Résumé de la table ronde sur le numérique et les données : le 6 septembre 2018 — Toronto (Ontario)

Animée par Arvind Gupta, Ilse Treurnicht et Paul Thompson, Sous-ministre délégué, ISDE
Domaine d'intérêt : Le travail de l'avenir

Points saillants de la discussion

La nouvelle économie a besoin d'une main-d'œuvre dotée de solides compétences numériques et capable de s'adapter à l'évolution des besoins et aux nouvelles méthodes de travail.

Possibilités, réflexions et défis clés

L'éducation 
La culture numérique doit occuper une place plus importante dans l'éducation, et ce, de la maternelle à la 12e année, et non seulement en ce qui concerne le codage, mais aussi la science des données, la protection de la vie privée, l'esprit d'entreprise, l'application des technologies numériques dans d'autres domaines d'apprentissage, de même que la promotion de l'enrichissement mutuel des compétences. D'autres pays, comme la Chine, font la promotion des compétences numériques auprès d'enfants d'âge scolaire primaire et nous devons adopter une approche semblable pour que le Canada puisse soutenir la concurrence mondiale. Nous ne pouvons pas être sûrs du type d'emplois qui existera à l'avenir et des compétences qui seront nécessaires, et c'est pourquoi nous devons avoir une approche souple en matière d'éducation et nous adapter aux changements rapides, tout en continuant à nous concentrer sur les compétences fondamentales. De plus, comme de nombreux étudiants universitaires n'ont pas les compétences de base en calcul, nous devons donc veiller à ce que ces compétences soient enseignées à tous les niveaux.

Nous avons également besoin de connaissances hybrides. Il est important pour les gens d'avoir des compétences en STIM, mais les connaissances dans d'autres domaines, comme les sciences sociales, les affaires et les sciences humaines sont également nécessaires. Nous devons nous rappeler combien la diversité des compétences est importante dans notre analyse des programmes destinés aux étudiants et aux adultes. Tout le monde n'a pas besoin d'être un codeur; nous continuerons d'avoir besoin de comptables et d'experts-comptables dans les industries de la création. Nous devons veiller à ce que tous les Canadiens aient une compréhension de base de la technologie, afin qu'ils soient en mesure de travailler dans un environnement numérique ou de le soutenir. Il y a aussi des domaines émergents où le travail de transition doit être ciblé (p. ex. la gérontologie, la maintenance robotique). Il importe également de vivre des expériences de travail concrètes; nous ne devrions pas nous concentrer exclusivement sur l'éducation formelle offerte dans un cadre académique. Un défi important consiste à déterminer quels seront les besoins en compétences, non seulement d'ici cinq ans, mais dans vingt ans. Il est très difficile de prévoir les tendances à long terme et c'est pourquoi nous devons doter les élèves d'un esprit critique, de compétences en résolution de problèmes, en collaboration et en communication afin qu'ils puissent s'adapter à des environnements changeants. Un autre défi réside dans notre incapacité à adopter une approche nationale coordonnée en matière d'éducation du fait qu'il s'agit d'une responsabilité à l'échelle provinciale.
Culture numérique et accessibilité 
Il faut améliorer la culture numérique à tous les niveaux de l'entreprise, y compris au niveau de la gouvernance. Certains entrepreneurs ne possèdent peut-être pas le savoir-faire numérique nécessaire pour faire croître leur entreprise. Les membres des conseils d'administration devraient avoir une connaissance approfondie des nouvelles technologies et des changements qu'elles apportent aux modèles d'affaires et à la main-d'œuvre (p. ex., l'intelligence artificielle). Notre connaissance de l'utilisation des données et de l'incidence qu'elles ont ou qu'elles auront sur les entreprises est limitée. En outre, certaines grandes entreprises hésitent à faire de la recherche sur l'utilisation et l'amélioration de la technologie numérique et à réagir de façon proactive aux nouvelles menaces et possibilités que présentent les technologies numériques. Il faut inciter ces organisations à faire de la recherche sur ce secteur de l'économie et sur la main-d'œuvre en pleine évolution. Il est facile de convaincre le gouvernement, le milieu universitaire, etc. de s'engager dans cette voie, mais les grandes sociétés sont lentes et réticentes à s'engager. Le gouvernement ne peut pas faire grand-chose à ce chapitre.

Nous devons en outre élargir le champ de la culture numérique, laquelle est très importante dans les communautés qui ne sont habituellement pas représentées ou marginalisées, comme les communautés rurales ou autochtones, ainsi que les secteurs traditionnels comme l'exploitation minière et forestière. Il est plus difficile pour les Canadiens vivant à l'extérieur des villes de saisir l'ampleur des changements en cours ou d'y contribuer. Le manque d'infrastructure moderne est un véritable problème : le Canada se classe au 41e rang pour ce qui est de l'abordabilité du numérique et il y a encore des lacunes importantes au chapitre de la couverture et de la connectivité (p. ex. il y a des pertes de connectivité de deux heures à l'extérieur de Thunder Bay).

Dans un même ordre d'idées, nous devons continuer à encourager les femmes à s'engager dans les domaines des STIM. Il faut également envisager une formation aux adultes à mi-carrière et veiller à ce que les gens soient soutenues dans leur transition d'un secteur traditionnel à un nouveau secteur fondé sur le savoir.

Nous devons approfondir notre compréhension de ce que l'on entend vraiment par « culture numérique » afin de préparer les citoyens à travailler dans ce secteur. Il ne s'agit pas simplement de se connecter à Facebook et aux médias sociaux. Les débutants dans le domaine du numérique qui ne connaissent pas même les termes numériques de base doivent apprendre à lire les repères visuels pour naviguer dans diverses plateformes comme les services bancaires, les services gouvernementaux et les services de transport (p. ex. les icônes des menus, les outils et paramètres, les symboles visuels qui indiquent des liens, etc.).
Intelligence artificielle 
L'intelligence artificielle (IA) est devenue omniprésente dans la société d'aujourd'hui et nous devons nous préparer à une pénétration encore plus large dans tous les secteurs de l'économie. Nous devons accroître notre compréhension de l'IA et notre capacité de l'utiliser en planifiant l'avenir de l'IA au Canada; d'autres pays, comme l'Inde et la Chine, ont déjà conçu des plans à long terme à cette fin. Par ailleurs, nous devons en tant que société discuter d'IA et d'éthique. Par exemple, comme l'interprétation des données peut être très biaisée, nous devons veiller à ce que les concepteurs des futurs systèmes basés sur l'IA en tiennent compte. L'éducation sur l'IA, tant fonctionnelle qu'éthique, doit commencer dès le plus jeune âge (la Chine, par exemple, commence l'enseignement de l'IA à l'école primaire). Bien que les entreprises canadiennes d'IA soient à l'avant-garde, elles ont de la difficulté à embaucher des femmes ou des gens dotés d'un ensemble de compétences très spécifiques. La formation en IA au Canada ne répond pas à la demande dans certains secteurs hautement spécialisés. Une formation en cours d'emploi en début de carrière aiderait-elle à résoudre le problème? Comment pouvons-nous amener les entreprises à faire cet investissement?
Évolution de la main-d'œuvre 
De nombreux travailleurs et entrepreneurs sont à mi-carrière et n'ont pas les connaissances nécessaires pour s'engager dans cette nouvelle économie numérique. Or, il est important de leur fournir les outils dont ils ont besoin pour continuer de mener à bien leur mandat. Nous devons mieux évaluer les compétences de ces travailleurs et la façon dont elles peuvent être appliquées ou améliorées dans les domaines de travail futurs et émergents.

Il est également important de se rappeler que tout le monde n'a pas besoin d'être un expert en technologie. Ainsi, certains jeunes ne sont pas intéressés à poursuivre leurs études en STEM, mais ils devront néanmoins être préparés à travailler dans un monde où la technologie joue un rôle important; c'est pourquoi la technologique doit malgré tout faire partie de leurs compétences. Par ailleurs, les entreprises en technologie offrent des emplois qui ne sont pas directement liés à la technologie, comme le marketing et les affaires, compétences qui sont pourtant nécessaires, voire d'une importance cruciale.

Même au cours de la dernière décennie, les objectifs en matière de compétences ont changé. Aujourd'hui, l'accent est mis sur les STIM, mais il n'y a pas si longtemps, il était mis sur les métiers spécialisés. Il existe encore des écarts entre l'offre et la demande dans les métiers spécialisés, mais ce qui importe, c'est de prendre conscience de ces changements.
Changer le modèle de travail 
Notre modèle de travail actuel répond aux besoins de l'ère industrielle, à savoir une ère où une personne travaille théoriquement pour le même employeur ou dans le même secteur tout au long de sa vie professionnelle. Nous nous dirigeons actuellement vers une économie du savoir où les habitudes et les modèles de travail évoluent rapidement. Nous devons préparer les gens à faire face à une économie en mutation où il ne sera peut-être plus courant de travailler pour un seul et même employeur; l'avenir nous réserve probablement plus de travail autonome ou à forfait (p. ex. l'économie des petits boulots), mais le manque de soutien (p. ex. l'assurance-emploi, l'assurance maladie, les prestations, l'achat ou la location d'une maison) et la stigmatisation sociale sont autant de difficultés qu'il faudra surmonter. Même si les emplois indépendants constituent une part importante de la nouvelle économie, les entrepreneurs doivent à cet égard surmonter de nombreux obstacles. En outre, toutes les PME n'ont pas les mêmes besoins. Des mesures de soutien devraient être mises en place à la fois pour ceux qui souhaitent une croissance rapide et pour ceux qui souhaitent demeurer petits, mais compétitifs.
Données 
Les données jouent un rôle déterminant dans la nouvelle économie numérique, mais leur interprétation repose essentiellement sur le jugement humain. La capacité de comprendre d'où proviennent les données, d'évaluer et de corriger les données biaisées, de les utiliser et de les interpréter sont des compétences extrêmement précieuses. Le codage, l'IA et d'autres compétences numériques exigent une solide compréhension des ensembles de données; la compréhension des données et la gestion de celles-ci sont autant de compétences essentielles pour l'avenir de tous les secteurs.

Idées et résultats

Capacité d'interprétation et accessibilité des données 
La couverture à large bande est essentielle pour combler les lacunes de la culture numérique dans les communautés rurales et marginalisées. Par exemple, des communautés rurales demandent encore de nos jours des outils d'apprentissage et des livres sur papier parce qu'elles n'arrivent pas à se connecter. Les bibliothèques ont été et continueront d'être un atout important à exploiter pour atteindre les communautés et les populations marginalisées (pour l'apprentissage numérique et l'accès aux services numériques). Celles-ci pourraient jouer un rôle accru dans le soutien des collectivités au cours des transitions du marché du travail et dans la préparation à un nouvel avenir.
Intelligence artificielle 
Le Canada a besoin d'un plan à long terme en matière d'IA, y compris au niveau de la petite enfance (p. ex. les plans indiens et chinois), tout en tenant compte des questions d'éthique et des préjugés inhérents à l'IA.
Changer le modèle du marché du travail 
Le virage vers une « économie des petits boulots » devrait inciter les gouvernements à examiner les mesures de soutien mises en place pour les travailleurs autonomes et les entrepreneurs, afin de combler le déficit (p. ex. en ce qui touche le système d'assurance-emploi, l'assurance maladie, les prestations, l'achat ou la location de maisons) et afin de combler l'écart actuel et d'éviter la stigmatisation sociale.
Les données et le gouvernement 
Les gouvernements recueillent et conservent de grandes quantités de données, mais celles-ci (p. ex. les données sur l'emploi) ne sont pas exploitées au profit des Canadiens comme dans le cas de BonEmploi en France, qui utilise les données gouvernementales et l'IA pour aider les chômeurs à accéder au marché du travail). Il est également possible de tirer parti des bases de données du Canada en établissant des partenariats avec d'autres pays; un partenariat qui créerait un ensemble de données plus vaste, plus diversifié et plus robuste pourrait rendre les données du Canada encore plus précieuses et plus utiles.
Rôle du gouvernement 
Nous devons combler le fossé qui existe entre le secteur de la technologie et d'autres secteurs non technologiques et le gouvernement pourrait jouer un rôle pour faciliter ce processus. De même, le gouvernement devrait inciter les grandes entreprises à former leurs employés en milieu de carrière aux nouvelles compétences dont l'économie numérique a besoin. D'ailleurs, toutes les économies du monde connaissent le même problème. Le gouvernement devrait songer à établir des partenariats avec d'autres pays afin d'apprendre d'eux et de partager des idées. Par exemple, à Singapour, des fonds sont offerts aux personnes qui souhaitent suivre des cours qui les aideront à progresser au sein de la population active en évolution. La France a également introduit un modèle similaire. Le gouvernement pourrait également servir de « centre de données et de distribution » pour divers programmes de compétence entrepreneuriale sans but lucratif, en facilitant l'accès à ces programmes et en élaborant des systèmes de reconnaissance professionnelle.

Liste des participants

  1. Deloitte
  2. ABC Life Literacy Canada
  3. Brand Innovators Labs
  4. Canadian Marketing Association
  5. Dot Health
  6. Goldspot Discoveries Inc.
  7. Oanda
  8. OCAD University
  9. SciNet
  10. STEM Fellowship
  11. Social Capital Partners
  12. Futurpreneur Canada
  13. Bounties Network
  14. Environicsanalytics.com
  15. Manulife
  16. SE Health
  17. Canadian Council for Aboriginal Business (CCAB)
  18. University of Toronto
  19. Ontario Society of Professional Engineers (OSPE)
  20. Canada en programmation
  21. SOTI
  22. Skills Ontario