Table de matières
- Sommaire exécutif
- Approche
- Conclusions de l’analyse de la concurrence
- 1. Introduction
- 2. Examen des fusions dans le secteur financier
- 3. Sources de renseignements sur lesquelles repose le présent rapport
- 4. Parties à la transaction envisagée
- 5. La transaction envisagée
- 6. Contexte : concurrence dans le secteur des services financiers
- 7. Analyse de la concurrence
- 8. Conclusions sur l’empêchement ou la diminution sensible de la concurrence
- Annexe A : Dispositions pertinentes de la Loi sur la concurrence
- Notes de bas de page
Sommaire exécutif
Le présent rapport est présenté dans le contexte de l’examen en cours de l’acquisition proposée de la Banque HSBC Canada (« HSBC Canada ») par la Banque Royale du Canada (« RBC ») [la « transaction envisagée »] (HSBC et RBC seront désignées individuellement comme une « partie » et collectivement comme « les parties »). La présente correspondance vise à décrire l’évaluation indépendante du commissaire de la concurrence des effets potentiels de la transaction envisagée sur la concurrence en vertu de l’article 92 de la Loi sur la concurrence.
Le Bureau de la concurrence (le « Bureau ») a le mandat de garantir que les entreprises et les consommateurs canadiens prospèrent dans un marché concurrentiel et innovateur. La protection et la promotion de la concurrence dans les marchés des services financiers sont particulièrement essentielles pour les intérêts des Canadiens, compte tenu de l’importance du secteur pour l’économie dans son ensemble et étant donné que les Canadiens comptent sur les institutions financières pour permettre les transactions quotidiennes et pour protéger leur sécurité financière. La transaction envisagée, qui combinerait les première et septième grandes banques du Canada, présente un intérêt particulier pour les consommateurs canadiens, comme en témoignent les plus de 1 500 observations reçues en réponse à une demande publique de renseignements émise par le Bureau.
Le commissaire a effectué un examen exhaustif des effets probables de la transaction envisagée sur la concurrence, conformément à son mandat en vertu de la Loi sur la concurrence. Après évaluation des éléments de preuve disponibles, le commissaire a conclu que la transaction envisagée n’aura vraisemblablement pas pour effet d’empêcher ou de diminuer sensiblement la concurrence en vertu de l’article 92 de la Loi sur la concurrence. Néanmoins, l’examen du Bureau a révélé que la fusion entraînerait une perte de rivalité entre RBC et HSBC Canada. Le Bureau a également constaté que les marchés des services financiers pertinents sont concentrés et caractérisés par des obstacles importants à l’entrée et à l’expansion dans plusieurs des marchés pertinents, et que les conditions dans certains des marchés pertinents peuvent faciliter un comportement coordonné entre les concurrents.
Le commissaire évalue les effets potentiels d’une transaction de fusion sur la concurrence en appliquant le critère défini à l’article 92 de la Loi sur la concurrence. Les sections ci-dessous présentent un résumé de l’approche et des conclusions du Bureau dans ce cas. Vous trouverez ci-joint un rapport plus détaillé sur l’analyse du Bureau.
Approche
En évaluant les effets potentiels d’une fusion sur la concurrence en application Loi sur la concurrence, le commissaire évalue si une fusion ou un projet de fusion empêche ou diminue sensiblement la concurrence, ou aura vraisemblablement pour effet de le faire. L’approche analytique adoptée par le Bureau pour l’examen des fusions est exposée dans son document Fusions — Lignes directrices pour l’application de la loi. Le commissaire évalue les effets potentiels d’une transaction de fusion sur la concurrence en appliquant le critère défini à l’article 92 de la Loi sur la concurrence, en tenant compte des éléments à considérer indiqués à l’article 93 de la Loi sur la concurrence. En vertu de l’article 92 de la Loi sur la concurrence, si le Bureau détermine qu’une fusion aura vraisemblablement pour effet d’empêcher ou de diminuer sensiblement la concurrence, il peut demander au Tribunal de la concurrence de rendre une ordonnance pour empêcher, dissoudre ou modifier la fusion.
L’article 96 de la Loi sur la concurrence prévoit une exception en matière de gains en efficience aux dispositions prévues à l’article 92, de sorte que le Tribunal ne rend pas l’ordonnance prévue à l’article 92 de la Loi sur la concurrence dans les cas où les gains en efficience qui résultent de la fusion surpassent et neutralisent les effets de l’empêchement ou de la diminution de la concurrence du fusionnement. L’article 96 de la Loi sur la concurrence n’a pas été appliqué au cours du présent examen. Par conséquent, la présente lettre ne fournit pas d’évaluation des gains en efficience allégués en vertu de l’article 96 de la Loi sur la concurrence.
Le Bureau a évalué la transaction envisagée en prenant en compte une vaste gamme de sources d’information, notamment :
- des centaines de milliers de documents, dont des documents stratégiques, de marketing et de planification d’activités des parties;
- des observations, renseignements à l’appui et analyses d’experts fournis par les parties;
- des données et des renseignements financiers détaillés reçus des parties et des concurrents;
- plus de 1 500 observations reçues de Canadiens en réponse à une demande de renseignements émise le 1er mai 2023;
- des entrevues avec divers intervenants des marchés pertinents, y compris des institutions financières concurrentes, des intermédiaires financiers (comme les courtiers en prêts hypothécaires), des clients et des organismes de réglementation.
Le Bureau a également fait appel à un expert en économie indépendant, qui a fourni des avis et des analyses sur les effets concurrentiels qui découleront vraisemblablement de la transaction envisagée.
Conclusions de l'analyse de la concurrence
La transaction envisagée entraînerait l’acquisition de la septième plus grande banque du Canada, selon une mesure de l’actif total, par la plus grande banque du pays. Le secteur financier est un pilier essentiel de l’économie canadienne; par conséquent, la protection et la promotion d’une concurrence vigoureuse dans les marchés concernés sont essentielles aux intérêts des Canadiens. Le projet de fusionnement lui-même a reçu une attention considérable de la part des consommateurs canadiens. Plus de 1 500 observations ont été reçues en réponse à la demande publique de renseignements du Bureau émise le 1er mai 2023. Bon nombre de ces observations mettaient l’accent sur les offres attrayantes de HSBC Canada et sur l’importance d’une concurrence efficace dans le secteur.
Dans ce contexte, le Bureau a procédé à un examen approfondi et détaillé des éléments de preuve et des analyses d’experts concernant les effets concurrentiels possibles de l’acquisition proposée de HSBC Canada par RBC. Le commissaire a évalué la transaction envisagée en appliquant le critère défini à l’article 92 de la Loi sur la concurrence, à la lumière de la jurisprudence pertinente. La présente lettre tente d’expliquer en détail le fondement de cette évaluation, tout en tenant compte des dispositions relatives à la confidentialité de la Loi sur la concurrence.
Même si certains éléments de preuve ont indiqué que HSBC Canada était un concurrent vigoureux et un rival non négligeable de RBC dans l’offre de services financiers particuliers, le Bureau a conclu que HSBC Canada avait une incidence concurrentielle limitée par rapport à d’autres institutions financières. Le Bureau a évalué les mesures de la concentration des marchés et a constaté que, dans la plupart des cas, les parts de marché après la fusion demeureraient à des niveaux où le commissaire ne contestera généralement pas une fusion en se fondant sur une préoccupation en matière de concurrence liée à l’exercice unilatéral d’un pouvoir de marché. L’analyse du Bureau a également révélé que HSBC Canada avait atteint une pénétration limitée du marché dans la plupart des services financiers. Le Bureau a tenu compte de l’incidence de la transaction envisagée sur les caractéristiques des produits offerts par HSBC Canada, qui sont particulièrement prisés par les Canadiens et servent à différencier l’offre de la banque. Le Bureau a également évalué les éléments de preuve relatifs à la dynamique de la concurrence dans chacun des marchés pertinents et a conclu que des concurrents efficaces demeureraient après la transaction, y compris les autres grandes banques canadiennes.
Le Bureau a également pris en compte une analyse des effets possibles sur la concurrence fournie par un expert économique indépendant et a conclu que les résultats, lorsqu’ils étaient pris en considération avec les autres éléments de preuve disponibles, n’appuyaient pas une conclusion selon laquelle la concurrence serait sensiblement diminuée ou empêchée.
Le commissaire évalue les fusions en appliquant le critère défini à l’article 92 de la Loi sur la concurrence. À la lumière des résultats de l’évaluation décrite dans le présent document, le commissaire a conclu que la transaction envisagée n’aura vraisemblablement pas pour effet d’empêcher ou de diminuer sensiblement la concurrence en vertu de l’article 92 de la Loi sur la concurrence.
Néanmoins, le Bureau a conclu que la transaction envisagée entraînerait la perte de rivalité entre RBC et HSBC Canada. Dans son évaluation des marchés pertinents, le Bureau a également fait les constats suivants :
- les marchés des services financiers pertinents demeurent concentrés, les cinq plus grandes banques du Canada représentant la grande majorité des services fournis aux Canadiens;
- les obstacles à l’entrée et à l’expansion dans plusieurs des marchés des services financiers pertinents sont élevés;
- les conditions dans certains des marchés des services financiers pertinents peuvent faciliter un comportement coordonné entre les entreprises.
1. Introduction
Le présent rapport présente l’évaluation du commissaire de l’acquisition proposée de la Banque HSBC Canada (« HSBC Canada ») par la Banque Royale du Canada (« RBC ») [la « transaction envisagée »] (HSBC Canada et RBC seront désignées individuellement comme une « partie » et collectivement comme « les parties »), dans le contexte d’un examen par la ministre des Finances (la « ministre »). Le commissaire évalue les effets possibles des fusions sur la concurrence en appliquant le critère défini à l’article 92 de la Loi sur la concurrence et peut demander au Tribunal de la concurrence de rendre une ordonnance s’il détermine qu’une fusion aura vraisemblablement pour effet d’empêcher ou de diminuer sensiblement la concurrence. Le présent rapport décrivant l’évaluation de la concurrence par le commissaire pour la transaction envisagée est présenté à la lumière de l’examen de la fusion que mène la ministre.
Avec le présent rapport, il s’agit de la quatrième fois où le commissaire fournit à la ministre une telle évaluation d’une transaction dans le secteur financier. En décembre 1998, le commissaire a envoyé des lettres aux parties à la fusion, avec copie au ministre, concernant les projets de fusionnement respectifs de RBC avec la Banque de Montréal et de la Banque canadienne impériale de commerce avec La Banque Toronto-Dominion. Le commissaire a conclu que chacune de ces transactions proposées aurait vraisemblablement pour effet d’empêcher ou de diminuer sensiblement la concurrence et les fusions ne se sont finalement pas réalisées. En janvier 2000, le commissaire a également fourni une lettre évaluant la fusion proposée entre La Banque Toronto-Dominion et Canada Trust, dans laquelle il concluait que les mesures correctives proposées par les parties régleraient les effets anticoncurrentiels susceptibles de résulter de cette transaction.
Le Bureau de la concurrence est un organisme d’application de la loi indépendant qui est chargé, entre autres, d’assurer et de contrôler l’application de la Loi sur la concurrence. Le Bureau veille à ce que les entreprises et les consommateurs canadiens prospèrent dans un marché concurrentiel et innovateur. Le secteur financier a été l’un des principaux points de mire des efforts déployés récemment par le Bureau en matière de promotion de la concurrence, compte tenu de son importance cruciale pour l’économie canadienne. Les services financiers contribuaient au produit intérieur brut (PIB) canadien à hauteur d’environ 7 % en 2022Note de bas de page 1 et les banques comme les parties soutiennent indirectement une part beaucoup plus importante de l’activité économique. En outre, les Canadiens comptent sur des acteurs clés du secteur financier pour protéger leur sécurité financière et accomplir des tâches quotidiennes essentielles comme recevoir ou faire des paiements, emprunter, dépenser, économiser ou investir. Dans ce contexte, la protection et la promotion de la concurrence dans le secteur financier sont particulièrement essentielles pour les intérêts des Canadiens.
La transaction envisagée entraînerait l’acquisition de la septième plus grande banque du Canada, selon une mesure de l’actif total, par la plus grande banque du pays. RBC et HSBC Canada se font concurrence pour offrir un vaste éventail de services financiers clés à des clients particuliers et commerciaux dans les marchés au Canada. Le projet de fusion revêt un intérêt important pour les Canadiens, comme en témoignent les plus de 1 500 observations reçues par le Bureau en réponse à une demande publique de renseignements, dont bon nombre soulevaient des préoccupations en matière de concurrence. Le Bureau a effectué un examen détaillé et exhaustif de la transaction envisagée en se fondant sur un vaste éventail de sources d’information, y compris :
- des renseignements, y compris des données et des documents, recueillis auprès des parties, des concurrents et d’autres participants au marché;
- des entrevues avec divers participants des marchés pertinents;
- plus de 1 500 observations reçues d’intervenants, y compris des consommateurs canadiens, en réponse à une demande publique de renseignements émise le 1er mai 2023;
- des analyses reçues de l’expert économique indépendant retenu par le Bureau.
Lorsqu’il examine une fusion, le Bureau évalue les effets possibles de la transaction sur les prix, la production et d’autres dimensions de la concurrence, comme la qualité, le choix de produits et le service, conformément à son document intitulé Fusions — Lignes directrices pour l’application de la loiNote de bas de page 2, à la lumière de la jurisprudence du Tribunal de la concurrence et des tribunaux et aux approches acceptées en théorie et en pratique économiques liées à l’examen des fusions. En fin de compte, le Bureau détermine si les fusions auront vraisemblablement pour effet d’empêcher ou de diminuer sensiblement la concurrence en appliquant le critère énoncé à l’article 92 de la Loi sur la concurrence.
Dans le cadre de son examen, le Bureau a tenu compte des récents changements technologiques dans les marchés pertinents, ainsi que des innovations continues dans l’offre de services financiers. Le Bureau a effectué une évaluation à jour du rôle des succursales bancaires, de l’incidence des concurrents numériques et sans succursales et de l’étendue des marchés géographiques pertinents. Le Bureau a analysé en profondeur les éléments de preuve concernant l’incidence concurrentielle de HSBC Canada et l’étendue de sa rivalité avec les grandes banques comme RBC. Le Bureau a pris en compte tous les effets possibles de la transaction envisagée sur les offres actuelles de HSBC Canada, y compris ses produits axés sur la durabilité et ses services axés sur les marchés internationaux qui comprennent l’intégration avec Groupe HSBC. Le Bureau a également évalué de nombreux éléments de preuve concernant l’efficacité des concurrents restants, les obstacles à l’entrée et à l’expansion et les effets anticoncurrentiels possibles, entre autres facteurs. Il a entre autres examiné des analyses des effets concurrentiels fournies par un expert économique indépendant.
À la lumière de l’analyse des faits et des renseignements provenant de diverses sources, comme il en est question plus en détail ci-dessous, le commissaire a conclu que la transaction envisagée n’aura vraisemblablement pas pour effet d’empêcher ou de diminuer sensiblement la concurrence en vertu de l’article 92 de la Loi sur la concurrence.
Néanmoins, le Bureau a conclu que la transaction envisagée entraînerait la perte de rivalité entre RBC et HSBC Canada et des effets concurrentiels concrets pour certains clients. Dans son évaluation des marchés pertinents, le Bureau a également fait les constats suivants :
- les marchés des services financiers pertinents demeurent concentrés, les cinq plus grandes banques du Canada représentant la grande majorité des services fournis aux Canadiens;
- les obstacles à l’entrée et à l’expansion sur plusieurs des marchés des services financiers pertinents sont élevés;
- les conditions dans certains des marchés des services financiers pertinents peuvent faciliter un comportement coordonné entre les entreprises.
Les sections suivantes décrivent le cadre analytique du Bureau, fournissent des renseignements généraux sur les services financiers pertinents et résument l’évaluation que le commissaire a faite de la transaction envisagée entre RBC et HSBC Canada.
2. Examen des fusions dans le secteur des services financiers
En vertu de la Loi sur la concurrence, le commissaire a compétence pour examiner les transactions de fusion de toute taille et dans tout secteur d’activité afin de déterminer si elles ont ou auront vraisemblablement pour effet d’empêcher ou de diminuer sensiblement la concurrence. Au cours des trois derniers exercices, le commissaire a procédé à l’examen de 216 transactions annuelles en moyenne dans tous les secteurs d’activité au Canada. Conformément à la partie IX de la Loi sur la concurrence, les parties à des transactions proposées qui dépassent certains seuils légaux et réglementaires (et qui ne font l’objet d’aucune exemption) sont tenues d’aviser le Bureau et de fournir les renseignements prescrits avant d’effectuer leur transaction. Après avoir analysé une transaction envisagée, le commissaire peut :
- décider de ne pas présenter une demande au Tribunal de la concurrence en ce qui concerne la transaction envisagée;
- demander au Tribunal de la concurrence d’ordonner l’interdiction totale ou partielle d’une fusion ou d’imposer des mesures correctives pour régler les préoccupations en matière de concurrence découlant de la fusion;
- conclure avec les parties un règlement consensuel pour répondre aux préoccupations, lequel est enregistré auprès du Tribunal de la concurrence et a la force d’une ordonnance de ce dernier.
Les fusions dans le secteur financier peuvent faire l’objet d’un examen simultané par la ministre. En vertu des articles 373 et 377 de la Loi sur les banques, par exemple, certaines acquisitions et certains investissements ne sont pas permis sans l’autorisation préalable de la ministre. L’article 396 de la Loi sur les banques prévoit que la ministre, pour décider si elle approuve ou non une telle opération, prend en considération tous les facteurs qu’elle estime indiqués, notamment :
- la nature et l’importance des moyens financiers du ou des demandeurs pour le soutien financier continu de la banque;
- le sérieux et la faisabilité de leurs plans pour la conduite et l’expansion futures de l’activité de la banque;
- leur expérience et leur dossier professionnel;
- leur moralité et leur intégrité et, s’agissant de personnes morales, leur réputation pour ce qui est de leur exploitation selon des normes élevées de moralité et d’intégrité;
- la compétence et l’expérience des personnes devant exploiter la banque, afin de déterminer si elles sont aptes à participer à l’exploitation d’une institution financière et à exploiter la banque de manière responsable;
- les conséquences de toute intégration des activités et des entreprises du ou des demandeurs et de celles de la banque sur la conduite de ces activités et entreprises;
- l’avis du surintendant quant à l’influence que pourrait avoir la structure organisationnelle projetée du ou des demandeurs et des membres de son ou de leur groupe sur la réglementation et la supervision de la banque, compte tenu :
- d’une part, de la nature et de l’étendue des activités projetées de prestation de services financiers de la banque et des membres de son groupe,
- d’autre part, de la nature et de l’étendue de la réglementation et de la supervision liées aux activités projetées de prestation de services financiers des membres du groupe de la banque;
- l’intérêt du système financier canadien notamment, dans le cas d’une banque qui est une coopérative de crédit fédérale, celui du système coopératif financier canadien.
L’article 94 de la Loi sur la concurrence prévoit que le Tribunal de la concurrence ne rend pas une ordonnance en vertu de l’article 92 à l’égard d’une transaction à propos de laquelle la ministre certifie qu’elle est dans l’intérêt publicNote de bas de page 3. Dans les cas où une fusion dans le secteur financier est assujettie à une approbation ministérielle, le Bureau a déjà été prié, par principe, de fournir une évaluation de la concurrence pour éclairer la décision du ministre concernant la transaction. Le Bureau du surintendant des institutions financières (le « BSIF ») est généralement chargé d’évaluer les questions de prudence.
Le commissaire évalue les effets potentiels d’une transaction de fusion sur la concurrence en appliquant le critère défini à l’article 92 de la Loi sur la concurrence, en tenant compte des éléments à considérer indiqués à l’article 93 de la Loi sur la concurrence. Les évaluations des gains en efficience, s’il y a lieu, sont effectuées conformément à l’article 96 de la Loi sur la concurrence, qui prévoit qu’aucune ordonnance prévue à l’article 92 de la Loi sur la concurrence ne sera rendue dans les cas où les gains en efficience qui résultent du fusionnement surpassent et neutralisent les effets de l’empêchement ou de la diminution de la concurrence du fusionnement.
En vertu de l’article 92 de la Loi sur la concurrence, le Bureau évalue si une fusion ou un projet de fusion empêche ou diminue sensiblement la concurrence, ou aura vraisemblablement pour effet de le faire. Un empêchement ou une diminution sensible de la concurrence ne peut résulter que d’une fusion ayant vraisemblablement pour effet de créer, de maintenir ou d’augmenter la capacité de l’entreprise fusionnée d’exercer, unilatéralement ou en coordination avec d’autres entreprises, un pouvoir de marché. L’article 93 comprend une évaluation des produits de substitution acceptables, des entraves à l’entrée, de la concurrence réelle restante ou de tout autre facteur pertinent à la concurrence dans un marché. L’approche analytique du Bureau en matière d’examen des fusions, y compris son évaluation des facteurs prévus à l’article 93, est exposée dans son document Fusions — Lignes directrices pour l’application de la loi et s’appuie sur la jurisprudence du Tribunal de la concurrence et des cours et peut comprendre les considérations suivantes :
- Définition du marché, y compris la définition des marchés de produits et des marchés géographiques pertinents concernés. Le Bureau définit les marchés afin d’identifier l’ensemble des produits que les clients considèrent comme des substituts à ceux offerts par les parties à la fusion, ainsi que l’ensemble ou les ensembles d’acheteurs susceptibles de faire face à un pouvoir de marché accru du fait de la fusion.
- Calcul des parts de marché et concentration sur les marchés pertinents. De façon générale, le commissaire ne s’inquiète pas de l’exercice unilatéral d’un pouvoir de marché lorsque la part de marché d’une entreprise issue d’une fusion serait inférieure à 35 %.
- Analyse des effets anticoncurrentiels fondée sur des techniques quantitatives et l’évaluation de divers facteurs, notamment l’efficacité des autres concurrents, le pouvoir compensateur détenu par les acheteurs, la déconfiture vraisemblable de l’entreprise ou d’une partie de l’entreprise d’une partie à la fusion proposée et la probabilité que la transaction entraîne l’élimination d’un concurrent dynamique et efficace.
- Analyse des entraves à l’entrée et de la probabilité que des concurrents potentiels s’implantent en temps opportun sur le marché pertinent, à une échelle et une ampleur suffisantes pour limiter une hausse appréciable des prix (ou un autre exercice de pouvoir de marché) sur ce marché.
En préparant l’évaluation du commissaire telle qu’elle est présentée dans le présent rapport, le Bureau a effectué une analyse conforme à cette approche.
3. Sources de renseignements sur lesquelles repose le présent rapport
L’évaluation du Bureau de la transaction envisagée comprenait un examen des éléments suivants :
- les préavis de fusion prévus par la Loi sur la concurrence fournis par les parties;
- des centaines de milliers de documents fournis par les parties en réponse à une demande de renseignements supplémentaires (« DRS ») du Bureau, y compris les documents stratégiques, de marketing et de planification d’activités liés à un vaste éventail de services bancaires et à l’établissement des frais, des taux d’intérêt, des niveaux de services, des caractéristiques des produits ainsi qu’à l’établissement d’autres aspects concurrentiels;
- des observations, renseignements à l’appui et analyses d’experts fournis par les parties, relativement à la transaction envisagée de manière générale et à des aspects clés de l’analyse sur la concurrence du Bureau;
- des données reçues des parties ou des concurrents, comme les états financiers et les données détaillées sur les frais et les taux d’intérêt, et les opportunités d’affaires;
- des entrevues réalisées avec un vaste éventail d’intervenants des marchés pertinents, notamment des clients particuliers, commerciaux et institutionnels, des autorités de réglementation, des banques, des coopératives de crédit, des entreprises axées sur la technologie financière, des prêteurs spécialisés et des intermédiaires financiers non bancaires (« IFNB »), et d’autres participants au marché.
Le 1er mai 2023, le Bureau a publié une demande d’information pour aider à recueillir des faits liés à la transaction envisagée et a invité les Canadiens à présenter des observations pour faciliter l’enquêteNote de bas de page 4. Le Bureau a reçu plus de 1 500 réponses qui ont facilité et éclairé son examen.
Le Bureau a également fait appel à un expert en économie indépendant, qui a fourni des avis et des analyses sur les effets concurrentiels qui découleront vraisemblablement de la transaction envisagée.
Les renseignements obtenus par le Bureau ou fournis à ce dernier dans le cadre de son examen sont protégés par l’article 29 de la Loi sur la concurrence. Le Bureau a le pouvoir discrétionnaire de communiquer ces renseignements seulement dans certaines circonstances, comme le prévoit l’article 29, et même lorsqu’il lui est permis de le faire, il réduit au minimum la mesure dans laquelle ces renseignements confidentiels sont communiqués. Le Bureau reconnaît que, pour s’acquitter de ses responsabilités et faire preuve d’intégrité en tant qu’organisme d’application de la loi, il est primordial qu’il préserve la confidentialité de ces renseignements.
3.1 Analyses d’expert des effets anticoncurrentiels
L’expert en économie embauché par le Bureau a procédé à une analyse empirique des données détaillées au niveau des comptes, préalablement anonymisées, afin de déterminer et de quantifier les effets anticoncurrentiels qui découleront vraisemblablement de la transaction envisagée. Cette analyse comprenait une estimation des répercussions sur les taux d’intérêt, le montant de certains produits financiers achetés et d’autres dimensions de la concurrence pour les principaux services financiers offerts par les parties, ainsi que des évaluations de la portée des marchés pertinents.
L’analyse de l’expert économique intégrait des données exhaustives et détaillées sur les principaux produits d’épargne et de prêt offerts par RBC et HSBC Canada, et recueillies directement auprès des parties et des institutions financières concurrentes. Les données évaluées par l’expert comprenaient des renseignements détaillés au niveau des comptes sur les caractéristiques du produit, les frais, les taux d’intérêt et d’autres composantes du prix, ainsi que des renseignements financiers et des données macroéconomiques, des données démographiques locales et des données sur la richesse des populations. Au moyen de ces données, l’expert a procédé à une analyse par simulation de la fusion dans le cadre de laquelle il a présenté un modèle de concurrence entre les institutions financières, a estimé et calibré les principaux paramètres et a simulé les effets de la transaction envisagée sur les taux d’intérêt, le montant de certains produits financiers achetés et d’autres dimensions de la concurrence. Dans le cadre de son analyse, l’expert a tenu compte des principales caractéristiques de la concurrence pour les services financiers, comme le potentiel de discrimination par les prix (et les effets qui en découlent sur certains groupes de clients) et les relations entre les taux d’intérêt des produits de dépôt et des produits de prêt. De plus, l’expert a appliqué de façon empirique le critère du monopoleur hypothétique dans les régions locales où se trouvent des succursales de RBC et de HSBC Canada, pour cerner les marchés pertinents aux fins de l’analyse du Bureau. L’évaluation de l’expert comprenait des vérifications approfondies de la robustesse et des analyses de sensibilité, y compris la prise en compte d’autres scénarios de marché géographique, des mécanismes d’établissement des prix et des caractéristiques de la demande.
À la lumière de cette analyse, l’expert a fourni des estimations des effets sur la concurrence dans les principaux marchés de chevauchement entre les parties. Les résultats de l’évaluation effectuée par l’expert en économie sont décrits aux sections 7.3.3 et 7.3.4 du présent rapport.
4. Parties à la transaction envisagée
RBC est une société de services bancaires et financiers qui sert plus de 17 millions de clients dans le cadre de ses activités dans 29 pays. RBC est la plus grande banque canadienne sur le plan des revenus, de la capitalisation boursière et de l’actif totalNote de bas de page 5. RBC exploite un réseau de 1 162 succursales au Canada et tire 60 % de ses revenus d’environ 50 milliards de dollars au pays.
RBC offre une gamme complète de services financiers dans cinq segments principaux :
- Services bancaires aux particuliers et aux entreprises, y compris des services bancaires quotidiens, des services de placement et des services de financement;
- RBC Gestion de patrimoine, qui offre des solutions de placement, de fiducie, de services bancaires, de crédit et d’autres solutions de gestion de patrimoine axées sur les conseils aux clients particuliers et institutionnels fortunés et très fortunés;
- RBC Marchés des Capitaux, qui offre des services bancaires de placement mondiaux et des services de marchés de capitaux aux sociétés, aux investisseurs institutionnels, aux gestionnaires d’actifs, aux sociétés de capital-investissement et aux gouvernements;
- L’assurance, y compris des solutions pour les clients particuliers et commerciaux comme la vie, la santé, le patrimoine, la maison, l’automobile, les voyages, les rentes et la réassurance;
- Des services de trésorerie et de marché, qui offrent des services d’actifs, de paiements et de trésorerie aux institutions financières et aux propriétaires d’actifs.
RBC est une banque figurant à l’annexe I au sens de la Loi sur les banques fédérale. Les grandes banques figurant à l’annexe I, comme RBC, La Banque Toronto-Dominion (« Banque TD »), la Banque de Nouvelle-Écosse (« Banque Scotia »), la Banque de Montréal (« BMO ») et la Banque Canadienne Impériale de Commerce (« CIBC ») [parfois collectivement appelées les « cinq grandes banques »], représentent la grande majorité des transactions bancaires au Canada.
HSBC Canada, que RBC propose d’acquérir, est une filiale de la banque multinationale Groupe HSBC. HSBC Canada est classée à l’annexe II de la Loi sur les banques comme une filiale étrangère et son siège social est situé à Vancouver (Colombie-Britannique). HSBC Canada offre des services financiers à ses clients au Canada et à l’étranger par l’intermédiaire de quatre unités opérationnelles :
- Services bancaires de détail et gestion de patrimoine, qui offrent des produits d’épargne, de prêt et de gestion de patrimoine aux particuliers, y compris des produits d’investissement mondiaux et des services spécialisés aux clients ayant des besoins internationaux;
- Services aux entreprises, ce qui comprend des services financiers et des solutions pour les entreprises, allant des petites entreprises aux entreprises internationales;
- Services bancaires mondiaux, qui fournissent des services financiers aux gouvernements, ainsi qu’aux entreprises et aux clients institutionnels, y compris le capital de la dette, le commerce mondial et le financement des créances, la liquidité mondiale et la gestion de trésorerie;
- Services de marchés et de valeurs mobilières, y compris des solutions de financement, des ventes et des transactions, la recherche, la compensation et le règlement pour les entreprises et les clients institutionnels.
HSBC Canada est la septième plus grande banque du Canada en raison de ses actifs d’environ 120 milliards de dollars et de ses revenus d’environ 2,2 milliards de dollars en 2021. HSBC Canada exploite un réseau de 128 succursales au Canada.
HSBC Canada se décrit comme la « principale banque internationale » du Canada, car elle a une portée internationale plus vaste que celle offerte par tout concurrent canadien au pays. De nombreux documents d’affaires de HSBC Canada examinés par le Bureau décrivent une stratégie avant la transaction visant entre autres à tirer parti de l’intégration au réseau international plus vaste du Groupe HSBC. La transaction envisagée entraînera la fin de cette intégration et la sortie du Canada des liens du Groupe HSBC avec l’ensemble du groupe HSBC, qui exerce actuellement ses activités dans 62 pays et dont l’actif mondial se chiffre à environ 3 billions de dollars. Dans le cadre de son évaluation de la concurrence, le Bureau a tenu compte de cet effet de la transaction envisagée et de l’incidence potentielle sur les produits et services financiers offerts aux Canadiens.
5. La transaction envisagée
Le 29 novembre 2022, RBC a annoncé qu’elle avait conclu une entente en vue d’acquérir 100 % des actions ordinaires de HSBC Canada pour un prix d’achat en espèces de 13,5 milliards de dollars.
Même si la transaction envisagée sépare généralement HSBC Canada du réseau international du Groupe HSBC, RBC décrit la fusion comme une occasion d’ajouter une entreprise complémentaire et d’élargir ses capacités en produits internationaux. RBC cherche également à devenir la banque de choix pour les clients commerciaux ayant des besoins internationaux, les nouveaux arrivants au Canada et les clients aisés qui ont besoin de capacités mondiales.
6. Contexte : concurrence dans le secteur des services financiers
Un vaste éventail d’institutions financières et d’autres acteurs du marché offrent activement des produits et des services financiers au Canada. En général, les fournisseurs potentiels à la disposition des Canadiens peuvent comprendre, selon le service, les suivants :
- Les banques canadiennes, classées comme banques figurant à l’annexe I en vertu de la Loi sur les banques, y compris RBC et ses principaux rivaux, comme la Banque de Montréal, la Banque Scotia, la Banque CIBC et la Banque TD;
- Les filiales de banques étrangères, classées comme banques figurant à l’annexe II en vertu de la Loi sur les banques, comme HSBC Canada;
- Les succursales de banques étrangères, qui ont une capacité limitée d’accepter les dépôts canadiens, mais qui peuvent faire face à moins d’exigences réglementaires en matière de capitalisation;
- Les coopératives de crédit, qui offrent certains services comparables à ceux des banques canadiennes;
- Un éventail d’intermédiaires financiers non bancaires (« IFNB »), y compris, selon le service, des concurrents spécialisés dans le financement hypothécaire, des sociétés de courtage en valeurs mobilières indépendantes, des entreprises de gestion de patrimoine et de placement, des entreprises de prêt à la consommation, des entreprises de technologies financières qui offrent des services de prêt, de traitement de paiement ou d’autres services, et de nombreux autres acteurs qui mènent leurs activités à l’extérieur du système bancaire traditionnel.
RBC est la plus grande banque canadienne de l’annexe I, tandis que HSBC Canada est une importante filiale de banque étrangère qui exerce ses activités dans un certain nombre de marchés partout au Canada. Les parties se livrent une concurrence pour offrir une vaste gamme de produits et services financiers, et ce, dans un certain nombre de dimensions de la concurrence, notamment les caractéristiques des produits, les taux d’intérêt, les frais de service, les niveaux de service, les modalités et d’autres facteurs. Le Bureau a évalué les effets potentiels de la transaction envisagée sur ces aspects de la concurrence au moyen d’une combinaison de preuves quantitatives et qualitatives.
Le Bureau a procédé à de nombreuses évaluations concurrentielles des projets de fusionnement entre fournisseurs du secteur financier. Par exemple, le Bureau a auparavant examiné des transactions importantes entre des institutions canadiennes, comme les fusions proposées de RBC avec la Banque de Montréal et de la CIBC avec la Banque TD, en 1998. En décembre 1998, le Bureau a envoyé des lettres aux présidents de ces quatre banques, accompagnées de copies au ministre, énonçant ses conclusions selon lesquelles les transactions auraient vraisemblablement pour effet d’empêcher ou de diminuer sensiblement la concurrence. Le Bureau a entre autres conclu qu’une fusion ou les deux entraînerait une diminution sensible de la concurrence dans :
- divers marchés de succursales bancaires locaux;
- les services pour les entreprises de taille moyenne ayant des prêts d’exploitation de 1 à 5 millions de dollars dans certaines provinces et certains territoires;
- certains marchés liés aux cartes de crédit;
- un certain nombre de marchés locaux pour les services de courtage de plein exercice;
- possiblement, le marché national pour la souscription d’émissions importantes de capitaux propres. En fin de compte, les transactions n’ont pas été autorisées à la suite d’un examen par le ministre.
Le Bureau a également examiné un important dossier bancaire en 2000, lorsqu’il a évalué les répercussions sur la concurrence de l’acquisition de Canada Trust par la Banque TD. Dans une lettre envoyée aux parties à la fusion avec copie au ministre, le Bureau a exposé ses conclusions selon lesquelles la transaction entraînerait une hausse des prix et une baisse des niveaux de service et de choix dans trois marchés de succursales bancaires locaux en Ontario, ainsi qu’un empêchement ou une diminution sensible de la concurrence dans le marché des réseaux de cartes de crédit d’utilisation courante au Canada. Le Bureau a également indiqué que les mesures correctives proposées par les parties à la fusion, y compris la vente de succursales bancaires et la vente ou la conversion d’aspects de leur portefeuille de cartes de crédit, remédieraient à l’incidence anticoncurrentielle de la fusion.
Au cours des années qui ont suivi ces fusions importantes de banques, le Bureau a examiné des centaines de transactions proposées au sein du secteur financier impliquant des acteurs du marché comme des banques, des coopératives de crédit, des compagnies d’assurance, des spécialistes en hypothèques, des courtiers en valeurs et diverses autres IFNB. Dans tous ces cas, les analyses sont effectuées conformément au document intitulé Fusions — Lignes directrices pour l’application de la loi et à la jurisprudence pertinente de la Loi sur la concurrence.
Dans le cadre du présent examen de l’acquisition envisagée de HSBC Canada par RBC, le Bureau a noté que le secteur des services financiers dans son ensemble a subi d’importants changements technologiques qui peuvent avoir une incidence sur les services offerts aux Canadiens et, possiblement, sur le paysage concurrentiel dans des marchés précis. Le rôle des services bancaires en ligne a continué d’évoluer et des modèles d’affaires novateurs ont fait leur apparition, par exemple, dans la prestation de services de paiement, l’offre de nouvelles méthodes de financement, ainsi que dans le courtage et les conseils d’investissement. Certaines études de la Banque du Canada et de Statistique Canada ont donné à penser que le secteur des IFNB a connu dans l’ensemble une croissance importante au cours des années précédant la pandémie de COVID-19, quoique sa part des actifs financiers globaux, comparativement à celle des institutions traditionnelles, est demeurée relativement stable. De même, en ce qui concerne les prêts en particulier, les données portent à croire que les IFNB sont une source de crédit importante et croissante pour les Canadiens, quoique d’autres acteurs, comme les banques traditionnelles, ont dépassé leur émission de crédit au cours des dernières annéesNote de bas de page 6.
En décembre 2017, le Bureau a également publié une étude de marché (L’innovation axée sur la technologie et les nouveaux services dans le secteur canadien des services financiersNote de bas de page 7), qui portait sur l’incidence de l’innovation dans les technologies financières sur le paysage concurrentiel au Canada, et explorait les entraves possibles à l’entrée, à l’innovation, à la concurrence et à la croissance auxquelles font face les entreprises de technologies financières. L’étude a révélé que le Canada accusait un retard par rapport à ses pairs internationaux en ce qui concerne l’adoption des technologies financières et a fourni certaines recommandations pour promouvoir la concurrence et l’innovation dans le secteur. Malgré certains obstacles, le Bureau a noté que les technologies financières pouvaient changer radicalement la façon dont les Canadiens accèdent aux produits et services financiers et les utilisent.
Dans ce contexte, le Bureau a évalué un éventail de preuves à jour concernant les innovations récentes dans le domaine des services financiers pour en arriver aux conclusions présentées dans ce rapport. Cela comprenait un examen des données, des points de vue des intervenants et des sources documentaires concernant, par exemple, le rôle des services bancaires de détail et des services en ligne, l’incidence et la présence de concurrents sans succursale et d’entreprises de technologies financières, ainsi que les contraintes concurrentielles potentielles imposées par d’autres IFNB.
6.1 Considérations réglementaires dans le secteur des services financiers
Les parties et leurs principaux concurrents mènent leurs activités dans un cadre réglementaire étendu qui sert à protéger les systèmes financiers canadiens et à régir le comportement des participants au marché. Ces règlements visent souvent à atténuer les risques systémiques, prudentiels et liés à la gouvernance, et à protéger par ailleurs les consommateurs et les investisseurs. Cependant, ils peuvent également avoir des répercussions sur les conditions d’entrée, l’expansion des concurrents et d’autres aspects de la concurrence sur les marchés des services financiers. Le Bureau demeure conscient de ce contexte réglementaire et de ses effets lorsqu’il évalue les transactions envisagées dans le secteur financier.
Les activités bancaires sont réglementées par des lois, notamment la Loi sur les banques, la Loi sur l’assurance-dépôts du Canada, la Loi canadienne sur les paiements et la Loi sur l’Agence de la consommation en matière financière du Canada. Divers aspects du régime de réglementation peuvent imposer des exigences aux concurrents potentiels dans les marchés touchés par la transaction envisagée. Les aspects pertinents sur le plan de la concurrence de ce régime comprennent, par exemple :
- La classification des participants au marché en vertu de la Loi sur les banques en tant que banques figurant à l’annexe I (comme RBC), banques figurant à l’annexe II (comme HSBC Canada) ou succursales de banques étrangères offrant un service complet ou un service de prêt, où les succursales de banques étrangères qui offrent un service complet peuvent avoir accès aux marchés canadiens des dépôts de gros et des marchés financiers pour obtenir du financement, tandis que les succursales de prêts doivent compter sur du financement étranger ou des fonds empruntés auprès d’autres institutions.
- Diverses exigences en matière de fonds propres et de liquidité, dont celles énoncées par le BSIF, qui diffèrent largement pour les banques désignées comme étant des banques d’importance systémique nationale (« BSIN »), les banques d’importance systémique mondiale (« BSIM », comme RBC) et les petites et moyennes institutions de dépôt (« PMB »). Les BSIN et les BSIM sont tenues de maintenir des tampons de capital supplémentaires comparativement aux PMB. Des exigences et des lignes directrices supplémentaires s’appliquent également en ce qui concerne le capital initial d’une nouvelle banque.
- Diverses restrictions à la propriété prévues par les lois, y compris la Loi sur les banques, comme l’obligation pour les grandes et moyennes banques d’avoir un grand nombre d’actionnaires ou d’avoir un flottant public de 35% des actions avec droits de vote.
- Des exigences en matière de surveillance, de production de rapports et de conformité, ainsi que les coûts connexes, qui peuvent être plus importants par rapport aux revenus, pour les petits concurrents.
- Une incertitude réglementaire et des entraves réglementaires potentielles pour les nouveaux acteurs des technologies financières dans des domaines comme les prêts et l’investissement.
Le contexte réglementaire dans lequel les participants au marché, y compris les parties, se font concurrence pour offrir des services financiers, continue d’évoluer. Comme il a été mentionné précédemment, le Bureau a récemment mené une étude de marché portant sur des considérations réglementaires (et autres) pertinentes à l’innovation dans le secteur des technologies financièresNote de bas de page 8. Il a également, par exemple, fait des présentations axées sur la concurrence au ministre au sujet de consultations sur les services bancaires ouvertsNote de bas de page 9 et des mesures stratégiques plus larges dans le secteur financierNote de bas de page 10. Dans le cadre de l’analyse de la transaction décrite dans le présent rapport, le Bureau a examiné des renseignements concernant les répercussions de divers aspects de la réglementation existante sur la concurrence dans les marchés pertinents.
7. Analyse de la concurrence
7.1 Marchés pertinents
Le Bureau définit les marchés afin de cerner l’ensemble des produits que les clients considèrent comme de proches substituts à ceux offerts par les parties à la fusion. La définition des marchés permet au Bureau de cerner les participants à un marché pertinent afin de déterminer les parts de marché et le niveau de concentration. Lorsque le Bureau constate qu’une fusion peut soulever des problèmes de concurrence, il désigne généralement un ou plusieurs marchés pertinents sur lesquels la concurrence sera vraisemblablement empêchée ou diminuée.
Aux fins de la présente analyse, un marché pertinent correspond à l’ensemble le plus restreint de produits, y compris au moins un produit des parties à la fusion, et à la plus petite région géographique pour laquelle un vendeur unique cherchant à maximiser ses profits (un « monopoleur hypothétique ») imposerait et maintiendrait une augmentation de prix modeste, mais sensible et non transitoire. Dans la plupart des cas, le Bureau considère qu’une hausse de prix est significative si elle atteint 5 % et qu’elle n’est pas transitoire si elle dure un an. La détermination de l’ensemble le plus restreint de produits pour lequel un monopoleur hypothétique imposerait et maintiendrait une telle augmentation de prix sans que les acheteurs se procurent d’autres produits en quantité suffisante pour que la hausse ne soit pas rentable est souvent appelée le « critère du monopoleur hypothétique ». Ce critère peut être appliqué de façon empirique lorsque les données le permettent. Le Bureau peut également tenir compte d’autres éléments de preuve pertinents pour la définition des marchés, notamment de l’information sur les points de vue, les stratégies et le comportement des acheteurs et des documents préparés par les parties à la fusion dans le cours normal des activités.
Le Bureau peut également examiner ou décrire de multiples produits ou marchés pertinents dans leur ensemble lorsqu’ils partagent une dynamique concurrentielle commune et que les mêmes concurrents sont présents dans chacun d’eux.
RBC et HSBC Canada offrent une vaste gamme de produits et services financiers aux particuliers, aux clients commerciaux et aux investisseurs. En fin de compte, le Bureau a cerné les produits pertinents (ou groupes de produits) suivants pour lesquels les offres des parties se chevauchaient :
- Services financiers personnels :
- Les comptes d’opérations personnels, y compris les comptes de chèques et d’épargne;
- L’épargne personnelle à court terme, y compris les produits de placement comme les certificats de placement garanti (« CPG »), les dépôts à terme, les fonds communs de placement du marché monétaire, les obligations d’épargne et les bons du Trésor;
- Les prêts aux consommateurs, comme les prêts automobiles, les prêts personnels, les marges de crédit et autres produits de crédit garantis ou non garantis;
- Les hypothèques résidentielles;
- Les services de courtage en ligne ou à escompte, qui permettent aux particuliers d’échanger des valeurs sans avoir recours à un conseiller financier spécialisé (p. ex., placements autonomes);
- Les services de conseils en investissement privés, y compris les services de gestion de portefeuille et l’investissement des actifs des clients dans les valeurs mobilières, à l’exclusion des services de courtage de plein exercice;
- Les services de placement personnels à long terme, y compris la gestion de produits d’investissement à long terme comme les fonds communs de placement et les fonds négociés en bourse.
- Services financiers aux entreprises :
- Les comptes d’entreprise, qui permettent aux entreprises d’effectuer des paiements, de recouvrer des comptes clients et de gérer les besoins en fonds de roulement;
- Les prêts aux entreprises, comme les prêts d’exploitation, les marges de crédit et les prêts à terme.
- Services de marchés de capitaux :
- Les conseils sur les fusions et les acquisitions, qui comprennent la prestation de conseils stratégiques, des conseils d’évaluation et des conseils d’intégration aux entreprises clientes, ainsi que des conseils sur le financement par emprunt et par capitaux propres des fusions et des acquisitions;
- La souscription, ce qui implique d’assumer le risque d’une nouvelle émission de titres de créance ou de titres de participation et la revente de ces titres aux investisseurs;
- Les ventes et transactions, ce qui comprend l’achat et la vente d’instruments financiers au nom d’investisseurs institutionnels.
- Services de cartes de crédit :
- Émission de cartes de crédit d’utilisation courante aux entreprises;
- Émission de cartes de crédit d’utilisation courante aux particuliers.
Afin de déterminer ces produits pertinents, le Bureau a tenu compte de divers renseignements et éléments de preuve, y compris les observations des parties à la fusion, les opinions des intervenants, les données recueillies auprès des participants au marché et les documents stratégiques internes produits par les participants au marché. Le Bureau a également évalué des renseignements indiquant que les clients peuvent acheter des sous-ensembles de ces produits et services en tant que forfait et que, dans certains cas, les concurrents peuvent offrir des incitatifs aux clients pour qu’ils achètent plusieurs produits. Le Bureau a donc tenu compte de la dynamique concurrentielle de la vente de forfaits de plusieurs produits financiers, le cas échéant, y compris au moment d’évaluer la probabilité d’entrée de concurrents.
7.1.1 Réseau de succursales bancaires et analyse du marché géographique
Dans les évaluations antérieures des fusions de grandes banquesNote de bas de page 11, l’analyse du Bureau a porté, en grande partie, sur l’offre de services par un réseau de succursales bancaires. Au moment de ces examens antérieurs, les services pour lesquels le Bureau a déterminé qu’ils étaient offerts en succursale comprenaient bon nombre des services financiers offerts maintenant par RBC et HSBC Canada, et le marché géographique pertinent pour leur vente aux particuliers et aux petites et moyennes entreprises (« PME ») était considéré comme local. Ces conclusions se basaient sur les éléments de preuve et les conseils d’experts disponibles à ce moment. Le Bureau a donc examiné la concurrence pour les services de réseau de succursales bancaires dans des agglomérations urbaines de recensement et des régions métropolitaines de recensement (« RMR ») particulières, ainsi que dans des régions rurales locales où les succursales des parties à la fusion sont situées à une courte distance les unes des autres.
Dans le présent dossier, l’un des points de mire principaux du Bureau était d’examiner le rôle continu des emplacements des succursales dans la concurrence des services financiers et d’évaluer l’étendue du marché géographique pertinent pour chacun des produits offerts par les parties qui se chevauchent. Dans le cadre de cette analyse, le Bureau a cherché à confirmer la mesure dans laquelle les concurrents exploitant des succursales plus éloignées, ou ceux n’ayant aucun réseau de succursales, peuvent effectivement faire concurrence aux parties étant donné la technologie disponible. L’évaluation du marché géographique du Bureau a été éclairée par l’analyse de données, des documents stratégiques et commerciaux internes produits par les parties et des entrevues avec les participants au marché. Le Bureau a également examiné l’analyse de l’étendue des marchés pertinents de l’expert, y compris l’application empirique du critère du monopoleur hypothétique.
Les parties font valoir qu’il n’est plus nécessaire d’avoir des succursales afin de livrer une concurrence efficace pour des services financiers personnels, et citent des données d’enquête indiquant qu’une minorité décroissante de Canadiens se rendent en succursale ou utilisent le guichet automatique comme méthode la plus courante de mener leurs activités bancaires. Les parties suggèrent également qu’un nombre croissant de concurrents servent leurs clients uniquement par l’intermédiaire de canaux de distribution numérique. En ce qui concerne les services aux entreprises offerts aux PME, les parties font valoir que les clients peuvent obtenir des services de fournisseurs locaux et nationaux étant donné leur utilisation accrue des outils numériques.
Le Bureau a examiné les preuves documentaires relatives aux tendances générales vers les solutions numériques dans les services financiers et décrivant un rôle croissant pour les entreprises de technologies financières et les plateformes numériques. Dans l’ensemble, le Bureau a toutefois constaté que les succursales sont toujours importantes et demeurent la principale façon (ou une façon importante) de mener ses activités bancaires pour un sous-ensemble de Canadiens. Même si un grand nombre de succursales ont fermé depuis l’arrivée des services en ligne, les données portent à croire que le taux de fermetures a diminué, et RBC et HSBC Canada continuent d’exploiter de vastes réseaux de succursales. L’information reçue des intervenants donne à penser que les services de succursales pourraient être considérés comme un complément aux services bancaires en ligne, car les succursales jouent toujours un rôle important dans les transactions clés, la prestation de conseils ou certaines étapes dans la création de clientèle.
Le Bureau a examiné des documents internes décrivant en détail les plans des parties pour leurs réseaux de succursales, sans la transaction envisagée et à la suite de celle-ci, ainsi que les considérations stratégiques et concurrentielles qui ont guidé de tels plans. Ces documents décrivaient des cas de regroupement ou de restructuration de succursales (y compris des réductions de la taille globale des succursales, ou de la portée des services, au profit d’offres numériques), mais ils renforçaient généralement l’importance concurrentielle des réseaux locaux de succursales dans leur ensemble. Selon les éléments de preuve, les parties considéraient les succursales locales comme le moyen prédominant de créer et de faire croître leur clientèle, et elles demeuraient le mode de prédilection pour certains segments de clients ayant des taux d’utilisation très élevés. Le vaste réseau de succursales de RBC, le plus grand au pays, était également invoqué dans certains documents comme un avantage concurrentiel. Même lorsque les parties ont examiné des approches qui favorisaient l’offre numérique, les documents internes ont démontré que les parties jugeaient que la fermeture de succursales posait un risque notable pour la compétitivité et leur croissance dans le marché, et constituait un facteur susceptible de mener à une attrition de la clientèle. Ces facteurs semblent avoir mené à l’adoption de stratégies qui impliquent un investissement continu dans les succursales locales, en maintenant en grande partie l’empreinte globale des succursales et ouvrant de nouvelles succursales dans des marchés de croissance clés. Certains documents ont suggéré, par exemple, que les parties ont tenu compte de la concurrence entre les succursales locales et ont évalué leur couverture des différents marchés à l’intérieur de distances restreintes dans les banlieues et les zones urbaines.
Le Bureau s’est également concentré sur l’examen des éléments de preuve relatifs à l’établissement des prix pour chacun des produits offerts par les parties qui se chevauchent. En ce qui concerne les services financiers personnels et commerciaux, le Bureau a constaté que, malgré les tarifs annoncés à l’échelle nationale, les parties faisaient souvent des offres locales, régionales ou propres aux clients pour bon nombre des produits qui se chevauchent. Ceux-ci variaient selon le produit et comprenaient des taux d’intérêt, des frais, des offres en espèces et d’autres conditions déterminées ou négociées de façon spéciale. Les preuves documentaires ont appuyé le constat que ces prix et ces conditions étaient les plus touchés par les solutions de rechange à proximité. Le Bureau a examiné les structures organisationnelles des parties et l’attribution des décisions en matière d’établissement de prix au sein de chaque entreprise, y compris le pouvoir discrétionnaire en matière de prix accordé au personnel local (comme les spécialistes en hypothèques). Ces pratiques étaient conformes à l’établissement des prix influencé par la concurrence locale.
En plus de cette preuve qualitative, le Bureau a tenu compte des opinions de l’expert économique, qui a élaboré un modèle de concurrence pour les principaux produits de chevauchement. À l’aide de données historiques détaillées sur les ventes aux Canadiens recueillies auprès des parties et des concurrents, ainsi que de données sur l’emplacement des succursales des concurrents, l’expert a appliqué le critère du monopoleur hypothétique dans chacun des domaines locaux de chevauchement entre les succursales des parties. Compte tenu de la nature du réseau de succursales de HSBC Canada, cette évaluation s’est concentrée sur les zones urbaines et comportait un exercice itératif axé sur les données pour évaluer des regroupements d’emplacements concurrents situés à proximité les uns des autres. À la lumière de cette analyse, qui comprenait une évaluation empirique du critère du monopoleur hypothétique, l’expert a conclu que les marchés pertinents appropriés aux fins de l’analyse des effets concurrentiels potentiels de la transaction envisagée étaient locaux.
Par conséquent, en se fondant sur les données qualitatives et quantitatives recueillies, ainsi que sur les opinions de l’expert économique, le Bureau a conclu que les marchés pertinents pour bon nombre des services financiers personnels et commerciaux qui se chevauchent sont locauxNote de bas de page 12. Le Bureau a donc évalué la concurrence dans les régions locales où chacune des parties exploitait une succursale de détail et a tenu compte des regroupements de concurrents fondés sur l’analyse de l’expert, ainsi que d’autres éléments de preuve et des conditions locales particulières. Le Bureau a examiné divers scénarios de marché local précis (et a finalement constaté que ses conclusions n’étaient pas sensibles au scénario particulier examiné), mais il en a généralement découlé une analyse concurrentielle de plus de 60 régions locales autour des emplacements des succursales de RBC ou de HSBC Canada. Le Bureau a également évalué les renseignements concernant la concurrence dans les RMR dans lesquelles les deux parties exercent leurs activités, et a conclu que cette approche plus large ne modifierait pas ses conclusions.
7.2 Élimination d’un concurrent vigoureux et réel
La transaction envisagée entraînerait l’acquisition de la septième plus grande banque du Canada, selon une mesure de l’actif canadien, par la plus grande banque du pays. Même si les cinq plus grandes banques du Canada, soit RBC, BMO, la Banque Scotia, La Banque TD et la CIBC, représentent la grande majorité des actifs et des transactions bancaires du pays, HSBC Canada représente l’une des principales institutions nationales de rechange à la disposition des Canadiens. HSBC Canada exploite un réseau de succursales à l’échelle nationale, particulièrement axé sur les régions urbaines, ainsi que sur l’Ontario et la Colombie-Britannique. Les intervenants ont décrit HSBC Canada comme un fournisseur ayant des forces particulières dans les services axés sur l’international et comme un concurrent vigoureux dans des segments de produits particuliers.
Le 1er mai 2023, le Bureau a publié une demande de renseignements invitant les participants au marché et tous les Canadiens à présenter des observations afin d’aider le Bureau dans son enquête. En fin de compte, plus de 1 500 réponses portant sur un éventail de services financiers ont été reçues des intervenants. Bon nombre de ces réponses ont fourni de l’information sur les offres de services particulièrement concurrentielles de HSBC Canada et ont exprimé des préoccupations quant au fait que la transaction envisagée pourrait avoir une incidence sur les frais, les taux d’intérêt, les modalités ou les caractéristiques des produits offerts aux Canadiens. Les offres avantageuses de HSBC Canada décrites dans ces observations comprenaient, par exemple, des taux hypothécaires et de marges de crédit adossées à un bien immobilier faibles ou souples, des exonérations de frais de compte de transaction pour divers clients, des modalités souples et des taux d’intérêt élevés pour des produits d’épargne comme les CPG, des options de placements écologiques, des ensembles de services bancaires abordables pour les petites entreprises, ainsi que des offres axées sur l’international comme des comptes à devises multiples et des transferts internationaux gratuits ou à moindre coût. Le Bureau a tenu compte de ces renseignements ainsi que de son examen d’autres facteurs influant sur la concurrence.
Lorsqu’il détermine si une transaction aura vraisemblablement pour effet d’empêcher ou de diminuer sensiblement la concurrence, le Bureau peut évaluer les caractéristiques concurrentielles de l’entreprise cible afin de déterminer si la fusion entraînera vraisemblablement la disparition d’un concurrent dynamique et efficace. Cette évaluation peut comprendre un examen des éléments de preuve de rivalité entre les parties à la fusion, ainsi qu’un examen de la question de savoir si l’une ou les deux parties a entraîné une réduction des prix, fourni des services ou des modalités uniques, ou réalisé des gains de parts de marché (ou est en mesure de le faire), entre autres facteurs. L’un des principaux objectifs de l’examen du Bureau dans ce dossier était d’évaluer l’incidence de HSBC Canada sur la concurrence dans les marchés de services financiers pertinents et de l’ampleur de la rivalité entre HSBC Canada et RBC.
Les parties soutiennent que HSBC Canada est un petit concurrent dont les parts de marché sont limitées dans la plupart des marchés de chevauchement. Elles soutiennent en outre que HSBC Canada est généralement axée sur les clients ayant une valeur nette élevée et une vision internationale, et qu’elle n’est pas un concurrent perturbateur pour les services financiers personnels et commerciaux pertinents. Les parties soutiennent que la dépendance de HSBC Canada à l’égard du financement et de l’orientation stratégique du Groupe HSBC a nui à sa compétitivité au Canada et a entraîné un sous-investissement ou des retards dans le développement de produits, des offres de produits plus limitées et un retard dans les offres numériques comparativement aux grandes banques nationales. Compte tenu de ces facteurs et de la présence limitée de HSBC Canada en général, les parties indiquent que HSBC Canada répond généralement aux taux établis par les banques canadiennes figurant à l’annexe I, et que RBC n’établit pas systématiquement de prix en prévision des prix de HSBC Canada, et ne tient pas compte des taux de HSBC Canada ou n’y répond pas lorsqu’elle établit les siens.
Afin d’évaluer l’efficacité et l’incidence de HSBC Canada sur la concurrence, le Bureau a examiné un éventail de preuves documentaires relatives à l’établissement des prix, des taux, des caractéristiques des produits et d’autres dimensions de la concurrence dans l’ensemble des services financiers pertinents. Contrairement aux observations décrites ci-dessus, le Bureau a trouvé des preuves de cas où HSBC Canada avait eu une incidence considérable sur les offres de RBC pour un certain nombre de produits examinés, y compris les hypothèques, les comptes d’épargne à taux d’intérêt élevé, les CPG et les prêts et comptes d’entreprises. Certains rapports de RBC ont indiqué, par exemple, que HSBC Canada faisait souvent partie d’un ensemble d’institutions financières dont les taux concurrentiels étaient régulièrement surveillés, de même que les cinq autres grandes banques ainsi que d’autres institutions financières. Le Bureau a trouvé de nombreux exemples d’utilisation des taux hypothécaires de HSBC Canada comme référence dans les négociations des clients avec RBC ou dans les considérations internes de RBC concernant les propositions de taux spéciaux. De même, le Bureau a relevé des cas où HSBC Canada s’est livrée à une concurrence efficace afin d’attirer de grandes entreprises clientes de RBC pour leur offrir des produits de prêt aux entreprises. Le Bureau a également constaté que les documents stratégiques de RBC indiquaient que certaines caractéristiques des produits de HSBC Canada, comme les conditions de rachat de CPG, les limites de transaction, les caractéristiques des comptes de devises étrangères et les services internationaux, entre autres, avaient été efficaces pour attirer les clients de RBC auprès de HSBC Canada.
Les intervenants et les preuves documentaires étayaient également le fait que HSBC Canada offrait des produits particulièrement attrayants et concurrentiels dans des segments particuliers de services financiers personnels et commerciaux. Le Bureau a trouvé certains éléments de preuve selon lesquels le personnel de HSBC Canada considérait ses activités hypothécaires comme un « perturbateur de taux » sur le marché canadien, et poursuivait une stratégie axée sur des taux peu élevés affichés publiquement. Certains documents portaient également à croire que HSBC Canada a négocié des offres inférieures à ces taux hypothécaires affichés moins fréquemment que les concurrents; cependant, certains documents de RBC indiquaient que les hypothèques HSBC Canada étaient néanmoins souvent offertes à des taux inférieurs à ceux du marché. Les intervenants et certains plans internes ont également fait état de cas où HSBC Canada offrait des taux très avantageux pour d’autres produits, comme les CPG, ainsi que des conditions avantageuses et des caractéristiques de produits inégalées par des concurrents, comme des exonérations de frais de transaction, des options de remboursement anticipé des prêts hypothécaires et des limites de transaction plus élevées. Le Bureau s’est demandé si les clients de HSBC Canada pouvaient être lésés par une réduction de ces avantages en raison de la transaction envisagée. Cette analyse est décrite plus en détail aux sections 7.3.3 et 7.3.4 ci-dessous.
Malgré ces constatations concernant les offres souvent avantageuses de HSBC Canada, le Bureau a également examiné diverses preuves qui ont mis en évidence les limites de l’incidence concurrentielle de la banque et l’absence de concurrence étroite entre les parties. Le Bureau a conclu que HSBC Canada n’avait atteint qu’une faible pénétration du marché dans la plupart des produits, malgré ses prix souvent concurrentiels. Un examen des éléments de preuve recueillis auprès de RBC (ainsi que d’autres concurrents) a confirmé que l’établissement des taux, la surveillance, les réactions à l’établissement de prix et les stratégies concurrentielles globales pour les services qui se chevauchent étaient principalement axés sur les cinq autres grandes banques, même dans les régions géographiques où HSBC Canada a une force relative. Comme il en est question plus en détail aux sections 7.3.3 et 7.3.4, le Bureau a évalué des preuves documentaires concernant la justification de centaines de décisions individuelles de RBC liées à l’établissement de prix et a constaté qu’elles étaient principalement motivées par la concurrence d’autres institutions financières et rarement par les offres de HSBC Canada. Le Bureau a également constaté des preuves substantielles de concurrents importants comme RBC qui ont directement refusé d’offrir les mêmes taux que HSBC Canada ou élaboré des stratégies qui réagissaient moins directement aux offres de HSBC Canada, ce qui est conforme à la présence plus limitée de la banque sur le marché.
Le Bureau a relevé des indications selon lesquelles HSBC Canada n’était souvent pas un chef de file en matière de prix et qu’elle ne suscitait peut-être pas systématiquement des réactions de la part de rivaux, même lorsqu’elle livrait une concurrence particulièrement vigoureuse. Le Bureau a également découvert certains éléments de preuve selon lesquels HSBC Canada a adopté une stratégie explicite de « suiveur », ou s’est directement qualifiée de preneur de prix, dans certains marchés de produits de services financiers. Selon les éléments de preuve, HSBC Canada accusait un retard par rapport à ses concurrents canadiens dans certaines caractéristiques de produits, particulièrement en ce qui concerne les services numériques, comme la compatibilité des cartes de débit, les capacités de libre-service mobile et d’autres offres. Dans certains cas, les documents démontraient que l’absence de financement pour des initiatives de produits qui ne faisaient pas partie des priorités du Groupe HSBC avait nui à la compétitivité de HSBC Canada. Même dans les cas où HSBC Canada semblait être un chef de file en matière de développement de produits ou de caractéristiques de produits, il n’y avait que peu de preuves de l’influence que cela avait eu sur l’offre des institutions canadiennes.
Outre les analyses des effets sur les prix ou les taux susceptibles d’être offerts aux Canadiens, le Bureau tient également compte des répercussions possibles sur le service, la qualité, le choix de produits et d’autres dimensions de la concurrence. À cet égard, le Bureau a fait remarquer que les offres de produits de HSBC Canada axées sur l’international étaient particulièrement prisées par certains clients et comprenaient des produits qui dépendaient de l’intégration au groupe mondial HSBC. Les intervenants et les preuves documentaires ont fait ressortir l’importance concurrentielle des caractéristiques particulières des produits de HSBC Canada, comme les comptes à devises multiples, le commerce international, les mouvements et la gestion de fonds internationaux, ainsi que certains produits encore en cours d’élaboration, et ont confirmé que ces offres différenciaient HSBC Canada de ses concurrents, comme RBC. Le Bureau a examiné des plans d’intégration, des documents stratégiques et d’autres éléments de preuve afin d’évaluer les incitatifs concurrentiels de RBC et la probabilité qu’elle continue d’offrir des produits clés au Canada. En fin de compte, le Bureau a conclu que les éléments de preuve corroboraient le fait que RBC avait l’intention de continuer à prioriser un grand nombre de produits pertinents, avait élaboré des plans pour combler les lacunes clés en matière de produits et cherchait à maintenir des offres importantes et à éviter l’attrition des clients.
À la lumière de cette analyse, le Bureau a généralement conclu qu’il y avait une rivalité non négligeable entre HSBC Canada et RBC sur de nombreux marchés de services financiers, mais que HSBC Canada avait une incidence concurrentielle limitée par rapport aux autres institutions financières (particulièrement les grandes banques nationales). Le Bureau a conclu que la perte de rivalité entre les parties pourrait être plus prononcée pour certains groupes de clients, y compris les clients de HSBC Canada, pour des produits comme les hypothèques et les comptes axés sur l’international.
Lorsqu’il évalue la probabilité qu’une fusion empêche ou diminue sensiblement la concurrence, le Bureau examine également l’efficacité des concurrents restants, la probabilité d’une entrée ou d’une expansion suffisante et en temps opportun, et d’autres facteurs qui peuvent limiter l’exercice potentiel d’un pouvoir de marché. Afin d’évaluer pleinement les effets concurrentiels probables de la transaction envisagée, le Bureau a pris en considération d’autres éléments de preuve relatifs à la dynamique concurrentielle et à la concurrence restante dans chacun des marchés de chevauchement, y compris des mesures de la concentration du marché, des documents stratégiques et commerciaux et une analyse économique spécialisée. L’expert économique du Bureau a estimé les demandes et mené un exercice de simulation de fusion afin d’évaluer les effets de la transaction envisagée sur la concurrence dans les marchés pertinents. On traite des résultats de ces analyses aux sections 7.3.3 et 7.3.4 ci-dessous.
7.2.1 Finance durable
RBC et HSBC Canada offrent toutes deux une gamme de produits financiers durables et ont pris des engagements publics en vue de promouvoir des pratiques de prêt respectueuses de l’environnement ou de les adopter. Les observations des intervenants et les documents internes reçus des participants au marché ont confirmé que les consommateurs prisent grandement et de plus en plus ces offres et que la demande pour de tels produits devrait continuer de croître. Au cours de son examen, le Bureau a également constaté que HSBC Canada a été, à certains égards, un concurrent particulièrement vigoureux dans le domaine de la finance durable et un chef de file dans le développement de certains produits dans le secteur. Comme il est indiqué dans le document Fusions — Lignes directrices pour l'application de la loi, lorsqu’il évalue les effets d’une fusion sur la concurrence, le Bureau examine diverses dimensions de la concurrence au-delà des prix et de la production, comme la qualité, le choix de produits et l’innovation. Par conséquent, le Bureau a effectué une évaluation distincte et détaillée de la probabilité que la transaction envisagée ait une incidence importante sur la qualité ou la portée des produits durables offerts par les parties, ou sur l’innovation en ce qui concerne la finance durable. L’examen de cette question par le Bureau a été particulièrement éclairé par les documents stratégiques et les plans d’affaires recueillis auprès des parties, ainsi que par les éléments de preuve concernant l’incidence concurrentielle d’autres institutions financières dans le domaine de la durabilité.
Les institutions financières au Canada font la promotion d’un certain nombre de produits de finance durable pour attirer les clients et appuyer des engagements environnementaux plus élargis, y compris des solutions de conseil, des prêts verts ou liés à la durabilité, des dépôts verts, des obligations vertes ou liées à la durabilité, ou d’autres produits semblables qui engagent des capitaux selon des normes de durabilité définies. Les éléments de preuve recueillis par le Bureau ont confirmé que HSBC Canada était considérée comme un chef de file du marché et un innovateur dans ce secteur de produits, comme en témoignent son introduction précoce de prêts verts en 2019 et son offre d’une gamme complète de produits financiers durables en 2021. Les documents stratégiques examinés par le Bureau ont confirmé les plans de HSBC Canada pour continuer à investir dans l’innovation de produits durables, et ont indiqué qu’elle offrait un plus vaste portefeuille de produits axés sur la durabilité que bon nombre de ses concurrents, y compris RBC. L’analyse du Bureau visait donc entre autres à déterminer si la transaction envisagée inciterait sensiblement RBC à réduire cette offre de produits, ou si elle nuirait autrement à l’innovation ou à la qualité des produits en réduisant la concurrence dans le secteur.
Les éléments de preuve examinés par le Bureau, y compris les documents de planification interne, ont démontré que les parties étaient confrontées à des pressions externes importantes pour mettre au point de solides offres en matière de finance durable qui ne seraient pas touchées par la transaction. Des éléments de preuve documentaires donnent à penser que les parties, tout comme d’autres concurrents, avaient préparé des plans pour une croissance importante de la finance durable, une stratégie renforcée par une demande croissante des consommateurs, la nature nouvelle et croissante des marchés pertinents et les pressions réglementaires croissantes. Les éléments de preuve examinés par le Bureau n’indiquaient pas que le développement de produits durable avait été grandement stimulé par la rivalité actuelle entre RBC et HSBC Canada. Le Bureau a également examiné en détail les plans stratégiques de RBC relatifs à la transaction envisagée et a constaté qu’ils décrivaient l’intégration du portefeuille de finance durable général de HSBC Canada comme un moyen d’accélérer cette croissance. Les documents internes détaillaient les intentions de RBC, par l’intermédiaire de la transaction envisagée, de renforcer ses capacités dans le secteur, d’intégrer de nouvelles offres de HSBC Canada et d’élargir la gamme de solutions offertes à tous ses clients. Le Bureau n’a pas trouvé de preuve selon laquelle RBC avait l’intention d’interrompre ou de limiter les investissements dans le portefeuille durable de HSBC Canada.
Le Bureau a également trouvé des preuves selon lesquelles RBC continuerait de faire face à des pressions importantes de la part de concurrents particuliers pour développer ses offres de finance durable après la fusion. Des preuves documentaires ont démontré que, dans l’évaluation de leurs stratégies respectives en matière de durabilité, chacune des parties considérait que le développement insuffisant de tels produits constituait un risque important pour les parts de marché, les taux de croissance et d’attrition de la clientèle, les pertes en capital estimées et la rentabilité globale. Le Bureau a examiné des éléments de preuve concernant les capacités des concurrents, qui indiquaient que les grandes institutions concurrentes au Canada, comme BMO, la Banque Nationale, la Banque Scotia et d’autres, disposaient de capacités importantes en finance durable ou étaient bien placées pour élaborer des solutions ayant une incidence importante sur ces marchés naissants. Le Bureau a également noté que chacun des principaux concurrents de RBC (y compris la Banque Scotia, la Banque TD, la CIBC et BMO) a pris d’importants engagements en matière de prêts durables.
En fin de compte, le Bureau a conclu que, d’après les données disponibles, RBC aurait vraisemblablement l’incitatif et l’intention de continuer à offrir les produits de finance durable de HSBC Canada après la transaction, et serait encouragée à poursuivre le développement dans ce domaine compte tenu de la demande croissante, de la nature vigoureuse des marchés pertinents et des pressions concurrentielles importantes. Compte tenu de ces constatations, ainsi que de la présence de concurrents réels restants pour les produits pertinents, le Bureau a conclu que l’acquisition du portefeuille de finance durable de HSBC Canada par RBC n’aurait vraisemblablement pas pour effet d’empêcher ou de diminuer sensiblement la concurrence.
7.3 Effets concurrentiels et concurrence restante
7.3.1 Concurrence dans les services de marchés de capitaux
Les services de marchés de capitaux comprennent généralement l’obtention de capitaux en échange d’instruments financiers (principalement des capitaux propres ou des dettes), le commerce de ces instruments financiers, ainsi que la vente et la fourniture de certains autres instruments financiers comme les devises étrangères. Les clients des services de marchés des capitaux comprennent généralement les sociétés, les investisseurs institutionnels, les gestionnaires d’actifs, les sociétés de capital-investissement et les gouvernements. Comme on l’a mentionné à la section 7.1, le Bureau a cerné trois principaux services de marchés financiers offerts par RBC et HSBC Canada, soit :
- les conseils en matière de fusions et d’acquisitions,
- la souscription et
- les ventes et les transactions. Le Bureau a évalué la concurrence pour chacun de ces services, notamment en évaluant la concentration du marché et l’efficacité des autres concurrents, en se fondant sur des preuves documentaires, des entrevues avec les intervenants et d’autres sources d’information.
Le Bureau a constaté que la dynamique concurrentielle des services de marchés des capitaux est, à bien des égards, distincte de celle des autres marchés des services financiers. Les éléments de preuve indiquent que même si les clients des marchés de capitaux préfèrent utiliser des concurrents qui connaissent bien les territoires dans lesquels ils exercent leurs activités, ils n’exigent généralement pas qu’un fournisseur potentiel ait un bureau local, de sorte que les marchés pertinents sont probablement d’envergure nationale ou mondiale. Les renseignements recueillis par le Bureau démontraient que les parties faisaient donc face à la concurrence d’un certain nombre d’acteurs importants, sophistiqués et souvent établis à l’échelle internationale, particulièrement en ce qui concerne les services de souscription.
Le Bureau a évalué les données disponibles sur la concentration du marché et a constaté que les parts de marché des parties étaient faibles pour chacun des produits pertinents du marché de capitaux. Les renseignements recueillis par le Bureau ont également indiqué que HSBC Canada avait une présence minimale dans les services de marchés de capitaux et un impact concurrentiel limité. Le Bureau a évalué l’efficacité des concurrents restants et a constaté que RBC continuerait de faire face à d’importantes contraintes concurrentielles de la part des autres cinq grandes banques, d’autres institutions financières canadiennes comme la Banque Nationale et Desjardins, ainsi que d’importants acteurs internationaux, dont la Bank of America, la Deutsche Bank, BNP Paribas, JP Morgan et un certain nombre d’autres (particulièrement pour les services de souscription). Les grands concurrents internationaux sont particulièrement présents dans les opérations de souscription où des capitaux importants sont requis.
À la lumière de ces constats, le Bureau a conclu que la transaction envisagée n’aurait vraisemblablement pas pour effet d’empêcher ou de diminuer sensiblement la concurrence dans les services des marchés de capitaux, compte tenu des parts de marché limitées des parties, de l’impact concurrentiel modeste de HSBC Canada et de la présence de concurrents réels restants. Compte tenu de cette décision, il n’a pas été nécessaire de poursuivre une enquête plus approfondie, y compris des analyses d’experts des effets de la concurrence, sur les services des marchés de capitaux.
7.3.2 Concurrence dans l’émission de cartes de crédit
Comme il a été indiqué à la section 7.1, le Bureau a cerné deux catégories de services de cartes de crédit offerts par RBC et HSBC Canada :
- l’émission de cartes de crédit d’utilisation courante aux entreprises et
- l’émission de cartes de crédit d’utilisation courante aux particuliers. RBC émet des cartes de crédit Visa et Mastercard, tandis que HSBC Canada émet des cartes de crédit Mastercard.
Les institutions financières se font concurrence pour attirer les clients de cartes de crédit en fonction des taux d’intérêt, des frais annuels, des incitatifs à l’inscription, des avantages intégrés, des caractéristiques et des conditions des programmes de récompenses connexes, entre autres dimensions de la concurrence. Le Bureau a reçu un certain nombre d’observations en réponse à sa demande publique de renseignements, qui décrivaient des caractéristiques importantes sur le plan de la concurrence des offres de cartes de crédit de HSBC Canada, comme une assurance voyage attrayante et l’absence de frais de transaction internationaux, et faisaient part de l’inquiétude que la transaction envisagée ait une incidence sur ces caractéristiques.
Le Bureau a examiné les offres de cartes de crédit des parties et de leurs principaux concurrents et a évalué l’ampleur de la concurrence restante après la transaction. Le Bureau a conclu que les données disponibles donnaient à penser que les parties détenaient de faibles parts des marchés pertinents des cartes de crédit et que HSBC Canada avait une présence très limitée sur le marché. Le Bureau a également déterminé que RBC continuerait de faire face à une concurrence efficace de la part de grandes banques comme la Banque TD, la CIBC, BMO, la Banque Scotia et la Banque Nationale, ainsi qu’à la concurrence de certains autres émetteurs de cartes de crédit, comme des petites institutions financières et des détaillants, à la suite de la transaction envisagée.
Par conséquent, compte tenu de la présence limitée des parties et de l’ampleur de la concurrence restante, le Bureau a conclu que la transaction envisagée n’aurait vraisemblablement pas pour effet d’empêcher ou de diminuer sensiblement la concurrence dans l’émission de cartes de crédit. Compte tenu de cette décision, il n’a pas été nécessaire d’approfondir l’enquête sur les services d’émission de cartes de crédit, ni de procéder à une analyse par l’expert.
7.3.3 Concurrence dans les services financiers personnels
Comme il a été indiqué à la section 7.1, le Bureau a cerné un éventail de services financiers personnels que RBC et HSBC Canada offrent aux particuliers. Les produits et services pertinents qui se chevauchent comprennent les suivants :
- comptes d’opérations personnels,
- épargne personnelle à court terme,
- produits de prêt à la consommation,
- prêts hypothécaires résidentiels,
- services de courtage en ligne/à escompte,
- services de conseils en placement privés et
- services personnels de placement à long terme.
Dans chaque cas, le Bureau a évalué les effets potentiels sur la concurrence en examinant les éléments de preuve disponibles, y compris les documents et les données, et en menant des entrevues avec les participants au marché. Le Bureau a également évalué les parts de marché et la concentration du marché et a examiné les analyses de l’expert économique indépendant.
Le Bureau a évalué la concentration du marché pour les services financiers personnels offerts par les parties dans plus de 60 marchés locaux où les succursales se chevauchent. Les analyses des parts de marché du Bureau ont été éclairées par des données détaillées recueillies directement auprès des parties et d’autres participants au marché. Aux fins de la présente analyse, les marchés géographiques locaux ont été éclairés par l’application du critère de monopoleur hypothétique effectué par l’expert économique indépendant, ainsi que par d’autres éléments de preuve, et tenaient compte d’autres scénarios, comme il est décrit à la section 7.1.1. Le Bureau a constaté que les parts de marché des parties étaient inférieures à 35 % dans la majorité des marchés locaux pertinents, ce qui est principalement attribuable à la concurrence des grandes banques nationales. De façon générale, le commissaire ne contestera pas une fusion en raison d’une préoccupation liée à l’exercice unilatéral d’un pouvoir de marché lorsque la part de marché d’une entreprise issue d’une fusion serait inférieure à 35 %.
Le Bureau a également examiné directement l’efficacité des autres concurrents dans chacun des services financiers personnels de chevauchement. Afin de déterminer la capacité et l’efficacité des autres concurrents de limiter l’exercice d’un pouvoir de marché par l’entreprise fusionnée, le Bureau peut examiner les formes de rivalité utilisées telles que le recours aux rabais ou à d’autres stratégies d’établissement des prix, les méthodes de distribution et de commercialisation, le positionnement des produits et des emballages, et les services offerts. Afin de mener cette analyse, le Bureau a examiné les dossiers internes relatifs aux multiples dimensions de la concurrence, y compris la détermination des prix, des frais, des taux d’intérêt, des caractéristiques de produits et de la qualité du service.
Dans l’ensemble, le Bureau a constaté que BMO, la Banque TD, la Banque Scotia et la CIBC offraient généralement toutes des produits comparables et concurrentiels dans l’ensemble des services financiers personnels de chevauchement entre les parties et dans les marchés locaux pertinents visés par l’examen. Les éléments de preuve documentaires appuient fortement le fait que les cinq grandes banques étaient les concurrents les plus proches des parties pour les services pertinents dans les régions où elles exploitaient des succursales locales. Les plans stratégiques ont confirmé qu’il s’agissait des banques les plus systématiquement surveillées et comparées par les parties, et celles qui touchaient le plus les offres concurrentielles des parties. Le Bureau a également évalué les plans d’affaires relatifs aux domaines où HSBC Canada a une force concurrentielle, comme les services aux nouveaux arrivants au Canada, et a continué de trouver des preuves d’une concurrence étroite et d’une forte pénétration du marché de la part de ces grandes banques.
Le Bureau a également examiné des renseignements relatifs à la contrainte imposée par les autres institutions financières et les concurrents autres que des banques. Le Bureau a trouvé des éléments de preuve indiquant, par exemple, que la Banque Nationale et Desjardins étaient des concurrents très efficaces et agressifs sur de nombreux marchés de produits dans la province de Québec. Divers documents d’affaires internes appuyaient également la présence de contraintes sporadiques et plus limitées imposées par les coopératives de crédit et les banques régionales, dans les régions où elles sont très présentes.
Le Bureau a également examiné des éléments de preuve concernant la dynamique concurrentielle dans des marchés de produits particuliers. Le Bureau a examiné en détail, par exemple, des documents relatifs à la détermination des taux hypothécaires résidentiels dans les domaines pertinents. Ces éléments de preuve comprenaient des documents internes sur les changements apportés aux taux hypothécaires affichés, ainsi que des demandes d’exceptions de taux ou d’offres spéciales pour des clients particuliers en réponse aux activités de compétiteurs. Le Bureau a constaté que les changements apportés aux offres hypothécaires des parties étaient le plus souvent attribuables à la concurrence des cinq grandes banques, comme BMO, la Banque TD, la Banque Scotia ou la CIBC. Le Bureau a également examiné des éléments de preuve concernant les ventes par l’entremise de courtiers hypothécaires, qui représentent une proportion croissante des prêts hypothécaires canadiens. Dans certains documents, on a aussi trouvé des exemples de suivi systématique des offres hypothécaires de ces entreprises qui n’incluaient pas d’autres concurrents. L’examen du Bureau a révélé que la concurrence d’autres fournisseurs de prêts hypothécaires, comme les prêteurs spécialisés, les prêteurs privés ou les concurrents numériques ou sans succursales, a eu une incidence plus limitée sur l’établissement des prix et des offres hypothécaires des parties. Selon les éléments de preuve, la capacité d’offrir de multiples services financiers et de tirer parti des relations de compte existantes d’un client peut être un facteur important dans l’efficacité des concurrents.
Le Bureau a également trouvé des éléments de preuve selon lesquels les parties comparaient les caractéristiques et les structures tarifaires de leurs comptes d’opérations personnels avec des concurrents comme BMO, la Banque TD, la Banque Scotia et la CIBC. Même si certaines banques sans succursales ou numériques font aussi parfois l’objet d’une surveillance concurrentielle, ces dernières étaient souvent des affiliées de grandes institutions canadiennes ou détenues par celles-ci. Des documents relatifs aux prêts personnels et aux produits d’épargne (en particulier les CPG) ont également décrit des cas de concurrence et de surveillance étroites entre les cinq plus grandes institutions du Canada, tout en confirmant que HSBC Canada offrait les meilleurs taux sur le marché pendant certaines périodes, et en suggérant que les banques régionales détenaient des parts plus importantes de CPG que d’autres produits financiers personnels. Selon certains documents, les investissements des grandes institutions financières dans l’innovation numérique et leurs vastes réseaux de distribution ont contribué à en faire une menace concurrentielle globale efficace. Néanmoins, le Bureau a trouvé certaines preuves selon lesquelles des produits comme les services de conseils en placement et de courtage, qui ne comportent pas d’exigences de réserve de capital, étaient plus touchés par la concurrence des concurrents spécialisés et numériques seulement.
Afin d’évaluer davantage les effets potentiels de la fusion sur les services financiers de chevauchement entre les parties, le Bureau a également examiné les analyses de l’expert économique indépendant. L’expert économique du Bureau a estimé la demande et mené un exercice de simulation de fusion afin d’évaluer les effets concurrentiels probables de la transaction envisagée sur la concurrence dans les marchés pertinents. Le Bureau ne fonde pas ses conclusions concernant la probabilité qu’une transaction aura vraisemblablement pour effet de diminuer sensiblement la concurrence sur un seuil numérique précis d’augmentation des prix, mais il examine ces analyses en conjonction avec son évaluation des facteurs susceptibles de limiter l’exercice d’un pouvoir de marché après la transaction.
L’analyse de l’expert comprenait diverses analyses de sensibilité et tenait compte des caractéristiques clés des services financiers personnels évalués. L’évaluation de l’expert a également tenu compte des effets potentiels non liés aux prix associés à la fusion. En fin de compte, l’analyse de l’expert économique a révélé un éventail d’effets sur la concurrence, y compris des augmentations de prix précises, qui peuvent découler de la transaction envisagée. Le Bureau a conclu que ces effets prévus, lorsqu’ils sont évalués avec tous les autres éléments de preuve disponibles, n’étayaient pas une conclusion de diminution sensible de la concurrence au sens de l’article 92 de la Loi sur la concurrence.
Compte tenu de ce qui précède, le Bureau a tiré les conclusions suivantes :
- les parts de marché de l’entreprise fusionnée après la fusion seraient, dans la plupart des cas, inférieures à 35 % sur les marchés des services financiers personnels évalués;
- même si la transaction envisagée entraînera vraisemblablement la perte d’une rivalité non négligeable entre HSBC Canada et RBC, les éléments de preuve indiquaient que les concurrents restants étaient vraisemblablement efficaces et avaient une incidence beaucoup plus importante sur les marchés des services financiers personnels pertinents; et
- l’évaluation de l’expert des effets sur la concurrence n’appuie pas une conclusion selon laquelle la transaction envisagée entraînerait une diminution sensible de la concurrence.
En fin de compte, au vu de son examen dans son ensemble, le Bureau a conclu que la transaction envisagée n’aurait vraisemblablement pas pour effet d’empêcher ou de diminuer sensiblement la concurrence dans les marchés des services financiers personnels de chevauchement entre les parties, au sens de l’article 92 de la Loi sur la concurrence. Les conclusions du Bureau sont examinées plus en détail à la section 8 ci-dessous.
7.3.4 Concurrence dans les services financiers aux entreprises
RBC et HSBC Canada offrent toutes deux une gamme de services financiers aux entreprises, qui peuvent être regroupés en deux catégories :
- les comptes d’entreprises; et
- les services de prêts aux entreprises. Le Bureau a constaté que les offres et les modalités négociées des parties pour ces produits, ainsi que les processus concurrentiels et les conditions, différaient souvent selon la taille du client. Certains éléments de preuve montraient que les parties avaient classé leurs clients par catégories, et avaient élaboré des stratégies distinctes pour chacune des catégories suivantes :
- les petites et moyennes entreprises (« PME »),
- les entreprises d’envergure moyenne et
- les grandes entreprises clientes.
Par conséquent, le Bureau a évalué la concurrence pour chaque service pertinent dans les marchés locaux où il y a chevauchement entre les parties et a tenu compte des éléments de preuve concernant l’offre de ces services à des entreprises de tailles différentes.
Comme dans le cas des services financiers personnels dont il est question à la section 7.3.3., le Bureau a évalué les effets potentiels sur la concurrence dans les services aux entreprises en examinant les éléments de preuve disponibles, y compris les documents et les données, et en menant des entrevues avec les participants au marché. Le Bureau a de nouveau évalué les parts de marché et la concentration du marché et a examiné les analyses de l’expert économique indépendant.
Le Bureau a évalué la concentration du marché pour les services financiers aux entreprises offerts par les parties dans plus de 60 marchés locaux où les succursales se chevauchent. Les analyses des parts de marché du Bureau ont été encore une fois éclairées par des données détaillées recueillies directement auprès des participants au marché, tandis que les marchés géographiques locaux ont été éclairés par l’application du critère de monopoleur hypothétique effectué par l’expert économique indépendant, ainsi que par d’autres éléments de preuve. Le Bureau a conclu que les parts de marché des parties étaient généralement faibles, dans bien des cas inférieures à 35 %, ce qui est principalement attribuable à la concurrence des plus grandes banques canadiennes. De façon générale, le Bureau ne contestera pas une fusion en raison d’une préoccupation liée à l’exercice unilatéral d’un pouvoir de marché lorsque la part de marché d’une entreprise issue d’une fusion serait inférieure à 35 %.
Les analyses du marché local peuvent être les plus pertinentes pour les services fournis aux PME, car les éléments de preuves ont montré que ces clients comptaient le plus sur les services des succursales locales. Le Bureau a constaté que les entreprises clients de plus grande taille, y compris celles dont les activités ou les bureaux s’étendent sur une vaste zone géographique, achetaient souvent des services financiers au moyen d’appels d’offres concurrentiels ou cherchaient à obtenir des prêts syndiqués, et n’accordaient que peu d’importance à la présence locale d’un fournisseur. Par conséquent, compte tenu des éléments de preuve selon lesquels les marchés géographiques pertinents pour la fourniture de comptes ou de prêts à certaines grandes entreprises clientes peuvent être plus vastes que ceux de marchés locaux, le Bureau a également tenu compte de la concurrence dans les marchés régionaux potentiels, comme il est décrit plus en détail ci-dessous.
Le Bureau a examiné l’efficacité des autres concurrents dans chacun des services financiers aux entreprises qui se chevauchent. Le Bureau a examiné les dossiers d’affaires internes relatifs à de multiples dimensions de la concurrence et aux négociations avec des clients de différentes tailles. Le Bureau a également examiné des éléments de preuve concernant les plans stratégiques des parties et leurs forces respectives dans leurs offres de services aux entreprises, en vue d’évaluer la dynamique concurrentielle dans chaque marché pertinent.
Selon les documents internes stratégiques et de planification des activités, HSBC Canada avait une présence globalement limitée dans les services financiers aux entreprises, même en tenant compte de certaines prévisions de croissance à court terme, mais possédait des forces particulières dans les services pour les clients ayant des besoins internationaux. Le Bureau a conclu que HSBC Canada détenait une part limitée des services aux PME, par exemple, et que même ses plans de croissance dans ce segment mettaient l’accent sur le ciblage des clients ayant des besoins internationaux et faisaient ressortir les offres internationales dans le cadre d’analyses comparatives concurrentielles.
En ce qui concerne les comptes et les prêts fournis aux PME, le Bureau a conclu que les parties surveillaient de près et régulièrement les offres de chacune des banques suivantes : la Banque TD, la Banque Scotia, BMO et CIBC. Les éléments de preuve donnaient à penser que chacune de ces entreprises était généralement aussi concurrentielle sur le plan des coûts et offrait aux PME une gamme de produits comparable à celle des parties (quoique leurs offres internationales puissent varier). Le Bureau a trouvé des preuves de plans d’expansion importants de certaines de ces grandes banques dans des produits comme les prêts aux petites entreprises. Dans l’ensemble, les éléments de preuve étayaient le fait que ces entreprises étaient des concurrents efficaces pour les services aux PME dans les marchés locaux où elles exploitaient une succursale.
Les éléments de preuve relatifs à la contrainte imposée par d’autres concurrents étaient beaucoup plus limités. Certains plans stratégiques et d’affaires appuyaient, par exemple, que les banques régionales et les coopératives de crédit pourraient être des solutions de rechange concurrentielles appropriées pour les PME d’envergure locale. D’autres éléments de preuve indiquaient que les technologies financières étaient considérées comme une menace notable pour des services comme les services de dépôt et de prêts en cas de modification de la réglementation bancaire canadienne. En fin de compte, les éléments de preuves d’un effet direct de la concurrence de la part des banques en ligne ou des IFNB sur les offres des parties étaient limités pour les services financiers aux entreprises.
Le Bureau a également examiné des preuves considérables concernant la concurrence pour les services fournis aux entreprises d’envergure moyennes et aux grandes entreprises clientes. Il s’agissait entre autres de preuves directes de la négociation et de l’établissement du prix de prêts importants, de prêts syndiqués et de comptes d’entreprise. Ces documents ont confirmé que les grandes banques comme BMO, la Banque TD, la Banque Scotia et la CIBC étaient les plus proches concurrents des parties en ce qui concerne les prêts aux entreprises de grande valeur, et comportaient nombreux exemples de perte de comptes clients importants aux mains de ces institutions en raison d’offres concurrentes. Des documents stratégiques ont également confirmé que les campagnes agressives de certains de ces concurrents faisaient l’objet d’un suivi attentif dans le cadre de la planification interne. Les éléments de preuve relatifs à la négociation de prêts syndiqués importants laissaient entendre que RBC livrait davantage la concurrence aux plus grandes banques canadiennes pour de tels produits qu’avec HSBC Canada.
Le Bureau a constaté que la contrainte imposée par d’autres prêteurs variait probablement considérablement selon la taille de la transaction. Certains éléments de preuve ont mis en évidence une concurrence vigoureuse de la part des coopératives de crédit en ce qui concerne les prêts aux entreprises d’envergure moyenne, notamment en Colombie-Britannique, où la présence de HSBC Canada est importante. En revanche, les documents indiquaient que les coopératives de crédit, les banques figurant à l’annexe II et d’autres concurrents non traditionnels étaient beaucoup moins efficaces pour livrer concurrence aux grands prêts aux entreprises, en partie en raison d’un coût sous-jacent de financement plus élevé.
L’expert économique du Bureau a estimé les demandes et mené un exercice de simulation de fusion afin d’évaluer les effets concurrentiels probables de la transaction envisagée pour les principaux services financiers de chevauchement entre les parties. L’analyse de l’expert comprenait diverses analyses de sensibilité et tenait compte des caractéristiques clés des services financiers aux entreprises évalués. L’évaluation de l’expert a également tenu compte des effets potentiels non liés aux prix associés à la fusion. En fin de compte, l’analyse de l’expert économique a révélé un éventail d’effets sur la concurrence, y compris des augmentations de prix précises, qui peuvent découler de la transaction envisagée. Le Bureau a conclu que ces effets prévus, lorsqu’ils sont évalués avec tous les autres éléments de preuve disponibles, n’étayaient pas une conclusion de diminution sensible de la concurrence au sens de l’article 92 de Loi sur la concurrence.
Compte tenu de ce qui précède, le Bureau a tiré les conclusions suivantes :
- les parts de marché des parties étaient généralement faibles, dans de nombreux cas inférieures à 35 %, sur les marchés des services financiers aux entreprises évalués;
- même si la transaction envisagée entraînera vraisemblablement la perte de rivalité non négligeable entre HSBC Canada et RBC dans certains secteurs, comme les services pour les grands clients ayant une vision internationale, les éléments de preuve permettaient de conclure que les concurrents restants étaient efficaces; et
- l’évaluation de l’expert des effets sur la concurrence n’appuie pas une conclusion selon laquelle la transaction envisagée entraînerait une diminution sensible de la concurrence.
En fin de compte, au vu de son examen dans son ensemble, le Bureau a conclu que la transaction envisagée n’aurait vraisemblablement pas pour effet d’empêcher ou de diminuer sensiblement la concurrence dans les marchés des services financiers aux entreprises qui se chevauchent, au sens de l’article 92 de la Loi sur la concurrence. Les conclusions du Bureau sont examinées plus en détail à la section 8 ci-dessous.
7.4 Entrée et expansion
Lorsqu’il effectue une analyse des effets concurrentiels, le Bureau examine les obstacles à l’entrée et à l’expansion dans les marchés pertinents afin d’évaluer si une entrée ou une expansion opportune de concurrents serait vraisemblablement suffisante pour limiter un éventuel exercice de pouvoir de marché après la fusion. Le Bureau étudie aussi fréquemment les perspectives d’entrée ou d’expansion de concurrents potentiels particuliers et cherche à identifier toute entreprise prête à entrer sur les marchés pertinents ou à étendre ses activités dans ceux-ci. Au cours de son examen de la transaction envisagée, le Bureau a effectué ces évaluations dans le cadre d’entrevues avec les intervenants, d’un examen des considérations réglementaires, d’un examen des documents relatifs aux conditions d’entrée et aux investissements des concurrents actuels, et d’un examen des preuves documentaires relatives aux capacités des concurrents, entre autres analyses.
À la lumière de ces éléments de preuve, le Bureau a conclu que les obstacles à l’entrée dans plusieurs des marchés pertinents liés aux services financiers sont élevés. En particulier, l’analyse du Bureau n’a pas permis de découvrir un nouveau venu prêt à entrer sur le marché et en mesure de le faire à une échelle suffisante pour avoir un impact concurrentiel comparable à celui de HSBC Canada. En fin de compte, toutefois, il n’a pas été nécessaire pour le Bureau de déterminer de façon concluante si l’entrée ou l’expansion était susceptible de limiter l’exercice d’un pouvoir de marché dans les marchés pertinents, compte tenu des autres conclusions décrites dans le présent rapport.
Le Bureau a constaté que les obstacles à l’expansion dans des gammes de produits adjacentes par des concurrents déjà établis dans un service financier donné sont probablement moins importants, mais qu’aucun concurrent ou groupe de concurrents de ce genre n’est prêt à remplacer la présence de HSBC Canada sur le marché. Le Bureau a également constaté que les obstacles à l’entrée dans certains secteurs de produits, comme les services de marchés de capitaux, peuvent être moins importants que ceux liés aux services financiers personnels et aux entreprises, et que les principaux concurrents actuels, comme les plus grandes banques du Canada, peuvent être en mesure d’élargir considérablement leurs offres dans les marchés pertinents. En fin de compte, le Bureau a conclu qu’une entrée ou une expansion importante dans les marchés pertinents au Canada se produisait le plus souvent par l’acquisition ou par l’intermédiaire d’un partenariat avec de grands concurrents existants, à la lumière des obstacles importants à l’entrée et à l’expansion dans le secteur d’activité.
7.4.1 Obstacles à l’entrée et à l’expansion
Les examens antérieurs du Bureau des fusions dans le secteur financier ont permis de conclure que les obstacles à l’entrée dans les services offerts par les réseaux de succursales bancaires étaient élevés et que les concurrents actuels faisaient également face à des obstacles à l’expansionNote de bas de page 13. Ces obstacles comprenaient les coûts irrécupérables liés à l’établissement d’un réseau de succursales, la présence d’économies d’échelle et de portée, la fidélisation des clients et les problèmes liés à la réputation, ainsi que les exigences réglementaires, entre autres. Au cours de son examen de la transaction envisagée, le Bureau a effectué une évaluation des obstacles auxquels font face les nouveaux venus potentiels sur les marchés pertinents en fonction des éléments de preuve actuels, tout en tenant compte des changements technologiques ou réglementaires récents qui peuvent avoir eu une incidence sur les conditions d’entrée.
L’examen du Bureau a confirmé qu’un éventail d’obstacles peuvent se dresser à la fois devant les nouveaux venus dans les marchés des services financiers pertinents et, dans une moindre mesure, devant les concurrents actuels qui cherchent à prendre de l’expansion. Ces obstacles sont les suivants :
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Obstacles au changement de fournisseurs pour les clients : Les éléments de preuve documentaires et les entrevues avec les intervenants ont souligné qu’il y avait des obstacles importants au changement de fournisseurs pour les clients dans plusieurs des marchés pertinents. Les intervenants ont fait remarquer que les Canadiens dépendent grandement de leur relation bancaire principale pour leurs transactions quotidiennes et leur sécurité financière globale, de sorte que des interruptions potentielles au moment d’un changement de fournisseur comportent des coûts et des risques importants. En outre, des coûts directs sont souvent associés au changement de fournisseurs, comme des frais de rupture sur les prêts hypothécaires ou à terme, des intérêts perdus sur les dépôts à terme, des frais pour le transfert de comptes de placement et des paiements possiblement manqués au moment du transfert de comptes d’opération. Par conséquent, tous les éléments de preuve disponibles ont permis de démontrer que les nouveaux venus seront confrontés à des coûts d’acquisition importants et à des défis globaux importants lorsqu’ils tentent d’attirer de nouveaux clients.
Le Bureau a examiné de nombreux éléments de preuve documentaire relatifs au changement de fournisseurs pour chacun des produits ou services de chevauchement entre les parties. Les plans d’affaires indiquaient, par exemple, que les concurrents suivaient de près leurs ventes de produits multiples et en faisaient la promotion comme moyen d’« ancrer » les clients ou d’encourager la « fidélité des clients ». Les comptes de transactions personnelles et de cartes de crédit, en particulier, ont été cités comme étant essentiels à la réduction de l’attrition de la clientèle dans son ensemble. Le Bureau a examiné des plans stratégiques qui indiquaient que les concurrents suivaient de près les taux de rétention de la clientèle dans plusieurs des produits pertinents et pour différents profils de clients. Les plans démontraient que ces taux étaient extrêmement élevés pour la plupart des produits. Le Bureau a également examiné les offres concurrentielles offertes par les concurrents et a constaté que celles-ci comprenaient des incitatifs initiaux importants visant à compenser les coûts associés au changement de fournisseur. Un nouveau venu qui souhaite établir une clientèle devrait réaliser des investissements et offrir des incitatifs semblables ou supérieurs.
Les obstacles au changement de fournisseur par les clients peuvent contribuer à des obstacles à l’entrée élevés lorsqu’ils limitent la capacité d’un nouveau venu d’attirer une clientèle suffisante pour mener ses activités de façon rentable dans les marchés pertinents. Cet effet peut être particulièrement marqué dans plusieurs des marchés bancaires canadiens, compte tenu des économies d’échelle et de portée, et des exigences globales en matière de capital, dont il est question dans le reste de la présente section.
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Considérations réglementaires : Comme il a été mentionné à la section 6.1 ci-dessus, les marchés pertinents sont assujettis à un vaste cadre de réglementation qui a été pris en compte par le Bureau dans le cadre de son examen. Cette réglementation, qui a entre autres pour but d’atteindre certains objectifs stratégiques tels que la stabilité du système financier, peut avoir pour conséquence d’affecter l’entrée et l’expansion par certains concurrents, notamment :
- en limitant les participants au marché, les intervenants ou les sources de capitaux qui peuvent entrer sur les marchés pertinents et y livrer concurrence,
- en augmentant le temps et les ressources nécessaires pour entrer sur les marchés pertinents, et
- en imposant des coûts liés à la conformité et à la production de rapport ainsi que d’autres coûts, conditions et exigences qui peuvent avoir une plus grande incidence sur les revenus des nouveaux venus ou des concurrents de plus petite taille (ce qui se traduit, par exemple, par de plus grandes économies d’échelle ou de portée). Les concurrents peuvent également faire face à des coûts différents du financement ou à un accès différent à celui-ci, selon leur perception du risque et leur importance systémique, ainsi que les restrictions réglementaires, la désignation ou la surveillance, en plus de leur position globale sur le marché.
Comme il en est question à la section 6.1., par exemple, la Loi sur les banques prévoit certaines restrictions précises en matière de propriété (p. ex., des exigences selon lesquelles les grandes banques doivent être largement détenues par le public). La loi limite également les sources de financement offertes aux succursales de banques étrangères qui exercent leurs activités au Canada, en particulier en limitant leur accès aux dépôts des particuliers. Les nouveaux venus qui souhaitent établir des banques classées en tant que banques figurant à l’annexe I (nationales) ou à l’annexe II (filiales de banques étrangères) en vertu de la Loi sur les banques sont confrontés à des processus d’octroi de licences qui peuvent avoir une incidence sur le caractère opportun et le coût d’entrée. De même, les coopératives de crédit (ou autres institutions financières) sous réglementation provinciale peuvent devoir composer avec des processus réglementaires importants avant d’étendre leurs activités à d’autres provinces.
La plupart des nouveaux venus potentiels doivent obtenir un capital initial suffisant pour respecter les lignes directrices établies par le Bureau du surintendant des institutions financières et s’assurer que les réserves respectent les ratios requis avant d’atteindre la rentabilité et selon les scénarios de simulation de crise. Même pour les concurrents actuels, la réglementation canadienne établit des exigences importantes en matière de réserves de capital, ainsi que divers processus continus de surveillance, de production de rapports et de conformité. Les intervenants ont laissé entendre que les coûts importants associés à la conformité à la réglementation sont proportionnellement plus élevés par rapport aux revenus pour les petits entrants et constituent un facteur important dans la probabilité d’une entrée rentable.
- Obstacles liés à la réputation et présence de la marque : Comme il a été indiqué précédemment, les Canadiens dépendent grandement des services financiers pour effectuer leurs transactions essentielles, et les intervenants et les preuves documentaires ont indiqué que la confiance, la réputation et la notoriété de la marque sont des facteurs importants de la concurrence dans les marchés pertinents. Dans plusieurs des marchés des services financiers personnels et aux entreprises, une réputation de stabilité financière peut être importante pour attirer les clients et les dépôts. Les documents internes ont confirmé les dépenses et les efforts considérables déployés par même les titulaires établis en matière de marketing et d’atténuation du risque lié à la réputation. Le Bureau a conclu que ces considérations ont motivé d’importantes initiatives environnementales, sociales et de gouvernance, des investissements dans l’infrastructure matérielle et des dépenses associées, par exemple, à des initiatives de cybersécurité. Un nouveau venu qui chercherait à concurrencer les principaux titulaires sur les marchés pertinents devrait probablement réaliser des investissements proportionnellement plus importants, car ceux-ci ont acquis une réputation et une valeur de la marque au cours de leurs nombreuses décennies d’activités. Divers éléments de preuve, ainsi que les opinions des intervenants, ont confirmé que les problèmes de réputation peuvent donc constituer un obstacle important pour les nouveaux venus éventuels.
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Exigences en matière de capital et investissements dans les réseaux et la technologie des succursales : Comme il a été mentionné précédemment, le Bureau a pris en compte des éléments de preuve relatifs aux réserves de capital requises des nouveaux venus en vertu des règlements existants, et, de façon plus générale, les intervenants ont indiqué que l’obtention de capitaux suffisants pour permettre la croissance constituait un obstacle important à l’entrée et à l’expansion. Toutefois, le Bureau a également conclu que dans plusieurs des marchés de services financiers pertinents, les concurrents potentiels seraient probablement tenus de financer divers autres investissements irrécupérables avant l’entrée sur le marché, comme l’établissement d’un réseau de succursales suffisant et la mise au point de solutions technologiques appropriées.
Comme il en est question à la section 7.1.1, les éléments de preuve examinés par le Bureau permettent de conclure à l’importance concurrentielle globale des réseaux locaux de succursales malgré le rôle croissant des solutions numériques. Les documents stratégiques laissent entendre que les réseaux de succursales sont importants pour renforcer la notoriété globale de la marque d’une banque, et les renseignements donnent à penser que les concurrents qui n’ont pas de succursales locales ont obtenu des parts limitées dans de nombreux marchés pertinents. Le Bureau a conclu que l’établissement d’un réseau de succursales comparable à celui des entreprises titulaires entraînerait vraisemblablement des dépenses très importantes et des années de développement. De même, le Bureau a constaté que de nombreux nouveaux venus auraient besoin de réaliser des investissements importants dans l’infrastructure numérique afin de livrer une concurrence efficace sur les marchés pertinents. Cela est particulièrement vrai compte tenu de la sensibilité des renseignements recueillis par les institutions financières, des exigences réglementaires connexes et des risques liés à la réputation et à la sécurité auxquels sont confrontés les nouveaux venus. Les nouveaux venus peuvent également être obligés de consacrer des ressources aux fonctions déjà offertes par les titulaires, comme les systèmes de paiement et les applications mobiles.
Au vu de l’ensemble des éléments de preuve, le Bureau a donc conclu que les obstacles à l’entrée dans plusieurs des marchés pertinents sont généralement élevés. Les facteurs d’entrée décrits ci-dessus, ainsi que d’autres caractéristiques des marchés pertinents, peuvent entraîner des économies d’échelle et de portée importantes, de sorte que les concurrents plus petits ou potentiels doivent souvent composer avec des coûts de financement et d’investissement plus élevés et ont moins d’occasions de diversifier le risque que les titulaires plus grands et plus efficaces. Toutefois, le Bureau a trouvé des renseignements indiquant que les obstacles à l’entrée peuvent être plus faibles pour les services de marchés de capitaux, de gestion de patrimoine et de consultation, ou d’autres services distincts des opérations de dépôt et de prêt. Le Bureau a également constaté que les obstacles à l’expansion des concurrents existants sur les marchés pertinents étaient moins importants et que, par exemple, des titulaires comme les cinq plus grandes banques canadiennes pourraient avoir des réserves de capital suffisantes pour leur capacité.
Le Bureau a également procédé à une évaluation de tous les concurrents potentiels prêts à offrir les services financiers personnels et aux entreprises pertinents, et il a tenu compte des événements d’entrée antérieurs dans les marchés pertinents. Le Bureau a conclu que, compte tenu des considérations décrites ci-dessus, les concurrents qui entrent sur les marchés pertinents n’ont souvent offert qu’une concurrence marginale ou ont établi des partenariats avec les banques comme solution de rechange pour surmonter les obstacles à l’entrée. Dans la plupart de ces cas, les nouveaux arrivants avaient donc offert une contrainte concurrentielle limitée. En fin de compte, toutefois, il n’était pas nécessaire que le Bureau détermine de façon concluante si l’entrée ou l’expansion était susceptible de restreindre l’exercice d’un pouvoir de marché dans chacun des marchés pertinents, compte tenu des constatations qu’il a décrites ailleurs dans le présent rapport.
7.5 Effets coordonnés
En plus d’évaluer la probabilité d’un exercice unilatéral de pouvoir de marché à la suite de la fusion, le Bureau a également examiné si la transaction envisagée aurait vraisemblablement pour effet d’empêcher ou de diminuer sensiblement la concurrence en facilitant un comportement coordonné entre les entreprises. Les analyses antérieures du Bureau sur le secteur bancaire ont révélé que des facteurs susceptibles de faciliter un comportement interdépendant semblaient, dans une large mesure, être présents dans l’industrieNote de bas de page 14.
Lorsqu’il évalue si une fusion soulève des préoccupations en matière de concurrence liées aux effets coordonnés, le Bureau s’intéresse non seulement à l’évaluation de ces facteurs facilitants, mais cherche aussi à savoir si la fusion a une incidence sur eux d’une manière qui rend plus probable la coordination, ou une coordination plus efficace. Pour mener cette évaluation, le Bureau a examiné divers éléments de preuve, y compris la structure du marché des produits pertinents et les documents stratégiques internes relatifs à l’établissement des prix, des taux d’intérêt, des conditions ainsi que d’autres dimensions de la concurrence. Le Bureau a examiné des éléments de preuve relatifs à tous les produits et services touchés par la fusion, mais son analyse s’est particulièrement concentrée sur les comptes d’épargne à intérêt élevé, les produits d’épargne comme les CPG et les offres hypothécaires des parties.
À titre préliminaire, le Bureau a noté que certains marchés pertinents sont très concentrés, comme il en est question ailleurs dans le présent rapport. Les données laissent entendre que le ratio de concentration de quatre entreprises (ou « CR4 ») pour bon nombre des produits qui se chevauchent peut dépasser 65 % dans divers marchés canadiens, et que les six plus grandes banques peuvent représenter jusqu’à 90 % des comptes d’opérations personnels au pays. La concentration du marché est généralement une condition nécessaire, mais non suffisante, pour qu’une fusion soulève des préoccupations au sujet des effets coordonnés. Le Bureau a également constaté, comme il en a été question à la section 7.4 ci-dessus, que les obstacles à l’entrée dans plusieurs des marchés pertinents sont élevés, de sorte qu’une entrée efficace n’est pas nécessairement susceptible de rendre un comportement coordonné non viable.
Un comportement coordonné ne sera vraisemblablement viable que si :
- les entreprises sont en mesure de reconnaître individuellement les conditions mutuellement avantageuses de la coordination;
- les entreprises sont en mesure de surveiller mutuellement leur comportement et de détecter les écarts par rapport aux modalités de la coordination;
- les entreprises sont en mesure de réagir à tout écart par l’intermédiaire de mécanismes de dissuasion crédibles;
- la coordination ne sera pas menacée par des facteurs externes.
Le Bureau a évalué ces facteurs dans le cadre de l’examen de documents internes, particulièrement en ce qui concerne les stratégies d’établissement des prix des parties, ainsi que d’autres éléments de preuve.
Le Bureau a trouvé des éléments de preuve qui donnaient fortement à penser que les concurrents dans certains marchés pertinents étaient en mesure de reconnaître séparément les conditions de coordination mutuellement avantageuses. L’examen du Bureau a porté, en partie, sur des documents qui exposaient les stratégies des parties en matière d’établissement des prix au moment de l’évolution des taux d’intérêt directeurs, comme le taux au jour le jour de la Banque du Canada. Les changements dans ce taux, ainsi que dans d’autres indicateurs comme les taux de swap ou les rendements obligataires, entraînent une transparence et une symétrie importantes entre les concurrents en ce qui concerne le coût du financement. Il est généralement plus facile de reconnaître les modalités de coordination lorsque les produits sont moins différenciés et lorsque les entreprises ont des structures tarifaires semblables. Les preuves documentaires ont confirmé que, au moment des changements de taux et à d’autres points de décision concurrentiels, certaines institutions financières ont reconnu les modalités possibles de coordination et ont directement tenu compte des signaux que les changements de prix des hypothèques, des comptes d’épargne et d’autres produits fourniraient aux concurrents lorsqu’ils fixeraient leurs propres taux.
Le Bureau a également évalué le degré de transparence qui existe dans les marchés pertinents afin de déterminer si les entreprises peuvent surveiller et détecter les écarts par rapport au comportement coordonné. Bien que certains produits, comme les prêts hypothécaires, soient caractérisés par une négociation des taux qui peut être moins qu’entièrement transparente, le Bureau a constaté que les banques surveillaient de près et efficacement les prix des autres et se demandaient à l’interne si les changements de taux représentaient un écart par rapport aux tendances prévues en matière de prix. Le Bureau a également constaté que la demande et les coûts sous-jacents des entreprises étaient généralement prévisibles et bien étudiés, ce qui peut également permettre aux entreprises de déterminer plus efficacement si le changement de taux d’un concurrent représente un écart de prix prévu.
Des preuves documentaires ont également permis de conclure que les entreprises considéraient des changements temporaires et intentionnels dans leurs propres pratiques d’établissement des prix, y compris des offres de tarifs spécialement ciblées inférieures à leurs taux affichés, comme une punition crédible en réaction à des prix imprévus de la part de concurrents. La majorité des grandes institutions bancaires du Canada se livrent une concurrence dans un nombre important de marchés locaux et pour un vaste éventail de produits et de services, ce qui se traduit par un degré élevé de présence sur plusieurs marchés parmi les entreprises. Cela offre généralement plus de possibilités de décourager les écarts par rapport à un comportement coordonné, parce qu’il y a une plus grande marge de manœuvre pour punir de tels écarts.
À la suite de cet examen, le Bureau a donc déterminé qu’il existait des preuves selon lesquelles les conditions dans certains marchés pertinents facilitent généralement un comportement coordonné. En fin de compte, toutefois, l’évaluation de la transaction envisagée par le Bureau a porté sur l’effet de la fusion elle-même sur la probabilité ou l’efficacité d’une coordination potentielle. À cet égard, le Bureau s’est concentré sur la question de savoir si la présence de HSBC Canada en tant que concurrent indépendant constituait une contrainte importante à une coordination efficace ou si d’autres contraintes de ce genre pouvaient être touchées par la fusion. Cette analyse exige souvent de déterminer si une partie à la fusion est un concurrent particulièrement dynamique et efficace (une « franc-tireur ») qui joue un rôle perturbateur dans les cas où la coordination pourrait autrement se produire.
À la lumière de son examen approfondi des documents stratégiques internes et d’autres renseignements, le Bureau n’a pas trouvé de preuve que HSBC Canada avait représenté une telle contrainte. Comme il est mentionné ailleurs dans le présent rapport, même si HSBC Canada offre des prix et des services attrayants dans plusieurs catégories de produits, son incidence concurrentielle globale est limitée par rapport aux autres grandes institutions financières du Canada. Cette dynamique se reflète dans les documents stratégiques des concurrents, qui ont démontré, par exemple, que HSBC Canada n’était généralement pas prise en compte lors de la détermination des réactions aux prix, de l’évaluation des signaux que les changements de prix peuvent fournir au marché ou de l’anticipation des changements de prix futurs des concurrents (p. ex., en réponse à des changements dans les taux de référence ou d’autres coûts). L’examen du Bureau n’a pas révélé de cas de comportements concurrentiels perturbateurs, ou particulièrement vigoureux, de la part de HSBC Canada qui ont eu une incidence sur le potentiel d’un comportement coordonné. En fin de compte, le Bureau n’a pas conclu que la transaction envisagée aurait vraisemblablement une incidence sur la probabilité ou l’efficacité d’une coordination potentielle dans les marchés pertinents, que ce soit par la disparition d’un concurrent qui est un franc-tireur ou par d’autres moyens.
Par conséquent, le Bureau a conclu que la transaction envisagée n’aurait vraisemblablement pas pour effet d’empêcher ou de diminuer sensiblement la concurrence en ce qui concerne le comportement coordonné entre concurrents. Toutefois, les éléments de preuve disponibles confirment que les conditions dans certains marchés pertinents facilitent généralement le comportement coordonné entre les entreprises.
8. Conclusions sur le risque d’empêcher ou de diminuer sensiblement la concurrence
Le commissaire de la concurrence a procédé à une évaluation de l’acquisition proposée de HSBC Canada par RBC en appliquant le critère énoncé à l’article 92 de la Loi sur la concurrence. À la lumière de l’analyse exposée ci-dessus, le commissaire a conclu que la transaction envisagée n’aura vraisemblablement pas pour effet d’empêcher ou de diminuer sensiblement la concurrence en vertu de l’article 92 de la Loi sur la concurrence.
Néanmoins, le Bureau a conclu que la transaction envisagée entraînerait la perte de rivalité entre RBC et HSBC Canada. Dans son évaluation des marchés pertinents, le Bureau a aussi fait les constats suivants :
- les marchés des services financiers pertinents demeurent concentrés, les cinq plus grandes banques du Canada représentant la grande majorité des services fournis aux Canadiens;
- les obstacles à l’entrée et à l’expansion sur plusieurs des marchés des services financiers pertinents sont élevés;
- les conditions dans certains marchés des services financiers pertinents peuvent faciliter un comportement coordonné.
Ce rapport est fourni pour décrire les résultats de l’examen du commissaire à la suite de l’évaluation continue par la ministre de la transaction envisagée en vertu de l’article 373 de la Loi sur les banques. Le Bureau a tenté d’expliquer en détail les fondements de ses conclusions dans ce qui précède, tout en tenant compte des dispositions sur la confidentialité de la Loi sur la concurrence et du mandat du commissaire en vertu de cette loi.
Annexe A : Dispositions pertinentes de la Loi sur la concurrence
Loi sur la concurrence (L.R.C. (1985), ch. C-34)
Ordonnance en cas de diminution de la concurrence
92 (1) Dans les cas où, à la suite d’une demande du commissaire, le Tribunal conclut qu’un fusionnement réalisé ou proposé empêche ou diminue sensiblement la concurrence, ou aura vraisemblablement cet effet :
- dans un commerce, une industrie ou une profession;
- entre les sources d’approvisionnement auprès desquelles un commerce, une industrie ou une profession se procure un produit;
- entre les débouchés par l’intermédiaire desquels un commerce, une industrie ou une profession écoule un produit;
- autrement que selon ce qui est prévu aux alinéas a) à c),
le Tribunal peut, sous réserve des articles 94 à 96;
- dans le cas d’un fusionnement réalisé, rendre une ordonnance enjoignant à toute personne, que celle-ci soit partie au fusionnement ou non :
- de le dissoudre, conformément à ses directives,
- de se départir, selon les modalités qu’il indique, des éléments d’actif et des actions qu’il indique,
- en sus ou au lieu des mesures prévues au sous-alinéa (i) ou (ii), de prendre toute autre mesure, à condition que la personne contre qui l’ordonnance est rendue et le commissaire souscrivent à cette mesure;
- dans le cas d’un fusionnement proposé, rendre, contre toute personne, que celle-ci soit partie au fusionnement proposé ou non, une ordonnance enjoignant :
- à la personne contre laquelle l’ordonnance est rendue de ne pas procéder au fusionnement,
- à la personne contre laquelle l’ordonnance est rendue de ne pas procéder à une partie du fusionnement,
- en sus ou au lieu de l’ordonnance prévue au sous-alinéa (ii), cumulativement ou non :
- à la personne qui fait l’objet de l’ordonnance, de s’abstenir, si le fusionnement était éventuellement complété en tout ou en partie, de faire quoi que ce soit dont l’interdiction est, selon ce que conclut le Tribunal, nécessaire pour que le fusionnement, même partiel, n’empêche ni ne diminue sensiblement la concurrence,
- à la personne qui fait l’objet de l’ordonnance de prendre toute autre mesure à condition que le commissaire et cette personne y souscrivent.
Preuve
(2) Pour l’application du présent article, le Tribunal ne conclut pas qu’un fusionnement, réalisé ou proposé, empêche ou diminue sensiblement la concurrence, ou qu’il aura vraisemblablement cet effet, en raison seulement de la concentration ou de la part du marché.
Éléments à considérer
Lorsqu’il détermine, pour l’application de l’article 92, si un fusionnement, réalisé ou proposé, empêche ou diminue sensiblement la concurrence, ou s’il aura vraisemblablement cet effet, le Tribunal peut tenir compte des facteurs suivants :
- la mesure dans laquelle des produits ou des concurrents étrangers assurent ou assureront vraisemblablement une concurrence réelle aux entreprises des parties au fusionnement réalisé ou proposé;
- la déconfiture, ou la déconfiture vraisemblable de l’entreprise ou d’une partie de l’entreprise d’une partie au fusionnement réalisé ou proposé;
- la mesure dans laquelle sont ou seront vraisemblablement disponibles des produits pouvant servir de substituts acceptables à ceux fournis par les parties au fusionnement réalisé ou proposé;
- les entraves à l’accès à un marché, notamment :
- les barrières tarifaires et non tarifaires au commerce international,
- les barrières interprovinciales au commerce,
- la réglementation de cet accès, et tous les effets du fusionnement, réalisé ou proposé, sur ces entraves;
- la mesure dans laquelle il y a ou il y aurait encore de la concurrence réelle dans un marché qui est ou serait touché par le fusionnement réalisé ou proposé;
- la possibilité que le fusionnement réalisé ou proposé entraîne ou puisse entraîner la disparition d’un concurrent dynamique et efficace;
- la nature et la portée des changements et des innovations sur un marché pertinent;
- (g.1) les effets de réseau dans le marché;
- (g.2) le fait que le fusionnement réalisé ou proposé contribuerait au renforcement de la position sur le marché des principales entreprises en place;
- (g.3) tout effet du fusionnement réalisé ou proposé sur la concurrence hors prix ou par les prix, notamment la qualité, le choix ou la vie privée des consommateurs;
- tout autre facteur pertinent à la concurrence dans un marché qui est ou serait touché par le fusionnement réalisé ou proposé.
Exception
Le Tribunal ne rend pas une ordonnance en vertu de l’article 92 à l’égard :
- d’un fusionnement en substance réalisé avant l’entrée en vigueur du présent article;
- d’une fusion réalisée ou proposée aux termes de la Loi sur les banques, de la Loi sur les associations coopératives de crédit, de la Loi sur les sociétés d’assurances ou de la Loi sur les sociétés de fiducie et de prêt, et à propos de laquelle le ministre des Finances certifie au commissaire le nom des parties et certifie que cette fusion est dans l’intérêt public ou qu’elle le serait compte tenu des conditions qui pourraient être imposées dans le cadre de ces lois;
- d’une fusion – réalisée ou proposée – agréée en vertu du paragraphe 53.2(7) de la Loi sur les transports au Canada et à l’égard de laquelle le ministre des Transports certifie au commissaire le nom des parties;
- d’une fusion – réalisée ou proposée – constituant une entente, au sens de l’article 53.7 de la Loi sur les transports au Canada, autorisée par le ministre des Transports en application du paragraphe 53.73(8) de cette loi, dans la mesure où l’autorisation n’a pas été révoquée.
Exception dans les cas de gains en efficience
96 (1) Le Tribunal ne rend pas l’ordonnance prévue à l’article 92 dans les cas où il conclut que le fusionnement, réalisé ou proposé, qui fait l’objet de la demande a eu pour effet ou aura vraisemblablement pour effet d’entraîner des gains en efficience, que ces gains surpasseront et neutraliseront les effets de l’empêchement ou de la diminution de la concurrence qui résulteront ou résulteront vraisemblablement du fusionnement réalisé ou proposé et que ces gains ne seraient vraisemblablement pas réalisés si l’ordonnance était rendue.
Facteurs pris en considération
(2) Dans l’étude de la question de savoir si un fusionnement, réalisé ou proposé, entraînera vraisemblablement les gains en efficience visés au paragraphe (1), le Tribunal évalue si ces gains se traduiront :
- soit en une augmentation relativement importante de la valeur réelle des exportations;
- soit en une substitution relativement importante de produits nationaux à des produits étrangers.
Restriction
(3) Pour l’application du présent article, le Tribunal ne conclut pas, en raison seulement d’une redistribution de revenu entre plusieurs personnes, qu’un fusionnement réalisé ou proposé a entraîné ou entraînera vraisemblablement des gains en efficience.