L’Association canadienne des professionnels de l’insolvabilité et de la réorganisation (ACPIR) a tenu son assemblée générale annuelle (AGA) le 15 septembre 2022. Cette année encore, l’événement s’est déroulé virtuellement. Avant de commencer l’assemblée, Elisabeth Lang, surintendante des faillites, a fait le point sur les priorités du Plan d’activités 2021-2022 du Bureau du surintendant des faillites (BSF). Elle a aussi présenté certaines statistiques sur l’insolvabilité et quelques questions juridiques importantes.
Vous trouverez ci-dessous un résumé de la présentation de la surintendante et de la séance de questions et réponses qui a suivi avec les syndics autorisés en insolvabilité (SAI).
Résumé
Dans son allocution d’ouverture, Mme Lang a fait état des consultations avec les intervenants qui ont eu lieu en 2021 au sujet de l’examen des instructions et des règlements en vertu de la Loi sur la faillite et l’insolvabilité (LFI) et de la Loi sur les arrangements avec les créanciers des compagnies (LACC). Elle a profité de l’occasion pour remercier les SAI qui ont fourni des commentaires lors de cette consultation, en soulignant que le BSF a procédé à l’analyse de ceux-ci et élabore actuellement un plan de mise en œuvre divisé en étapes. Elle a informé les SAI qu’une consultation sur les formulaires clés allait bientôt être lancée. Elle a également mentionné que le BSF cherche à modifier les règlements en vertu de la LFI et de la LACC au moyen d’un long processus officiel qui rend nécessaire l’approbation du Conseil du Trésor.
Mme Lang a souligné la publication du nouveau Questionnaire sur la dette sur le portail de solutions à l’endettement du BSF qui a eu lieu plus tôt cette année, ajoutant que cet outil permettra aux gens de savoir ce que d’autres Canadiens et Canadiennes en situation financière comparable à la leur ont fait pour régler leurs dettes.
La surintendante a insisté sur le fait que le renforcement de l’intégrité du cadre de conformité du BSF constitue une priorité pour le BSF depuis quelques années et que plusieurs projets ont été achevés ou ont progressé en 2021-2022. Un de ces projets est la création de la nouvelle direction générale Intégrité et Enquêtes qui centralise l’expertise du BSF pour traiter des dossiers graves. Cette nouvelle direction générale est chargée de superviser le traitement des dossiers d’insolvabilité plus complexes déposés en vertu de la LACC et de la LFI , les enquêtes sur la conduite professionnelle et les mesures conservatoires. Elle réunit également les unités d’enquêtes spéciales du BSF afin d’accroître la capacité du BSF et de se concentrer sur l’application des dispositions relatives aux infractions criminelles dans le cadre du système d’insolvabilité.
La surintendante Lang était également fière d’annoncer que le BSF a mis en œuvre un nouveau programme de conformité des débiteurs avec un système de gestion des cas remanié, qui tire parti de l’intelligence artificielle pour détecter plus efficacement les cas de non-conformité des débiteurs exigeant plus de mesures d’application de la loi. Le BSF exploite également l’intelligence artificielle dans le développement d’un modèle d’évaluation des risques associés aux SAI . La surintendante a précisé que le BSF a publié un cadre de promotion de la conformité dans le but de renforcer le programme de conformité en encourageant la conformité volontaire. Le cadre prévoit de mettre davantage l’accent sur les droits et les responsabilités des intervenants dans le système d’insolvabilité, de clarifier la position du BSF et son interprétation du cadre réglementaire et d’amplifier les conséquences de la non-conformité.
La surintendante a mentionné que le BSF continue de se pencher sur les questions relatives au marché des services-conseils en redressement financier, notamment en s’engageant auprès de ses partenaires pour combler les lacunes législatives qui y existent actuellement dans et à les encourager à traiter les cas d’information fausse ou trompeuse.
La surintendante a ajouté que le BSF poursuit son travail de modernisation des technologies de l’information, qui comprend des mises à jour importantes des systèmes d’administration des dossiers et de dépôt électronique, et qu’il continue d’investir dans la formation opérationnelle.
Mme Lang a indiqué que le BSF a examiné son programme d’octroi de licences avec des partenaires, en tenant compte de l’évolution des modèles d’affaires des SAI ainsi que des préférences des débiteurs et des créanciers en matière de services d’insolvabilité afin d’évaluer l’incidence des récentes innovations technologiques et opérationnelles. Bien que la pandémie de COVID-19 a permis de mettre à l’essai la prestation de services à distance – laquelle s’est avérée très efficace – la majorité des SAI n’était pas favorable à des changements importants dans le programme d’octroi de licences ou dans les exigences relatives aux bureaux physiques. Le BSF maintiendra donc le statu quo pour le moment. À la suite de l’examen du programme d’octroi de licences, le BSF a mis sur pied un projet pilote pour permettre aux candidats et candidates qui se présentent pour un examen oral devant jury de choisir l’option d’une licence limitée aux procédures d’insolvabilité de consommateurs ou aux procédures d’insolvabilité d’entreprises, ou une licence qui couvre les deux options. Le projet pilote vise à soutenir la diversité et l’inclusion dans la profession des SAI tout en maintenant des normes élevées de formation et de connaissances pour les questions d’insolvabilité de consommateurs et d’entreprises.
La surintendante a également mentionné qu’en 2021-2022, un comité composé d’organismes de réglementation économique fédéraux a été créé pour échanger de l’information sur les tendances et les défis en matière de finances, les premières réunions étant axées sur l’application de procédures pénales. Elle a souligné que le BSF continue d’organiser régulièrement une conférence à l’intention des registraires, ce qui donne l’occasion à ces derniers de discuter de sujets d’intérêt national liés à l’insolvabilité et de pratiques exemplaires.
Le fait que l’ ACPIR et le BSF continuent de travailler ensemble est mis en évidence par leur collaboration en vue d’accroître la diversité dans la profession des SAI . La surintendante a évoqué la Déclaration commune du BSF et de l’ ACPIR concernant la représentativité dans la profession de SAI et le Guide du BSF et de l’ ACPIR pour promouvoir la diversité et l’inclusion qui ont été publiés récemment.
La surintendante a présenté des statistiques de 2021-2022, dont 92 330 dépôts de dossiers d’insolvabilité au titre de la LFI et 18 dépôts au titre de la LACC ; 35 nouvelles licences délivrées et 1 197 licences renouvelées; 146 visites à distance de bureaux de SAI ; 558 interrogatoires de débiteurs et 220 interventions auprès des tribunaux pour remédier au comportement non conforme de débiteurs.
La surintendante a ensuite présenté des statistiques sur les volumes de dépôts de dossiers d’insolvabilité; le dividende médian versé aux créanciers et le taux de recouvrement médian des dossiers d’insolvabilité des consommateurs et des entreprises, qu’il s’agisse de faillites ou de propositions; les entrées et sorties d’entreprises par rapport aux taux d’insolvabilité des entreprises; les trois principaux secteurs pour les dépôts sous le régime de la LACC entre 2010 et 2021 ainsi qu’une comparaison des volumes de dépôts de dossiers d’insolvabilité au Canada, au Royaume-Uni, aux États-Unis et en Australie.
La surintendante a abordé quelques développements notables. Le Projet de loi n º 96 au Québec, Loi sur la langue officielle et commune du Québec, le français, qui a reçu la sanction royale le , a suscité certaines inquiétudes quant à l’accès à la justice compte tenu de l’exigence de traduire les plaidoiries anglaises en français. La surintendante a souligné l’affaire Mitchell c. Procureur général du Québec, 2022 QCCS 2983 qui a suspendu temporairement l’application des articles 9 et 208.6 de la Loi jusqu’à la tenue d’une audience sur le fond.
Mme Lang a mentionné que la question de savoir ce qu’il faut faire dans le cas d’une faillite suivie du dépôt d’une demande de protection au titre de la LACC a été soulevée devant Madame la Juge Fitzpatrick dans l’affaire Encore Fx inc. (EncoreFX Inc. (Re), 2021 BCSC 750 (CanLII). Elle a fait part de sa position selon laquelle la transition d’une société débitrice en faillite vers une procédure au titre de la LACC devrait avoir les mêmes répercussions que la transition vers une proposition au titre du paragraphe 61 (1) de la Section I de la LFI , de sorte que la faillite devrait être annulée ab initio, simultanément au plan de la LACC sanctionnée par le tribunal. Toutefois, le tribunal ne peut pas dispenser du processus de taxation. Elle a précisé que les honoraires du SAI ne doivent pas être établis par le tribunal au moment de l’annulation, mais que le SAI doit plutôt transmettre au BSF une copie de l’état définitif de ses recettes et débours, ainsi qu’une feuille de dividendes aux fins d’examen, de commentaires et de taxation, conformément à l’article 152 de la LFI . Elle a ajouté que la taxation est un élément crucial des vastes dispositions législatives habilitantes de la surintendante pour superviser et protéger l’intégrité du système de faillite et que ces dispositions législatives habilitantes ne peuvent être supprimées par les tribunaux.
La surintendante a remercié l’ ACPIR et les SAI pour leur participation et leur collaboration continue.
Questions et réponses
Question 1 : Le BSF peut-il faire le point sur les attestations que les SAI ont dû faire à la banque avant le 30 avril de cette année concernant la couverture des soldes des comptes en fiducie par la Société d’assurance-dépôts du Canada (SADC)?
La surintendante : Le BSF collabore avec la SADC pour publier un avis informant les SAI que le gouvernement a apporté d’importantes modifications aux règles visant la protection de l’assurance-dépôts pour les dépôts détenus « en fiducie » dans les institutions membres de la SADC . Ces modifications entrées en vigueur le ont introduit de nouvelles exigences de divulgation pour les syndics. En vertu de ces nouvelles règles, certains syndics qui détiennent des dépôts en fiducie pour des clients à titre professionnel peuvent désormais désigner certains ou tous leurs comptes comme comptes de fiduciaire professionnel (CFP). Les syndics qui désignent leurs comptes en fiducie comme étant des CFP bénéficieront d’une simplification des exigences de déclaration pour les bénéficiaires. (Remarque : l’avis concernant les modifications importantes apportées à la Loi sur la SADC qui pourraient avoir une incidence sur les SAI a été publié le .)
Question 2 : Y a-t-il une mise à jour concernant l’énoncé de position du BSF sur la question à savoir qui paie les frais d’interprète dans une administration sommaire?
La surintendante : Des discussions sont en cours entre l’ ACPIR et le BSF sur l’ébauche d’un exposé de position sur cette question. Ce sujet sera abordé lors de la réunion du Comité de liaison sur les pratiques des consommateurs le 20 septembre et l’exposé de position sera publié sur le site Web du BSF en temps opportun.
Question 3 : Pouvez-vous faire le point sur ce qui en est du rapport annuel du syndic?
La surintendante : Le BSF a formé un groupe de travail avec des SAI afin d’élaborer le Rapport annuel du syndic (RAS) à remplir au moment du renouvellement des licences. Le rapport recueillera des renseignements sur les pratiques et les modèles d’affaires des SAI afin de guider les activités de surveillance du BSF et d’aider à réduire le fardeau administratif des SAI , en évitant, par exemple, certaines demandes de renseignements pendant les visites de bureaux et en aidant le BSF à planifier efficacement ces visites. Le BSF travaille avec son dirigeant principal de l’information sur la mise en œuvre du RAS qui pourrait qui pourrait n’avoir lieu qu’après la prochaine période de renouvellement des licences en raison de priorités concurrentes.
Question 4 : Comme vous le savez, les deux dernières années ont été difficiles pour toutes les entreprises, y compris celles du domaine de l’insolvabilité et de la réorganisation. Nos membres connaissent un ralentissement de leurs activités en raison de la pandémie et de l’inflation. Dans ce contexte, le moment n’a jamais été aussi important d’aborder la question des tarifs. Pouvez-vous nous dire quand nous pouvons nous attendre à des augmentations des tarifs pour aider les cabinets de SAI ?
La surintendante : Bien que les deux dernières années ont été très difficiles pour les entreprises, y compris pour les professionnels de l’insolvabilité et de la réorganisation, il est important de préciser qu’une augmentation des taux ne doit pas être tenue pour acquise. Tel qu’exprimé plus tôt, les modifications apportées aux règlements en vertu de la LFI et de la LACC sont le résultat d’un processus officiel très structuré un travail considérable qui comprend une analyse approfondie pour aboutir à une recommandation au Conseil du Trésor. Il est donc difficile, à ce stade-ci, de donner une estimation précise du moment où cette question sera soumise à l’examen du Conseil du Trésor.
Question 5 : Vous avez mentionné brièvement le marché des services-conseils en redressement financier. Pouvez-vous nous fournir plus de renseignements sur ce que vous jugez nécessaire pour régler ce problème et assurer la protection du public?
La surintendante : Après avoir consacré beaucoup de temps à explorer et analyser le marché des services-conseils en redressement financier, le BSF s’est engagé à déployer des efforts continus pour prendre des mesures significatives lorsque les relations entre les SAI et les intervenant du marché des services-conseils en redressement financier sont non conformes ou non éthiques. Le BSF adopte une approche à volets multiples qui comprend des visites de bureaux de SAI (VBSAI) et des mesures de suivi appropriées, le traitement de cas où des personnes qui ne sont pas des SAI semblent offrir des services d’insolvabilité, la collaboration avec les autorités provinciales et l’Agence de la consommation en matière financière du Canada, la sensibilisation des consommateurs par la promotion du Portail de solutions à l’endettement du BSF et la création d’un avis aux consommateurs en collaboration avec l’ ACPIR .
Le BSF a également émis de nombreuses ordonnances de cessation et d’abstention et a imposé des mesures de conformité à l’encontre de diverses personnes morales offrant des services-conseils en redressement financier et des personnes physiques se présentant comme des SAI , faisant de la publicité fausse ou trompeuse et ayant une incidence négative sur l’intégrité du système d’insolvabilité.
Tous les SAI doivent garder à l’esprit qu’il est important d’éviter les pratiques commerciales douteuses susceptibles de mettre en péril leur intégrité, leur indépendance ou leur compétence, et ne doivent pas oublier les conséquences, les risques individuels et les répercussions de toute non-conformité sur la profession de SAI dans son ensemble. Les décisions des SAI influencent grandement le marché des services-conseils en redressement financier.
(Remarque : l’avis aux consommateurs du BSF - ACPIR Vous avez besoin d’aide pour gérer vos dettes? Posez des questions et renseignez-vous pour éviter de payer des frais inutiles a été publié le ).
Question 6 : Certains membres de l’ ACPIR mènent leurs activités partout au pays. Certains membres de l’ ACPIR affirment que chaque région du BSF appliquerait ses propres politiques et procédures. Ainsi, il est difficile de savoir quelle procédure adopter lors des interaction avec le BSF en tant qu’organisme national. Pouvez-vous nous dire quelles mesures le BSF prend pour fonctionner uniformément?
La surintendante : Le BSF a des politiques et des procédures nationales et s’efforce d’assurer l’uniformité à l’échelle nationale, bien que les circonstances régionales et la jurisprudence puissent parfois entrer en jeu. Au cours du présent exercice, le BSF a entrepris un examen de son cadre de conformité et des procédures connexes, ainsi que de son matériel de formation. Cet examen permettra de clarifier les sources d’application irrégulières des programmes et des politiques. De plus, des efforts concernant le modèle d’évaluation des risques des SAI du BSF , à commencer par le modèle de risque lié à l’état des recettes et des débours, ont été entrepris dans le but d’assurer l’uniformité à l’échelle nationale.
Le BSF travaille également sur son approche de la surveillance des entreprises qui œuvrent à l’échelle nationale ou dans plusieurs provinces et territoires. Cette initiative n’en est encore qu’à ses débuts, mais les objectifs sont d’atteindre une meilleure cohésion nationale, une efficacité accrue et une réduction du fardeau administratif pour les SAI .
Question 7 : La Fédération canadienne de l’entreprise indépendante a récemment publié un communiqué indiquant que les faillites d’entreprises sont à la hausse, mais qu’elles ne représentent que 10 % des fermetures d’entreprises imminentes selon ses recherches. Il est essentiel de veiller à ce que les micros, petites et moyennes entreprises (MPME) aient un accès abordable au système d’insolvabilité et de réorganisation en ce moment. D’autres pays ont mis en place de nouveaux programmes pour traiter cette question. L’ ACPIR plaide pour des changements auprès d’ ISDE , mais nous aimerions savoir quels efforts le BSF déploie au sein du gouvernement pour défendre les intérêts des MPME .
La surintendante : Comme mentionné précédemment, nos collègues au sein du Ministère sont responsables des questions de nature législative, mais nous soulignons régulièrement la question de l’accès juste et raisonnable au système d’insolvabilité pour les MPME ainsi que pour les débiteurs à revenu ou actifs faibles (RAF) et à revenu ou actifs nuls (RAN). Le BSF tient régulièrement des réunions avec ses collègues responsables des politiques d’ ISDE pour présenter des données et des analyses, et proposer des recommandations à l’appui d’éventuelles modifications législatives.