viabilité économique, la qualité marchande et la compétitivité des installations visées par le dessaisissement dans un état équivalent à celui qui existait à la clôture de l’acquisition jusqu’à ce que les installations cédées soient vendues.

Le commissaire est convaincu que la vente des installations visées par le dessaisissement permettra de remédier à la diminution sensible de la concurrence résultant vraisemblablement de l’acquisition dans les marchés visés par le dessaisissement en ce qui concerne la prestation de SGDI et/ou de SRH. Dans le contexte du règlement par voie de médiation, ce consentement met fin à l’action en justice du commissaire contre GFL.

Le présent énoncé de position n’est pas un document juridique. Les conclusions du Bureau, telles qu’elles y sont exposées, ne constituent ni des conclusions de fait ni de droit ayant subi l’épreuve d’un tribunal administratif ou judiciaire. Qui plus est, ces conclusions ne sauraient indiquer que telle ou telle partie s’est livrée à un comportement illégal.

Cependant, afin de renforcer la transparence et la communication avec les intervenants, le Bureau peut publier dans des énoncés de position les résultats de certains de ses examens de fusions et de ses enquêtes menés en vertu de la Loi sur la concurrence. Dans le cas de l’examen d’une fusion, l’énoncé de position donnera un aperçu de l’analyse de la transaction proposée et en résumera les principales constatations. Dans le cas d’une enquête, il présentera le sommaire des résultats. Le lecteur se doit d’interpréter les énoncés de position avec discernement. Les décisions liées à l’application de la loi sont prises au cas par cas, et les conclusions exposées ici ne se rapportent qu’au cas dont il est question et ne lient aucunement le commissaire de la concurrence.


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