Rapport du comité consultatif sur le système fédéral de soutien à la recherche

Table des matières

Message du comité

Nos chercheuses et chercheurs, grâce à leurs talents et à leur détermination, sont au cœur de la création de nouvelles connaissances qui améliorent notre bien-être ainsi que notre compétitivité et notre prospérité économiques. Au-delà de ces bienfaits, leurs recherches et leurs innovations sont essentielles pour nous aider à relever les défis environnementaux, sociaux et en matière de santé, des défis majeurs auxquels notre pays et le monde entier sont confrontés. Pensons, par exemple, aux changements climatiques, à l'enjeu de la sécurité alimentaire ou à la préparation aux pandémies. En bref, la recherche et l'innovation sont essentielles au maintien et à l'amélioration de tous les aspects de notre existence.

Si les Canadiennes et Canadiens peuvent à juste titre être fiers des réalisations de leur pays en matière de science, de technologie, de recherche et d'innovation, nous nous trouvons actuellement dans une situation précaire. Le système canadien de soutien à la recherche finance la recherche universitaire afin d'étudier des questions fondamentales, et soutient les nouvelles idées, la création de connaissances transformatrices et les découvertes révolutionnaires qui en découlent. Il soutient également la formation de personnes hautement qualifiées (PHQ) qui interviennent dans tous les secteurs de la société et de l'économie. Bien que dans le passé le Canada ait fait des investissements importants visant à former, attirer et retenir des chercheuses et chercheurs de classe mondiale, force est de constater que nous n'avons pas toutes les structures appropriées pour en tirer pleinement profit. Par ailleurs, ces investissements ne sont pas à la hauteur des mesures prises par nos concurrents internationaux et ne reflètent pas les diverses transformations de la recherche elle-même.

Les défis fondamentaux d'aujourd'hui et de demain transcendent les disciplines et les frontières nationales et exigent un plein engagement des gouvernements et de tous les partenaires de l'écosystème de la recherche. Nous recommandons donc d'établir rapidement un nouveau mécanisme qui serait bâti à partir de certaines capacités existantes et capable d'induire ce changement de culture. Dans notre contexte national, les problèmes de financement actuels sont aggravés par un système de soutien de la recherche qui n'est pas conçu de façon optimale pour répondre aux approches multi et interdisciplinaires, collaboratives et internationales de la recherche. Par conséquent, notre pays ne possède pas tous les outils indispensables pour relever les défis complexes auxquels nous sommes – et serons – confrontés.

La situation du Canada devient encore plus préoccupante à la lumière des actions concrètes prises par nos pays « pairs » et nos concurrents en matière de science, de recherche et d'innovation. Le bien-être, la prospérité et la compétitivité du Canada à l'échelle mondiale dépendront de plus en plus de notre capacité à soutenir et à habiliter nos brillants talents. Alors que d'autres pays cherchent à devenir des puissances mondiales en matière de science et d'innovation, il est primordial que nous soutenions une communauté de recherche vigoureuse grâce à un financement adéquat et un système de soutien agile, capable de répondre efficacement et rapidement aux nouveaux besoins et attentes du milieu de la recherche, de l'économie, et de la société.

Heureusement, grâce à nos forces en matière de connaissances et de talents, le Canada dispose d'un immense potentiel pour mener le monde vers un avenir plus prospère, plus juste et plus durable. Notre succès dépendra de notre capacité à déployer stratégiquement nos atouts en matière de recherche et de talent et de notre capacité à partager ces atouts avec l'ensemble de la société. Le Canada continuera de prendre du retard si nous ne parvenons pas à faire évoluer notre système de soutien à la recherche. Notre système doit être adapté afin qu'il réponde mieux aux besoins du milieu de la recherche contemporaine dans un monde où les pays les plus innovateurs et les plus prospères utilisent leur propre capacité scientifique comme un actif national stratégique. La considération sérieuse d'améliorations possibles du système de soutien à la recherche est requise afin de garantir que la recherche et les talents du Canada demeurent parmi les meilleurs au monde et ainsi nous assurer d'être en mesure de relever les défis et saisir les occasions qui se présenteront à nous aujourd'hui et dans l'avenir.

Ce rapport vise à offrir au gouvernement une série de mesures audacieuses, mais réalisables, qui placeront l'écosystème canadien de la recherche là où il mérite et doit être – parmi les meilleurs au monde. Les recommandations du comité renforceront l'excellence de la recherche qui est une caractéristique fondamentale de la science canadienne, tout en permettant une plus grande agilité, flexibilité et réactivité dans le soutien à la recherche et l'innovation transformatrices.

  • Frédéric Bouchard
    Président du Comité consultatif sur le système fédéral de soutien à la recherche; Doyen de la Faculté des arts et des sciences, Université de Montréal

  • Gilles Patry
    Professeur émérite et Président émérite, Université d'Ottawa; ancien Président-directeur général, Fondation canadienne pour l'innovation

  • Laurel Schafer
    Professeure, Département de chimie, Université de la Colombie-Britannique

  • Baljit Singh
    Vice-président à la recherche, Université de la Saskatchewan

  • Yolande Chan
    Doyenne et professeure James McGill, Faculté de gestion Desautels, Université McGill

  • Janet Rossant
    Présidente et directrice scientifique, The Gairdner Foundation; scientifique principale émérite, Hospital for Sick Children; et professeure universitaire émérite, Département de génétique moléculaire, Université de Toronto

  • Vianne Timmons
    Présidente et vice-chancelière, Université Memorial de Terre-Neuve

Remerciements : Le comité souhaite exprimer sa gratitude envers Kristen Haddad et Ryan Hampel qui ont assuré le secrétariat du comité au sein d'Innovation, Sciences et Développement économique Canada, et pour le soutien de haute qualité qu'ils ont fourni tout au long des travaux de ce comité.

Sommaire exécutif

Mandat et consultations

Le Comité consultatif sur le système fédéral de soutien à la recherche a été inauguré en octobre 2022 avec pour mandat de conseiller le gouvernement du Canada sur la façon de moderniser le système fédéral de soutien à la recherche universitaire afin d'assurer l'agilité et la coordination de ses composantes, de maximiser l'impact de ses investissements et d'assurer le succès des chercheuses et chercheurs canadiens. Le comité a été invité à se concentrer sur la structure et la gouvernance du système fédéral de soutien à la recherche, en portant une attention particulière aux relations entre les conseils subventionnaires fédéraux soient le Conseil de recherches en sciences naturelles et en génie du Canada, le Conseil de recherches en sciences humaines du Canada et les Instituts de recherche en santé du Canada, ainsi que les relations entre ces conseils et la Fondation canadienne pour l'innovation.

Le comité a également été chargé de donner des conseils sur les structures et la gouvernance afin de mieux soutenir le développement et la rétention des talents, ainsi que l'innovation, la mobilisation et la commercialisation des connaissances, et finalement, d'offrir son avis sur un cadre proposé pour la prise de décision fédérale concernant les investissements dans les grandes installations de recherche (GIR), élaboré par Innovation, Sciences et Développement économique Canada.

Les consultations avec les intervenants et les experts, tant au Canada qu'à l'étranger, ont joué un rôle essentiel dans le processus d'analyse en enrichissant les délibérations du comité à chaque étape de ses travaux. Le comité a échangé, directement ou indirectement, avec plus de mille intervenants de partout au Canada par le biais de rencontres en personne ou virtuelles, de soumissions écrites ou de réponses à un questionnaire en ligne. Les recommandations du comité ont également été étayées par plusieurs analyses, études, rapports, comparateurs internationaux ainsi que par des évaluations antérieures de divers programmes et organismes du système de soutien canadien.

Gouvernance et structures : Ce qui a été dit

Tout au long des travaux du comité consultatif, certains messages clés sont ressortis :

  • Le Canada a réussi à générer l'excellence en recherche dans un large éventail de disciplines, et les conseils subventionnaires ont excellé dans leur mission fondamentale de création de connaissances et de développement de talents. Cependant, leurs niveaux de financement n'ont pas suivi l'évolution des besoins, ce qui entrave les initiatives existantes et les nouveaux programmes.
  • Le système est très fragmenté. Les conseils subventionnaires et un certain nombre d'autres entités distinctes et déconnectées sont souvent responsables de mandats similaires, mais non coordonnés, menant à un impact de moindre envergure.
  • Cette fragmentation a entraîné un manque de clarté entre les différents acteurs du système en ce qui concerne leurs responsabilités et leurs rôles respectifs, des chevauchements de mandat, un manque d'uniformité dans les soutiens entre les disciplines et un fardeau administratif accru pour la communauté de la recherche.
  • La fragmentation a également entraîné des lacunes importantes dans le soutien à la recherche. Il est ainsi devenu plus ardu de financer certains types d'initiatives qui se situent entre les programmes ou les mandats organisationnels existants, ou en dehors de ceux-ci, notamment (mais pas exclusivement) la recherche intersectNote de bas de page 1orielle, la recherche visant à répondre à des urgences sociétales, les programmes internationaux de grande envergure et les activités de précommercialisation.
  • L'impact de la fragmentation est aggravé par l'absence d'un organisme consultatif externe indépendant responsable de fournir des conseils stratégiques et d'assurer une évaluation globale de l'état de la recherche au pays, ainsi que par l'absence d'une stratégie nationale ou d'une vision commune pour l'écosystème canadien des sciences, de la recherche et de l'innovation qui permettrait d'harmoniser les actions des différents acteurs du système.
  • Le Comité de coordination de la recherche au Canada (CCRC) et d'autres efforts du même ordre n'ont pas permis de réaliser pleinement l'harmonisation souhaitée et le système de soutien reste donc fragmenté. Le CCRC a contribué à une meilleure compréhension des besoins et des contraintes des divers acteurs du système. Toutefois, sa conception n'était pas adaptée pour répondre aux objectifs de résoudre les inefficacités et les inégalités entre certains programmes, d'éliminer les divers obstacles à la collaboration entre les chercheurs canadiens et leurs partenaires internationaux, de réduire le fardeau administratif pour les chercheurs ou de répondre avec agilité aux besoins urgents et aux enjeux stratégiques (lacunes particulièrement évidentes durant la pandémie).
  • Le CCRC a été mis en place au sein d'un système qui n'a pas été conçu pour favoriser la coordination et les perspectives stratégiques partagées ou pour répondre aux enjeux émergents et urgents. En raison de la structure de gouvernance actuelle, ce n'est pas un défi que les conseils subventionnaires et les autres acteurs du système peuvent facilement surmonter.

Principales recommandations

La création de la Fondation canadienne pour le savoir et la science

Il est évident pour le comité que les conseils subventionnaires ont une solide réputation d'excellence dans leur soutien à la recherche disciplinaire initiée par les chercheurs ainsi que dans leur soutien à la formation de talents. Ils devraient en être félicités et mieux soutenus pour leur rôle fondamental dans le système de soutien à la recherche. Selon les commentaires reçus par le comité, il est également nécessaire de mettre en place un nouveau mécanisme de gouvernance complémentaire qui travaillerait de concert avec le système existant, avec une répartition claire des responsabilités entre ce mécanisme et les conseils. Ce nouveau mécanisme de gouvernance serait conçu afin de rehausser la coordination des acteurs et faciliter au pays la recherche urgente, internationale, multi et interdisciplinaire et la recherche orientée. Par ailleurs, ce mécanisme supplanterait le CCRC et il miserait sur le redéploiement de certaines ressources existantes dans l'écosystème afin de contribuer à la réalisation de son mandat.

Ce nouveau mécanisme de gouvernance, que le comité appelle la Fondation canadienne pour le savoir et la science (FCSS), favoriserait la collaboration dans l'ensemble du système pour soutenir la recherche urgente, multidisciplinaire et interdisciplinaire, et orientée, afin d'aider le Canada à relever les défis sociaux, technologiques, économiques et sanitaires urgents. La FCSS améliorerait également le soutien au continuum des talents par une meilleure coordination des programmes. Il s'appuierait sur le mandat du CCRC qui serait aboli, et prendrait en charge l'aspect du financement de la recherche orientée. Il serait conçu pour rassembler rapidement la communauté des chercheurs de tous horizons autour de missions qui pourraient être transversales, interdisciplinaires et à haut risque. Il serait dirigé par un nouveau leader possédant une grande crédibilité en matière de recherche, de leadership et de gestion. Il serait imputable à un conseil d'administration comprenant des perspectives académiques, industrielles, gouvernementales, autochtones et autres perspectives jugées pertinentes.

Puisque les changements progressifs n'ont pas permis de combler les lacunes identifiées par les intervenants, le comité recommande de confier à ce nouveau mécanisme de gouvernance le mandat ambitieux d'apporter des changements importants au paysage de la recherche canadienne, de rehausser la réputation mondiale de la science et de la recherche canadiennes, et de permettre à la recherche canadienne (y compris celle effectuée par le gouvernement) d'être interpelée plus efficacement lorsqu'un besoin sociétal urgent ou de nouvelles occasions pour le pays se présentent.

Nécessité d'une vision stratégique nationale et d'un organisme consultatif stratégique

Après la discontinuation du Conseil des sciences, de la technologie et de l'innovation et le retard dans le lancement du Conseil des sciences et de l'innovation (CSI), le Canada souffre d'une vulnérabilité inquiétante en matière de capacité de conseil stratégique indépendant. L'absence d'une vision stratégique à long terme et de priorités pour la réaliser place le Canada en position défavorable par rapport à ses concurrents internationaux et fait du Canada un choix de second rang lorsqu'il s'agit de partenariats stratégiques internationaux, malgré le fait que nos chercheuses et chercheurs soient individuellement reconnus mondialement. Le comité a entendu ces messages de la part des intervenants nationaux et internationaux de manière répétée.

À l'heure où de nombreux pays lancent des stratégies de recherche et d'innovation audacieuses, ambitieuses et cohérentes visant à les propulser au rang de puissances mondiales en matière de science, de recherche et d'innovation, le Canada va de l'avant avec diverses stratégies sectorielles. Toutefois, il lui manque une vision cohérente qui permettrait à la communauté scientifique et de recherche de travailler à des objectifs stratégiques communs.

Il est impératif de signaler à notre communauté de la recherche et à nos pairs du monde entier que le Canada aspire à figurer parmi les meilleurs pays du monde en matière de recherche et d'innovation, avec une vision et une stratégie nationales claires.

Le comité recommande fortement au gouvernement de procéder à la création d'un organisme consultatif indépendant responsable d'apporter au gouvernement des conseils stratégiques sur la science, la recherche et l'innovation, d'évaluer le soutien et le rendement de ces activités au Canada et d'en rendre compte publiquement. Cet organisme jouerait également un rôle clé dans l'établissement d'une vision de l'avenir, en façonnant les priorités à long terme du Canada en matière de science, de recherche et d'innovation, ainsi qu'une stratégie nationale ambitieuse et échelonnée sur plusieurs années pour les réaliser. L'expectative serait que les plans stratégiques de la FCSS ainsi que ceux des autres bailleurs de fonds en recherche soient harmonisés à ce plan stratégique national. Afin d'encourager une diversité de perspectives par rapport à l'écosystème de la recherche et de l'innovation, il est recommandé que l'organisme consultatif proposé comprenne des représentants du milieu autochtone de la recherche, ainsi que d'autres groupes revendiquant l'équité et les droits.

Cet organisme consultatif guiderait le gouvernement sur les priorités d'une stratégie nationale en matière de science, de recherche et d'innovation, avec le soutien de la communauté de la recherche.

Une capacité consultative stratégique et une stratégie nationale pour la science, la recherche et l'innovation fourniraient une approche cohérente, ciblée et à long terme pour faire progresser la recherche canadienne (de la recherche initiée par le chercheur axée sur la curiosité, à la recherche interdisciplinaire, à la recherche orientée en fonction d'enjeux prioritaires), et signaleraient à nos pairs mondiaux que le Canada prend au sérieux la recherche et l'innovation et qu'il est un partenaire digne de ce nom.

Autres recommandations : Facteurs d'excellence en matière de recherche

Un nouveau paradigme pour les infrastructures de recherche

Le succès des chercheuses et chercheurs canadiens dépend non seulement des fonds de recherche, mais aussi de l'accès à des outils, des instruments et des installations de recherche de pointe. Plusieurs intervenants ont souligné l'importance de mieux arrimer le soutien aux infrastructures, le soutien à leur fonctionnement et le financement de la recherche qui y est réalisée. La FCSS proposée aurait pour mission de travailler avec les conseils subventionnaires et la Fondation canadienne pour l'innovation (FCI) afin de remédier à cette fragmentation des soutiens et d'identifier les possibilités de simplification des processus.

La nécessité d'une approche plus cohérente est encore plus pertinente en ce qui concerne les grandes infrastructures. Pour le soutien aux grandes installations de recherche (GIR), le comité appuie fortement l'adoption d'une approche sous forme d'un portefeuille d'infrastructures, tenant compte d'un soutien de leur cycle de vie complet (c.-à-d. un financement tout au long de la planification, de la construction, de l'exploitation, de l'entretien et du démantèlement éventuel de ces installations).

Le comité appuie les orientations du cadre proposé pour la prise de décision fédérale sur les investissements dans les GIR. Ce dernier établirait un modèle de financement qui procure un soutien plus prévisible et plus approprié aux GIR tout au long de leur cycle de vie. Dans cette optique, le comité recommande l'élaboration d'une feuille de route nationale pour établir les priorités et la planification des investissements à grande échelle dans les infrastructures de recherche. Cette feuille de route serait arrimée à la stratégie nationale sur les sciences, la recherche et l'innovation.

Le comité a également identifié plusieurs moyens de mieux intégrer et consolider le soutien aux infrastructures de recherche, y compris les outils et instruments de recherche, comme le regroupement et la simplification de certains processus de la FCI et l'amélioration du soutien au fonctionnement des outils et instruments de recherche.

Soutenir le continuum des talents

La communauté étudiante, les chercheuses et chercheurs en début de carrière, les directions universitaires et les associations étudiantes ont signalé au comité que les programmes visant à soutenir le continuum des talents doivent être simplifiés et harmonisés afin de réduire le fardeau pour les candidates et candidats chercheurs. Ces simplifications leur permettraient ainsi de se concentrer sur leurs recherches.

Un système de soutien fédéral bien coordonné, agile et adapté aux talents qu'il soutient implique l'élaboration de mécanismes de soutien simplifiés. Le groupe d'experts a formulé des recommandations visant à mieux soutenir le talent à chaque étape du continuum, notamment en confiant à la FCSS proposée la responsabilité de simplifier et d'harmoniser l'ensemble des programmes de bourses d'études et de recherche, et de simplifier le programme des Chaires de recherche du Canada (CRC).

Relier la recherche et l'innovation

Reconnaissant le rôle important de l'innovation et de la commercialisation pour l'essor du Canada, le comité recommande que la FCSS proposée ait des liens clairement établis avec les activités éventuelles de l'Agence canadienne d'innovation et d'investissement, et avec les programmes d'innovation et de commercialisation du gouvernement destinés aux entreprises. La FCSS devrait également être responsable de réunir les intervenants appropriés afin de soutenir la formation en entrepreneuriat des chercheuses et des chercheurs, de mieux utiliser les programmes de mise en marché de la recherche et d'investir dans le changement de culture nécessaire pour favoriser un état d'esprit plus entrepreneurial au sein de la communauté de la recherche.

Équité, diversité et inclusion (EDI), et soutien à la recherche et au talent des Autochtones et des francophones

Pour que le Canada se hisse en tête du peloton en science et innovation et afin qu'il puisse relever les grands défis de société qui se présenteront à nous, il doit favoriser un environnement de recherche véritablement inclusif. La résolution de problèmes complexes exige un large éventail de perspectives et d'expériences. Pour y parvenir, il faut éliminer les obstacles à l'entrée et à la réussite.

Le comité recommande que le système fédéral de soutien à la recherche poursuive la mise en place du Plan d'action des trois organismes pour l'EDI et d'autres travaux complémentaires qui serviront à améliorer la sous-représentation et la sous-participation de certains groupes et à encourager la diversité dans l'ensemble de l'écosystème de recherche, comme le financement des étudiants et des chercheurs noirs (budget 2022), le Comité consultatif du CRSH contre le racisme à l'endroit des personnes noires et le Comité consultatif externe contre le racisme des IRSC. La diversité du Canada est un atout au pays et sur la scène mondiale, et il est dans notre intérêt de mieux l'encourager et de la renforcer.

Le comité se réjouit également de la poursuite de la mise en œuvre du plan stratégique interorganismes pour la recherche autochtone, élaboré en collaboration avec le Cercle de leadership autochtone en recherche. Le comité recommande que la recherche autochtone soit une composante d'une stratégie nationale en matière de sciences, de recherche et d'innovation, et que des représentants des acteurs de l'écosystème et des communautés concernées participent à rassembler les avis et conseillent l'organisme consultatif proposé sur cette composante.

Le comité recommande également d'améliorer le soutien à la recherche francophone et de veiller à ce que les demandes de financement de la recherche soumises en français soient traitées de manière équitable au sein du système fédéral de soutien à la recherche. Comme le soutien à la recherche francophone est une priorité commune à l'ensemble du système fédéral de soutien à la recherche, la FCSS devrait s'assurer que les programmes existants sont également accessibles aux francophones et également identifier les possibilités d'encourager la production et la diffusion de connaissances et de recherches en français au Canada et dans le monde.

Les conditions du succès : Augmentation du financement de la recherche suscitée et entreprise par les chercheurs, et offrir un appui concurrentiel au talent

Un système de soutien fédéral coordonné et agile qui est outillé pour répondre aux besoins de la recherche contemporaine ainsi qu'aux nouvelles priorités gouvernementales serait très avantageux pour tous les Canadiens et toutes les Canadiennes. Cela dit, le succès de la science, de la recherche et de l'innovation sur la scène mondiale dépend d'abord et avant tout de la capacité de soutenir efficacement et de retenir les meilleurs chercheurs du Canada et de bâtir un milieu de recherche qui favorise la découverte de nouvelles connaissances grâce à la recherche suscitée et entreprise par les chercheuses et les chercheurs (une recherche souvent qualifiée de recherche libre).

Étant donné les investissements énormes constatés dans d'autres pays et les niveaux d'investissement stagnants au Canada, la priorité absolue doit être d'augmenter le financement de la recherche et du soutien au talent. Afin d'assurer le succès des recommandations de ce rapport, il est d'une importance capitale que le financement de base des conseils subventionnaires soit d'abord considérablement augmenté pour faire face :

  • aux pressions résultant de la croissance de la taille et des activités du système (par exemple, le nombre croissant d'étudiantes et étudiants chercheurs et de stagiaires postdoctoraux);
  • aux effets de l'inflation; et
  • à l'importance d'entretenir une base de recherche et de talents compétitive à l'échelle mondiale.

Le financement de la recherche n'a tout simplement pas suivi le rythme de ces pressions au cours des vingt dernières années. Une première mesure consisterait à augmenter d'au moins 10 % par anNote de bas de page 2 pendant cinq ans le budget total de base des conseils subventionnaires afin de soutenir leurs programmes essentiels de subventions. Un nouveau financement sera également nécessaire pour la programmation de la FCSS afin d'assurer son succès. Notons que le gouvernement pourra tirer parti de ressources existantes qui soutiennent actuellement les fonctions de coordination entre les conseils subventionnaires pour couvrir une partie des coûts. Il est important de souligner que l'amélioration de la gouvernance et des processus obtenue grâce au FCSS devrait entraîner des gains d'efficacité dans d'autres parties du système de soutien.

Il est également évident pour le comité que le soutien actuel aux étudiantes et étudiants chercheurs, la relève de la communauté scientifique, est à un point de rupture. La valeur des bourses accordées par le gouvernement à la relève en recherche a pratiquement stagné au cours des 20 dernières années. Par conséquent, elles n'ont pas suivi l'augmentation du coût de la vie ni les tendances mondiales en matière de rémunération des stagiaires de recherche. Cette situation a considérablement érodé la position du Canada en tant que plaque tournante mondiale pour l'attraction et la rétention des meilleurs talents en recherche et cette érosion sera accélérée par l'augmentation des investissements de nos pairs internationaux. Par conséquent, le comité exhorte également le gouvernement à augmenter considérablement le financement des personnes étudiantes et des stagiaires postdoctoraux pour atteindre un niveau concurrentiel à l'échelle internationale. Il convient de noter que de nombreuses personnes étudiantes, si ce n'est la plupart, ne sont pas financées par des bourses d'études ou de recherche, mais plutôt par des assistanats de recherche rendus possibles par les subventions de leurs professeurs. C'est une raison supplémentaire pour laquelle une augmentation du financement des programmes de subventions de base des conseils est si importante. Compte tenu de la concurrence internationale pour le talent, le Canada risque fort, sans un réinvestissement conséquent, de subir un nouvel exode des personnes hautement qualifiées.

Conclusion

Les recommandations du comité visent à assurer et à améliorer l'excellence de la recherche qui est la marque distinctive de la science canadienne, tout en permettant une plus grande agilité, flexibilité et réactivité pour soutenir la recherche et l'innovation transformatrices. Le comité reconnaît que la mise en œuvre de ces recommandations sera un grand défi, mais le coût de la complaisance et de l'inaction est beaucoup plus grand encore.

Le Canada a l'immense potentiel de mener le monde vers un avenir plus prospère, plus juste et plus durable grâce à ses forces en matière de connaissances et de talents, mais il faut redoubler d'efforts si le Canada aspire à faire partie des leaders mondiaux. Il faut accroître nos investissements dans le milieu de la recherche canadienne et adapter notre système de soutien de manière à pouvoir maximiser l'impact de ces investissements, afin de prospérer en tant que pays et assurer une amélioration continue de la qualité de vie de toutes et tous.

La nécessité de renforcer le soutien à la recherche

Contexte

Les sociétés qui investissent dans leurs activités de recherche prospèrent, tandis que celles qui ne le font pas régressent. Tous les aspects de notre qualité de vie individuelle et collective sont améliorés par la science et la recherche et, surtout, par le partage et la mobilisation efficaces de ces avancées scientifiques. Comme l'ont montré très clairement la pandémie mondiale et la découverte rapide de vaccins et d'autres moyens d'intervention en matière de santé, les activités de recherche libre effectuées pendant des décennies et menées par des chercheurs tenaces et déterminés, peuvent être mobilisées de façon apparemment miraculeuse en quelques mois pour répondre à un besoin urgent. Nous avons assisté à la réalisation spectaculaire de la promesse de la recherche scientifique : la transformation de la curiosité en réponses. Cependant, la pandémie a également permis de tirer une leçon beaucoup plus inconfortable : nous avons été témoins de la vulnérabilité des pays qui dépendent trop d'autres pays pour obtenir les solutions et les outils précieux nécessaires à leur bien-être et à leur prospérité. Il est très risqué de déléguer le développement de talents et d'inventions à d'autres pays, en espérant que ces derniers nous aideront rapidement dans les moments difficiles. Investir stratégiquement dans notre propre capacité nationale de recherche et d'innovation est une nécessité urgente et une immense opportunité.

Dans l'avenir turbulent qui pointe à l'horizon, alors que le climat et les marchés perdent leurs repères et que des amis lointains peuvent être préoccupés par leurs propres défis, l'épanouissement et la prospérité du Canada dépendront plus que jamais de la formation, du développement et de la rétention de nos talents, ainsi que de l'exploitation des grandes idées et inventions qu'ils réaliseront. La recherche éclaire chaque étape de la création d'une société et d'une économie plus fortes, prospères et résilientes, et le savoir sera la fondation nécessaire de notre réussite individuelle et collective.

La bonne nouvelle est que selon de nombreux indicateurs liés au développement des talents, le Canada a traditionnellement obtenu des résultats parmi les meilleurs au monde. La recherche et le talent canadiens sont reconnus à l'échelle mondiale, et notre système de recherche a toujours été très performant. Heureusement, le Canada a investi de manière importante dans son écosystème de recherche pour s'assurer que nous pouvons développer, attirer et retenir des chercheuses et des chercheurs de classe mondiale, soutenir un solide continuum d'éducation et de talent, et développer des institutions de recherche solides et accessibles. La mauvaise nouvelle qui doit nous préoccuper aujourd'hui est que le Canada n'est pas le seul pays à l'avoir fait, et, surtout, que de nombreux pays ont récemment pris de nouveaux engagements importants visant à repenser et redynamiser leur système de soutien à la recherche.

Les échanges du Comité consultatif sur le système fédéral de soutien à la recherche avec les intervenants et divers partenaires du continuum de la recherche et du talent ont fait ressortir que le système actuel de soutien à la recherche comporte des caractéristiques et des atouts réels dont nous pouvons nous réjouir. Toutefois, nos consultations ont également mis en évidence le fait que le système actuel manque de ressources et que les structures existantes ne sont peut-être pas adaptées à la nature changeante de la recherche et aux utilisations de plus en plus diversifiées des résultats scientifiques. Cela entravera notre capacité à relever les grands défis et à tirer parti des opportunités qui s'offriront à nous. Cela pourrait également limiter l'impact de nos investissements dans le secteur de la recherche.

D'autres pays ont pris conscience de l'impératif stratégique que représente un écosystème vigoureux de recherche et de talents et ils se mobilisent face à l'urgence d'agir. Des pays tels que le Royaume-Uni (RU) et les Pays-Bas ont apporté des changements substantiels à leurs systèmes de soutien à la recherche afin de dynamiser la production de connaissances et leur application pour répondre aux opportunités clés. Nos pays pairs augmentent considérablement leur soutien à la science et à la recherche afin de garantir leur compétitivité mondiale.

Alors que d'autres pays ont fait de l'augmentation de leurs investissements dans la recherche, l'innovation et le talent une priorité nationale, le Canada a perdu du terrain.

Par conséquent, le Canada part d'une position de faiblesse qui s'accentuera à mesure que d'autres pays réinvestiront massivement dans la recherche. Le sous-financement limite notre capacité à attirer et à retenir les talents, à relever les défis mondiaux et à maintenir la position du Canada parmi les meilleurs au monde en matière de qualité de vie. Ce sous-financement a également mis en évidence les domaines dans lesquels le Canada a toujours été moins performant, comme la transformation de nos atouts en recherche en innovations qui atteignent le marché et qui profitent aux Canada et au monde entier. Les fiches de rendement en matière d'innovation du Conference Board du Canada ont souligné de manière répétée la faiblesse de la performance du Canada en matière d'innovation, ce qui mine davantage notre compétitivité à l'échelle mondiale. Si le Canada aspire à une économie du savoir compétitive à l'échelle mondiale, il doit augmenter ses investissements dans la recherche et l'innovation et mettre en place un soutien accru et plus intelligent. Il faut s'assurer que nous investissons dans la recherche et le talent, et améliorer les mécanismes permettant de tirer parti de leur plein potentiel.

Les défis mondiaux et nationaux sont évidents : Le Canada prendra du retard si nous ne parvenons pas à faire évoluer notre système de soutien à la recherche pour qu'il continue de répondre aux besoins du milieu de recherche contemporaine dans un monde où les pays utilisent leur propre potentiel scientifique comme un atout stratégique national. La considération sérieuse des améliorations possibles du système de soutien à la recherche est requise afin de garantir que la recherche et les talents du Canada demeurent parmi les meilleurs au monde et ainsi nous assurer d'être en mesure de relever les défis et saisir les occasions qui se présenteront à nous aujourd'hui et dans l'avenir.

La nouvelle réalité de la recherche

Les niveaux de financement relativement bas de la recherche sont un aspect essentiel de l'histoire; cependant, même avec les réinvestissements nécessaires, le Canada doit aussi être plus intelligent dans la façon dont il organise son entreprise scientifique et de recherche. Notre réussite dépend de la conception des éléments du système de soutien à la recherche pour faire en sorte que les recherches ambitieuses soient non seulement réalisées, mais aussi menées et utilisées efficacement. Il s'agit notamment de la façon dont nous concevons notre système pour soutenir la recherche multidisciplinaire et interdisciplinaireNote de bas de page 3 et les partenariats internationaux, de la façon dont nous assurons l'agilité nécessaire pour relever les défis urgents et tirer parti des nouvelles occasions s'offrant à nous, de la façon dont nous coordonnons le financement de la recherche et des infrastructures qu'elle requiert, et de la façon dont nous relions la recherche, l'innovation et le talent afin de travailler ensemble pour relever les grands défis scientifiques de notre époque.

La nature de la recherche a considérablement évolué au cours des dernières décennies. Nos défis sociétaux les plus complexes exigent de plus en plus des solutions créatives qui rassemblent des perspectives multiples provenant de domaines divers. Par conséquent, la recherche est aujourd'hui plus internationale, plus collaborative et souvent plus multi et interdisciplinaire que jamais. Les défis cruciaux, comme la sécurité alimentaire, la transformation du travail et l'inégalité des revenus, les maladies infectieuses et chroniques, la transition énergétique et les changements climatiques, transcendent les disciplines et les frontières nationales; nous devons travailler au-delà des frontières traditionnelles pour trouver les réponses et les outils adaptés aux besoins des Canadiennes et Canadiens.

Un système de recherche de classe mondiale qui encourage les approches collaboratives est non seulement essentiel pour soutenir nos scientifiques et nos chercheurs, mais aussi pour assurer la capacité du Canada à relever les défis sociétaux qui se présenteront à nous. La pandémie de la COVID-19 et la question de l'adaptation aux changements climatiques soulignent l'importance d'un système de recherche agile et collaboratif pour relever les nouveaux défis, ainsi que l'importance de la coordination dans l'ensemble du système de soutien à la recherche pour tirer parti des ressources et des forces de ses parties constituantes afin de répondre aux priorités du gouvernement et d'appuyer la prise de décisions.

Pour suivre le rythme des autres pays de premier plan en matière de recherche, le Canada a besoin d'un système de soutien à la recherche et au talent qui permet d'établir des liens entre les disciplines et entre les structures que le Canada a créées pour les soutenir (p. ex., les conseils subventionnaires), ainsi que des liens entre les établissements et les chercheurs de l'ensemble du système de recherche, y compris l'industrie, les organismes sans but lucratif et le gouvernement. Notre système de soutien à la recherche doit être conçu de manière à encourager les partenariats pertinents afin d'assurer l'avenir du Canada et d'accroître l'impact de nos investissements en recherche.

Contexte historique et actuel du système de soutien à la recherche du Canada

Le système actuel de soutien à la recherche du Canada s'est adapté au fil des décennies, reflétant l'évolution des priorités de recherche et la nature même du fonctionnement des activités de recherche. Un certain nombre de rapports antérieurs ont fourni des lectures perspicaces du contexte historique du système actuel de soutien à la recherche du Canada, notamment le rapport de 2017 du comité d'Examen du soutien aux sciences fondamentales.

En général, les structures et la gouvernance actuelles du système de soutien ont été élaborées lorsque la plupart des activités de recherche étaient alignées sur le développement des disciplines universitaires particulières. Chacun des trois conseils subventionnaires (le Conseil de recherches en sciences naturelles et en génie (CRSNG), le Conseil de recherches en sciences humaines (CRSH) et les Instituts de recherche en santé du Canada (IRSC)) a été créé séparément, avec des rôles définis par la loi en fonction des disciplines et un rattachement envers des ministres distincts (le CRSNG et le CRSH sont liés aux portefeuilles de l'économie et de l'innovation, tandis que les IRSC sont liés au portefeuille de la santé). Les conseils subventionnaires ont été conçus pour et poursuivent leur soutien du talent et de la recherche dans leurs domaines respectifs.

Bien que les conseils subventionnaires aient des mandats propres à de grands domaines de recherche, il y a aussi un besoin croissant de soutenir la recherche multidisciplinaire et interdisciplinaire afin de répondre à des questions scientifiques complexes et d'aborder des domaines prioritaires et des occasions émergentes. Les conseils n'ont pas été créés avec des mandats de collaboration pour coordonner les programmes et les politiques ni pour fournir des réponses stratégiques coordonnées aux défis intersectoriels (c.-à-d., interdisciplinaires au sens large) qui sont de plus en plus courants dans le milieu de la recherche et nécessaires pour répondre aux besoins sociétaux pressants. Par conséquent, un certain nombre de programmes tripartites ont été créés pour combler cette lacune. Ces grands programmes (p. ex. le Fonds d'excellence en recherche Apogée Canada, les Chaires d'excellence en recherche du Canada, le Fonds Nouvelles frontières en recherche, le Fonds canadien de recherche biomédicale) sont en grande partie gérés par le Secrétariat des programmes interorganismes à l'intention des établissements (SPIIE), hébergé au CRSH, lequel exécute certains programmes des trois organismes au nom des trois conseils subventionnaires.

En plus des conseils subventionnaires, le gouvernement fédéral a créé et/ou financé un certain nombre d'autres organismes tiers importants pour soutenir le talent, la recherche, les infrastructures de recherche, la mobilisation des connaissances et l'innovation, notamment la Fondation canadienne pour l'innovation (FCI), Génome Canada, Mitacs et CIFAR.

Enfin, pour accroître la capacité et stimuler le potentiel d'innovation dans certains domaines prioritaires, un certain nombre de stratégies ou de consultations sectorielles ont été élaborées, ou sont en cours d'élaboration, afin de tirer parti de la capacité et de promouvoir la collaboration entre le milieu universitaire, l'industrie et le gouvernement (p. ex. génomique, intelligence artificielle, technologies quantiques, biofabrication et sciences de la vie). Ces stratégies sont gérées par Innovation, Sciences et Développement économique Canada (ISDE) en collaboration avec d'autres ministères concernés (p. ex. Santé Canada) dans le but de favoriser la formation de talents ciblés, la mobilisation des connaissances, l'innovation et la commercialisation.

En bref, les conseils subventionnaires jouent un rôle clé et spécifique dans l'écosystème de la recherche. Par ailleurs, un certain nombre d'autres entités et programmes ont été créés de manière quelque peu ad hoc afin de répondre à des besoins divers en matière de recherche, de talent et d'innovation et recoupent les mandats de plusieurs conseils ou se situent entre ou en dehors des programmes ou des mandats organisationnels existants.

Défis du système actuel de soutien à la recherche

Malgré les limites actuelles de notre système de soutien à la recherche, le Canada a réussi à générer des succès de recherche dans un large éventail de disciplines, et les conseils subventionnaires ont excellé dans leur mission principale de création de connaissances et de formation de talents. Cependant, cette approche a également entraîné une fragmentation importante du système, avec des conseils subventionnaires distincts et un certain nombre d'autres entités différentes et déconnectées, souvent responsables de mandats similaires, mais non coordonnés, dont beaucoup sont à petite échelle et disposent de ressources minimales.

La fragmentation a entraîné un manque de clarté sur les rôles et les responsabilités respectives de chacun et une augmentation de la charge administrative pour la communauté de la recherche (en raison des différents systèmes, règles et exigences, politiques, délais non harmonisés, etc.). La fragmentation a également entraîné d'importantes lacunes dans le soutien à la recherche : elle a rendu plus difficile le financement de certains types d'initiatives qui se situent entre ou en dehors des programmes ou des mandats organisationnels, y compris notamment la recherche intersectorielle, la recherche visant à répondre à des besoins sociétaux urgents, les programmes internationaux ambitieux et la précommercialisation. L'impact de la fragmentation est encore aggravé par l'absence d'une stratégie nationale ou d'une vision/objectifs communs pour la recherche canadienne qui permettrait d'orienter les divers acteurs dans la même direction.

Reconnaissant la nécessité d'une meilleure coordination, certaines mesures ont été prises pour rapprocher les différents acteurs du système, en particulier les trois conseils subventionnaires (CRSH, CRSNG, IRSC) et la FCI. Notamment, en 2017, la ministre des Sciences a lancé le Comité de coordination de la recherche au Canada (CCRC) qui a été mandaté pour coordonner davantage les programmes et les politiques liés à la recherche au Canada. Les membres du CCRC sont les présidents des trois conseils subventionnaires, de la FCI et du Conseil national de recherches du Canada (CNRC), la conseillère scientifique en chef (CSC) et les sous-ministres de l'ISDE et de Santé Canada. Le CCRC a été créé suite aux travaux du comité d'Examen du soutien fédéral aux sciences (2017) qui rapportait les défis découlant de la fragmentation du système de soutien à la recherche du Canada. Les travaux de l'actuel Comité consultatif sur le système fédéral de soutien à la recherche peuvent être considérés, en partie, comme un moyen d'évaluer l'efficacité de certaines mesures mises en œuvre par le gouvernement en réponse à l'Examen du soutien fédéral aux sciences.

Malgré les efforts sincères et la bonne volonté de toutes les personnes impliquées, le comité a entendu de la part de divers intervenants que le fonctionnement du CCRC n'ont pas généré les résultats souhaités par le gouvernement lors de la création de ce comité. Bien que le CCRC ait contribué à une meilleure compréhension des besoins et des contraintes des différents acteurs du système, sa conception même n'était pas adaptée à l'objectif de résoudre les défis du système actuel.

Le CCRC a été mis en place au sein d'un système qui n'a pas été conçu pour favoriser la coordination et les perspectives stratégiques partagées ou pour répondre aux enjeux émergents et urgents. Il ne s'agit pas d'un défi que les conseils subventionnaires et les autres acteurs du système peuvent facilement relever dans le cadre des structures actuelles, sans compromettre leurs mandats fondamentaux.

Cependant, le succès futur de la recherche et de ses applications bénéfiques pour le Canada dépend de la capacité à relever ce défi. Le comité a entendu que la réalité actuelle :

  • limite le développement, l'attraction et la rétention des talents;
  • restreint la capacité du Canada à entreprendre des recherches d'envergure impliquant des disciplines multiples;
  • nuit à la réactivité et à l'agilité du système face aux besoins sociétaux urgents;
  • limite les possibilités de partenariats internationaux et affaiblit la réputation du Canada auprès de ses pairs mondiaux;
  • limite les possibilités de mobilisation intersectorielle des connaissances;
  • limite les possibilités de favoriser les activités de précommercialisation et de les relier aux activités de commercialisation;
  • inhibe la capacité d'établir une vision stratégique prospective pour la science, la recherche et l'innovation;
  • impose des charges administratives toujours plus lourdes aux étudiants, aux chercheurs et aux établissements de recherche.

Le système de soutien à la recherche doit évoluer pour faire progresser l'intérêt national et la compétitivité internationale du Canada. Notre système de soutien à la recherche a besoin de changements stratégiques pour que le Canada puisse relever les importants défis actuels et futurs.

Mandat et approche

Mandat et portée du comité

L'honorable François-Philippe Champagne, ministre de l'Innovation, des Sciences et de l'Industrie, et l'honorable Jean-Yves Duclos, ministre de la Santé, ont lancé le Comité consultatif sur le système fédéral de soutien à la recherche en octobre 2022. Comme le stipule le mandat du comité, celui-ci a pour mission de :

« …fournir des conseils stratégiques indépendants et spécialisés pour aider le ministre de l'Innovation, des Sciences et de l'Industrie et le ministre de la Santé à respecter l'engagement qu'ils ont pris dans la lettre de mandat de « moderniser l'écosystème fédéral de financement de la recherche afin de maximiser l'impact des investissements dans l'excellence de la recherche et l'innovation qu'elle génère ». Pour mieux répondre aux priorités du gouvernement et aux besoins du milieu de recherche moderne, le comité examinera et recommandera des améliorations à la structure, à la gouvernance et à la gestion du système fédéral de soutien à la recherche universitaire, en mettant particulièrement l'accent sur les trois conseils subventionnaires fédéraux et la Fondation canadienne pour l'innovation (FCI). »

En particulier, les ministres ont demandé que les recommandations du comité visent à assurer que le soutien fédéral à la recherche universitaire canadienne soit :

  • coordonné et cohérent, en équilibrant le respect des besoins des communautés disciplinaires avec une perspective holistique entre les disciplines et entre la recherche, la formation et l'infrastructure associée;
  • sensible aux approches multidisciplinaires et interdisciplinaires, collaboratives et internationales qui sont de plus en plus la marque de la recherche et de l'innovation transformatrices;
  • suffisamment agile pour saisir les nouvelles opportunités et répondre aux nouveaux besoins et intérêts de la recherche, de l'économie et de la société;

Les ministres ont également demandé au comité de fournir :

  • des conseils sur les structures et la gouvernance afin de mieux soutenir le développement et la rétention des talents, ainsi que la mobilisation des connaissances, la commercialisation et l'innovation;
  • des commentaires sur le cadre proposé pour la prise de décision fédérale concernant les investissements dans les grandes installations de recherche, dans la mesure où il est lié à ses recommandations sur l'ensemble de la recherche universitaire.

La portée du mandat du groupe a été discutée à divers moments au cours des délibérations du groupe, y compris avec les parties prenantes. Compte tenu de la latitude accordée par le mandat, le comité a abordé la question de la portée de son mandat comme suit :

  • Leviers/outils : Le mandat du comité est explicite quant à l'accent qu'il met sur « la structure, la gouvernance et la gestion » du système fédéral de soutien à la recherche. Il n'est pas surprenant que le « financement » et les « programmes » aient été mentionnés à divers moments tout au long des consultations du groupe, tant par les membres du groupe que par les intervenants, en raison de leur interdépendance. Le financement, en particulier, est une condition de succès pour tout système de soutien à la recherche, et est donc trop important pour être ignoré dans ce rapport, surtout compte tenu des récents investissements vigoureux des pays pairs. Bien que les recommandations de ce comité soient axées sur la gouvernance, le comité souhaite également renforcer les messages contenus dans l'Examen du soutien aux sciences fondamentales concernant l'augmentation du financement de la recherche, et souligner l'importance cruciale du financement de nos étudiantes et étudiants chercheurs et de nos stagiaires postdoctoraux afin d'éviter un exode de personnes hautement qualifiées d'une ampleur inégalée depuis plusieurs décennies.
  • Joueurs clés : Le mandat du comité mentionne expressément les « trois conseils subventionnaires fédéraux et la Fondation canadienne pour l'innovation (FCI) » ainsi que « la recherche universitaire ». Il y a également plusieurs autres bailleurs de fonds (et exécutants) importants dont il faut tenir compte si l'on veut que les conseils du comité sur la coordination aient un impact maximal. Il s'agit notamment des organismes de recherche tiers (p. ex. Génome Canada, Mitacs), des ministères et organismes fédéraux à vocation scientifique (p. ex. CNRC, Pêches et Océans Canada, Environnement et Changement climatique Canada, Ressources naturelles Canada), d'autres organismes sans but lucratif, des gouvernements provinciaux et territoriaux et du secteur privé. La portée de la recherche universitaire (l'équivalent usuel de « academic research ») doit inclure un large éventail d'institutions, comprenant entre autres les universités, les collèges et les CÉGEPS, les polytechniques et les hôpitaux de recherche.
  • Activités : Il a également été demandé au comité de fournir « des conseils sur les structures et la gouvernance pour mieux soutenir le développement et la rétention des talents, ainsi que la mobilisation des connaissances, la commercialisation et l'innovation ». Par conséquent, le comité s'est principalement concentré sur le soutien à la recherche universitaire (extra-muros), tout en prêtant attention à l'ensemble du continuum de soutien, depuis le talent et la recherche jusqu'à la mobilisation des connaissances, l'innovation, la précommercialisation et la commercialisation. Si cette perspective globale sur l'ensemble du continuum n'est pas adoptée, on risque de négliger des aspects importants du système, car les chercheuses et chercheurs occupent de plus en plus des rôles multiples sur le continuum (p. ex., chercheuses entrepreneures).
  • Disciplines : Étant donné l'importance de la multidisciplinarité et de l'interdisciplinarité dans le mandat du comité, ce dernier a considéré toutes les disciplines savantes dans son champ d'action. Le comité reconnaît l'importance de soutenir l'excellence dans un large éventail de disciplines, ce qui enrichit le Canada. Le comité a également interprété le terme « recherche » de manière à inclure le continuum de la recherche, de la recherche fondamentale à la recherche appliquée et à l'innovation, et a inclus dans ses délibérations la recherche entreprise à l'initiative des chercheurs (recherche libre) et la recherche orientée en fonction d'enjeux prioritaires.

Engagement auprès des partenaires et des parties prenantes

Le comité a entrepris ses travaux sur une période d'environ trois mois, en commençant par une première réunion à la mi-octobre 2022. Les gains d'efficacité permis par les réunions virtuelles ont permis au comité d'examiner et de discuter un large éventail d'enjeux en un court laps de temps.

Les consultations ont constitué un élément clé du travail du comité. Le comité a rencontré des dizaines de parties prenantes et d'experts entre octobre et décembre 2022, ainsi que des représentants de certaines organisations de juridiction provinciales et internationales, afin d'identifier les meilleures pratiques et les leçons tirées de leur expérience.

Dans le cadre de ses activités, le comité a rencontré divers groupes, notamment des associations étudiantes, des groupes de professeurs, des associations d'universités et de collèges, des chercheurs (y compris des chercheurs autochtones), des intervenants d'hôpitaux de recherche, des bailleurs de fonds nationaux et provinciaux pour la recherche ainsi que des représentants industriels. À l'échelle internationale, le comité a rencontré des représentants de l'Allemagne, de la Norvège, du Royaume-Uni (R.-U.), de la France et des États-Unis.

En plus des réunions (virtuelles et en personne), le comité a lancé une consultation en ligne afin de recueillir l'avis d'un large éventail de parties prenantes. Au total, 682 personnes et organisations ont répondu au questionnaire en ligne. De plus, le comité a reçu 24 soumissions par courriel.

Le comité a également organisé une séance de discussion lors de la Conférence CSPC2022 sur les politiques scientifiques canadiennes (Ottawa), qui a donné à environ 200 intervenants l'occasion d'échanger directement avec des membres du comité sur son mandat et son approche, de fournir des commentaires verbaux et des suggestions ou de poser des questions.

Le comité est reconnaissant du temps et des efforts déployés par plus d'un millier de personnes et de groupes qui ont fait part de leurs précieux points de vue, que ce soit lors de réunions en personne ou virtuelles, ou par le biais d'envois par courriel ou du questionnaire en ligne.

Principes directeurs des recommandations

Sur la base des commentaires reçus et des délibérations du comité, plusieurs principes ont guidé les recommandations du comité. Ces principes sont les suivants :

  • Rechercher des solutions audacieuses et réalisables : Le comité a adopté comme principe directeur primordial de formuler des recommandations à la fois audacieuses et réalisables. Le comité reconnaît que les ajustements progressifs du système n'ont pas suffi et ne suffiront pas à susciter les changements nécessaires pour assurer la compétitivité du Canada en matière de recherche et d'innovation. Par ailleurs, les recommandations doivent être réalisables tant du point de vue du gouvernement que des autres intervenants du système. Cela signifie qu'elles ne doivent pas imposer un fardeau excessif aux intervenants et qu'elles doivent tenir compte, entre autres considérations, des réalités des politiques gouvernementales (y compris les aspects budgétaires).
  • Préserver l'excellence et les éléments qui fonctionnent bien : l'excellence est la caractéristique fondamentale de la science et de la recherche canadiennes, et les recommandations doivent veiller à ce que les changements proposés protègent et favorisent cette caractéristique importante du système. De plus, les trois conseils subventionnaires et la FCI jouissent d'une réputation mondiale bien méritée pour l'excellence liée à leur mandat fondamental (c'est-à-dire le soutien de la recherche disciplinaire suscitée et entreprise par les chercheurs et l'infrastructure de recherche, respectivement). Les recommandations ne devraient pas perturber ce qui fonctionne déjà bien, mais plutôt continuer à s'appuyer sur nos réussites et à combler les lacunes et les faiblesses du système.
  • Contribuer à la clarté du système : Les recommandations devraient aider à clarifier et à donner de la cohérence au système, plutôt que d'accroître la fragmentation et la confusion. Plusieurs intervenants ont indiqué au comité qu'il faut mieux comprendre les rôles et les responsabilités des acteurs du système, notamment en ce qui concerne leur objectif et les résultats attendus pour les Canadiennes et Canadiens.
  • S'appuyer sur les recommandations antérieures pour assurer la cohérence des avis : Comme il a été mentionné précédemment, ce comité s'inscrit dans une lignée de comités d'experts qui ont examiné et conseillé le gouvernement sur divers aspects du système canadien de recherche et d'innovation. Le plus important (et le plus récent) de ces comités est le Comité d'examen de soutien aux sciences fondamentales. Notre comité estime que les principales conclusions et recommandations des rapports précédents sont toujours pertinentes. Plutôt que de réécrire ces rapports, notre comité cherche à renforcer les messages clés et les utilise comme point de départ pour comprendre l'état actuel de l'écosystème canadien et du contexte mondial dans lequel il évolue. En particulier, notre examen s'appuie sur leur analyse du financement requis pour soutenir des collaborations plus riches entre les acteurs ainsi que sur les structures et la gouvernance du système requises pour soutenir le financement de ces activités.
  • Rechercher l'efficacité : Les recommandations relatives à la gouvernance devraient chercher à tirer parti ou à mobiliser des ressources existantes autant que possible. Compte tenu de la nécessité urgente d'augmenter le financement direct des étudiantes et étudiants chercheurs, des stagiaires postdoctoraux, des chercheurs et des établissements de recherche, les recommandations devraient chercher à minimiser tout nouveau coût administratif et/ou de frais généraux. Cela dit, veiller à ce que les structures administratives disposent de ressources suffisantes peut également permettre de réaliser des gains d'efficacité en répondant mieux aux besoins des chercheuses et chercheurs ainsi qu'à ceux liés aux enjeux prioritaires nationaux.
  • Soutenir le talent : toutes les régions du Canada ont besoin de talents pour s'épanouir sur le plan économique et social. Le talent est essentiel à la compétitivité et au succès du Canada et doit être une priorité absolue dans tous les aspects du système de soutien à la recherche, y compris le financement et la gouvernance. Il est essentiel, pour la réussite du système lui-même, de veiller à ce que le système soutienne suffisamment les étudiantes et étudiants chercheurs, stagiaires postdoctoraux et les autres personnes hautement qualifiées (PHQ), ainsi que l'ensemble de la carrière des chercheuses et chercheurs.
  • Assurer l'équilibre entre les différentes approches en recherche : bien que le besoin de nouveaux instruments pour soutenir la recherche interdisciplinaire soit évident, le comité a entendu des préoccupations quant au fait que les exigences relatives aux équipes de recherche multidisciplinaires peuvent entraver la recherche disciplinaire d'envergure, tout aussi nécessaire à la création de connaissances transformatrices. En particulier, certains s'inquiètent du fait qu'en encourageant les approches multidisciplinaires et novatrices, le système pourrait aller trop loin, de sorte que les nouvelles approches pourraient être privilégiées a priori, même lorsque des approches plus classiques (avec des besoins en ressources plus conventionnels) pourraient être les plus appropriées pour faire avancer certains savoirs. Par conséquent, le système devrait être flexible pour répondre à une gamme variée de besoins en matière de recherche, et permettre la recherche multidisciplinaire et innovatrice lorsqu'elle est pertinente tout en s'assurant que la recherche disciplinaire fondamentale soit soutenue adéquatement.
  • Fournir un soutien efficace et agile à la recherche orientée en fonction d'enjeux prioritaires permettant de répondre aux nouvelles opportunités et aux nouveaux défis : L'une des plus grandes lacunes du système actuel est sa capacité à répondre rapidement et de façon novatrice aux besoins sociétaux et économiques émergents. Le système doit être doté d'une capacité à répondre efficacement à de tels défis, sans pour autant dénaturer ou détourner le soutien actuel à la recherche.
  • Reconnaître l'importance de la recherche fondamentale et de la recherche suscitée et entreprise à l'initiative des chercheurs : la recherche fondamentale, menée à l'initiative des chercheurs, est la pierre angulaire de l'activité de recherche et doit être soutenue à des niveaux compétitifs sur le plan international. Le succès de projets orientés en fonction d'enjeux prioritaires dépendra essentiellement de l'expertise établie et des percées générées par la recherche entreprise à l'initiative des chercheurs. La recherche libre est la condition préalable du succès de la recherche orientée. De nouveaux talents seront attirés au Canada par l'enthousiasme que suscitent la recherche axée sur la découverte et ses applications futures. Dans cette optique, la recherche libre, suscitée et entreprise à l'initiative des chercheurs constitue la fondation essentielle de l'ensemble de la génération des talents.
  • Promouvoir l'inclusivité : les structures et la gouvernance du système de soutien à la recherche doivent promouvoir l'inclusivité et la diversité. Cela nécessite une structure de gouvernance qui, elle-même, inclut une diversité de perspectives. Pour que le milieu de la recherche réalise son plein potentiel, les structures de gouvernance doivent chercher à renforcer les capacités de diverses communautés, en particulier celles qui sont sous-représentées dans la recherche et qui sont confrontées à des obstacles structurels à la progression de leur formation ou de leur carrière, et veiller à ce que les chercheuses et chercheurs puissent s'épanouir dans la langue officielle de leur choix.
  • S'inspirer des modèles internationaux : l'adaptation d'un système de soutien à la recherche aux nouvelles réalités du milieu de la recherche contemporaine n'est pas sans précédent – le Royaume-Uni et les Pays-Bas, par exemple, ont adapté leurs systèmes de financement au cours des dernières années, tout comme le Québec. D'autres pays, comme l'Allemagne et les États-Unis, continuent de figurer parmi les leaders mondiaux en ce qui concerne les résultats de leurs systèmes de recherche. Bien que le contexte canadien soit unique parmi ses pairs, d'importantes leçons peuvent être tirées d'autres contextes nationaux pour inspirer une approche typiquement canadienne.
  • Adopter une approche écosystémique : les recommandations doivent adopter une approche écosystémique, selon laquelle les organisations individuelles se considéreront comme faisant partie d'un système interconnecté plutôt que d'une constellation d'entités isolées. Les constituantes du système contribueront collectivement à des résultats positifs pour les Canadiennes et Canadiens.

Le comité espère que ses recommandations, qui sont articulées dans les sections suivantes du présent rapport, seront considérées et analysées à la lumière de ces principes.

Une approche audacieuse pour le soutien de la recherche

Les arguments en faveur de la Fondation canadienne pour le savoir et la science (FCSS)

Le Canada n'est pas le seul pays à rechercher des approches renouvelées pour soutenir la recherche multi et interdisciplinaire, urgente et orientée en fonction d'enjeux prioritaires. Même avant la pandémie, de nombreux pays examinaient cette question à la lumière de la nature changeante de la recherche et de la valeur d'un rehaussement des activités de mobilisation et de la commercialisation des connaissances.

Tel décrit dans la section précédente, les conseils subventionnaires ont été conçus d'abord et avant tout pour soutenir la recherche émanant de disciplines. Dans la plupart des cas, ce modèle convient à la nature de l'activité de recherche, comme en témoigne la prédominance d'approches similaires dans de nombreux autres contextes nationaux (particulièrement en ce qui concerne la recherche en santé, qui est souvent soutenue séparément des autres disciplines). Bien que cette approche ait été jugée suffisante dans le passé, le milieu de la recherche contemporaine a développé des approches additionnelles de recherche caractérisées de plus en plus par la multidisciplinarité et l'interdisciplinarité. Par ailleurs, face à de grands défis mondiaux, une perspective stratégique plus englobante à l'échelle du système est de plus en plus nécessaire. Par exemple, le comité a entendu que les chercheurs interdisciplinaires ou les chercheurs travaillant aux frontières des conseils subventionnaires ont souvent de la difficulté à accéder aux possibilités de financement permettant la réalisation de leurs projets. Bien que le Comité d'évaluation par les pairs interdisciplinaire des trois organismes, établi pour les principaux programmes du CRSNG, du CRSH et des IRSC, s'attaque partiellement à ce problème, les taux de réussite sont faibles et la mise en place de nouvelles initiatives d'envergure est ardue.

Les rôles des différents acteurs du système de soutien à la recherche, y compris ceux mandatés de soutenir la coordination, ne sont pas toujours bien définis ou bien compris. En outre, l'ajout ad hoc de nouveaux programmes pour combler les lacunes ou pour répondre aux opportunités émergentes a induit une plus grande fragmentation du système. Cette situation a entraîné un niveau élevé de complexité, ajoutant des charges administratives tant pour les bailleurs de fonds que pour les chercheuses et chercheurs, et leurs institutions. Cela nuit à la réactivité et à l'efficacité avec lesquelles le système peut relever les défis émergents de manière performante. Le CCRC a été créé afin de favoriser une plus grande harmonisation, intégration, collaboration et coordination des programmes, processus et politiques entre les conseils subventionnaires et la FCI, et ainsi de contribuer à la vitalité du système dans son ensemble. Toutefois, le comité a constaté des divergences importantes entre les perceptions des intervenants et certains membres du CCRC eux-mêmes quant à l'efficacité et aux progrès réalisés par le CCRC. En particulier, les chercheurs et les établissements ont toujours du mal à maîtriser toute la gamme de soutiens et de programmes, et continuent d'observer des différences majeures dans les processus entre les conseils. La fragmentation et la complexité du système ont réduit l'efficacité et entravé l'agilité.

Conformément à l'opinion exprimée par de nombreux intervenants, le comité d'experts a observé une variété de défis qui nuisent à l'efficacité, notamment :

  • Le CCRC n'a pas le pouvoir d'induire des changements dans les opérations des conseils subventionnaires qui pourraient améliorer la coordination. De plus, il n'y a pas d'organisme distinct (p. ex., un conseil d'administration) qui assure la supervision du CCRC.
  • L'exigence selon laquelle la présidence du CCRC doit être occupée par un président de conseil subventionnaire est problématique, affecte l'indépendance du CCRC et crée la possibilité de conflits d'intérêts réels ou perçus.
  • Compte tenu du nombre élevé d'autres acteurs importants participant au financement de la recherche, la composition étroite du CCRC (c.-à-d. les conseils subventionnaires, la FCI, le CNRC, la CSC, l'ISDE et Santé Canada) limite sa capacité à réaliser une coordination plus large.
  • Les discussions au CCRC semblent avoir porté sur des questions opérationnelles plutôt que sur des questions stratégiques ayant une portée systémique. En particulier, le comité note l'absence d'un plan stratégique global avec lequel les conseils pourraient aligner leurs plans stratégiques individuels afin de mieux exploiter et coordonner le soutien à la recherche existant. À l'heure actuelle, et conformément aux mandats et aux coutumes en vigueur, le plan stratégique de chaque conseil est élaboré de façon complètement autonome, avec peu d'attention accordée à l'alignement ou à l'harmonisation avec d'autres acteurs complémentaires.

Le comité observe trois autres lacunes importantes dans le système que ni le CCRC ni la CSC ne sont bien placés pour combler compte tenu des mandats existants. À savoir, il manque au Canada :

  • un mécanisme doté d'un mandat clair pour faciliter la recherche urgente, internationale, multi et interdisciplinaire, ou orientée en fonction d'enjeux prioritaires, comme cela a été nécessaire pendant la pandémie;
  • les mécanismes appropriés pour permettre au gouvernement fédéral de travailler avec des instruments autres que ceux des Conseils et de la FCI, comme les partenaires autochtones et les provinces et territoires;
  • une voix unique et coordonnée pour la science et la recherche canadiennes, ce qui présente des défis pour renforcer le soutien à la science et à la recherche au Canada ainsi que pour participer à certaines initiatives internationales.

Par conséquent, le comité conclut qu'une nouvelle approche de gouvernance est nécessaire pour combler les lacunes persistantes du système. Cette conclusion est conforme à l'opinion exprimée par le comité d'Examen du soutien aux sciences fondamentales, qui a noté qu'une coordination et une supervision renouvelées pourraient être nécessaires si les mesures prises jusqu'à présent (comme le CCRC) n'ont pas abouti à une culture plus forte de collaboration et de coordination.

Étude de modèles dans d'autres contextes nationaux

Le comité a examiné plusieurs modèles adoptés dans d'autres contextes nationaux qui cherchaient à améliorer la coordination et combler les autres lacunes identifiées. Le plus connu d'entre eux est peut-être le UK Research and Innovation (UKRI), qui a été lancé par le gouvernement britannique en 2018. L'UKRI a rassemblé les sept conseils de recherche disciplinaires du Royaume-Uni, auparavant distincts, ainsi que deux organismes de financement supplémentaires (c'est-à-dire Innovate UK et Research England), en une seule organisation placée sous la direction d'un directeur général et d'un conseil d'administration communs. Ce faisant, l'UKRI vise à faciliter la recherche multidisciplinaire et interdisciplinaire, à améliorer les liens entre la recherche, l'innovation et la commercialisation, et à offrir une voix unifiée au gouvernement et aux partenaires internationaux.

L'UKRI est une organisation relativement nouvelle et, comme l'ont suggéré ses rapports d'évaluation préliminaires, il est encore trop tôt pour évaluer pleinement si ses objectifs ont été atteints. Certains signes préliminaires permettent d'espérer qu'il offrira effectivement un environnement de recherche et d'innovation solide pour le Royaume-Uni, mais certains signes indiquent également que ce haut niveau de centralisation a augmenté la complexité administrative et les dépenses sans pour autant accroître la coordination à la hauteur prévue ou à la vitesse souhaitée. L'expérience se poursuit.

Le Royaume-Uni n'est toutefois pas le seul à avoir réformé sa gouvernance en matière de recherche et d'innovation. Les Pays-Bas, par exemple, ont entrepris une refonte organisationnelle en 2017 en créant une organisation faîtière ou « parapluie » (Nederlandse Organisatie voor Wetenschappelijk Onderzoek) pour mieux faciliter la collaboration multidisciplinaire. Même au Canada, la création des Fonds de recherche du Québec (FRQ) en 2011 visait à établir une voix unique pour la recherche et à promouvoir les synergies entre les disciplines en restructurant les trois organismes de financement de la recherche du Québec, auparavant autonomes, sous une structure de gouvernance partagée. Alors que des approches plus harmonisées ont été adoptées dans certains contextes nationaux homologues, d'autres, comme la France, l'Allemagne et les États-Unis qui ont de solides traditions d'excellence en matière de recherche, ont adopté des approches relativement décentralisées avec des entités axées sur des rôles spécifiques et distincts dans le continuum de la recherche et de l'innovation, y compris certaines axées sur la recherche libre à l'initiative des chercheurs et d'autres axées sur des programmes spécifiques orientés sur des enjeux prioritaires.

L'évolution de ces systèmes nationaux reflète leur propre histoire, leurs besoins et leurs particularités institutionnelles et ne peut donc pas être importée en bloc pour répondre aux besoins canadiens. Ils offrent tous des leçons clés qui devraient inspirer notre approche pour le Canada, mais le groupe d'experts a finalement conclu qu'une approche typiquement canadienne inspirée par des éléments de ces approches servirait mieux l'avenir du Canada.

Création de la FCSS

Le comité recommande que le gouvernement du Canada crée un nouvel organisme pour relever les défis du système actuel tout en préservant les conseils subventionnaires en tant qu'entités indépendantes afin qu'elles continuent d'exceller dans le financement de la recherche libre, suscitée et entreprise par les chercheurs. Ce nouvel organisme comblerait les lacunes identifiées par le comité et fournirait un mécanisme plus agile pour répondre aux besoins émergents et aux nouvelles occasions de développement sans perturber les autres activités performantes du système de recherche canadien. Cela permettrait également de clarifier les rôles complémentaires des divers acteurs de l'écosystème. Le nouvel organisme intégrerait les objectifs initiaux du CCRC et s'en inspirerait, le remplaçant ainsi.

Recommandation 1 : Le gouvernement du Canada devrait créer une nouvelle organisation, appelée Fondation canadienne du savoir et de la science (FCSS) qui agirait comme mécanisme pour répondre rapidement aux nouveaux besoins en matière de recherche et d'innovationNote de bas de page 4, offrir la plupart des programmes interorganismes, et améliorer la coordination, la planification et la capacité d'élaboration des politiques pour l'ensemble du système de soutien à la recherche.

Le comité suggère fortement de donner à la nouvelle organisation un nom qui la rendrait facilement reconnaissable parmi nos partenaires internationaux ainsi que dans notre propre société civile. Le comité propose au gouvernement d'envisager le nom de Fondation canadienne pour le savoir et la science-FCSS (Canadian Knowledge and Science Foundation (CKSF)), qui contribuerait à donner un profil élevé à l'organisation (semblable à la marque forte de la National Science Foundation aux États-Unis). Le comité recommande d'inclure le mot « savoir » dans le nom afin de s'assurer que les perspectives autochtones, ainsi que la recherche en arts, lettres et sciences humaines et d'autres communautés ayant des systèmes de connaissances différents, se voient interpelés dans le nouvel organisme. Cela permet également d'établir un lien avec la mobilisation des connaissances qui est un objectif important du nouvel organisme. Bien que le comité qualifie l'organisme de « fondation » pour refléter sa capacité à combiner des fonds provenant de diverses sources (voir ci-dessous), le comité envisage l'organisme comme une agence gouvernementale, et non comme une société autonome à but non lucratif.Note de bas de page 5

Rôles et responsabilités de la FCSS

Alors que la FCSS reprendrait entre autres le mandat du CCRC, le comité envisage un ensemble de rôles et de responsabilités beaucoup plus large pour la nouvelle organisation afin de combler les lacunes identifiées par le comité dans le système actuel.

Ainsi, le comité envisage trois rôles clés pour la FCSS :

Premièrement, la FCSS soutiendrait uneréponse plus rapide et efficace aux besoins émergents en matière de recherche et d'innovation, y compris ceux auxquels est confronté le gouvernement du Canada, comme cela a été le cas pendant la pandémie, en identifiant et en fournissant des programmes qui mobilisent la communauté en soutenant la recherche stratégique, orientée en fonction d'enjeux prioritaires, multidisciplinaire, interdisciplinaire et intersectorielle, urgente et à haut risque et à grandes retombées, ainsi que certains objectifs de mobilisation des talents et des connaissances (voir ci-dessous).Par exemple, la programmation partagée des trois organismes serait assurée par la FCSS. Lorsque cela s'avère pertinent pour atteindre les objectifs d'une orientation prioritaire, la FCSS devrait avoir le pouvoir de fournir un financement à des partenaires de projet tels que l'industrie (y compris les jeunes entreprises de recherche) et d'autres partenaires non universitaires. La FCSS travaillerait avec d'autres organisations, le cas échéant, pour tirer parti des mandats et des pouvoirs existants afin d'éviter de dupliquer les capacités des autres. En reconnaissance du fait que la recherche orientée en fonction d'enjeux prioritaires ne peut progresser que si des programmes vigoureux de recherche fondamentale ou libre, comme ceux proposés par les conseils, sont en place nous nous attendons à ce que la plupart des financements axés sur la mission incluent un financement correspondant aux conseils existants. La FCSS identifierait également les autres organisations (par exemple, des organisations autochtones, Mitacs) les mieux placées pour fournir des éléments de programmes orientés en fonctions d'enjeux prioritaires et donnerait au gouvernement la possibilité de financer ces organisations directement (par exemple, par le biais d'accords de contribution) ou par le biais de fonds distribués par la FCSS. Dans le cas d'un financement direct par le gouvernement à d'autres organismes de financement (par exemple, Mitacs) pour des programmes orientés en fonction d'enjeux prioritaires, la FCSS conseillerait le gouvernement sur la distribution appropriée.

Par ailleurs, la FCSS faciliterait davantage la réponse rapide en fournissant un nouveau mécanisme pour offrir des solutions de recherche à travers le gouvernement fédéral en lançant et en administrant des appels de fonds au nom des ministères (sans se limiter à l'ISDE et à Santé Canada). Elle permettrait également de lancer des appels de fonds pour la recherche orientée en fonction d'enjeux prioritaires ou pour la précommercialisation avec des partenaires externes, sur demande, en combinant (ou en mélangeant) les fonds, y compris ceux des provinces/territoires et des partenaires internationaux qui le souhaiteraient. Toutefois, cela n'empêcherait pas d'autres acteurs du système de lancer leurs propres appels. La FCSS faciliterait alors la mobilisation des connaissances des solutions et des résultats de recherche générés par la communauté des chercheurs. Cette approche au financement mixte et cette approche pluriministérielle, bien que ne constituant pas des prescriptions universelles, fourniraient au gouvernement des outils plus étendus et intégrés lui permettant de mieux répondre à certains des principaux défis multi et interdisciplinaires qui nous attendent tous, tels que l'adaptation au changement climatique et la transition énergétique, la préparation aux pandémies, la résilience des sociétés démocratiques et des économies en mutation, et la sécurité alimentaire mondiale. Ces grands défis toucheront tous les pays et il est essentiel que le Canada apporte ses propres solutions pour les relever. Cependant, certains défis sont spécifiques au Canada et le gouvernement pourrait souhaiter des solutions de recherche pour guider les politiques fondées sur des données probantes dans les années à venir pour un certain nombre de défis clés. Parmi ces défis, citons les enjeux de santé publique dans une société vieillissante, l'atténuation des impacts des changements climatiques dans le Nord, la conciliation de la dette nationale avec la pression croissante sur les programmes sociaux, et la compréhension de la transformation de l'économie induite par l'intelligence artificielle ou le « friendshoring ».

Deuxièmement, la FCSS soutiendrait la coordination et la planification dans l'ensemble du système de recherche en fournissant un mécanisme aux conseils subventionnaires, à la FCI, à Mitacs, à Génome Canada et à d'autres partenaires financiers clés (selon le cas) pour simplifier, harmoniser, intégrer et coordonner les programmes, les processus et les politiques, le cas échéant. Cela devrait inclure, sans s'y limiter, la coordination des approches visant à faire progresser les objectifs liés à l'équité, à la diversité et à l'inclusion (EDI), comme la recherche autochtone, l'avancement des chercheurs noirs et l'assurance que la capacité de recherche dans les deux langues officielles est encouragée et soutenue. Pour favoriser une meilleure harmonisation au sein du système, une fonction clé de la FCSS serait l'élaboration d'un plan stratégique intégré pour le système de soutien à la recherche qui éclairerait l'élaboration des plans stratégiques individuels des conseils et des autres partenaires financiers (p. ex., la FCI) afin de promouvoir une perspective mieux intégrée. Tous les partenaires financiers devraient être encouragés à considérer le plan stratégique intégré dans le développement de leurs propres plans.

Troisièmement, la FCSS serait le siège de la planification et de la mise en œuvre coordonnées des programmes de développement des talents, y compris, mais sans s'y limiter, les bourses d'études et de recherche, les programmes des Chaires de recherche du Canada (CRC) et des Chaires d'excellence en recherche du Canada (CERC). Étant donné que le cœur de l'écosystème de la recherche et de l'innovation repose sur le développement de chercheurs et d'innovateurs talentueux, il est essentiel d'adopter une approche coordonnée et équitable pour soutenir la prochaine génération de talents canadiens. Grâce à un financement accru pour les stagiaires dans l'ensemble de l'écosystème (voir la recommandation 6), la FCSS veillera à ce que des programmes novateurs soient élaborés pour former les scientifiques et les universitaires interdisciplinaires dont le Canada a besoin pour rester à l'avant-garde sur la scène internationale, et pour attirer et retenir les meilleurs talents d'ici et d'ailleurs.

En tant qu'organisme responsable de la coordination, la FCSS devrait servir de portail pour les partenaires gouvernementaux et internationaux souhaitant mener à bien des recherches stratégiques orientées en fonction d'enjeux prioritaires ou des collaborations internationales de grande envergure, notamment par le biais d'une fonction de triage afin de s'assurer que les partenaires puissent se connecter au bon point de contact. La FCSS devrait également servir de porte-parole harmonisé de la science et de la recherche canadiennes auprès des décideurs gouvernementaux, de la société civile et des partenaires internationaux.

Le nouvel organisme comblera les lacunes observées par le comité dans le système de soutien actuel et développera un plan stratégique intégré en collaboration avec les différents acteurs de l'écosystème de la recherche au Canada. Cela permettra aux conseils subventionnaires, avec leur autonomie relative et leurs propres mandats, de se concentrer sur ce qu'ils font bien tout en évitant la dérive de leur mission. Elle permettra également de mieux équilibrer et distinguer, au sein du système de soutien, les entités qui appuient la recherche entreprise à l'initiative des chercheurs et la recherche orientée en fonction d'enjeux prioritaires. La recommandation du comité concernant la structure de la FCSS repose sur la préservation des conseils subventionnaires existants en tant que bailleurs de fonds de l'excellence dans la recherche libre, suscitée et entreprise par les chercheurs. La FCSS n'est pas conçue pour remplacer les conseils subventionnaires existants. Notre approche reconnaît la pertinence d'avoir des entités distinctes (un peu comme le font les États-Unis et l'Allemagne) avec des mandats complémentaires pour leur permettre de se concentrer sur les domaines d'excellence, tout en fournissant un organisme d'harmonisation de niveau supérieur qui offre un point de contact plus clair vers l'extérieur (un peu comme le font le Royaume-Uni et les Pays-Bas). De manière tout à fait canadienne, la FCSS pourrait permettre des expérimentations et des partenariats provinciaux et territoriaux inédits grâce à la possibilité de lancer des appels de fonds mixtes orientés en fonctions d'enjeux prioritaires.

Recommandation 2 : Les conseils subventionnaires existants devraient être préservés en tant que mécanismes essentiels pour soutenir l'excellence de la recherche suscitée et entreprise par les chercheurs ainsi que le développement des talents.

Gouvernance et leadership

Une supervision forte et des responsabilités claires sont nécessaires au succès de la FCSS. Le comité recommande la structure organisationnelle suivante pour la FCSS.

Conseil d'administration

La FCSS devrait être dirigée par un conseil d'administration qui prendrait en charge la gouvernance de l'organisation, y compris l'identification des priorités et l'établissement et la supervision des orientations et objectifs stratégiques de l'organisation. Le conseil d'administration évaluera également la performance globale de la FCSS, notamment en ce qui concerne la réalisation de ses objectifs. En outre, le conseil fournira des informations au gouvernement sur l'allocation de fonds pour les initiatives de recherche orientées en fonction d'enjeux prioritaires.

Le conseil pourrait être présidé par la conseillère scientifique en chef (CSC). Cela permettrait de mieux relier la science gouvernementale à la communauté de recherche au sens large et de donner une voix plus forte à la CSC au sein des communautés de recherche canadiennes et internationales. Pour les programmes exécutés par la FCSS, la supervision stratégique serait assurée par le conseil de la FCSS.

Les membres du conseil d'administration devraient provenir de diverses parties de l'écosystème de la recherche, y compris du milieu universitaire (en tenant compte de la représentation d'une diversité d'universités – des grandes universités situées dans les grands centres aux petites institutions jouant un rôle clé dans leurs communautés – ainsi que d'autres institutions telles que les collèges, les CÉGEPS et les polytechniques), de l'industrie (en particulier dans des secteurs où l'innovation joue un grand rôle) et des organismes à but non lucratif. Les considérations relatives aux expertises requises et l'EDI devraient également être des critères pour déterminer la composition du conseil. Les sous-ministres de l'ISDE et de Santé Canada siégeraient également au conseil, de même que les présidents des conseils ou des conseils d'administration des trois conseils subventionnaires, ainsi que ceux de la FCI, Mitacs et Génome Canada.

Présidence

La mise en œuvre des objectifs stratégiques et des opérations quotidiennes de la FCSS serait supervisée par une personne assumant la présidence dédiée, à temps plein, disposant des ressources nécessaires pour soutenir le mandat et la direction stratégique de l'organisation. Le mandat de la présidence inclurait, sans s'y limiter, l'assurance que la conception des programmes de la FCSS s'aligne sur les capacités des autres organisations de l'écosystème. La présidence, avec le conseil d'administration, sera l'intermédiaire entre l'organisation et le gouvernement. La présidence conseillera également le conseil d'administration sur la stratégie et le tiendra au courant des performances de l'organisation.

La personne assumant la présidence ne doit pas cumuler son mandat à celui de la présidence d'un autre conseil subventionnaire ou d'une autre responsabilité gouvernementale. La personne présidente devrait également agir à titre de membre observateur au sein du conseil d'administration de la FCSS. Le gouvernement pourrait s'inspirer du rôle de PDG de l'UKRI pour déterminer le profil approprié de la présidence (c'est-à-dire un ou une universitaire ou scientifique de grande distinction possédant une solide expérience en gestion).

Comité de coordination

La principale responsabilité du comité de coordination serait d'apporter une contribution stratégique à la conception des programmes sous la responsabilité de la FCSS, notamment en assurant la cohérence avec les enjeux prioritaires du gouvernement, la complémentarité avec d'autres programmes et les liens avec les capacités d'autres organisations. Le comité aidera le président à trier les questions et les demandes reçues par la FCSS. De plus, le comité de coordination prendrait la direction de la coordination/harmonisation des activités des membres du comité, y compris le développement d'un plan de recherche stratégique global intégré. Étant donné que le CCRC serait dissous, le comité de coordination, en partenariat avec les peuples autochtones, maintiendrait et mettrait à jour le plan stratégique existant pour la recherche autochtone et la formation à la recherche élaboré par le CCRC.

Le comité de coordination serait modelé sur le CCRC (sans être identique), composé des présidents de la FCSS, des conseils subventionnaires et de la FCI, et élargi pour inclure également les personnes dirigeant Génome Canada et Mitacs. L'inclusion des présidents des conseils subventionnaires au sein du comité de coordination garantit que les discussions de la FCSS sont réellement interdisciplinaires et que les présidents participent à la prise de décision concernant toutes les activités de la FCSS. Le comité de coordination permettrait de faire le lien entre la recherche, le talent et l'infrastructure dans une perspective systémique. Étant donné le rôle transversal de l'ISDE et de Santé Canada par rapport au milieu de recherche, on s'attend à ce qu'ils participent régulièrement au comité. D'autres intervenants pourraient être invités par la présidence à contribuer au comité de coordination selon les besoins (p. ex., recherche orientée en fonction d'enjeux prioritaires, l'innovation, stratégie talent), notamment des représentants de ministères à vocation scientifique (p. ex., Environnement et Changement climatique Canada, Pêches et Océans Canada) ainsi que les dirigeants du CNRC et de CIFAR, entre autres.

Direction des politiques

La direction des politiques appuierait la présidence et le comité de coordination en fournissant des analyses et des conseils stratégiques sur les approches de pointe en matière de soutien à la recherche et d'autres questions clés (p. ex. l'examen des obstacles à la participation à la recherche et aux programmes de soutien aux talents) afin d'éclairer et d'appuyer la prise de décision liée à la programmation. Ce faisant, il compléterait le rôle de l'ISDE et de Santé Canada qui continueraient de diriger les travaux liés aux autorisations stratégiques qui régissent les nouveaux programmes, en veillant à l'harmonisation avec les priorités gouvernementales et en jouant un rôle dans la supervision pour assurer l'alignement continu entre les programmes et leurs mandats stratégiques. En conséquence, il devrait y avoir un lien entre les fonctions de politique de l'ISDE, de Santé Canada et de la FCSS.

La fonction d'élaboration des politiques devrait également être liée à d'autres éléments du système fonctionnant à l'extérieur de la FCSS, y compris d'autres ministères fédéraux clés, un nouvel organisme consultatif (discuté dans la section suivante) et d'autres programmes/initiatives axés sur l'innovation et les entreprises. Étant donné que certaines provinces ont exprimé au comité le désir que le gouvernement fédéral améliore la consultation et la coordination en matière de programmation et de financement, la direction des politiques devrait également assurer une fonction de liaison avec les provinces et les territoires afin de discuter et de partager l'information sur les politiques et les programmes liés à la recherche et à l'innovation, afin de mieux soutenir les capacités de recherche et d'innovation tant provinciales et territoriales que fédérales.

La direction des politiques devrait également comprendre des conseillers pour les questions autochtones, de l'EDI, de la lutte contre le racisme et des enjeux liés à la francophonie afin de s'assurer que ces perspectives sont intégrées dans ses analyses et ses conseils. La FCSS devrait également s'associer au Cercle de leadership autochtone en recherche, qui a été annoncé au début de 2022.

Structure proposée pour la FCSS

Un organigramme montrant la structure proposée de la Fondation canadienne du savoir et de la science, y compris les différentes composantes de la structure, les membres et les rôles.

Structure proposée pour la FCSS – Version textuelle

L'organigramme illustre la structure proposée de la Fondation canadienne du savoir et de la science, y compris les différentes composantes de la structure organisationnelle, les membres et leurs rôles, ainsi que les relations entre elles.

Il existe quatre niveaux principaux de la structure organisationnelle :

  • Le ministre de l'Innovation, des Sciences et de l'Industrie et le ministre de la Santé sont au sommet.
  • Sous les ministres se trouve le conseil d'administration, qui est présidé par la conseillère scientifique en chef et composé de membres du milieu académique, de l'industrie et d'organismes à but non lucratif, ainsi que de sous-ministres, de présidents de conseil et d'un représentant autochtone.
  • Sous le conseil d'administration se trouve le président, qui est un poste dédié et à temps plein.
  • Deux organismes relèvent du président :
    • Le premier organisme sous l'autorité du président est un comité de coordination présidé par le président. Les membres du comité de coordination comprennent les présidents du CRSNG, du CRSH, des IRSC, de la FCI, de Génome Canada et de Mitacs. Il peut également y avoir des contributeurs ad hoc au comité de coordination, tels que le CNRC, le CIFAR, des ministères gouvernementaux et d'autres, selon le cas. Le comité de coordination contient également une équipe responsable de l'exécution des programmes, qui comprend un comité de gestion de programme avec des représentants d'ISDE et de Santé Canada.
    • Le deuxième organisme relevant du président est une direction des politiques qui fournit des analyses et des conseils pour soutenir le comité de coordination et le président, qui fait le lien entre la Fondation, un organisme consultatif et les programmes du gouvernement fédéral destinés aux entreprises, et qui assure la liaison avec les provinces et territoires.

Programmation de la FCSS

En fonction des rôles et responsabilités de la FCSS identifiés ci-dessus, le comité envisage quatre types de programmes qui relèveraient de la FCSS et qui permettraient au système de combler les lacunes existantes ainsi que de relever d'autres défis.

Initiatives multidisciplinaires et interdisciplinaires

Les parties prenantes ont signalé au comité que les conseils subventionnaires excellent dans le soutien de la recherche disciplinaire, mais que les chercheurs qui travaillent aux limites des disciplines ou entre les disciplines éprouvent des difficultés avec les mécanismes de financement existants, car les programmes de soutien à la recherche multi et interdisciplinaire sont toujours administrés dans le contexte des conseils disciplinaires. À l'avenir, en vertu de cette proposition, la FCSS serait responsable de la plupart des initiatives multi et interdisciplinaires, y compris le Fonds Nouvelles frontières en recherche.

Il est également prévu que la FCSS soutienne d'autres initiatives de recherche véritablement intersectorielles, comme celles associées à, par exemple, « Une seule santé »; cependant, tout comme pour projets intersectoriels éventuels, cela n'empêcherait pas les IRSC (ou d'autres conseils) d'entreprendre certaines initiatives associées à ces thématiques lorsque cela est pertinent. En outre, il faudrait examiner la possibilité que la FCSS assume la prestation du Fonds scientifique stratégique. Notons toutefois que la priorité devrait être accordée à l'intégration des programmes existants mentionnés ci-dessus qui ont déjà un rôle structurant dans le système de soutien à la recherche.

Enfin, la FCSS serait appelée à administrer le Fonds d'excellence en recherche Apogée Canada (actuellement administré par le SPIIE), le Programme d'innovation dans les collèges et la communauté, les subventions Dimensions (pilote) et les subventions de renforcement des capacités en matière d'équité, de diversité et d'inclusion (pilote) (actuellement administrées par le CRSNG).

Initiatives de recherche orientée en fonction d'enjeux prioritaires

Des efforts notables ont été déployés pour répondre au besoin de programmes de recherche orientée, mais cela reste l'une des plus grandes lacunes de l'écosystème actuel. Cette lacune était particulièrement évidente pendant la pandémie, alors que le gouvernement cherchait à répondre à un besoin urgent dans toutes les disciplines. Pour combler cette lacune, la FCSS assumerait la responsabilité des programmes de recherche axés des missions particulières ou orientés en fonction d'enjeux prioritaires. Cela comprendrait le transfert à la FSCC de l'actuel Fonds de recherche biomédicale du Canada (FRBC) actuellement administré par le SPIIE et qui est par ailleurs multidisciplinaire.

Il faut reconnaître que les programmes orientés en fonction d'enjeux prioritaires exercent souvent une forte attraction gravitationnelle sur certaines disciplines ou certains sujets. Lors de la conception de programmes multidisciplinaires et interdisciplinaires dans le cadre de la FCSS, il faut veiller à ce que les programmes soient conçus de manière à non seulement permettre, mais aussi à encourager la diversité des approches, y compris celles des sciences sociales et humaines. De plus, étant donné la diversité des besoins scientifiques et sociétaux, il faut veiller à ce que les programmes ne favorisent pas a priori les projets uniquement liés à l'économie, à la technologie ou à la santé. Par exemple, les initiatives de recherche prioritaires pourraient soutenir le développement de politiques publiques, telles que des politiques visant à mieux soutenir la participation civique ou à améliorer la sécurité alimentaire. Du fait de sa conception, la FCSS doit être attentive à l'ensemble du spectre d'expertises et de connaissances que la recherche rend possible.

Les chercheurs de tous les établissements « académiques » (y compris les hôpitaux de recherche) peuvent contribuer aux initiatives de recherche prioritaire, des grandes universités à forte intensité de recherche aux collèges communautaires régionaux et aux CÉGEPS. Tous ces établissements sont appelés à jouer un rôle croissant dans la recherche et l'innovation. Par exemple, de nombreuses universités régionales ancrées dans leur communauté, ainsi que des collèges, des CÉGEPS et des écoles polytechniques, ont développé des activités de recherche orientée et sont liées à des petites et moyennes entreprises (PME) locales et à des organisations locales. Dans cette optique, tous ces types d'établissements devraient être admissibles à un soutien par le biais d'initiatives de recherche orientée, lorsque cela est justifié. Si nous aspirons à renforcer la capacité de recherche du Canada et à développer tout le spectre des talents (pas seulement les titulaires d'un doctorat, mais tout le personnel hautement qualifié), nous devons donner à tous les établissements du pays les moyens de maximiser leur impact.

Talent

Des étudiantes et étudiants chercheurs, des stagiaires postdoctoraux et des chercheuses et chercheurs ont signalé au comité que les programmes de développement des talents du gouvernement fédéral sont fragmentés, ce qui entraîne des inefficacités lors des processus de candidature. La FCSS rassemblerait l'ensemble des programmes de soutien aux talentsNote de bas de page 6 au sein d'une même organisation, créant ainsi un portail d'entrée unique et contribuant à l'harmonisation de l'ensemble des programmes de soutien aux talents. Cette approche permettrait de mieux soutenir à la fois le développement de talents disciplinaires et interdisciplinaires. Cela dit, le comité convient que les conseils subventionnaires devraient conserver la capacité d'offrir des initiatives de soutien au talent axées sur la recherche (c.-à-d. des subventions de recherche individuelles). Par conséquent, le CRSNG conserverait la prestation des bourses de recherche de premier cycle (BRPC) et les conseils conserveraient leurs nouvelles BRPC pour les chercheurs noirs (toutefois, des discussions devraient avoir lieu au comité de coordination de la FCSS concernant l'harmonisation de ces programmes de bourses entre les conseils). Notons cependant qu'il peut y avoir des particularités et des réalités disciplinaires justifiant la mise en place de certaines initiatives de talent par le biais d'un conseil particulier; par exemple, de nouvelles initiatives de financement qui visent à accroître la participation et la réussite des Noirs et d'autres groupes racisés dans des domaines de recherche particuliers.

Mobilisation des connaissances

La mobilisation des connaissances est essentielle pour traduire les résultats de la recherche en bienfaits pour les Canadiennes et les Canadiens. Cependant, les chercheuses et chercheurs ont exprimé leur frustration à l'égard de l'approche actuelle du soutien à la mobilisation des connaissances, à l'innovation et à la commercialisation. Les approches actuelles présentent un certain nombre de lacunes, notamment en ce qui concerne les besoins des chercheuses et chercheurs entrepreneurs. Le comité envisage que la FCSS, les conseils et d'autres acteurs clés partagent la responsabilité de la prestation de programmes dans ce domaine, en reconnaissant que la mobilisation des connaissances, l'innovation et la commercialisation doivent être encouragées et soutenues dans l'ensemble du système. Le comité est d'avis qu'en général, les conseils subventionnaires se concentreraient par exemple sur les niveaux de maturité technologique (Technology Readiness Level, TRL) faibles, tandis que la FCSS s'occuperait des TRL faibles à intermédiaires, et que d'autres organisations (comme le CNRC et l'Agence canadienne d'innovation et d'investissement récemment annoncée) se concentreraient sur les TRL supérieurs qui sont plus proches du déploiement ou des activités de commercialisation (à noter que le comité n'envisage pas de retirer I2I du CRSNG). Cela est également conforme aux rôles fondamentaux envisagés par le groupe d'experts pour les conseils subventionnaires et la FCSS : les projets sont plus susceptibles d'impliquer un plus grand nombre de disciplines au fur et à mesure qu'ils augmentent le niveau de TRL. La FCSS pourrait notamment jouer un rôle dans le soutien des projets de précommercialisation multi et interdisciplinaires, une lacune identifiée par plusieurs parties prenantes. La FCSS serait également responsable d'identifier les lacunes dans les programmes et les approches de mobilisation des connaissances afin de mieux positionner la communauté des chercheurs pour les activités liées à l'innovation et à la commercialisation, en particulier dans les projets multi et interdisciplinaires et les projets orientés en fonction d'enjeux prioritaires. De plus, la FCSS serait l'interface avec d'autres organisations qui offrent un soutien aux entreprises par le biais de sa direction des politiques, afin de transférer les projets au partenaire approprié à mesure que les projets se rapprochent de la possibilité de commercialisation.

Détermination du mécanisme de mise en œuvre approprié

Le mécanisme de mise en œuvre approprié pour une nouvelle initiative sera déterminé en consultation avec le comité de coordination de la FCSS, en fonction des rôles respectifs de la FCSS, des conseils subventionnaires et d'autres organisations. En général, les initiatives de nature multi et interdisciplinaire ou de recherche orientée en fonction d'enjeux prioritaires devraient être mises en œuvre par la FCSS. Toutefois, cela n'empêche pas les conseils subventionnaires – ou d'autres ministères et organismes – de lancer des appels prioritaires multidisciplinaires et interdisciplinaires et/ou de recherche orientée. De tels appels ne devraient être lancés qu'après discussion avec la FCSS afin d'assurer la coordination avec d'autres initiatives pertinentes. En particulier, le groupe d'experts reconnaît la nature orientée et les succès des instituts des IRSC, ainsi que le rôle crucial des hôpitaux de recherche dans l'écosystème de la recherche. Pour cette raison et en raison du rôle fondamental qu'ils jouent dans la conception et le fonctionnement mêmes des IRSC, le comité recommande que ces instituts demeurent dans le mandat des IRSC.

La FCSS cherchera également à mobiliser d'autres mécanismes/organismes de financement pour les composantes de projets stratégiques qui relèvent de la portée de ces autres mécanismes/organismes. Par exemple, le comité s'attend à ce qu'une partie du financement des initiatives stratégiques axées sur des missions prioritaires qu'elle chapeauterait soit encore livrée par les conseils subventionnaires ou d'autres partenaires (p. ex. Génome Canada). Le conseil d'administration de la FCSS pourrait conseiller les ministres sur l'attribution de ressources supplémentaires aux partenaires pour de telles initiatives, en fonction des recommandations du comité de coordination de la FCSS. De manière notable, les recommandations sur l'allocation de nouveaux soutiens à la recherche devraient toujours aussi tenir compte des besoins associés en infrastructure de recherche.

Pour accroître l'agilité de la FCSS, des ressources devraient être disponibles pour soutenir les initiatives de recherche internationales et d'autres opportunités exceptionnelles qui peuvent se présenter à tout moment. Le calendrier des concours internationaux et des opportunités de partenariat n'est pas toujours aligné sur les mécanismes de financement existants. Il faut augmenter l'agilité et la flexibilité de nos instruments de soutien si nous souhaitons faire en sorte que nos chercheuses et chercheurs puissent accroître leur participation aux occasions de collaboration et aux partenariats internationaux.

Le comité reconnaît le risque que la FCSS soit perçue comme étant en concurrence pour l'obtention de ressources avec d'autres organismes de financement au sein de l'écosystème. Ce risque est partiellement atténué par la structure de gouvernance de la FCSS, en particulier la représentation des principaux partenaires financiers au sein du comité de coordination et du conseil d'administration. Pour réduire davantage ce risque, le groupe d'experts recommande que des indicateurs clés de performance (ICP) clairs soient établis pour le leadership de la FCSS et les organismes de soutien à la recherche financés par le gouvernement fédéral (y compris, mais sans s'y limiter, les conseils subventionnaires) afin de refléter le progrès dans la coordination et la collaboration elles-mêmes. Une évaluation périodique des efforts de coordination devra être entreprise par un organisme consultatif externe (discuté en détail dans la section suivante).

Résumé de la programmation proposée par la FCSS vis-à-vis des conseils subventionnaires

Programmation de la FCSS

Programmation des conseils

  • La plupart des programmes partagés des trois organismes, y compris :
    • Les programmes de talent (c.-à-d. les bourses d'études supérieures du Vanier Canada et les bourses postdoctorales Banting, les bourses d'études supérieures du Canada)
    • Programmes de recherche partagés (c.-à-d., le Fonds d'excellence en recherche Apogée Canada, le Fonds Nouvelles frontières en recherche, le FRBC)
    • Certains programmes de partenariat (c.-à-d., Programme d'innovation dans les collèges et la communauté)
    • Subventions Dimensions (pilote) et subventions pour le renforcement de la capacité des établissements en matière d'équité, de diversité et d'inclusion (pilote)
  • Recherche multidisciplinaire et interdisciplinaire qui se situe à cheval ou à l'écart des domaines de recherche traditionnels soutenus par les trois conseils subventionnaires fédéraux
  • La recherche de niveau de maturité technologique (TRL) faible à intermédiaire, la précommercialisation et certaines recherches en lien avec des entreprises
  • Recherche orientée en fonction d'enjeux prioritaires (avec des exceptions pour celles qui se rapportent exclusivement au mandat d'un conseil ou qui relèvent d'un seul domaine scientifique)
  • Programmes spécifiques à la recherche fondamentale ou à la recherche libre, suscitée et entreprise à l'initiative des chercheurs, y compris les programmes phares actuels tels que (mais sans s'y limiter) les subventions de projet et de fondation des IRSC, les subventions à la découverte du CRSNG et les subventions Savoir du CRSH
  • Les programmes propres à la recherche appliquée suscitée et entreprise par les chercheurs en collaboration avec des partenaires industriels ou internationaux, y compris les subventions Alliance du CRSNG
  • Initiatives de talent axées sur la recherche, y compris le Programme de formation orientée vers la nouveauté, la collaboration et l'expérience en recherche (FONCER) du CRSNG
  • Les programmes propres aux instituts des IRSC
  • TRL de niveau inférieur

Liens d'imputabilité

Reconnaissant que la responsabilité du financement de la recherche universitaire extra-muros est partagée par le ministre de l'Innovation, des Sciences et de l'Industrie (par l'intermédiaire du CRSNG et du CRSH) et le ministre de la Santé (par l'intermédiaire des IRSC), le conseil d'administration et le président de la FCSS seraient nommés par le gouverneur en conseil (GC) sur recommandation des deux ministres, et relèveraient des deux ministres. Cela permettrait également de s'assurer que les deux ministres ont accès aux perspectives de l'ensemble de l'écosystème de la recherche et de l'innovation plutôt qu'aux seules perspectives des organisations qui relèvent de leurs propres portefeuilles.

Une note sur la division des conseils subventionnaires entre deux ministères : Aucun message fort n'est ressorti des intervenants quant à l'impact de cette division sur la coordination au sein du système de soutien à la recherche. Au contraire, le milieu de la recherche en santé s'est dit très préoccupé par l'idée d'un transfert des IRSC au portefeuille des ISDE. Un tel transfert, s'il advenait, aurait des conséquences négatives réelles, compte tenu du rôle des IRSC dans le soutien des politiques en matière de santé et du rôle significatif que joue la recherche en santé à Santé Canada. Par conséquent, le groupe d'experts estime que les objectifs sont mieux atteints en maintenant les IRSC sous la responsabilité du ministre de la Santé tout en créant un mécanisme de coordination plus robuste par le biais de la FCSS. Par ailleurs, une coordination accrue pourrait être obtenue en renforçant le rôle de Santé Canada en ce qui concerne les responsabilités gouvernementales en matière des politiques vis-à-vis de la FCSS et des conseils. La création d'un secrétariat conjoint ISDE-Santé Canada devrait être envisagée à cette fin. Une structure plus formelle pour faciliter la coordination entre l'ISDE et Santé Canada pourrait aider à assurer une plus grande harmonisation et une efficacité accrue dans le soutien à la recherche en général.

En ce qui concerne la relation entre les membres du comité de coordination (y compris les présidents des conseils) et le président de la FCSS, le comité souligne que la présidence de la FCSS n'aura aucun contrôle sur les activités quotidiennes des autres présidents et de leurs organisations qui resteront autonomes par rapport à la FCSS. Cependant, le président de la FCSS devrait être habilité à superviser les membres du comité de coordination sur les questions relevant des rôles et responsabilités de la FCSS. Cela pourrait se faire par le biais des paramètres de financement fournis par la FCSS ou sur sa recommandation ou par le biais de directives fournies par les ministres aux personnes nommées par le gouvernement. Afin d'établir des attentes claires quant à la collaboration des membres du comité par le biais de la FCSS, les ministres doivent préciser cette attente aux membres par le biais d'outils tels que les paramètres de financement et les accords de contribution, et, là où c'est possible, des indicateurs clés de performance liés à la coopération doivent être établis. Lorsque les présidents ou les membres du conseil d'administration sont nommés par les ministres, il convient d'accorder une attention particulière aux personnes ayant déjà fait la démonstration de leur aptitude à la collaboration.

Ressources opérationnelles

Pour que la FCSS réussisse, elle doit être suffisamment dotée des ressources requises. Bien que le comité reconnaisse que de nouvelles ressources seront nécessaires, le gouvernement peut également tirer parti de certaines ressources existantes qui soutiennent actuellement les fonctions de coordination au sein des conseils subventionnaires.

En particulier, il existe déjà un secrétariat pour le CCRC, hébergé par le CRSH, qui pourrait être transféré à la FCSS pour soutenir le comité de coordination. Ce secrétariat est actuellement responsable de l'organisation, de la préparation et de l'enregistrement des réunions du CCRC et des activités de suivi.

En ce qui concerne la fonction d'exécution des programmes, elle serait remplie en transférant le SPIIE (ainsi que la structure du comité de gestion correspondant), qui est actuellement hébergé par le CRSH, à la FCSS. Cela permettrait d'assurer une supervision stratégique plus efficace des programmes partagés des trois organismes, étant donné le mandat multidisciplinaire et interdisciplinaire de la nouvelle organisation. Le transfert des ressources associées au SPIIE à la FCSS (ainsi que la plupart des programmes administrés par le SPIIENote de bas de page 7) contribuerait également à réduire le besoin de nouvelles ressources. Les ressources des IRSC pour la prestation des bourses d'études supérieures du Canada Vanier et des bourses postdoctorales Banting pourraient également être réaffectées à la FCSS pour continuer à soutenir ces programmes.

Cela dit, le comité s'attend à ce que de nouvelles ressources soient nécessaires pour renforcer la capacité en matière de politiques et pour embaucher la personne qui présidera la FCSS. En particulier, la direction des politiques de la FCSS aura besoin de personnel à temps plein pour entreprendre des recherches et des analyses et assurer la liaison avec les conseils subventionnaires, les provinces/territoires et les autres partenaires de l'écosystème de la recherche et de l'innovation afin d'éclairer l'élaboration des politiques.

Il est important de reconnaître, par ailleurs, qu'il peut y avoir des gains d'efficacité dans d'autres parties du système de soutien grâce à une meilleure gouvernance. De plus, le groupe d'experts s'attend à ce que les éléments transférés à la FCSS depuis d'autres parties du système de soutien (par exemple, le SPIIE et le secrétariat du CCRC) aient un plus grand impact, car ils auraient dorénavant un lien plus étroit avec un mécanisme de supervision (c'est-à-dire la FCSS) qui correspond mieux aux finalités souhaitées.

Enfin, le comité souhaite souligner que, mis à part les ressources réaffectées des conseils subventionnaires associées aux programmes placés sous l'égide de la FCSS, la création de la FCSS ne doit pas se faire au détriment de la capacité des conseils à offrir leurs programmes de base, qui constituent la base de l'excellence scientifique actuelle au Canada.

Quelques réflexions sur la mise en œuvre

Le gouvernement doit s'assurer que la nouvelle organisation est mise en œuvre de manière à lui permettre de remplir les rôles et les responsabilités recommandés par le groupe. Étant donné que l'ISDE et Santé Canada vivent au quotidien les aspects concrets de la mise en œuvre (et compte tenu de leurs excellents antécédents en matière de mise en œuvre), le comité estime que les deux ministères sont les mieux placés pour déterminer les détails de la meilleure façon de mettre en œuvre la nouvelle organisation, tout en maintenant l'efficacité et l'excellence des conseils subventionnaires et conformément aux principes et aux recommandations de notre comité.

Le comité souhaite attirer l'attention sur quelques points importants en ce qui concerne la mise en œuvre.

Premièrement, l'investissement dans les données et les technologies de l'information (TI) pour la nouvelle organisation est essentiel à son succès. Cette question a été soulignée par un responsable de l'UKRI lors d'une discussion avec le comité ainsi que lors de l'examen indépendant de l'UKRI en 2022. Investir dans des plateformes de données dans l'ensemble de la FCSS, des conseils subventionnaires et d'autres organismes financés par le gouvernement fédéral pour soutenir la recherche et l'innovation permettrait de mieux comprendre l'état et évaluer le rendement de l'ensemble du système de soutien, y compris sa capacité à la collaboration. Ces plateformes fourniraient une meilleure base de données probantes pour la prise de décisions futures afin de permettre une amélioration continue. De plus, les intervenants ont exprimé de manière répétée des préoccupations au sujet du manque d'efficacité résultant des différents processus des conseils. Une plus grande intégration des données et des plateformes de TI contribuerait à améliorer l'agilité du système, la prestation de services au milieu de la recherche et l'expérience des utilisateurs. Faire ces investissements maintenant améliorerait l'efficacité du système de soutien global à long terme. Une certaine harmonisation des systèmes de données pourrait commencer avant la création de la FCSS.

Deuxièmement, le processus de nomination du nouveau conseil d'administration et de la direction de la FCSS proposée doit être rapide et en temps voulu. Un certain nombre de postes serait pourvu par nomination ministérielle. Le comité a été informé que cela peut entraîner des processus longs et donc pourrait occasionner des carences au sein du comité de coordination ou du conseil d'administration pendant que les décisions de nomination sont prises. Bien que le groupe estime que ces postes sont à juste titre des nominations ministérielles, l'ISDE et Santé Canada devraient se pencher sur le processus de nomination en vue d'assurer l'efficacité, la rapidité et la crédibilité des nominations.

Avantages procurés par la FCSS

La création de la FCSS procurerait un certain nombre d'avantages que les structures existantes ne sont pas conçues, ou ne sont pas en mesure, de réaliser. Ces avantages comprennent :

  • Recherche rapide et orientée envers les enjeux prioritaires : La FCSS fournirait au Canada un instrument permettant de soutenir rapidement la recherche orientée dans l'ensemble de l'écosystème de la recherche grâce à une programmation sur mesure, agile et réactive, afin de relever les nouveaux défis de la recherche et de répondre à des besoins spécifiques (par exemple, la biofabrication). La FCSS permettrait au gouvernement, aux universités, aux entreprises et aux organismes à but non lucratif de se rassembler autour des nouveaux défis en fournissant un mécanisme de financement mixte, en offrant une certaine souplesse en ce qui concerne les bénéficiaires admissibles et en établissant des liens avec l'Agence canadienne d'innovation et d'investissement et d'autres programmes de soutien aux entreprises. Cela pourrait également contribuer à inciter les entreprises à investir davantage dans la recherche et le développement et l'innovation au Canada.
  • La recherche et l'innovation qui tombent entre, ou en dehors, des programmes ou des mandats organisationnels : Le comité a appris qu'un certain nombre d'intervenants dans le domaine de la recherche et de l'innovation estimaient que leurs rôles et leurs activités au sein de l'écosystème n'étaient pas bien soutenus par les structures existantes. Il s'agissait notamment de représentants de petites universités intégrées à la communauté, de chercheurs autochtones, de collèges, de cégeps et d'écoles polytechniques, ainsi que de chercheurs entrepreneurs. Le comité a également été informé des difficultés rencontrées par les chercheurs, notamment en sciences vétérinaires, en systèmes alimentaires et en sciences de l'environnement, qui travaillent aux frontières des disciplines ou entre elles. L'orientation multidisciplinaire et interdisciplinaire de la FCSS, ainsi que son mandat de soutenir des missions particulières, rehausserait le profil de ces activités et leur fournirait une organisation claire dans laquelle ils verraient leurs activités se refléter.
  • Clarification des rôles : Le comité a constaté à plusieurs reprises que les rôles des différents acteurs de l'écosystème sont mal définis et que les organisations ont été invitées à faire plus que ce qu'elles étaient censées faire, ce qui a conduit à une plus grande incertitude et à une perception de dérive de la mission de ces organisations. La création de la FCSS établirait une nouvelle organisation dotée d'un mandat clair pour les initiatives de recherche multidisciplinaires et intersectorielles orientée en fonction d'enjeux prioritaires tout en réaffirmant le rôle fondamental des conseils subventionnaires dans le soutien de la recherche libre, suscitée et entreprise par les chercheurs.
  • Portail pour les partenariats stratégiques internationaux : Le comité a été informé à maintes reprises par nos partenaires internationaux que la fragmentation du système canadien de soutien à la recherche rend difficiles le lancement et la négociation de partenariats de recherche stratégiques. En tant qu'organisme de soutien à la recherche primus inter pares du Canada, la FCSS fournirait aux partenaires internationaux du Canada un portail clair pour amorcer et coordonner les discussions sur les partenariats de recherche stratégiques internationaux. Cela améliorera également la capacité du Canada à saisir ces opportunités internationales en temps voulu.
  • Un guichet unique pour les solutions de recherche : Étant donné la capacité de la FCSS à coordonner le système de soutien à la recherche et à lancer des appels au nom d'autres ministères et agences du gouvernement fédéral, la FCSS fournit un mécanisme pour les ministères ayant des besoins de recherche axés sur leur mission. Le profil et les capacités de la FCSS lui permettraient de répondre rapidement à ces besoins et, le cas échéant, de les acheminer vers les organisations du système de soutien à la recherche les plus appropriées.
  • Réduction de la charge pour les étudiants et les chercheurs : Le comité a été informé à plusieurs reprises par la communauté étudiante et la communauté de la recherche que des processus lourds, répétitifs et opaques ont donné à beaucoup d'entre eux l'impression que le gouvernement ne valorise pas leur temps. La FCSS fournit aux conseils subventionnaires et aux autres acteurs clés du système de soutien un forum habilité à faciliter la coordination de leurs processus et ainsi réduire le fardeau pour les étudiants et les chercheurs. En particulier, l'harmonisation des programmes de talent dans le cadre de la FCSS permettra d'assurer une meilleure expérience client pour les étudiantes et étudiants chercheurs ainsi que pour les stagiaires postdoctoraux.
  • Rôle plus clair de la CSC : Le comité a été informé par plusieurs intervenants que le rôle de la CSC n'est pas utilisé efficacement. Cela résulte en grande partie du mandat de la CSC, qui est axé sur la science intra-muros. En tant que présidente éventuelle du conseil d'administration de la FCSS, la CSC pourrait jouer un rôle stratégique dans la recherche extra-muros, y compris par rapport aux occasions émergentes en recherche et les partenariats internationaux.

Une capacité de conseil stratégique pour un avenir prometteur

Les arguments en faveur d'un organisme consultatif stratégique indépendant

Contrairement à d'autres pays comme les États-Unis, qui disposent de plusieurs instruments procurant avis et conseils stratégiques en matière de science et de technologie, le Canada ne dispose d'aucun organisme indépendant responsable de superviser et de conseiller le gouvernement du Canada en matière de science, de recherche et d'innovation. L'absence d'un tel organisme limite une prise de décision éclairée sur les mécanismes de soutien et le financement de la recherche et de l'innovation. Cette absence restreint par ailleurs la cohérence de notre cadre de soutien à la recherche et l'impact de nos investissements.

Le Canada s'est doté de divers organismes consultatifs au cours des 35 dernières années. Plus récemment, le Conseil des sciences, de la technologie et de l'innovation (CSTI), créé en 2007, avait pour mandat de fournir au gouvernement des conseils externes indépendants et confidentiels sur les questions de science et d'innovation et de rendre compte publiquement de l'état de la science et de l'innovation au Canada. Cependant, le CSTI a été dissous vers 2015 et aucun organisme ne remplit actuellement cette fonction.

Reconnaissant l'importance de conseils impartiaux, le comité d'Examen du soutien aux sciences fondamentales a recommandé la création d'un Conseil consultatif national sur la recherche et l'innovation (CCNRI) afin d'assurer une surveillance de l'état et d'offrir des conseils favorisant la coordination de l'effort de recherche fédéral.

En réponse à cette recommandation, le gouvernement du Canada a entrepris de créer le Conseil de la science et de l'innovation (CSI) et a lancé en 2018-2019 la recherche d'une personne pour présider cette instance ainsi que des membres pour le constituer. Comme décrit dans le plan ministériel 2019-2020 de l'ISDE, le CSI serait un organisme consultatif plus transparent qui remplacerait le CSTI et fournirait des conseils stratégiques indépendants et spécialisés aux ministres afin de soutenir les efforts du gouvernement pour renforcer l'écosystème de la science et de la recherche et stimuler l'innovation dans toute l'économie. Le CSI couvrirait l'ensemble des activités, de la recherche fondamentale à la commercialisation des innovations en passant par la recherche appliquée. Plus précisément, l'appel à candidatures pour le poste de président et de membres indique que le conseil aurait pour mandat de :

  • fournir une analyse factuelle et des conseils politiques aux ministres sur des questions complexes qui nécessitent des recherches de fonds et des consultations avec des experts, des parties prenantes et/ou la société civile;
  • fournir une tribune aux ministres sur des questions urgentes ou à court terme;
  • rendre compte publiquement des questions relatives aux sciences et à l'innovation qui sont d'actualité pour le gouvernement du Canada et le public.

Selon l'appel aux candidatures, le gouvernement envisage que les membres du CSI soient nommés par les ministres et que le conseil soit composé d'un président et de 11 autres membres issus de la communauté scientifique et de la recherche, du secteur privé et de la société civile. De plus, la CSC serait vice-présidente d'office, et le sous-ministre de l'ISDE et le sous-ministre de la Santé seraient membres d'office.

Cependant, il n'y a pas eu de détails publics sur le CSI depuis 2019 et le CSI n'a jamais été rendu fonctionnel. Le comité a constamment entendu que l'absence d'un organisme comme le CSTI ou le CSI suscite des problèmes. Le comité d'Examen du soutien aux sciences fondamentalesen 2017 avait mis en évidence les facteurs justifiant la création d'une capacité de conseil stratégique externe. Leurs arguments sont encore plus pertinents aujourd'hui qu'à l'époque, notamment l'ampleur des défis mondiaux et la complexification du paysage de la recherche.

Par conséquent, le comité recommande que le gouvernement poursuive la création d'un organisme consultatif externe et indépendant qui permette aux communautés de la recherche et de l'innovation de conseiller le gouvernement sur le soutien à la recherche et à l'innovation et d'évaluer la coordination du système de soutien. Un degré d'indépendance approprié est important pour garantir le maintien d'une voix cohérente à long terme.

Recommandation 3 : Le gouvernement du Canada devrait créer un nouvel organisme consultatif indépendant responsable de fournir aux ministres des conseils stratégiques sur le financement et la stratégie nationale en matière de science, de recherche et d'innovation. Il assurerait par ailleurs une surveillance générale de l'état du système de soutien à la recherche et à l'innovation.

Rôles et responsabilités

Sur la base des commentaires reçus des parties prenantes et en s'appuyant sur les mandats envisagés pour le CCNRI et le CSI, le comité recommande les rôles et responsabilités suivants pour le nouvel organisme consultatif :

  • Fournir des conseils stratégiques aux ministres et au premier ministre sur des questions liées à la science, à la recherche et à l'innovation afin de soutenir une politique nationale cohérente en matière de science, de recherche et d'innovation. Ces questions peuvent être identifiées soit par les ministres/le premier ministre, soit par l'organisme consultatif lui-même. Cela le différencie du CSTI, qui ne fournissait des conseils qu'à la demande du gouvernement. Pour les avis demandés par le gouvernement, les ministres détermineraient si l'avis doit être public ou confidentiel.
  • Évaluer et rendre public (annuellement ou tous les deux ans) le soutien global et le rendement de la science, de la recherche et de l'innovation au Canada (comme dans les rapports du CSTI sur l'état de la nation) au moyen d'une analyse comparative internationale ainsi que d'autres indicateurs clés.
  • Contribuer à l'établissement des priorités stratégiques et d'une vision globale de la science, de la recherche et de l'innovation au Canada, notamment en appuyant l'élaboration d'une stratégie nationale en matière de science, de recherche et d'innovation (voir la section suivante).
  • Conseiller le gouvernement sur les allocations de fonds, en particulier (mais sans s'y limiter) l'équilibre du financement entre la recherche orientée et la recherche libre, suscitée et entreprise par les chercheurs, et l'équilibre entre la recherche disciplinaire et multidisciplinaire ou interdisciplinaire (soutenant ainsi la prise de décision relative à la FCSS).
  • Fournir des recherches et des analyses sur l'efficacité de la politique fédérale en matière de science et de recherche (y compris l'identification et l'évaluation des lacunes et des obstacles – y compris les obstacles réglementaires).
  • Aider à améliorer la coordination et l'alignement stratégique des différents éléments du système fédéral de soutien à la science, à la recherche et à l'innovation.
  • Assurer la liaison avec les organismes parallèles dans les provinces et les territoires ainsi qu'à l'échelle internationale.

En remplissant ces rôles, le nouvel organisme consultatif compléterait et renforcerait le rôle de la CSC.

Composition

À l'instar des propositions précédentes (c.-à-d. le CCNRI et le CSI) et conformément aux comités précédents (CSTI), l'organisme consultatif devrait être composé de 12 à 16 membres, soit des personnes éminentes et hautement crédibles provenant de diverses disciplines et représentant de vastes secteurs, y compris le milieu universitaire, l'industrie et la société civile/les organismes sans but lucratif, y compris la représentation de la communauté de recherche autochtone et d'autres groupes qui recherchent l'équité et qui détiennent des droits. Étant donné l'aspiration du Canada à rivaliser avec les meilleurs au monde, l'organisme consultatif devrait également comprendre au moins un membre international.

Pour refléter le vaste mandat de cet organisme consultatif en matière de recherche et d'innovation, celui-ci devrait être coprésidé par une personne imminente en recherche et une personne imminente ayant une expérience de direction en industrie et ayant fait ses preuves en matière d'innovation. Les personnes qui seront nommées pour coprésider doivent être connues et respectées par les personnes en position de prise de décision gouvernementale. Les membres devraient être choisis de manière à ce que l'organisme consultatif soit hautement respecté et qu'il ait la perspective et la crédibilité nécessaires pour représenter la communauté diversifiée de la recherche et de l'innovation au Canada et conseiller le gouvernement sur des questions d'importance nationale.

Liens hiérarchiques

Au Royaume-Uni et aux États-Unis, des organismes consultatifs stratégiques similaires font rapport au premier ministre ou au président plutôt qu'à un ministre, ce qui les relie au décideur principal et leur permet de mieux prendre en compte l'ensemble de l'écosystème et qui leur permet de transcender les mandats individuels des ministres et des départements.

Dans le contexte canadien, un organisme consultatif qui n'est lié qu'au ministre de l'Innovation, des Sciences et de l'Industrie peut limiter sa capacité à examiner des questions pertinentes pour d'autres ministères, comme Santé Canada, Environnement et Changement climatique Canada, Ressources naturelles Canada et Pêches et Océans Canada, entre autres. Cependant, il y a aussi des avantages à avoir un lien étroit avec un ministre particulier – en particulier, cela peut contribuer à ce que l'organisme reçoive plus d'attention.

En tenant compte de ces considérations, le comité estime que la structure hiérarchique de l'organisme consultatif devrait être similaire à celle de la CSC, les membres de l'organisme consultatif étant nommés par le premier ministre et entretenant une relation étroite avec le ministre de l'Innovation, des Sciences et de l'Industrie et le ministre de la Santé. Bien que l'organisme consultatif entretienne des relations plus étroites avec deux ministères, il devrait également être en mesure d'accepter les demandes de conseils du premier ministre et d'autres ministres.

Il faudrait envisager sérieusement d'acter cet organisme consultatif de manière législative afin d'en assurer sa pérennité. Ce point a été signalé à la fois par le comité d'Examen du soutien aux sciences fondamentales dans sa recommandation sur le CCNRI et par certaines soumissions reçues par ce comité.

Liens avec la FCSS et d'autres entités

Le comité s'est demandé si le rôle consultatif pouvait être joué par d'autres entités de l'écosystème, y compris le conseil d'administration de la FCSS proposée ou la CSC. En fin de compte, le comité a conclu qu'aucune autre entité de l'écosystème ne pouvait remplir les fonctions de cet organisme consultatif. Les parties prenantes ont toujours été claires sur le fait que la fonction consultative doit être indépendante dans l'écosystème.

Alors que le conseil de la FCSS pourrait avoir une composition similaire, il serait en conflit d'intérêt pour fournir des conseils stratégiques au gouvernement sur le soutien à la recherche et à l'innovation et entreprendre des évaluations de performance des efforts de coordination incluant les siens. Alors que le conseil de la FCSS assurerait la surveillance de la FCSS elle-même, l'organisme consultatif fournirait des conseils sur les objectifs stratégiques en matière de science, de recherche et d'innovation, ce qui nécessiterait des profils différents pour ses membres.

Cela dit, l'organisme consultatif devrait avoir un lien étroit avec la FCSS, la CSC et d'autres organismes consultatifs ou de gouvernance importants liés à la recherche et à l'innovation (par exemple, les grandes installations de recherche). La CSC ainsi que les sous-ministres de l'ISDE et de la santé pourraient participer en tant qu'observateurs pour aider à assurer la cohésion.

Étant donné le risque de confusion au sein de l'écosystème en ce qui concerne les rôles de l'organisme consultatif, de la CSC et de la FCSS, il faudra veiller à ce que les rôles et les responsabilités soient clairement établis et communiqués.

Soutien du secrétariat

Le personnel de soutien de la structure consultative pourrait être hébergé au sein de l'ISDE, à l'instar du bureau de la CSC. Comme pour les observations du comité concernant la FCSS, la structure consultative doit disposer de ressources suffisantes pour accomplir ses objectifs.

Une vision commune pour un impact collectif

Les arguments en faveur d'une stratégie nationale pour la science, la recherche et l'innovation

L'un des messages les plus forts et les plus cohérents des intervenants entendus par le comité concernait la nécessité d'une stratégie nationale pour la science, la recherche et l'innovation afin d'orienter l'ensemble de l'écosystème vers des objectifs stratégiques communs. En l'absence d'une telle stratégie nationale, le gouvernement et ses organismes semblent prendre des décisions sur les priorités et les programmes en matière de science, de recherche et d'innovation sans processus évident pour les arrimer à ce que le gouvernement aspire à réaliser. L'absence d'une stratégie nationale en matière de sciences, de recherche et d'innovation a également une incidence sur la façon dont le Canada est perçu à l'échelle internationale, car les objectifs stratégiques du Canada en matière de partenariats internationaux demeurent nébuleux.

Le comité a entendu que, de facto, le gouvernement fixe les priorités des intervenants dans l'écosystème par le biais d'allocations de fonds, mais cela se fait par le biais d'un processus ad hoc sans vision stratégique globale. Cette approche crée une incertitude au sein de l'écosystème et laisse autant les bailleurs de fonds de la recherche et que ses exécutants dans l'incertitude quant à la prochaine orientation du gouvernement.

Sans une telle stratégie, le Canada est désavantagé par rapport à ses pairs mondiaux, dont beaucoup ont élaboré leurs propres stratégies. Par exemple, en 2022, le Royaume-Uni a annoncé une stratégie ambitieuseNote de bas de page 8 visant à faire du pays une superpuissance scientifique et technologique. Le Japon a également lancé son sixième Plan fondamental pour la science et la technologieNote de bas de page 9 en 2021, qui vise à maintenir la position du Japon en tant que leader mondial de l'innovation et décrit le processus d'utilisation de la science, de la technologie et de l'innovation pour atteindre à la fois la croissance économique et la résolution des défis sociaux. La loi américaine CHIPS and Science Act sert également de vision stratégique nationale, cherchant à accroître la recherche et la commercialisation afin d'améliorer les performances économiques et la sécurité nationale.

Recommandation 4 : Le gouvernement du Canada devrait lancer un processus d'élaboration d'une stratégie nationale en matière de sciences, de recherche et d'innovation afin d'établir une vision et des objectifs communs pour l'écosystème de recherche et d'innovation du Canada et de favoriser une meilleure harmonisation entre les différents intervenants de l'écosystème.

Une stratégie nationale en matière de sciences, de recherche et d'innovation n'est pas un concept nouveau pour le Canada. Le Canada a eu de nombreuses stratégies, notamment Les sciences et la technologie à l'aube du XXIe siècle (1996), Réaliser le potentiel des sciences et de la technologie au profit du Canada (2007), et Un moment à saisir pour le Canada (2014). Plus récemment, le Canada a élaboré, ou est en train d'élaborer, une série de stratégies plus spécifiques, notamment des stratégies pancanadiennes pour l'intelligence artificielle et la génomique, une stratégie quantique nationale, une stratégie d'infrastructure de recherche numérique et le Plan pour l'innovation et les compétences de 2017. Le comité soutient fermement le sentiment de nombreux intervenants canadiens selon lequel le moment est venu pour le gouvernement du Canada de s'engager à nouveau dans une stratégie globale en matière de sciences, de recherche et d'innovation afin d'orienter les investissements et les activités stratégiques dans l'ensemble du continuum de la recherche et de l'innovation et d'exprimer l'ambition du Canada d'être un chef de file mondial en matière de sciences, de recherche et d'innovation.

Portée et composantes de la stratégie

À l'instar de la stratégie canadienne de 2014 (« Un moment à saisir pour le Canada »), le comité recommande que la stratégie adopte une perspective écosystémique complète, englobant à la fois la recherche et l'innovation et reflétant les continuums du talent, de la recherche et de l'innovation. La stratégie nationale (ainsi que la composition de l'organisme consultatif) doit également refléter un éventail de points de vue, notamment ceux des Autochtones, des Noirs et autres groupes racisés et des communautés francophones, ainsi que d'autres considérations liées à l'EDI.

Les commentaires reçus des intervenants comprenaient plusieurs suggestions concernant les éléments d'une stratégie, allant d'objectifs ambitieux de haut niveau à des domaines prioritaires spécifiques, en passant par des cibles pour les niveaux d'investissement.

Au cœur de la stratégie, il faut définir une vision claire et parler de l'ambition mondiale du Canada en proposant des manières pour y parvenir. Un bon point de départ est le cadre de la stratégie de 2014, qui s'articulait autour des thèmes des personnes (c.-à-d. le talent), du savoir (c.-à-d. la recherche) et de l'innovation. Ces thèmes restent pertinents. De l'avis du comité, les aspects particulièrement urgents qui devraient être reflétés dans une stratégie nationale comprennent le développement, l'attraction et la rétention des talents et l'amélioration du continuum de la recherche et de l'innovation, de la découverte à l'application et à la commercialisation. Pour soutenir nos ambitions, la stratégie devrait définir des niveaux de soutien ou des objectifs ambitieux pour les principaux intrants et extrants de la recherche et de l'innovation, notamment l'intensité des activités de recherche dans l'ensemble de l'écosystème ainsi que le développement du talent. La stratégie devrait également traiter des objectifs stratégiques du Canada en matière de partenariats internationaux de recherche et d'innovation, qui pourraient comprendre la diplomatie scientifique, l'amélioration de la réputation du Canada sur la scène mondiale, le soutien de l'excellence en recherche et la création de possibilités de collaboration industrielle.

L'idée de priorités de recherche est revenue fréquemment dans les discussions avec les intervenants sur la stratégie nationale, et les stratégies de 2007 et 2014 ont toutes deux défini des domaines prioritaires de recherche. Conformément à sa recommandation sur la FCSS, le comité appuie les approches orientées en fonction de priorités de recherche liées à des domaines névralgiques ou à des forces existantes au Canada, mais rappelle également que le soutien à la recherche orientée doit être jumelé à un soutien substantiel à la recherche libre, suscitée et entreprise par les chercheurs. Ce sont les résultats de ces recherches qui mènent à des percées inattendues susceptibles d'influencer les priorités futures. Lors de l'élaboration des priorités, il convient aussi de tenir compte de la manière dont celles-ci s'articulent avec les priorités de nos partenaires internationaux afin de favoriser l'avancement de nos recherches collectives.

Élaboration de la stratégie

Le comité a entendu différents points de vue sur la question de savoir qui serait le mieux placé pour diriger l'élaboration d'une stratégie nationale pour la science, la recherche et l'innovation, si le processus d'élaboration devait être plus descendant ou ascendant, et qui devrait être ultimement responsable de la stratégie.

Quant à savoir qui devrait diriger l'élaboration d'une stratégie en matière de sciences, de recherche et d'innovation, bien que le comité ait entendu certains points de vue selon lesquels la stratégie devrait être apolitique (et donc dirigée par le milieu de la recherche et de l'innovation), le comité estime que la stratégie doit en fin de compte être définie par le gouvernement puisque la mise en œuvre de la stratégie dépend de l'adhésion et de la réceptivité du niveau politique. De plus, le gouvernement est le mieux placé pour définir une vision globale pour le Canada et une action au niveau national.

Cela dit, le processus d'élaboration de la stratégie exige un certain degré d'indépendance et un large engagement dans l'ensemble de l'écosystème de la recherche et de l'innovation, en cherchant à obtenir une participation significative au processus de la part des universités, de l'industrie et d'autres parties prenantes de la recherche et de l'innovation. En particulier, la communauté devrait diriger l'identification des tactiques pour atteindre les objectifs de haut niveau du gouvernement. En fin de compte, tant le gouvernement que la communauté de la recherche et de l'innovation doivent avoir le sentiment de faire partie du processus d'élaboration et d'exécution de la stratégie et de se voir reflétés dans le produit final.

L'organisme consultatif proposé et la CSC pourraient tous deux jouer un rôle important dans le soutien à l'élaboration d'une stratégie nationale par le gouvernement, ce qui serait conforme au rôle des fonctions consultatives dans l'élaboration des stratégies d'autres pays (p. ex., l'Australie). En tant que chefs de file de la recherche et de l'innovation représentant l'ensemble de l'écosystème, l'organisme consultatif serait particulièrement bien placé pour réunir les intervenants de l'ensemble de l'écosystème afin de contribuer à l'élaboration de la stratégie et de fournir des conseils indépendants sur une vision de haut niveau et sur les priorités de recherche.

Les conditions de succès

Un système fédéral de soutien à la recherche coordonné et agile qui est outillé pour répondre aux besoins actuels et émergents en matière de recherche est d'une importance capitale pour le bien-être et la prospérité des Canadiennes et des Canadiens. Cela dit, pour que l'écosystème de recherche et d'innovation soit concurrentiel à l'échelle mondiale, il faut d'abord et avant tout être en mesure de soutenir efficacement et de maintenir en poste les meilleurs chercheuses et chercheurs du Canada et de bâtir un milieu de recherche qui favorise la découverte de nouvelles connaissances.

Au Canada, la recherche de calibre mondial est soutenue par un investissement annuel de 4 milliards de dollarsNote de bas de page 10 par l'entremise des conseils subventionnaires et de la FCI, qui alimente le vivier d'idées nouvelles et de PHQ qui sous-tendent et stimulent l'innovation. Les programmes phares qui appuient la recherche libre, suscitée et entreprise par les chercheurs (p. ex. les subventions à la découverte et les subventions Alliance du CRSNG, les subventions Savoir et de partenariats du CRSH et les subventions Projet des IRSC) en font partie. Ces programmes fournissent des fonds pour couvrir une panoplie des de coûts directs associés aux projets de recherche.

Comme il a été souligné au début du présent rapport, il est devenu tout à fait évident que de nouveaux investissements dans la recherche sont essentiels pour que le Canada demeure concurrentiel et assure la vitalité du bassin d'idées et de talents nécessaires à la réussite économique à long terme et à l'épanouissement des collectivités. Pour que le Canada puisse maximiser les retombées de la recherche, répondre aux priorités gouvernementales et contribuer aux objectifs économiques et sociétaux, le financement de la recherche doit être une priorité.

Les discussions du comité avec les intervenants, ainsi que les commentaires reçus des chercheurs de partout au Canada ainsi que l'étalonnage avec les pays pairs, ont révélé de façon répétée que l'écosystème de recherche canadien est maintenant gravement menacé en raison d'un soutien inadéquat à la recherche et à la communauté de talents qui la rend possible. Comme il a été mentionné précédemment, il est d'une importance capitale que le financement de base de chacun des conseils subventionnaires soit augmenté de façon significative afin de répondre aux pressions résultant :

  • de l'augmentation du nombre d'étudiantes et étudiants chercheurs et des stagiaires postdoctoraux dans l'écosystème de recherche;
  • des effets de l'inflation; et
  • de l'importance de favoriser une recherche concurrentielle à l'échelle mondiale, y compris une base de talents compétitive.

Le financement de la recherche au cours des 20 dernières années n'a tout simplement pas suivi le rythme de l'évolution des pressions exercées sur le système de soutien de la recherche. Compte tenu de la concurrence internationale pour le talent, le Canada risque fort, sans réinvestissement, de subir un nouvel exode des personnes hautement qualifiées.

Le manque de soutien adéquat des chercheuses et chercheurs d'aujourd'hui limite leurs activités de recherche, et en fin de compte limite aussi leurs impacts. Le manque de ressources limite la capacité d'entreprendre de nouvelles collaborations, limite la capacité d'amorcer des projets plus audacieux ou plus risqués qui ont un potentiel de grandes retombées, et il réduit la bande passante nécessaire pour entreprendre de nouveaux efforts de mobilisation des connaissances. Par conséquent, l'absence de financement suffisant compromet le succès du système de soutien à la recherche d'aujourd'hui et de demain, et continuera de le faire tant qu'on n'y aura pas remédié. Sans un effort significatif, la position relative et donc la compétitivité des chercheuses et chercheurs canadiens diminuera inexorablement, ce qui affectera l'état du Canada dans son ensemble.

Financement de la recherche suscitée et entreprise par les chercheurs

Le réinvestissement dans la recherche canadienne est nécessaire pour compenser les récentes baisses de financement des conseils subventionnaires et de la FCI (mesurées en dollars constants), qui ont été exacerbées par l'inflation exceptionnellement élevée enregistrée en 2022Note de bas de page 11. En particulier, une opinion largement répandue dans la communauté est qu'il existe un déséquilibre croissant entre la recherche suscitée et entreprise par les chercheurs des chercheurs (recherche souvent qualifiée de recherche libre) et la recherche orientée en fonction d'enjeux prioritaires. Le soutien à la recherche libre, suscitée et entreprise à l'initiative des chercheurs plafonne, tandis que de nouvelles ressources ont été affectées à des projets de recherche orientés ou ciblés. Une approche équilibrée du financement de la recherche est dans l'intérêt du Canada, car les connaissances acquises aujourd'hui par la recherche libre peuvent être cruciales pour répondre aux missions prioritaires de demain. Bien que le budget 2018 ait investi 925 millions de dollars sur cinq ans et 235 millions de dollars en cours pour accroître le soutien à la recherche fondamentale par l'entremise des trois conseils subventionnaires, ces investissements ont plafonné à un moment où de nombreux alliés et concurrents du Canada réinvestissent massivement dans la recherche et positionnent la science comme un pilier clé de leurs stratégies de croissance. Par exemple, en dollars constants de 2007, le budget du CRSNG est actuellement inférieur d'environ 3,7 p. 100 à ce qu'il était en 2007, alors que la National Science Foundation (NSF) des États-Unis a vu son budget augmenter de 5,2 p. 100 et le Conseil australien de la recherche de 1,1 p. 100 sur à peu près la même période (2007 à 2022).Note de bas de page 12

Qui plus est, les pays pairs du Canada se sont engagés de manière significative à faire des investissements additionnels. Par exemple, en 2022, les États-Unis se sont engagés à consacrer 200 milliards de dollars américains sur dix ans à la science par le biais de la loi CHIPS and Science Act, qui prévoit des investissements majeurs dans la recherche et le talent afin de stimuler l'excellence, l'innovation, la commercialisation et la compétitivité de la recherche américaine.Note de bas de page 13 Environ 81 milliards de dollars US sont destinés à la NSF, ce qui représente une augmentation d'environ 36 milliards de dollars US par rapport à la base de référence existante.Note de bas de page 14 Le Japon a également annoncé des plans d'augmentation historique du soutien à la recherche par la création d'un fonds de 87 milliards de dollars US destiné à promouvoir le Japon en tant que leader scientifique et technologique et à soutenir la croissance économique.Note de bas de page 15 De plus, le Royaume-Uni s'est engagé à porter l'investissement annuel du gouvernement dans la recherche et le développement à 20 milliards de livres sterling d'ici 2024 à 2025, ce qui constitue un niveau record.Note de bas de page 16 Cela fait partie du pivot stratégique du Royaume-Uni pour devenir une superpuissance scientifique. Il est important de noter que ces engagements comprennent des investissements à la fois dans la recherche à l'initiative des chercheurs (recherche libre) et dans la recherche orientée vers des enjeux prioritaires, reconnaissant que les deux types de recherche sont essentiels. La NSF américaine, par exemple, a l'intention d'augmenter considérablement le budget consacré à la recherche fondamentale à la suite de la loi CHIPS and Science Act. Toutes ces actions audacieuses et ambitieuses sont ancrées explicitement dans la reconnaissance de la science comme un pilier fondamental de l'intérêt national : la recherche est considérée comme une condition nécessaire du bien-être et de la prospérité au niveau individuel et collectif, ainsi qu'un outil supplémentaire de diplomatie et de l'influence au niveau mondial.

Les données de l'Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) montrent régulièrement que le Canada fait moins bien que ses pairs mondiaux en ce qui concerne l'intensité des investissements en recherche et développement (R-D) (c.-à-d. les investissements en R-D en pourcentage du PIB), et qu'il se situe bien en deçà de la moyenne de l'OCDE. Alors que l'Allemagne prévoit de porter les investissements dans la recherche à 3,5 % du PIB d'ici 2025Note de bas de page 17 et la Finlande à 4 % du PIB d'ici 2030Note de bas de page 18, le Canada se situe actuellement à environ 1,6 % du PIB. Le Canada est particulièrement en retard en matière d'investissement des entreprises dans la recherche et le développement, qui est un moteur important de la compétitivité économique.

Sans un financement compétitif à l'échelle internationale pour la recherche suscitée et entreprise à l'initiative des chercheurs, le Canada prendra du retard sur un marché mondial de plus en plus concurrentiel et perdra son statut de choix pour l'attraction de talent et comme collaborateur de recherche prisé.

Bien que le Canada se classe toujours bien dans certaines mesures de la production scientifique (par exemple, 10e au niveau mondial pour le nombre de publications scientifiques), ces indicateurs suivent une tendance à la baisse. En 2019, le nombre de chercheurs pour 1 000 employés au Canada est revenu à son niveau de 2011, le point culminant des deux dernières décennies. Au cours de cette période, le classement du Canada sur cette mesure a glissé du 8e rang de l'OCDE en 2011 – devant les États-Unis, le Royaume-Uni et l'Allemagne – au 18e rang en 2019, alors qu'il y a une demande toujours croissante de PHQ pour stimuler l'innovation dans tous les secteurs de l'économie canadienne.

Pour que la nouvelle FCSS réussisse à soutenir la recherche orientée en fonction d'enjeux prioritaires, permettant ainsi aux conseils subventionnaires de se concentrer et de continuer à exceller dans le soutien de la recherche libre suscitée et entreprise par les chercheurs dans un éventail de disciplines, et afin de stabiliser l'écosystème de la recherche, le gouvernement du Canada doit d'abord augmenter considérablement ses investissements dans les conseils subventionnaires. Ces nouveaux investissements doivent répondre aux pressions identifiées ci-dessus résultant :

  • de la croissance de l'écosystème de recherche;
  • des effets de l'inflation; et
  • de l'importance de soutenir une capacité de recherche et un vivier de talents compétitifs à l'échelle mondiale.

Comme action initiale, nous recommandons une augmentation annuelle d'au moins dix pour cent pendant cinq ans du budget de base total des conseils subventionnaires pour leurs programmes fondamentaux de subventions. Ce réinvestissement est nécessaire pour renverser le déclin de la valeur réelle du financement de la recherche universitaire au Canada.

Toutefois, compte tenu de la pression supplémentaire exercée par l'intensification de la concurrence internationale, une augmentation supplémentaire des investissements dans la recherche est nécessaire si le Canada aspire à rivaliser avec les meilleurs au monde. Le niveau de cet investissement supplémentaire devrait être déterminé en consultation avec l'organisme consultatif proposé, en fonction de l'analyse comparative internationale et d'autres considérations, et alloué pour soutenir par le biais de la FCSS à la fois la recherche axée sur la découverte et celle orientée en fonction d'enjeux prioritaires. Une fois la FCSS établie, le taux d'augmentation annuelle des conseils subventionnaires devrait être réexaminé afin d'évaluer les divers besoins en matière de recherche libre et de recherche orientée.

Recommandation 5 : Le gouvernement du Canada doit augmenter considérablement ses investissements dans les conseils subventionnaires. Ces nouveaux investissements doivent tenir compte des pressions résultant de la croissance de l'écosystème de recherche (par ex. nombre croissant d'étudiantes et étudiants chercheurs et de stagiaires postdoctoraux), des effets de l'inflation et de l'importance de favoriser une recherche et un bassin de talents compétitifs à l'échelle mondiale. Dans un premier temps, le gouvernement devrait s'engager à augmenter d'au moins dix pour cent par an pendant cinq ans le budget de base total des conseils pour leurs programmes fondamentaux de subventions. Le niveau requis d'investissements supplémentaires devrait ensuite être déterminé en consultation avec l'organisme consultatif proposé, sur la base d'une analyse comparative internationale.

En revigorant le soutien fédéral à la recherche, parallèlement à une série de changements proposés à la gouvernance du système fédéral de soutien à la recherche, le Canada soutiendra le succès de la recherche et notre position dans le milieu mondial de la recherche. Ces investissements auront également l'avantage de renforcer le soutien au développement des talents, à l'attraction et au maintien en poste d'une diversité de chercheuses et de chercheurs. Le vivier de talents est en fait un continuum qui va de la personne étudiante au stagiaire postdoctoral, puis la personne à l'emploi dans les universités, l'industrie ou le gouvernement; à ce titre, la formation à la recherche est nécessaire à de nombreux niveaux, ce qui rend essentiel l'investissement dans la recherche dans son ensemble.

Un soutien concurrentiel et prévisible pour le talent en recherche du Canada

Le talent en recherche est essentiel pour générer les idées et la propriété intellectuelle qui permettent de résoudre des défis importants et d'accroître la prospérité et le bien-être des Canadiennes et Canadiens. En termes clairs et simples, si les chercheurs ne considèrent pas le milieu de recherche comme offrant une carrière prometteuse, nous continuerons à perdre des talents au profit d'autres activités ou d'autres pays. La science et la recherche canadiennes en souffriront, et il y aura moins de PHQ et moins d'idées transformatrices susceptibles d'améliorer notre performance dans tous les secteurs sociaux et économiques.

Nous devons réaffirmer la position concurrentielle du Canada pour attirer, maintenir et développer des talents de pointe, sinon le Canada continuera à prendre du retard par rapport à nos pairs. Indépendamment des efforts qui pourraient être déployés pour établir un système fédéral de soutien à la recherche modernisé, agile et bien coordonné, nous trébucherons comme société si des investissements comparables ne sont pas faits pour développer, attirer et retenir les travailleurs du savoir dont les idées et les compétences sont les moteurs des solutions aux défis sociétaux complexes que nous connaitrons. Comme nous le savons, les meilleurs chercheurs et chercheuses du Canada sont très mobiles. La priorité doit être accordée aux mesures nécessaires pour soutenir un écosystème de recherche et d'innovation de calibre mondial qui développe, attire et retient des talents de classe internationale.

Pour être franc, le soutien actuel aux étudiantes et étudiants chercheurs – notre relève en recherche – est à un point de rupture. La valeur des bourses accordées par le gouvernement aux stagiaires en recherche universitaire a pratiquement stagné au cours des 20 dernières années. Par conséquent, elles n'ont suivi ni l'augmentation du coût de la vie ni les tendances en matière de rémunération des stagiaires de recherche dans le monde – une situation qui nuit considérablement à la position du Canada en tant que place de choix pour l'attraction et la rétention des talents en recherche. Des analyses récentes montrent que les niveaux de bourse offerts par les programmes fédéraux de bourses d'études de perfectionnement et de recherche du Canada se traduisent par un niveau de vie matériel inférieur pour nos étudiantes et étudiants chercheurs et nos stagiaires postdoctoraux à celui offert dans des pays comparables. Le groupe d'experts a entendu plusieurs groupes d'étudiants, dont l'Alliance canadienne des associations étudiantes (ACAE) et l'Union étudiante du Québec (UEQ), qui ont mis l'accent sur les conséquences du sous-financement des programmes de bourses d'études par les trois conseils subventionnaires fédéraux. Lorsque les étudiantes et étudiants chercheurs ne reçoivent pas un salaire décent et sont obligés d'accepter des emplois supplémentaires, la productivité des activités de recherche en souffre, tout comme la santé mentale et physique de notre communauté étudiante. Cela a un impact disproportionné sur les groupes marginalisés ou sous-représentés, ce qui affectera d'autant plus la diversité du bassin de talents pour des années à venir. Compte tenu du rôle crucial que jouent les étudiantes et étudiants chercheurs dans l'entreprise de recherche, il n'est pas surprenant qu'un appel à une action urgente sur ce front ait été lancé par la grande majorité des parties prenantes (au-delà des groupes d'étudiants) entendues par le comité.

Le Canada a un coût de la vie élevé et de faibles salaires pour les stagiaires en recherche par rapport à de nombreux autres pays, ce qui rend de plus en plus ardu le recrutement de talents internationaux ainsi que la rétention des chercheurs canadiens à tous les niveaux. Bien que le public se soit concentré sur la valeur stagnante des bourses d'études et de recherche, un aspect crucial du soutien aux stagiaires est offert par les subventions de recherche. Une part importante du soutien aux étudiantes et étudiants chercheurs et aux stagiaires postdoctoraux est versée non pas sous forme de bourses, mais sous forme d'allocations ou de salaires provenant des subventions accordées aux professeurs superviseurs. En faisant participer les stagiaires à leurs recherches, les bénéficiaires de subventions les aident à acquérir une expérience et des compétences en matière de recherche et à développer une plus grande capacité de recherche. Environ 35 000 stagiaires sont soutenus indirectement de cette manière, pour un montant total estimé à 726 millions de dollars par an. Ce montant est presque trois fois supérieur aux dépenses annuelles actuelles des conseils subventionnaires pour le soutien direct par le biais de leurs programmes de bourses d'études et de recherche. L'appui au personnel hautement qualifié, y compris les stagiaires et les autres membres du personnel de recherche, constitue généralement la majorité des dépenses liées aux subventions de recherche accordées. Les subventions de recherche sont actuellement insuffisantes pour financer les salaires compétitifs des stagiaires ou du personnel scientifique.

Pour espérer que la science et la recherche canadiennes conservent leur pertinence à l'échelle mondiale, il est essentiel que le financement des étudiants payés par des bourses d'études et de ceux rémunérés par des subventions des conseils subventionnaires soit élevé à un niveau concurrentiel à l'échelle internationale. Un soutien financier adéquat pour les subventions de recherche de nos chercheurs talentueux et des rémunérations attrayantes pour les stagiaires permettront le recrutement, la rétention et la formation de talents nécessaires pour soutenir l'entreprise scientifique du Canada.

Recommandation 6 : Le financement des étudiantes et étudiants chercheurs ainsi que celui des stagiaires postdoctoraux devrait être élevé à un niveau compétitif sur le plan international.

Un organisme de haut niveau, tel que l'organisme consultatif proposé, devrait également revoir régulièrement les niveaux de financement en tenant compte d'un étalonnage des financements internationaux. La hausse des niveaux de financement permettra d'attirer et de retenir les talents au Canada, d'accroître la diversité dans la recherche universitaire et dans d'autres secteurs de l'économie de l'innovation, et de stimuler le potentiel d'innovation du Canada. De plus, ces investissements permettront au Canada de mieux se positionner pour relever les principaux défis tels que le changement climatique, l'évolution démographique, les problèmes de santé, la cybersécurité et bien d'autres. Le Canada dispose d'une jeunesse instruite et curieuse et a la réputation d'accueillir les talents du monde entier; toutefois, sans un réinvestissement important dans le soutien aux talents, nous dilapiderons ces atouts, ce qui entraînera notre déclin collectif.

Soutenir le continuum des talents

Les étudiants et les chercheurs canadiens contribuent de façon importante à la recherche au Canada, que ce soit en tant que stagiaires dans le continuum des talents (c.-à-d. les étudiants de premier cycle et des cycles supérieurs et les stagiaires postdoctoraux), en tant que chercheurs émergents et en début de carrière, puis en tant que chercheurs établis. Les IRSC, le CRSNG et le CRSH contribuent, grâce à un large éventail de programmes et de bourses au développement, à l'attraction et au soutien des talents tout au long du cycle de vie de la carrière de recherche.

Bien qu'il soit clair qu'un financement accru est nécessaire pour les étudiants des cycles supérieurs et les stagiaires postdoctoraux du Canada, le développement du talent en recherche du Canada tout au long du continuum doit aussi être encouragé et mieux soutenu. Le talent, en particulier, devrait constituer un élément essentiel de la future stratégie en matière de sciences, de recherche et d'innovation, car notre réussite économique et sociétale exige que nous développions, attirions, retenions et intégrions mieux le talent en recherche dans tous les secteurs de l'économie et de la société canadiennes.

Le comité a clairement entendu de la part des étudiants, des associations étudiantes, de chercheurs en début de carrière et d'administrateurs séniors des universités que les programmes liés au continuum des talents doivent être simplifiés et harmonisés afin d'éliminer les inégalités en matière de soutien à la recherche et de réduire la charge des candidats afin qu'ils puissent se concentrer sur leurs recherches. Il est également nécessaire d'améliorer et rehausser les programmes visant à soutenir les professeurs en début et en milieu de carrière afin d'accélérer leur cheminement pour devenir les leaders de demain. Des programmes de concours préagrégation (« pre-tenure ») visant à récompenser l'excellence de la recherche en début de carrière renforceront la capacité du Canada à retenir les meilleurs talents, tout en permettant aux leaders scientifiques de demain de mettre sur pied des programmes ambitieux de calibre mondial, et d'attirer et financer des stagiaires à tous les niveaux. Un système de soutien fédéral bien coordonné, agile et adapté au développement des talents implique de disposer de mécanismes de soutien simplifiés.

Les programmes de bourses d'études et de perfectionnement du Canada sont offerts à la fois par les conseils subventionnaires et par des programmes partagés. De multiples organismes jouent différents rôles dans la gouvernance des divers programmes de bourses d'études et de perfectionnement, et plus d'un organisme semble être responsable de fournir une orientation stratégique de haut niveau sur les programmes de formation des conseils subventionnaires. Le groupe d'experts a entendu dire que l'ajout continu de nouveaux programmes a donné lieu à une complexification du portefeuille de programmes. Cela est particulièrement évident aux niveaux doctoral et postdoctoral, pour lesquels il existe de multiples programmes ayant des objectifs généraux similaires, mais des populations cibles et des caractéristiques de bourses différentes.

À la suite des recommandations de l'Examen du soutien aux sciences fondamentales, le CCRC a été invité à déterminer les moyens d'améliorer le soutien à la relève en recherche, notamment en faisant progresser les efforts d'harmonisation des programmes de bourses d'études et de recherche dans l'ensemble des conseils subventionnaires et en s'attaquant aux problèmes touchant les chercheurs en début de carrière. Depuis 2021, le CCRC travaille sur une stratégie trois conseils de formation des talents afin de coordonner et de rationaliser l'ensemble des programmes de bourses d'études et de recherche. Les conseils subventionnaires se penchent également sur les politiques et les pratiques visant à améliorer l'expérience durant la formation. Il s'agit notamment de réduire, voire éliminer les obstacles à la participation des Autochtones à la recherche, de réduire, voire éliminer les obstacles à la participation des Noirs à la recherche, d'harmoniser les programmes de bourses d'études et de recherche des trois conseils, d'élargir le programme de bourses de recherche pour étudiants de premier cycle (BRPC), d'examiner la transférabilité des bourses d'études et l'internationalisation des bourses, et de mettre davantage l'accent sur l'expérience lors de l'évaluation des étudiants pour l'attribution de bourses.

À la lumière des commentaires des parties prenantes, le comité d'experts estime qu'il reste du travail à faire pour harmoniser et simplifier les principaux programmes de talent afin de mieux soutenir les étudiants et les chercheurs. Le comité de coordination de la FCSS devrait être responsable de fournir une orientation sur la simplification et l'harmonisation en vue d'assurer une plus grande équité de financement entre les étudiantes et étudiants chercheurs des différentes disciplines. L'harmonisation de l'ensemble des programmes de talent permettra par ailleurs de soutenir de nouveaux types de doctorats et des projets de doctorat interdisciplinaires.

De plus, le gouvernement devrait simplifier l'opération du programme des Chaires de recherche du Canada (CRC). Le comité a entendu dire que le processus actuel des CRC ne répond pas suffisamment aux besoins des chercheurs et des établissements. Dans le cadre du processus actuel, le nombre de CRC est attribué aux universités en fonction du succès de l'établissement dans les programmes des trois organismes, les établissements recevant un nombre fixe de chaires par conseil. Actuellement, les candidatures particulières sont ensuite soumises au SPIIE pour un examen par les pairs. Le taux de réussite des candidatures CRC est supérieur à 95 %. Dans le but de simplifier le processus, de réduire le fardeau des examinateurs et d'être plus sensible à l'attraction et à la rétention de chercheurs exceptionnels, il est recommandé que les universités gèrent directement leur allocation de CRC, conformément aux politiques et aux exigences du programme, et de rendre compte à la FCSS de la façon dont elles ont utilisé leur allocation de CRC pour soutenir l'excellence, l'attraction/la rétention de talents et les objectifs de l'EDI. Cette approche favorisera l'attribution de chaires dans des domaines émergents, multidisciplinaires, interdisciplinaires et non traditionnels qui sont souvent désavantagés par le processus actuel d'évaluation par les pairs.

Recommandation 7 : La FCSS devrait donner la priorité à la simplification et à l'harmonisation de l'ensemble des programmes relatifs aux talents. En particulier, le comité de coordination de la FCSS devrait être responsable de fournir des directives sur la simplification et l'harmonisation des programmes de bourses d'études et de perfectionnement.

Recommandation 8 : La mise en œuvre du programme CRC devrait être simplifiée en permettant aux universités de gérer directement leur allocation CRC, conformément aux politiques et aux engagements du gouvernement, et de rendre compte à la FCSS de la manière dont elles ont utilisé leur allocation CRC pour soutenir l'excellence, l'attraction/la rétention des talents et les objectifs de l'EDI.

Recommandation 9 : Il convient d'envisager une programmation améliorée pour aider les professeurs en début et en milieu de carrière à accélérer leur parcours pour devenir les leaders de demain.

Autres facteurs d'excellence en matière de recherche et d'innovation

Les infrastructures de recherche et un nouveau paradigme pour les grandes installations de recherche

Le succès des chercheuses et chercheurs dépend non seulement des fonds de recherche, mais aussi de l'accès à des outils, des instruments et des installations de recherche de pointe. Le comité a évalué d'un point de vue de gouvernance et de structure comment le Canada pourrait améliorer son soutien aux outils et aux équipements de recherche de pointe afin d'appuyer la recherche et le talent de classe mondiale.

Plusieurs parties prenantes ont clairement indiqué au comité qu'il fallait étudier la possibilité d'améliorer la coordination et la simplification des programmes, notamment la faisabilité d'un guichet unique pour les fonds d'immobilisations, de fonctionnement et de recherche. À l'heure actuelle, les chercheurs doivent présenter plusieurs demandes distinctes pour obtenir les fonds nécessaires à la réalisation de leurs travaux (p. ex. une demande de subvention d'outils et d'instruments de recherche, une demande de subvention à la découverte et une demande de Fonds des leaders John R. Evans (FLJE)). Il convient de remédier à cette fragmentation.

La nécessité d'une approche plus cohérente est encore plus évidente pour les grandes infrastructures de recherche. De nombreux projets scientifiques révolutionnaires dépendent de l'accès à des installations de recherche complexes et à grande échelle. Qu'il s'agisse d'un accélérateur de particules, d'un centre de recherche sur les vaccins ou d'un brise-glace dans l'Arctique, la recherche et l'innovation au Canada dépendent d'un accès prévisible aux grandes installations de recherche (GIR).

Dans le cadre de son mandat et en relation avec ses recommandations sur l'ensemble de l'entreprise de recherche universitaire, le comité a été invité à formuler des commentaires sur le cadre proposé pour la prise de décision fédérale concernant les investissements dans les GIR. Le comité a examiné si le cadre proposé aidera à relever certains des défis actuels, à saisir les occasions de moderniser le système fédéral de soutien à la recherche et s'il pouvait inclure des possibilités de coordination accrue entre la FCI et les conseils subventionnaires.

Le comité appuie les orientations du cadre proposé pour la prise de décisions fédérales sur les investissements dans les GIR, car il établirait un modèle de financement plus prévisible et plus approprié aux GIR tout au long de leur cycle de vie. Dans cette optique, le comité recommande un exercice national de feuille de route (sur le modèle de ceux réalisés par l'Australie et le Royaume-Uni) pour guider l'établissement des priorités et la planification des investissements dans les infrastructures de recherche et de leur rôle dans l'ensemble de l'écosystème, qui s'inscrirait dans le cadre de la stratégie nationale proposée en matière de sciences, de recherche et d'innovation. Cet exercice de cartographie inclurait (sans s'y limiter) les GIR ainsi que d'autres investissements en infrastructure de recherche d'importance nationaleNote de bas de page 19 dans l'écosystème.

Une telle approche constituerait une première étape importante dans la clarification du rôle du gouvernement fédéral dans le processus décisionnel et le rôle continu des conseils subventionnaires et de la FCI dans le soutien de la recherche et de la formation menées dans ces installations.

Dans l'approche actuelle, les GIR représentent souvent une responsabilité significative pour les universités, tant au niveau de leur construction que de leur entretien. De nombreuses installations pourtant essentielles à la découverte scientifique au Canada subissent des pressions financières importantes et croissantes en raison de la hausse des coûts d'entretien de l'équipement vieillissant. Le comité reconnaît la nécessité pour le gouvernement fédéral de soutenir les GIR de façon plus holistique, en tenant compte des coûts du cycle de vie complet d'une installation et en arrimant les décisions de financement des immobilisations à celles liées à l'exploitation. Les GIR sont des actifs nationaux d'importance qui soutiennent la recherche et l'innovation à travers le pays et devraient être gérés dans cette optique.

Approche selon le cycle de vie, une feuille de route et un portefeuille global

Bien qu'elles soient détenues et exploitées par des institutions, les GIR sont principalement financées par le gouvernement fédéral, avec une contribution des institutions et des provinces. Bon nombre de ces installations jouent le rôle de laboratoires nationaux, une responsabilité qui dans de nombreux pays relève des gouvernements. Le comité est d'avis qu'à l'avenir, il sera important pour le gouvernement fédéral de mieux appréhender les opérations et les missions de ces installations – y compris leur lien avec les intérêts nationaux – et ainsi de mieux comprendre leur capacité de nous aider à répondre à des défis émergents ou à profiter d'occasions inédites.

Une approche par portefeuille des GIR permettrait également aux gouvernements de différents paliers d'appliquer un plus large éventail de critères dans leur prise de décision, tels que la répartition régionale, le développement économique et la sécurité nationale.

Recommandation 10 : Compte tenu de leur importance nationale en tant que ressources soutenant la recherche et l'innovation, il convient de mettre en œuvre une approche plus stratégique de la gestion des GIR. Cette approche devrait inclure les éléments suivants :

  1. a. Une approche axée sur le cycle de vie complet. Afin de reconnaître la valeur à long terme de ces installations, nous recommandons une approche axée sur le cycle de vie complet pour financer adéquatement les équipements et le personnel des GIR tout au long de la planification, de la construction, de l'exploitation, de l'entretien et de leur démantèlement éventuel. Cette approche augmenterait la prévisibilité et faciliterait une plus grande cohérence dans le financement des GIR.
  2. b. Une feuille de route des infrastructures. L'établissement des priorités d'investissement dans les GIR, dans le cadre d'un exercice plus holistique de feuille de route des infrastructures de recherche, assurerait que les investissements appuient les besoins et les priorités plus vastes du Canada en matière de science, de recherche et d'innovation et d'assurer une plus grande transparence et la participation du milieu de la recherche, les provinces et les territoires, l'industrie et les autres intervenants pertinents. Les décisions seraient prises en fonction du mérite scientifique, de la performance des activités réalisées et de considérations stratégiques telles que l'alignement à des intérêts nationaux ainsi que les répercussions économiques et sociales.
  3. c. Une approche de portefeuille global. Maintenir une perspective large et complète de l'ensemble des GIR que le gouvernement finance, en identifiant les actifs divers et complémentaires et les collaborations entre eux au sein d'un seul portefeuille, ainsi que les apports provinciaux aux infrastructures de ce portefeuille.

Partage des coûts et autres considérations financières

Compte tenu de leur taille et de leur complexité, les GIR sont uniques dans le soutien qu'ils requièrent des bailleurs de fonds. La planification, la construction, l'entretien et l'exploitation des GIR exigent des ressources considérables et des engagements financiers à long terme, car les coûts s'élèvent couramment à des dizaines, voire des centaines de millions de dollars. Leur ampleur dépasse généralement la capacité de financement d'une seule université, d'une seule région ou d'une seule province, et leur long cycle de vie exige une planification et des mises à niveau importantes si l'on veut qu'ils fonctionnent avec succès et restent pertinents.

Dans le cadre de l'approche de financement actuelle, le financement est fragmenté entre les gouvernements fédéral et provinciaux, les établissements hôtes et divers partenaires. En fait, la portion de financement provenant du gouvernement fédéral est plus faible au Canada que dans les pays comparables. Ces mêmes pays considèrent les GIR comme des actifs nationaux et financent les installations à des niveaux plus élevés. Les gouvernements nationaux des pays comparables exigent moins voire aucune contrepartie de la part des autres partenaires. Par ailleurs, les augmentations importantes du financement des sciences et de la recherche dans les pays pairs comprennent toutes des augmentations substantielles du soutien aux GIR et aux projets d'infrastructure de grande ampleur.

Les intervenants ont également noté que le soutien opérationnel des professionnels de recherche rattachés aux GIR n'est pas adéquatement soutenu par la FCI et n'est pas toujours admissible au financement des conseils subventionnaires. Cela crée un manque de financement qui limite l'impact de nos investissements dans les GIR et affecte le développement de la carrière du personnel scientifique travaillant dans les GIR. Par conséquent, le soutien à l'infrastructure des GIR devrait s'accompagner d'un soutien complémentaire à la recherche pour permettre aux chercheurs d'utiliser cette même infrastructure. De plus, le personnel scientifique et technique des GIR devrait être admissible à des fonds de recherche afin de leur permettre de participer à des expériences, d'embaucher des étudiants et de poursuivre une carrière scientifique, et ainsi de permettre à ces installations d'attirer et de retenir les meilleurs talents.

Recommandation 11 : L'exigence de fonds de contrepartie pour les GIR devrait être retirée ou considérablement réduite et les niveaux de financement des GIR devraient être augmentés pour atteindre les normes internationales.

Recommandation 12 :Le soutien aux infrastructures des GIR devrait s'accompagner d'un soutien suffisant à la recherche pour permettre aux techniciens de recherche de mieux soutenir les infrastructures et leurs activités de recherche.

Rôle de la FCI et des provinces

La FCI est bien placée pour contribuer à l'élaboration d'une feuille de route en collaboration avec les gouvernements fédéral, provinciaux et territoriaux. Elle pourrait notamment participer à l'élaboration d'une feuille de route à moyen (5 à 10 ans) et à long terme (10 à 20 ans) en consultant et en collaborant avec les établissements universitaires, les hôpitaux de recherche, les gouvernements fédéral et provinciaux et l'industrie, et en s'appuyant sur des enquêtes nationales sur la façon dont les infrastructures de recherche sont actuellement utilisées et peuvent répondre aux tendances, aux besoins et aux défis futurs.

Il est clair pour le comité que, en tant que cofondateurs et investisseurs importants dans les infrastructures de recherche du Canada, les provinces continueront d'avoir un rôle important à jouer dans la prise de décisions stratégiques et opérationnelles liées aux infrastructures de recherche. Étant donné la nature des GIR en tant que ressources nationales qui donnent accès à des utilisateurs de partout au pays, une table devrait être convoquée pour des discussions récurrentes fédérales-provinciales-territoriales à un niveau stratégique pour discuter des priorités nationales en matière d'infrastructure et afin d'éclairer l'exercice de planification. Cela facilitera l'établissement conjoint des priorités, une communication plus rapide et une meilleure compréhension de la contribution d'une province et de sa volonté d'investir dans un domaine prioritaire commun. Il convient de déterminer qui serait le mieux placé pour convoquer une telle table. Les options pourraient inclure la FCSS (dans le cadre de réunions avec les provinces et les territoires sur un plus large éventail de questions), la FCI et le gouvernement fédéral (par exemple, la CSC).

Le comité a discuté, sans parvenir à une conclusion claire, de la question de savoir si le statut de tierce partie indépendante de la FCI constitue un défi ou non pour la mise en œuvre des recommandations proposées pour les GIR. Toutefois, la question pourrait être réexaminée lorsque le gouvernement envisagera d'adopter les recommandations concernant les GIR.

Meilleure intégration du soutien aux infrastructures de recherche

Des petits projets jusqu'aux GIR, le comité a identifié plusieurs façons de mieux intégrer et consolider le soutien à l'infrastructure de recherche, y compris les outils et instruments.

En ce qui concerne le processus de demande de financement à la FCI, les intervenants ont indiqué qu'il était possible de simplifier et de mieux coordonner les demandes de la FCI avec les autres programmes de financement de la recherche. Le nouvel organisme (FCSS) devrait travailler avec la FCI pour améliorer la coordination et la simplification des processus de demande pour les infrastructures de recherche, y compris les projets de recherche orientée, et ce, pour l'ensemble des conseils (par exemple, examiner la faisabilité d'un guichet unique de demande pour les fonds d'immobilisations, de fonctionnement et de recherche). Étant donné que le mandat et la structure de la FCI ne permettent peut-être pas de répondre en temps opportun aux nouveaux besoins en matière d'infrastructure de recherche, il faudrait se demander si une partie du financement de l'infrastructure ne devrait pas être fournie par la FCSS pour répondre aux projets prioritaires.

Le financement accordé aux établissements par le biais du FLJE aide ces derniers à recruter et à retenir des chercheurs exceptionnels, à acquérir les outils qui permettent le travail novateur de chercheurs de premier plan et à offrir un soutien à la recherche qui, lorsqu'il est combiné au soutien à la recherche des conseils subventionnaires, constitue une offre concurrentielle à l'échelle internationale pour les meilleurs talents. Actuellement, les bourses FLJE sont attribuées en fonction d'une allocation institutionnelle annuelle; les propositions sont ensuite soumises à la FCI pour une évaluation par les pairs. Le taux de réussite du FLJE est supérieur à 80 %. Le fait de permettre aux établissements de gérer directement leurs allocations au lieu de devoir se plier à un processus de demande permettrait de réduire le fardeau des chercheurs, des évaluateurs et des établissements et de mieux répondre à la nécessité d'attirer et de retenir des chercheurs exceptionnels. À l'instar de la recommandation relative aux CRC, il serait possible de simplifier davantage le processus en permettant aux universités de gérer directement leur allocation FCI-FLJE et de rendre compte à la FCI de la façon dont elles ont utilisé cette allocation pour soutenir l'excellence, l'attraction/la rétention et les objectifs de l'EDI.

Une harmonisation supplémentaire et un accès aux instruments de recherche pourraient être envisagés par la FCSS en collaboration avec les conseils subventionnaires et la FCI. Bien que la plupart des fonds destinés aux infrastructures et aux équipements de recherche soient fournis par la FCI, certains fonds sont également fournis par les conseils subventionnaires, en particulier pour les équipements de moindre ampleur. Le comité a constaté que cette situation crée une certaine incertitude au sein de la communauté des chercheurs. De plus, étant donné le financement limité des petits équipements par les conseils subventionnaires et l'accent mis par la FCI sur les grandes infrastructures, les chercheurs sont parfois obligés de présenter à la FCI des demandes groupées plus imposantes que ce qui est strictement requis afin d'obtenir le financement de petits équipements qui sans être tapageurs sont souvent essentiels. Repenser et accroître le soutien aux outils et instruments de recherche pourrait permettre de clarifier les rôles, d'assurer une plus grande simplicité pour la communauté des chercheurs et d'offrir un meilleur accès à l'équipement aux chercheurs dans des domaines qui n'avaient pas besoin d'instruments de recherche dans le passé.

Recommandation 13 : Le processus de demande de la FCI devrait être simplifié et mieux coordonné, dans la mesure du possible, avec d'autres possibilités de financement de la recherche.

Recommandation 14 :Les universités devraient gérer directement leur allocation FLJE et rendre compte périodiquement à la FCI de la façon dont elles ont utilisé l'allocation FLJE pour soutenir les objectifs d'excellence, d'attraction/rétention de talents et d'EDI, conformément aux exigences du programme.

Recommandation 15 : La FCSS, en collaboration avec les conseils subventionnaires et la FCI, devrait repenser et augmenter le soutien aux outils et instruments de recherche afin de faciliter, d'accroître et de diversifier l'accès à ces outils.

Relier la recherche et l'innovation

Les étudiants canadiens de niveau postsecondaire sont les moteurs de l'innovation grâce aux sciences, à la recherche et à la réflexion menées dans les universités (y compris les hôpitaux de recherche affiliés), les collèges, les CÉGEPS et les écoles polytechniques. Le comité a été invité à donner des conseils pour aider le ministre de l'Innovation, des Sciences et de l'Industrie et le ministre de la Santé à respecter l'engagement pris dans la lettre de mandat de « moderniser l'écosystème fédéral de financement de la recherche afin de maximiser l'impact des investissements dans l'excellence de la recherche et l'innovation dans les étapes subséquentes ».

Premièrement, le comité souligne que les conseils subventionnaires ont un éventail de programmes de mobilisation des connaissancesNote de bas de page 20 qui reflète la grande importance que joue la mobilisation des connaissances dans leurs plans stratégiques et politiques respectifs. Ils devraient poursuivre ces efforts pour encourager les chercheurs universitaires à collaborer avec des organismes partenaires privés, publics ou sans but lucratif et soutenir la capacité des collèges, des CÉGEPS et des écoles polytechniques à travailler avec les PME pour appuyer le transfert et l'adoption de la technologie. Toutefois, comme il a été mentionné précédemment dans ce rapport, la FCSS proposée serait responsable de déterminer les lacunes dans les programmes et les approches de mobilisation des connaissances afin de mieux positionner la communauté des chercheurs dans les démarches d'innovation et de commercialisation. Elle assurerait également de meilleures lignes de communication entre l'industrie et les institutions universitaires sur le lien entre la recherche et l'innovation par le biais de l'organisme consultatif proposé.

L'innovation et la commercialisation dépendent des idées et du talent qui proviennent des laboratoires, des collèges, des cégeps, des écoles polytechniques, des universités et des instituts de recherche du Canada. De plus, les chercheurs et les personnes hautement qualifiées sont essentiels à la mobilisation des connaissances et à l'innovation. Le comité recommande que le système fédéral de soutien à la recherche s'appuie sur les efforts de mobilisation des connaissances et de commercialisation déployés jusqu'à présent et les fasse progresser davantage, en comblant les lacunes en matière de soutien et de gouvernance, afin d'avoir un impact plus important sur l'innovation.

Grâce à des discussions avec le milieu de la recherche, des hauts fonctionnaires responsables des programmes d'innovation au sein du gouvernement et des représentants de l'industrie, le comité a constaté un besoin évident de mieux lier la recherche au continuum de l'innovation et de mieux cerner les lacunes dans le soutien aux chercheurs en ce qui concerne la mobilisation des connaissances et les efforts de commercialisation (p. ex. la précommercialisation ou la commercialisation précoce). D'après les discussions du comité avec les intervenants, il faut un continuum de soutien pour favoriser la réussite dans ce domaine. Bien qu'il existe des possibilités de financement au tout début et à la fin du continuum de la recherche et de l'innovation (y compris à l'étape ultérieure de la commercialisation), il y a manifestement des lacunes au milieu de la progression vers la commercialisation, comme par exemple le manque de soutien aux chercheurs entrepreneurs qui souhaiteraient amener leurs initiatives à un niveau supérieur de maturité.

Les chercheurs ayant des aptitudes entrepreneuriales sont un catalyseur essentiel de la mobilisation des connaissances, de l'entrepreneuriat scientifique à la recherche industrielle. Il est possible de favoriser un état d'esprit plus entrepreneurial au sein de la communauté de la recherche au début de la carrière d'un chercheur (par exemple, par une formation à l'entrepreneuriat ou en favorisant le changement de culture là où pertinent) et de suivre attentivement divers indicateurs de réussite. Un défi supplémentaire est que la communauté de la recherche n'a pas accès à la formation nécessaire pour acquérir les connaissances et les compétences requises pour transformer leur recherche en une solution pour le marché. Une expertise chevronnée et du mentorat sont nécessaires pour accompagner les chercheurs afin qu'ils puissent positionner leurs technologies de manière à les rendre attrayantes pour les entreprises. Le comité considère le programme « Lab au Marché » proposé par le gouvernement et annoncé dans le budget 2022, comme un pas en avant à cet égard et suivra avec attention le déploiement de ce programme.

Certaines parties prenantes ont également noté qu'il existe des contraintes engendrées par certaines dispositions réglementaires et certains programmes qui entraînent des obstacles pour les chercheurs talentueux souhaitant participer à des activités liées à l'entrepreneuriat et à l'innovation. Par exemple, l'exigence de fonds de contrepartie limite l'utilité de Mitacs, car cette exigence exclut de facto certains groupes comme les chercheurs, les groupes communautaires ou les nouvelles entreprises n'ayant pas accès au capital requis.

La FCSS proposée devrait examiner comment les programmes d'innovation pourraient être alignés de manière plus réfléchie avec le soutien à la recherche. Il conviendrait d'explorer les programmes d'autres contextes nationaux qui offrent un soutien plus entrepreneurial aux chercheurs (par exemple, la bourse de recherche entrepreneuriale postdoctorale innovante aux États-Unis).

Les conseils subventionnaires continueraient à jouer un rôle dans la mobilisation des connaissances (p. ex. en soutenant les activités de niveau de maturité technologique TRL 1-5) et à encourager la recherche à TRL plus élevé, mais le mandat de la FCSS proposée comprendrait également des fonctions de mobilisation des connaissances, y compris l'expertise et la programmation pertinentes (TRL faible à intermédiaire), ainsi qu'un lien clair avec la programmation axée sur les entreprises. La nouvelle organisation comprendrait un mécanisme permettant de mieux relier la recherche à l'innovation et d'identifier les lacunes en matière de soutien. Actuellement, il y a une grande variation d'une région ou d'une institution à l'autre dans les instruments de mise en relation de la recherche et du marché.

Recommandation 16 : Le gouvernement devrait reconnaître le rôle que joue la recherche dans le continuum de l'innovation. La FCSS proposée et une future stratégie nationale en matière de sciences, de recherche et d'innovation devraient avoir des liens clairement établis avec les activités éventuelles de l'Agence canadienne d'innovation et d'investissement et avec les programmes d'innovation et de commercialisation gouvernementaux destinés aux entreprises. La FCSS comprendrait un mécanisme permettant de mobiliser les communautés de recherche et d'affaires pour soutenir les besoins émergents en matière de recherche et d'innovation auxquels le gouvernement du Canada doit faire face, comme ceux qui ont été vécus pendant la pandémie.

Recommandation 17 : La FCSS devrait être dotée d'instruments flexibles (y compris des financements mixtes et des critères d'éligibilité larges, le cas échéant) afin d'avoir la capacité de soutenir d'autres acteurs du continuum de l'innovation (par exemple, des projets de recherche et développement dans des entreprises en démarrage ou d'autres entreprises) lorsqu'une lacune des programmes est identifiée.

Recommandation 18 : La FCSS devrait être responsable de l'identification du soutien à la formation des chercheurs afin qu'ils acquièrent les connaissances et les compétences nécessaires pour que la recherche ait le plus d'impact possible. De plus, la FCSS devrait identifier de nouvelles approches pour soutenir le continuum de la découverte, à l'invention, aux produits ou aux bienfaits pour les Canadiennes et Canadiens. Plus précisément, il faudrait procéder à un examen des contraintes créées par certaines politiques et certains programmes qui font obstacle à la participation des chercheuses et chercheurs de talent à la démarche d'innovation.

Renforcer l'équité, la diversité et l'inclusion

Le CCRC doit être félicité pour le travail accompli afin de mieux comprendre et d'aborder les disparités auxquelles font face les groupes sous-représentés au sein de l'écosystème de recherche. Notons par exemple la publication du plan d'action tripartite sur l'EDI et le leadership sur la charte Dimensions. Les présidents des conseils, l'ISDE et Santé Canada ont également supervisé les changements apportés au programme des CRC, comme l'établissement d'objectifs d'équité fondés sur la population afin de s'assurer que la représentation des groupes racisés, des peuples autochtones, des femmes et des personnes handicapées corresponde à la diversité canadienne.

En poursuivant sur cette lancée, la FCSS devrait être responsable de déterminer les obstacles à la participation des groupes sous-représentés dans l'ensemble du continuum de la recherche et des talents, et chercher à coordonner les efforts visant à éliminer ces obstacles, d'autant plus que la FCSS aurait le mandat pour les programmes de talents clés et un mandat de mobilisation des connaissances.

Recommandation 19 : Le système fédéral de soutien à la recherche devrait continuer par l'entremise de la FCSS à faire progresser la mise en œuvre du Plan d'action des trois organismes pour l'EDI et d'autres travaux complémentaires qui serviront à remédier à la sous-représentation dans plusieurs domaines des groupes en quête d'équité et de détenteurs de droits (p. ex. Noirs et autres groupes racisés) et à encourager la diversité dans l'ensemble de l'écosystème de recherche.

Recherche et talent autochtones

L'Examen du soutien aux sciences fondamentales a recommandé que les trois conseils subventionnaires collaborent à l'élaboration d'un plan stratégique global visant à promouvoir et à soutenir à long terme la recherche autochtone. Par la suite, le CCRC a été mandaté pour appuyer le leadership du CRSH, en collaboration avec les autres conseils subventionnaires, la FCI et les communautés autochtones, afin de répondre à l'appel de la Commission de vérité et réconciliation pour l'établissement d'un programme national de recherche visant à faire progresser la compréhension de la réconciliation. Il s'agit notamment de soutenir la recherche effectuée par et avec les communautés autochtones et d'accroître la capacité de ces dernières à mener des recherches et à établir des partenariats avec le milieu de la recherche en général.

Depuis 2019, l'initiative Renforcement des capacités en recherche autochtone établit les bases de la mise en œuvre du tout premier plan stratégique inter-organismes du Canada pour la recherche et la formation en recherche autochtone (Établir de nouvelles orientations à l'appui de la recherche et de la formation en recherche autochtone au Canada 2019-2022). Des représentants des conseils subventionnaires et de la FCI se sont réunis tout au long de l'année 2020-2021 afin de coordonner la mise en œuvre de la stratégie de recherche et de formation autochtones dans l'ensemble des programmes et des politiques existants.

Le comité suivra avec attention la continuation de la collaboration avec les partenaires autochtones et la mise en œuvre du plan stratégique interorganismes pour la recherche et la formation en recherche autochtone élaboré en partenariat avec le Cercle de leadership autochtone en recherche. Il souhaiterait également que la communauté de recherche autochtone soit représentée au sein de l'organisme consultatif proposé.

Recommandation 20 : La recherche autochtone devrait être une composante d'une stratégie nationale en matière de sciences, de recherche et d'innovation, et des représentants des d'acteurs de l'écosystème et des communautés concernées devraient participer à rassembler les avis et conseiller l'organisme consultatif proposé sur cette composante.

Soutien à la recherche francophone

Reconnaissant les mesures mises en place par les conseils subventionnaires, le comité a été informé par les intervenants qu'il est nécessaire de mieux soutenir et financer la recherche francophone et de veiller à ce que les demandes de financement de la recherche présentées en français soient traitées de façon équitable au sein du système fédéral de soutien à la recherche. D'abord et avant tout, il est impératif que les demandes de financement soumises à tout organisme de financement fédéral soient traitées et soutenues de la même manière, quelle que soit la langue officielle dans laquelle elles sont rédigées. Deuxièmement, pour que le Canada maintienne vraiment l'excellence de la recherche, nous devons soutenir la recherche de classe mondiale dans toutes les régions du pays, dans des institutions de toutes tailles, qu'elle soit entreprise dans l'une ou l'autre des langues officielles du Canada. Troisièmement, il faut identifier les possibilités d'encourager de manière continue la production et la diffusion de connaissances et de recherches en français au Canada et dans le monde. Finalement, il faudrait examiner les moyens d'offrir des possibilités de perfectionnement en français pour appuyer les chercheurs non francophones de talent qui aspirent à une collaboration et à un leadership accrus en matière de recherche dans les deux langues officielles.

Recommandation 21 : Étant donné que le soutien à la recherche francophone est une priorité commune à l'ensemble du système fédéral de soutien à la recherche, la FCSS devrait s'assurer que les programmes existants sont équitables pour les francophones. La FCSS devrait également identifier les moyens d'encourager la production et la diffusion de connaissances et de recherches en français au Canada et dans le monde.

Échéancier proposé

Le comité comprend qu'il pourrait ne pas être possible ou réaliste de mettre en œuvre toutes les recommandations contenues dans ce rapport au cours de l'exercice 2023-2024. Si les principaux éléments sont acceptés, l'ordre de mise en œuvre pourrait être le suivant :

Court terme (2023)

  • Annonce de l'intention d'établir la FCSS afin de répondre rapidement aux nouveaux besoins en matière de recherche et d'innovation, et d'améliorer la coordination et la planification intégrée dans l'ensemble de l'écosystème de la recherche et de l'innovation.
  • Annonce de l'intention de créer un nouvel organisme consultatif chargé de fournir aux ministres des conseils stratégiques en matière de science, de recherche et d'innovation sur le financement et la stratégie nationale, et d'assurer une surveillance générale de l'état de l'écosystème de la recherche et de l'innovation.
  • Un financement rehaussé pour les trois conseils subventionnaires afin de soutenir la recherche fondamentale, libre, suscitée et entreprise par les chercheurs.
  • Un financement rehaussé pour fournir un soutien compétitif et durable aux étudiantes et étudiants chercheurs canadiens.

Moyen terme (2023 à 2024)

2023 :

  • Simplification de certains programmes spécifiques (par exemple, CRC, infrastructure de recherche).
  • Faire progresser les autorisations législatives, politiques et de programmes pour mettre en œuvre la FCSS.
  • Lancement du nouvel organisme consultatif.

2024 :

  • Lancement de la FCSS.

Conclusion

Le Canada prendra du retard si nous ne parvenons pas à faire évoluer notre système de soutien à la recherche. Celui-ci doit être capable de répondre aux besoins de la recherche contemporaine dans un monde où les autres pays utilisent leur propre potentiel scientifique comme un atout stratégique national. Au cours de ses délibérations, le comité a compris que le dynamisme et l'ambition du milieu de la recherche ne sont pas seulement la marque d'une société avancée et tournée vers l'avenir, mais qu'ils constituent de plus en plus une question de priorité stratégique nationale pour des raisons sociales, économiques et même géopolitiques.

Les conseils subventionnaires jouent un rôle clé et spécifique dans le système de soutien à la recherche et, avec la FCI, ils jouissent d'une réputation mondiale méritée d'excellence en ce qui concerne leur soutien à la recherche disciplinaire suscitée et entreprise par les chercheurs et aux infrastructures de recherche, respectivement. En fin de compte, la capacité du Canada à répondre à des enjeux prioritaires repose sur le talent, l'expertise et les idées générés par la recherche libre qui émane de nos chercheurs et qui est financée par les conseils.

En plus du réinvestissement approprié dans la recherche libre et le talent, il est important de concevoir et de maintenir un système de soutien qui est en mesure mieux soutenir la mobilisation des connaissances, l'innovation et la commercialisation. Il est dans notre intérêt en tant que pays de veiller à ce que la recherche ambitieuse financée par le système de soutien fédéral soit entreprise de manière efficace et efficiente et qu'elle soit exploitée pour avoir le plus grand impact possible. C'est pourquoi le comité a tenu plusieurs discussions sur la structure, la gouvernance, les programmes et les processus du système de soutien à la recherche, dans le but de s'assurer que le soutien fédéral à la recherche est :

  • suffisamment agile pour saisir les nouvelles opportunités et répondre aux nouveaux besoins et intérêts de la recherche, de l'économie et de la société;
  • coordonné et cohérent, équilibrant le respect des besoins des communautés disciplinaires avec une perspective holistique entre les disciplines et avec une compréhension du lien fondamental entre la recherche, la formation et les infrastructures associées; et
  • sensible aux approches multidisciplinaires et interdisciplinaires et aux approches collaboratives et internationales qui sont de plus en plus la marque de la recherche et de l'innovation transformatrices.

Nos défis sociétaux les plus complexes exigent de plus en plus des solutions créatives qui rallient des perspectives multiples issues de domaines divers. La recherche est maintenant plus internationale, plus collaborative et plus multi et interdisciplinaire que jamais. Un système de soutien à la recherche concurrentiel qui facilite une approche collaborative n'est pas seulement essentiel pour soutenir nos scientifiques et nos chercheurs, mais aussi pour garantir la capacité du Canada à relever les défis sociétaux qui se présenteront à nous.

Le comité reconnaît que l'une des plus grandes lacunes du système de soutien actuel est sa capacité à répondre rapidement et de façon novatrice aux besoins émergents qu'ils soient sociétaux ou économiques. Le Canada a besoin d'un système de soutien à la recherche et au talent qui facilite les liens entre les disciplines et qui établit des liens entre les structures que le Canada a créées pour les soutenir (p. ex., les conseils subventionnaires). Ce système doit aussi créer des liens entre les établissements et entre les chercheurs, y compris ceux de l'industrie et du gouvernement. Le système de soutien à la recherche de l'avenir doit être conçu de manière à encourager les partenariats, partout où c'est pertinent, afin d'assurer l'avenir du Canada et de renforcer l'impact de ses investissements dans la recherche.

Le comité est d'avis que le système de soutien devrait être souple afin de répondre à une gamme diversifiée de besoins en matière de recherche. Il devrait encourager la recherche multidisciplinaire, interdisciplinaire et orientée en fonction d'enjeux prioritaires lorsque c'est pertinent, tout en veillant à ce que la recherche fondamentale, spécifique à une discipline et, de manière générale, la recherche libre suscitée et entreprise par les chercheurs soit soutenue selon les normes les plus élevées. Afin de protéger et de rehausser la stature du Canada dans le monde, nous devons également nous attaquer à améliorer notre soutien à l'évolution d'une idée émanant de la recherche, à l'innovation et à la commercialisation. Ceci exige une coopération et une coordination dans l'ensemble du continuum de la recherche et de l'innovation.

Le comité recommande la création de la Fondation canadienne pour le savoir et la science (FCSS) afin de doter le Canada d'un instrument permettant de financer rapidement la recherche orientée dans l'ensemble de l'écosystème de la recherche grâce à une programmation souple et sur mesure visant à répondre à des besoins spécifiques (p. ex. la biofabrication, la sécurité alimentaire). La FCSS permettra aux gouvernements, aux universités, aux entreprises et aux organismes à but non lucratif de se rassembler autour de défis et de missions, ce qui se traduira par une plus grande agilité et une plus grande souplesse dans la recherche de solutions. Cette nouvelle approche de la gouvernance est nécessaire pour que les lacunes persistantes du système de soutien puissent être comblées. Une action urgente est requise, car le Canada doit être prêt à répondre de manière éclairée aux nouveaux défis locaux et mondiaux qui se présenteront à nous. Le groupe d'experts a envisagé d'autres solutions pour atteindre ces objectifs, certaines auraient peut-être conduit à des changements plus progressifs. Cependant, l'exécution apparemment plus simple de ces autres options masque un fardeau bureaucratique accru sans procurer d'avantage stratégique réel.

Le comité reconnaît que la mise en œuvre de changements en matière de gouvernance peut s'avérer difficile, mais le maintien du statu quo constitue un risque en soi. Le statu quo laisserait la recherche canadienne dans une position précaire : exode de talents et perte des compétences et des capacités de recherche pour l'avenir. Bien que la mise en œuvre de la FCSS soit une entreprise importante, il est clair, d'après les délibérations du groupe d'experts et les commentaires des parties prenantes, que les changements progressifs n'ont pas été suffisants pour apporter les changements nécessaires requis pour soutenir la diversité des approches en recherche : les besoins des communautés disciplinaires, ceux des approches multidisciplinaires et interdisciplinaires, l'agilité pour répondre aux nouveaux besoins d'une manière compétitive au niveau mondial.

D'autres mesures devraient également être prises, notamment le lancement de l'organe consultatif (en reconnaissant notamment que beaucoup de travail a déjà été fait autour du CSI) et la recherche d'opportunités pour simplifier les programmes et les processus, en particulier le FLJE et les CRC. D'autres travaux pourraient consister à soutenir le développement de plateformes de données améliorées et à charger le CCRC de commencer à travailler sur certains des rôles qui seront assumés par la FCSS, notamment un plan intégré et une harmonisation plus poussée des politiques, etc. (cela permettrait de préparer le terrain pour la FCSS, afin que celle-ci puisse être opérationnelle dès son lancement).

Étant donné que d'autres pays investissent de plus en plus pour devenir des puissances mondiales en matière de science et d'innovation, le comité recommande fortement que la priorité immédiate soit d'augmenter le soutien financier pour la recherche et le talent à un niveau approprié et concurrentiel. Un tel réinvestissement est absolument nécessaire au succès des autres recommandations proposées par le comité. De plus, les investissements dans l'écosystème de recherche du Canada sont des investissements dans notre bien-être et notre prospérité collectifs, car ils renforceront notre capacité à attirer et à retenir les talents et à résoudre les défis d'envergure auxquels nous serons confrontés aujourd'hui et demain.

Les recommandations du comité serviront à protéger et à promouvoir l'excellence en recherche qui est la marque distinctive de la science canadienne, tout en permettant une plus grande souplesse, flexibilité et réactivité pour soutenir la recherche et l'innovation transformatrices, ainsi que l'équité et l'inclusion. Le Canada a l'immense potentiel de mener le monde vers un avenir plus prospère, plus juste et plus durable grâce à ses forces en matière de connaissances et de talents. Pour réaliser ce potentiel et occuper la place qui lui revient sur la scène mondiale de la science, de la recherche et de l'innovation, nous devons redoubler d'efforts, mettre en place les solutions et les politiques requises et nous engager avec ferveur à relever ce défi.

Annexe A : Liste des recommandations

Dans le texte du rapport, le comité formule les recommandations suivantes (classées par ordre d'apparition) :

Une approche audacieuse pour le soutien à la recherche

Recommandation 1 : Le gouvernement du Canada devrait créer une nouvelle organisation, appelée Fondation canadienne du savoir et de la science (FCSS) qui agirait comme mécanisme pour répondre rapidement aux nouveaux besoins en matière de recherche et d'innovation, offrir la plupart des programmes partagés des trois organismes, et améliorer la coordination, la planification et la capacité d'élaboration des politiques pour l'ensemble du système de soutien à la recherche.

Recommandation 2 : Les conseils subventionnaires existants devraient être préservés en tant que mécanismes essentiels pour soutenir l'excellence de la recherche suscitée et entreprise par les chercheurs ainsi que le développement des talents.

Conseils stratégiques et vision commune pour un impact collectif

Recommandation 3 : Le gouvernement du Canada devrait créer un nouvel organisme consultatif indépendant responsable de fournir aux ministres des conseils stratégiques sur le financement et la stratégie nationale en matière de science, de recherche et d'innovation. Il assurerait par ailleurs une surveillance générale de l'état du système de soutien à la recherche et à l'innovation.

Recommandation 4 : Le gouvernement du Canada devrait lancer un processus d'élaboration d'une stratégie nationale en matière de sciences, de recherche et d'innovation afin d'établir une vision et des objectifs communs pour l'écosystème de recherche et d'innovation du Canada et de favoriser une meilleure harmonisation entre les différents intervenants de l'écosystème.

Financement de la recherche et soutien concurrentiel aux talents

Recommandation 5 : Le gouvernement du Canada doit augmenter considérablement ses investissements dans les conseils subventionnaires. Ces nouveaux investissements doivent tenir compte des pressions résultant de la croissance de l'écosystème de recherche (par ex. nombre croissant d'étudiantes et étudiants chercheurs et de stagiaires postdoctoraux), des effets de l'inflation et de l'importance de favoriser une recherche et un bassin de talents compétitifs à l'échelle mondiale. Dans un premier temps, le gouvernement devrait s'engager à augmenter d'au moins dix pour cent par an pendant cinq ans le budget de base total des conseils pour leurs programmes fondamentaux de subventions. Le niveau requis d'investissements supplémentaires devrait ensuite être déterminé en consultation avec l'organisme consultatif proposé, sur la base d'une analyse comparative internationale.

Recommandation 6 : Le financement des étudiantes et étudiants chercheurs ainsi que celui des stagiaires postdoctoraux devrait être élevé à un niveau compétitif sur le plan international.

Soutenir le continuum des talents

Recommandation 7 : La FCSS devrait donner la priorité à la simplification et à l'harmonisation de l'ensemble des programmes relatifs aux talents. En particulier, le comité de coordination de la FCSS devrait être responsable de fournir des directives sur la simplification et l'harmonisation des programmes de bourses d'études et de perfectionnement.

Recommandation 8 : La mise en œuvre du programme CRC devrait être simplifiée en permettant aux universités de gérer directement leur allocation CRC, conformément aux politiques et aux engagements du gouvernement, et de rendre compte à la FCSS de la manière dont elles ont utilisé leur allocation CRC pour soutenir l'excellence, l'attraction/la rétention des talents et les objectifs de l'EDI.

Recommandation 9 : Il convient d'envisager une programmation améliorée pour aider les professeurs en début et en milieu de carrière à accélérer leur parcours pour devenir les leaders de demain.

Les infrastructures de recherche et un nouveau paradigme pour les grandes installations de recherche

Recommandation 10 : Compte tenu de leur importance nationale en tant que ressources soutenant la recherche et l'innovation, il convient de mettre en œuvre une approche plus stratégique de la gestion des GIR. Cette approche devrait inclure les éléments suivants :

  • Une approche axée sur le cycle de vie complet. Afin de reconnaître la valeur à long terme de ces installations, nous recommandons une approche axée sur le cycle de vie complet pour financer adéquatement les équipements et le personnel des GIR tout au long de la planification, de la construction, de l'exploitation, de l'entretien et de leur démantèlement éventuel. Cette approche augmenterait la prévisibilité et faciliterait une plus grande cohérence dans le financement des GIR.
  • Une feuille de route des infrastructures. L'établissement des priorités d'investissement dans les GIR, dans le cadre d'un exercice plus holistique de feuille de route des infrastructures de recherche, assurerait que les investissements appuient les besoins et les priorités plus vastes du Canada en matière de science, de recherche et d'innovation et d'assurer une plus grande transparence et la participation du milieu de la recherche, les provinces et les territoires, l'industrie et les autres intervenants pertinents. Les décisions seraient prises en fonction du mérite scientifique, de la performance des activités réalisées et de considérations stratégiques telles que l'alignement à des intérêts nationaux ainsi que les répercussions économiques et sociales.
  • Approche de portefeuille global. Maintenir une perspective large et complète de l'ensemble des GIR que le gouvernement finance, en identifiant les actifs divers et complémentaires et les collaborations entre eux au sein d'un seul portefeuille, ainsi que les apports provinciaux aux infrastructures de ce portefeuille.

Recommandation 11 : L'exigence de fonds de contrepartie pour les GIR devrait être retirée ou considérablement réduite et les niveaux de financement des GIR devraient être augmentés pour atteindre les normes internationales.

Recommandation 12 : Le soutien aux infrastructures des GIR devrait s'accompagner d'un soutien suffisant à la recherche pour permettre aux techniciens de recherche de mieux soutenir les infrastructures et leurs activités de recherche.

Recommandation 13 : Le processus de demande de la FCI devrait être simplifié et mieux coordonné, dans la mesure du possible, avec d'autres possibilités de financement de la recherche.

Recommandation 14 : Les universités devraient gérer directement leur allocation FLJE et rendre compte périodiquement à la FCI de la façon dont elles ont utilisé l'allocation FLJE pour soutenir les objectifs d'excellence, d'attraction/rétention de talents et d'EDI, conformément aux exigences du programme.

Recommandation 15 : La FCSS, en collaboration avec les conseils subventionnaires et la FCI, devrait repenser et augmenter le soutien aux outils et instruments de recherche afin de faciliter, d'accroître et de diversifier l'accès à ces outils.

Relier la recherche et l'innovation

Recommandation 16 : Le gouvernement devrait reconnaître le rôle que joue la recherche dans le continuum de l'innovation. La FCSS proposée et une future stratégie nationale en matière de sciences, de recherche et d'innovation devraient avoir des liens clairement établis avec les activités éventuelles de l'Agence canadienne d'innovation et d'investissement et avec les programmes gouvernementaux d'innovation et de commercialisation destinés aux entreprises. La FCSS comprendrait un mécanisme permettant de mobiliser les communautés de recherche et d'affaires pour soutenir les besoins émergents en matière de recherche et d'innovation auxquels le gouvernement du Canada doit faire face, comme ceux qui ont été vécus pendant la pandémie.

Recommandation 17 : La FCSS devrait être dotée d'instruments flexibles (y compris des financements mixtes et des critères d'éligibilité larges, le cas échéant) afin d'avoir la capacité de soutenir d'autres acteurs du continuum de l'innovation (par exemple, des projets de recherche et développement dans des entreprises en démarrage ou d'autres entreprises) lorsqu'une lacune des programmes est identifiée.

Recommandation 18 : La FCSS devrait être responsable de l'identification du soutien à la formation des chercheurs afin qu'ils acquièrent les connaissances et les compétences nécessaires pour que leurs recherches aient le plus d'impact possible. De plus, la FCSS devrait identifier de nouvelles approches pour soutenir le continuum de la découverte, à l'invention, aux produits ou aux bienfaits pour les Canadiennes et Canadiens. Plus précisément, il faudrait procéder à un examen des contraintes créées par certaines politiques et certains programmes qui font obstacle à la participation des chercheuses et chercheurs de talent à la démarche d'innovation.

Renforcement de l'équité, de la diversité et de l'inclusion (EDI), et soutien à la recherche et aux talents autochtones et francophones

Recommandation 19 : Le système fédéral de soutien à la recherche devrait continuer, par l'entremise de la FCSS, à faire progresser la mise en œuvre du Plan d'action des trois organismes pour l'EDI et d'autres travaux complémentaires qui serviront à remédier à la sous-représentation dans plusieurs domaines des groupes en quête d'équité et de détenteurs de droits (p. ex. Noirs et autres groupes racisés) et à encourager la diversité dans l'ensemble de l'écosystème de recherche.

Recommandation 20 : La recherche autochtone devrait être une composante d'une stratégie nationale en matière de sciences, de recherche et d'innovation, et des représentants des acteurs de l'écosystème et des communautés concernées devraient participer à rassembler les avis et conseiller l'organisme consultatif proposé sur cette composante.

Recommandation 21 : Étant donné que le soutien à la recherche francophone est une priorité commune à l'ensemble du système fédéral de soutien à la recherche, la FCSS devrait s'assurer que les programmes existants sont équitables pour les francophones. La FCSS devrait également identifier les moyens d'encourager la production et la diffusion de connaissances et de recherches en français au Canada et dans le monde.