Sommet sur l'application numérique de la loi 2020 - Faits marquants

Un message du commissaire

Dans la vision stratégique du Bureau de la concurrence pour 2020-2024, je me suis fixé comme priorité de favoriser le dialogue ouvert et la collaboration avec les parties prenantes internationales et nationales, en particulier en ce qui concerne l'application de la loi en matière de concurrence à l'ère numérique.

Matthew Boswell

Pour atteindre cet objectif, le Bureau a organisé son premier sommet annuel sur l'application numérique de la loi – une occasion pour le Bureau et ses partenaires d'application de la loi de faire part de leurs pratiques exemplaires, d'explorer de nouveaux outils et de nouvelles solutions, et de se pencher sur des enjeux émergents – et j'ai le plaisir de présenter les faits marquants et les leçons tirées de cet événement inaugural.

Tout au long d'octobre et de novembre 2020, nous avons suivi les étapes d'une enquête, de la détection à la résolution, en participant à quatre séances de discussion entre experts en ligne :

  • Notre première séance a porté sur le rôle du renseignement numérique à l'étape de la préenquête et les avancées sur le plan des éléments de preuve, notamment la collecte et le traitement.
  • Notre deuxième séance s'est penchée sur la manière dont les organismes d'application de la loi en matière de concurrence s'adaptent aux enquêtes numériques.
  • Notre troisième séance a exploré l'essor des nouvelles solutions et des nouveaux outils technologiques pour soutenir l'application de la loi à l'ère numérique.
  • Notre dernière séance s'est attardée sur les défis auxquels les organismes sont confrontés compte tenu du rythme rapide des changements dans l'économie numérique et le fardeau changeant de la preuve devant les tribunaux.

Je remercie chaleureusement tous nos invités et participants dont la participation a grandement contribué au succès du sommet. Au cours de nos quatre séances en ligne, nous avons eu une combinaison de 752 participants des quatre coins du monde. Les discussions nous ont permis de faire avancer le dialogue sur les enjeux émergents dans l'économie numérique. J'ai hâte de poursuivre notre collaboration dans les années à venir.

Matthew Boswell
Commissaire de la concurrence

 

Faits marquants des séances

Séance 1 – Développements dans le renseignement, la détection et les éléments de preuve

La première séance du sommet sur l'application numérique de la loi a permis d'étudier deux sujets : le rôle du renseignement numérique à l'étape de la préenquête et les avancées sur le plan des éléments de preuve, notamment la collecte et le traitement.

La première étape de toute enquête est la détection d'activités potentiellement anticoncurrentielles et la collecte des éléments de preuve nécessaires. Les prises de décisions des entreprises devenant toujours plus complexes, automatisées et opaques sur les plateformes numériques, la détection devient un processus de plus en plus axé sur les données. Pour y faire face, les organismes doivent continuellement faire évoluer la façon dont ils mettent à profit les données en tant que renseignement et élément de preuve.

Les participants ont discuté de l'évolution rapide du marché, mettant à l'épreuve la capacité des organismes d'application de la loi à détecter les activités anticoncurrentielles qui peuvent se dérouler sur une courte période seulement avant qu'elles ne s'adaptent à de nouvelles conditions du marché. Cette réalité souligne l'importance des outils de détection numériques, comme les outils de dépistage des truquages d'offres et les plus récentes applications de collecte de données, afin d'appuyer la détection proactive.

Il est essentiel de pouvoir compter sur des équipes multidisciplinaires bien formées qui veilleront à ce que les technologies novatrices soient utilisées efficacement en vue d'analyser ces jeux de données de plus en plus complexes. Pour réunir de telles équipes, les organismes sortent de leur modèle d'embauche classique.

Dans le cadre de cette séance, les participants ont désigné l'infonuagique, le traitement du langage naturel et les plus récentes mises à jour des lois sur la concurrence comme les avancées les plus déterminantes des cinq dernières années pour les organismes d'application de la loi. L'infonuagique permet à certains organismes de traiter d'importants jeux de données plus rapidement et d'améliorer l'analyse et l'examen des éléments de preuve. Le traitement du langage naturel, qui est en fait une toute nouvelle technologie d'intelligence artificielle, permet aux organismes d'analyser des volumes de plus en plus grands d'éléments de preuve numériques et de comprendre les renseignements contextuels en temps réel. Quant aux plus récentes mises à jour des lois sur la concurrence, elles aident les organismes de la concurrence à remédier aux nouveaux comportements complexes constatés au sein de l'économie numérique et à en faire le suivi.

Dans l'avenir, les participants s'attendent à des progrès de la réglementation dans le domaine numérique, qui permettront de s'attarder davantage aux pouvoirs de collecte des renseignements, au traitement automatique des données et à l'analyse des algorithmes. À mesure que les géants numériques grandissent et recueillent encore plus de données, il est essentiel que les organismes gouvernementaux suivent le rythme. Cela dit, les organismes de la concurrence doivent tout de même opter pour des investissements stratégiques à long terme plutôt que pour l'achat des outils les plus récents et performants sur le marché.

Séance 2 – L'avenir des enquêtes

La discussion au cours de la deuxième séance a été axée sur le recrutement et la formation, les outils numériques et la technologie, ainsi que sur les approches à l'égard de la gestion des affaires.

Les organismes cherchent à renforcer les connaissances, l'expertise et les compétences de leur personnel en vue de répondre à la demande en fait d'application de la loi au sein de l'économie numérique. Les participants ont relevé un besoin croissant de pouvoir compter sur des employés qui comprennent les nouvelles technologies et les nouveaux outils, ainsi que la façon de les appliquer à des jeux de données complexes. C'est pour cette raison que les organismes procèdent à la création de nouveaux postes et embauchent des employés de professions autres que celles retrouvées actuellement en leur sein. En effet, les organismes de la concurrence cherchent des professionnels autres que des économistes et des avocats et se tournent vers des experts en science des données, des spécialistes du comportement et des analystes du renseignement et de la TI pour venir grossir leurs rangs.

Les organismes regardent également au sein de leurs équipes afin de tirer parti des talents déjà en place et de former des équipes spécialisées qui travailleront en étroite collaboration avec les enquêteurs. La séance a aussi permis de discuter de l'idée d'avoir recours à des équipes spécialisées pour aider les enquêteurs à mieux comprendre la conception et les modèles commerciaux des marchés numériques, de même que pour les aider à concevoir des solutions pour des activités anticoncurrentielles.

La nature complexe des affaires récentes de concurrence pousse en outre ces organismes à adapter et à renouveler continuellement la façon dont ils mènent leurs enquêtes et gèrent leurs affaires. Alors que les participants de l'économie numérique deviennent de plus en plus sophistiqués, une affaire moyenne oblige les organismes à traiter des quantités de plus en plus grandes de données. Du codage prédictif à l'identification automatique des activités anticoncurrentielles, les organismes cherchent à équiper leurs équipes des outils dont elles ont besoin pour mener leurs enquêtes. Les participants ont également discuté de la manière dont ils adaptent leurs techniques de gestion des affaires pour mettre à contribution ces outils. Par exemple, certains organismes ont investi des ressources dans la détection précoce afin de pouvoir intervenir de façon proactive avant qu'un marché soit touché. Bien que tous les organismes ne disposent pas des mêmes pouvoirs officiels, certains ont veillé à approfondir leur connaissance des marchés numériques grâce à des techniques de collecte de renseignements, notamment des études de marché.

Lorsqu'ils envisagent l'avenir, les participants s'entendent sur le fait qu'il y a un besoin croissant en fait d'analyses économiques sophistiquées, de renseignements stratégiques et d'une meilleure compréhension des comportements sous-jacents dans les marchés. Afin d'assurer l'efficacité des enquêtes transfrontalières, les participants ont répété qu'une collaboration accrue entre les organismes de la concurrence était essentielle, afin de permettre la mise en commun de pratiques exemplaires, d'outils et de techniques.

Séance 3 – Outils d'application de la loi à l'ère numérique

La discussion de la troisième séance a porté sur la manière dont les organismes d'application de la loi répondent aux défis de l'économie numérique, notamment les stratégies et les outils novateurs comme le codage prédictif, l'intelligence artificielle et la gestion des données.

Les participants ont discuté de l'effet potentiellement transformateur de ces nouveaux outils et de ces nouvelles technologies pour la collecte et l'analyse efficaces et efficientes de grandes quantités d'éléments de preuve d'une manière qui améliore le contrôle de la qualité et la validation de l'examen des documents. Les participants ont également discuté d'à quel point la formation et le recrutement sont essentiels à l'acquisition des compétences et à l'approfondissement des connaissances des nouveaux outils et des nouvelles technologies au sein des organismes.

L'analyse des données, le filtrage et le renseignement de sources ouvertes comptaient parmi les outils numériques abordés. Ces outils permettent aux organismes de cibler des secteurs stratégiques à des fins d'analyse en utilisant des algorithmes pour détecter les comportements suspects et recueillir des informations à partir de sources moins traditionnelles, comme les médias sociaux.

Les participants ont convenu que, malgré la transformation numérique, les fondements du travail des organismes de réglementation de la concurrence resteront inchangés à l'avenir. Bien que les technologies offrent de nouvelles possibilités, les participants ont fait part de leurs préoccupations en matière de communication pour les enquêteurs. Par exemple, l'utilisation par des plateformes de données cryptées s'effaçant d'elles-mêmes complique la collecte d'éléments de preuve qui éclairent les enquêtes. La quantité croissante d'éléments de preuve a des conséquences sur les ressources, les délais d'enquête et les divulgations. L'évolution de l'économie numérique motivera les organismes à suivre le rythme en augmentant leur capacité et en cherchant un équilibre entre les méthodes traditionnelles et les stratégies novatrices.

Séance 4 – Nouvelles stratégies relatives aux litiges et à la résolution d'une affaire

La discussion finale s'est concentrée sur le rythme de l'évolution de la technologie, les questions liées aux éléments de preuve et aux autres instruments de règlement des cas, parmi d'autres sujets axés sur l'application de la loi.

Les participants ont réfléchi au rythme rapide de la technologie et des marchés. Certains ont signalé que les outils d'application de la loi antitrust existants, des interventions qui prennent souvent des années à mettre en œuvre, ne sont pas adaptés aux marchés numériques. Pendant que l'on réalise une enquête, les grandes plateformes peuvent acquérir un pouvoir de marché substantiel et bien établi. Malgré cela, les participants ont maintenu une perspective positive, en soulignant la façon dont les agences ont développé leur capacité numérique par l'entremise d'unités numériques, de l'embauche de personnel ayant de nouvelles compétences, comme les scientifiques des données, et de l'exploitation de technologies telles que l'intelligence artificielle. Ils ont convenu que la coopération internationale complète ces nouvelles technologies et ces nouveaux outils, permettant aux responsables de l'application de la loi de tirer des leçons des expériences précédentes et d'échanger des pratiques exemplaires.

Les participants ont discuté de la manière dont les tribunaux spécialisés et les fonctions juridictionnelles se sont adaptés à la numérisation. Les tribunaux évoluent rapidement, permettant la tenue d'audiences électroniques et la possibilité d'obliger la divulgation électronique des éléments de preuve. Les participants ont également discuté de la manière dont les consentements peuvent être un moyen efficace de parvenir à des règlements et de corriger des comportements. De plus, certains organismes dotés de pouvoirs en matière d'études de marché ont souligné que ces pouvoirs leur permettaient de mener des enquêtes sur les plateformes numériques, ce qui permet d'intervenir massivement sur des marchés importants. Les participants ont conclu que les organismes et les entreprises continueraient de s'adapter à la numérisation en tirant parti de tous les outils et technologies à leur disposition.