Animée par Dre Ilse Treurnicht et Dr Arvind Gupta
Domaines d'intérêt : Donner libre cours à l'innovation

Points saillants de la discussion
L'économie numérique et le secteur des technologies de l'information et des communications (TIC) sont en pleine croissance et leur contribution à l'économie canadienne continuera de dépasser celle des autres secteurs. La technologie évolue rapidement, devenant de plus en plus essentielle à la croissance des entreprises, même dans les secteurs traditionnels. Le Canada a une chance de montrer la voie à ce chapitre, mais une fracture numérique nous empêche d'en bénéficier pleinement. Les solutions ne doivent pas creuser cet écart, car nous avons besoin d'un plus grand nombre de Canadiens qui participent et contribuent à l'économie numérique.
Le secteur numérique n'est dorénavant qu'un moyen de plus de faire des affaires, mais nous devons élargir nos horizons et réaliser que la transformation du numérique et des données ne consiste pas simplement à faire par voie numérique ce que nous faisions auparavant en personne ou sur papier. Ce secteur ouvre la voie à toute une gamme de possibilités entièrement nouvelles.
Le Canada possède de nombreux atouts; notre bassin de talents qualifiés et diversifiés est attrayant, nous avons des politiques d'immigration relativement efficaces et nous sommes forts dans les domaines de l'éducation et de la formation. Cependant, nous voyons des lacunes en ce qui concerne la vitesse, l'agilité et la volonté de prendre des risques dans le domaine de la transformation numérique. Ces lacunes découlent d'une culture qui préfère le statu quo et de l'absence de forces concurrentielles. Il est possible de changer la donne par une meilleure connaissance du numérique et une plus grande sensibilisation aux tendances du marché, tout en mettant l'accent sur quelques domaines clés où le Canada possède un avantage concurrentiel, comme les données sur les soins de santé.
Possibilités, prises en considération et défis clés
- Manque de concurrence
- Souvent, les entreprises canadiennes ne ressentent pas le besoin d'être concurrentielles du fait que les structures du marché sont confortables. Ce n'est que lorsque l'entreprise cherche à être concurrentielle à l'échelle internationale ou lorsque la concurrence internationale est introduite sur le marché local que des pressions sont exercées pour que des changements soient apportés. Face à l'évolution rapide et l'interconnexion croissante du marché mondial, le Canada risque de ne pas être prêt à affronter la concurrence.
- Culture
- De nombreuses organisations ont des lignes directrices et des processus internes qu'ils utilisent depuis longtemps, d'où leur hésitation à se lancer et à essayer de nouvelles approches. Les entreprises sont souvent à l'aise avec le statu quo. Elles sont également beaucoup axées sur le profit à court terme, d'où leur réticence à prendre des risques ou des initiatives qui pourraient ne pas rapporter dans l'immédiat. De nombreuses entreprises ne sont pas proactives et ne s'attaquent aux problèmes que lorsqu'ils sont devenus tangibles.
Il y a aussi une culture de la peur de l'inconnu qui fait que l'on hésite à apprendre et à adopter de nouvelles approches. Les gens ont peur du changement et craignent de devoir apprendre quelque chose de nouveau. Nous devons mieux comprendre les possibilités et les avantages de l'utilisation des outils numériques et mieux exploiter les données dans tous les secteurs de l'économie. Les risques liés aux données et à la protection de la vie privée suscitent également des craintes; les services juridiques déconseillent d'ailleurs souvent de prendre des risques technologiques. Cette hésitation des grandes entreprises et des institutions publiques, souvent provoquée par des réactions très publicisées, influence d'autres secteurs de l'économie. Les entreprises avisées établissent des partenariats et se diversifient tôt, mais d'autres réagissent plus difficilement, sans compter que les petites entreprises manquent souvent de ressources pour être proactives et tirer parti des nouvelles occasions qui se présentent. - Différences de marché
- Les consommateurs canadiens n'ont pas les mêmes exigences à l'égard des entreprises et des gouvernements que les citoyens d'autres pays (p. ex. les services gouvernementaux en ligne, les données médicales intégrées), ce qui les incite moins à innover. En outre, pour de nombreuses entreprises le premier client est américain, puisque les Canadiens, y compris le gouvernement, sont souvent craintifs et ils veulent voir les résultats avant de se lancer. Enfin, il y a un attrait naturel vers les marchés plus vastes, ce qui fait que de nombreuses entreprises se développent et finissent par se lancer sur le marché américain.
- Le financement public n'incite pas à prendre des risques
- Les données sur les soins de santé offrent un potentiel d'innovation inexploité, mais de nombreux hôpitaux et fournisseurs de soins de santé n'ont pas la capacité d'investir adéquatement dans les technologies numériques, car ces initiatives ne sont pas considérées comme faisant partie de leur mandat principal. Les institutions publiques risquent également de perdre des fonds lorsque les systèmes deviennent plus efficaces et qu'ils n'ont pas la capacité de réinvestir les économies réalisées dans de nouvelles avancées. Bref, il y a peu de place pour l'expérimentation et pas de place du tout pour l'échec.
- Compétences et sensibilisation
- La littératie numérique affiche des faiblesses au sein des conseils d'administration et chez les cadres qui comprennent mal en quoi la transformation numérique peut nuire ou profiter à leur entreprise. Il faut comprendre que ces changements, y compris l'utilisation stratégique des données, peuvent offrir un avantage concurrentiel et mieux orienter les personnes qui cherchent à obtenir de l'aide (p. ex. les programmes d'accélérateur).
Pour développer la résilience numérique, les systèmes d'éducation doivent soutenir une approche multidisciplinaire qui encourage les stages et favorise par ricochet la pollinisation croisée de la technologie et de ses applications avec d'autres disciplines et dans tous les secteurs. Les gens doivent posséder le langage pour être en mesure de discuter des problèmes et des solutions dans tous les secteurs. - Intelligence artificielle
- Ce créneau suscite beaucoup d'intérêt à l'échelle mondiale et c'est un domaine où le Canada est fort, mais en raison de la réglementation sur la conformité, les droits de la personne, la protection de la vie privée, etc. d'autres pays progressent plus rapidement. Nous devons soutenir une réglementation intelligente, tout en cherchant à atteindre un juste équilibre, à créer de solides talents et à trouver des applications de niche à des problèmes concrets.
- Analyses comparatives et normes
- Dans certains domaines techniques relativement inexplorés (p. ex. l'intelligence artificielle), il n'existe ni point de repère ni norme pour aider les entreprises à s'orienter. Les entreprises ne savent pas trop comment mesurer les progrès pour assurer leur compétitivité, entravant du coup leur capacité de planifier et d'orienter leurs investissements. Le Canada doit apporter sa contribution à cet égard en participant activement à l'établissement de normes mondiales, car c'est un domaine dans lequel nous pourrions jouer un rôle de chef de file.
- Secteur difficile à définir
- Le « secteur numérique » est difficile à définir, car les technologies numériques ne touchent pas seulement les technologies de l'information et de la communication (TIC). Les secteurs qui ne sont pas considérés comme « numériques » (p. ex. l'exploitation minière, l'énergie, l'agriculture) sont déjà touchés, mais ces secteurs ne se présentent habituellement pas à la table de négociation. Ils sont souvent négligés par les incubateurs et les accélérateurs également. Les intervenants dans les secteurs non traditionnels doivent se définir et travailler ensemble pour assurer la pollinisation croisée et ainsi ne pas être laissés pour compte.
- Confiance dans l'utilisation des données
- Les pools de données sont essentiels pour faire progresser l'intelligence artificielle et les plateformes d'apprentissage machine. Les organisations doivent avoir accès à des données partagées tout en instaurant la confiance et la protection de ces données. En outre, des données empreintes de partialité peuvent être intégrées dans les algorithmes et les systèmes de données. Il est donc nécessaire de protéger les données, mais aussi de s'assurer qu'elles sont utilisées de manière équitable et impartiale.
L'utilisation généralisée des données s'intègre de plus en plus dans nos vies et les clients peuvent se sentir obligés de fournir des données sans comprendre pleinement les conséquences de ce geste. Ceux-ci seraient plus enclins à donner leur consentement à l'utilisation des données s'ils pouvaient en voir et en comprendre les avantages. Une meilleure éducation des clients sur les avantages et les risques est donc nécessaire. - Cybersécurité
- Aucun système ne sera totalement à l'épreuve des fuites dans le monde numérique et il faut en tenir compte de ce constat lorsqu'on examine les risques et les facteurs atténuants. Il faut une plus grande alphabétisation autour de la cybersécurité, en particulier auprès des PME, car les pirates de données peuvent se servir des petites organisations pour accéder à d'autres, plus importantes. Le Canada pourrait jouer un rôle de chef de file dans ce domaine en élaborant des normes ou des technologies.
Idées et résultats
- Encadrement numérique interne
- Afin de surmonter la résistance à l'introduction de nouveaux systèmes numériques dans les petites entreprises, les propriétaires pourraient être plus ouverts à la perspective d'obtenir de l'aide. Des mesures d'incitation pourraient être prises pour intégrer l'expertise numérique dans une entreprise par l'intermédiaire d'un « coach numérique » qui pourrait alors développer des outils adaptés au modèle d'entreprise spécifique et présenter des avantages concrets.
- Incubateur de talents numériques
- Les entreprises qui cherchent à mieux intégrer la technologie devront avoir accès à des talents pour la mise en œuvre, mais ces dernières ne savent peut-être pas comment accéder à ce bassin de talents (p. ex. embaucher quelqu'un, le former, etc.). Une source fiable pourrait être développée afin de mettre les entreprises en contact avec les ressources qualifiées appropriées. Ce service pourrait en outre mettre les entreprises en contact avec des entreprises homologues qui agiraient comme mentors, et des études de cas pourraient y être présentées afin de démystifier le processus et rassurer les entreprises au tout début de l'application du changement numérique que l'initiative pourrait s'avérer un succès.
- Soins de santé
- La plupart des systèmes d'information sur les soins de santé traitent les données différemment et il n'y a pas de communication possible entre les systèmes tant que des ententes supplémentaires de confidentialité et d'accès aux données (p. ex. d'un hôpital à un autre) n'ont pas été mises en place. Nous pourrions envisager d'harmoniser ces systèmes et ces processus afin que les ententes sur la protection des renseignements personnels et le partage des données soient normalisées et automatisées. Les consommateurs exigent de plus en plus que des changements soient apportés à cet égard et ils demandent d'avoir accès à leurs données sur la santé.
- Citizen 360
- En se basant sur le concept de Customer 360, le gouvernement pourrait envisager un portail unique pour les services du gouvernement aux citoyens. Il pourrait créer une identité unique pour les citoyens et établir des bases de données qui intègrent les données gouvernementales sur toutes les plateformes.
- Partage des meilleures pratiques
- Afin de faire progresser la capacité numérique dans des secteurs clés, nous pourrions inciter les entreprises à partager les meilleures pratiques (p. ex. le programme de bons d'achat) et nous attaquer aux obstacles numériques dans leur ensemble. En outre, les grandes entreprises pourraient aider à éduquer et à soutenir les petites entreprises dans le cadre de la chaîne de valeur.
- Recherche
- Il convient de poursuivre les recherches afin de mieux comprendre l'évolution et les changements rapides de l'économie numérique. Nous avons besoin de plus d'information en temps réel sur l'utilisation des données au Canada, ainsi que sur la composition et les activités de notre secteur technologique. Il faudrait conclure une entente entre le secteur et le gouvernement sur ce qui définit une « entreprise de technologie » et effectuer des études ciblées sur les facteurs particuliers qui façonnent leur croissance. Nous pourrions aussi envisager l'intégration de la transformation du numérique et des données dans des disciplines plus traditionnelles afin d'identifier quelles sont les lacunes au niveau des connaissances (p. ex. s'assurer qu'un diplôme en journalisme comprend une formation sur le journalisme dans une économie numérique).
- Stratégie de transition en milieu de carrière
- Les personnes dont la carrière est touchée par l'automatisation ne possèdent peut-être pas les compétences nécessaires pour réussir leur réintégration dans l'économie numérique. Une stratégie inclusive est nécessaire pour aider les personnes touchées à se recycler et à faire la transition vers une nouvelle carrière. Or, un programme d'apprentissage intégré au travail pour les travailleurs en milieu de carrière pourrait être une option.
Liste des participants
- Cadilllac Fairview
- Telus
- Conseil canadien des innovateurs
- Mars Discovery District
- University of Toronto
- Vector Institute
- DMZ Ryerson
- St. Michael's Hospital
- Fields Institute
- Brookfield Institute
- Association Canadienne de la Technologie de L'Information (ACTI)
- Microsoft Canada