Comment les innovations universitaires parviennent à nos entreprises

Saviez-vous que nos universités et nos collèges représentent une véritable pépinière d'innovation? Par exemple, de nombreuses années passées, une équipe de l'Université de Sherbrooke a développé la technologie de compression de la voix, plus précisément l'algebric code excited linear prediction (ACELP). Cette technologie est maintenant utilisée dans plus de 95 % de nos téléphones cellulaires et a permis à l'Université de générer plus de 200 M$ de revenus.

Mais il ne suffit pas d'inventer de nouvelles technologies en établissement d'enseignement. Encore faut-il que ces inventions trouvent preneur sur le marché. Pour ce faire, les établissements d'enseignement supérieur du pays doivent compter sur ce que l'on nomme le transfert de technologie. Qu'est-ce que c'est exactement? Selon Visiplus Academy, « le transfert de technologie s'entend communément comme l'ensemble des compétences et des résultats techniques développés et tenus à jour au sein des laboratoires, cédés ou concédés à des tiers, au travers notamment de cession de brevets ou concession de licences d'exploitation de brevet et de savoir-faire, mais aussi grâce au recrutement de personnel formé par la recherche ».

C'est un peu technique comme définition, donc nous nous pencherons plus bas sur un cas concret pour bien comprendre le cycle de commercialisation d'une technologie développée en établissement d'enseignement.

Au Québec, la structure de recherche et de transfert de technologie diffère de celle du reste du Canada. En effet, au niveau collégial, on retrouve 2 organismes voués à la recherche.

  • Synchronex regroupe les Centres collégiaux de transfert de technologie (CCTT).
  • L'Association pour la recherche au collégial regroupe ces CCTT et les autres équipes de recherche qui n'ont pas cette désignation.

À l'échelle universitaire au Québec, chacun des établissements possède son propre bureau de valorisation de la recherche (dont le nom varie d'un établissement à un autre). Ces bureaux sont regroupés, depuis avril 2021, sous l'enseigne d'Axelys, société québécoise de développement et de transfert de l'innovation à but non lucratif dont le mandat est d'accompagner les universités et leurs équipes de chercheurs dans les activités de propriété intellectuelle et de commercialisation des technologies.

Revenons maintenant à notre exemple concret.

Il y a quelques années, un professeur de l'Université du Québec à Rimouski (UQAR), Falah Boumédiène, ingénieur et spécialiste de l'équipement de transport, a participé à développer un mécanisme de support de souffleuse à neige, qui réduit le risque d'usure des chargeuses à roues munies d'une souffleuse à neige.

Convaincu d'avoir développé une technologie prometteuse, le Pr Boumédiène a été appuyé par le bureau de valorisation de l'UQAR et par la société de valorisation ALIGO innovation (maintenant Axelys) pour l'ensemble du processus d'obtention de brevet (CA 2910297). Détenir une technologie brevetée, c'est excellent, mais l'histoire ne s'arrête pas là! La plus-value réside dans le transfert de cette technologie vers le marché. Pour ce faire, il faut trouver une entreprise, un organisme à but non lucratif ou une association souhaitant obtenir une licence – d'exploitation dans ce cas-ci – pour générer des revenus et verser des redevances à la société de valorisation, à l'université et au chercheur (et son équipe).

De fil en aiguille, après nombre de démarches et négociations, ALIGO a conclu une entente avec une entreprise québécoise de Lévis, SM Suspension, qui détient entre autres des contrats d'entretien des routes gérées par le ministère des Transports du Québec. Pour cette entreprise familiale, c'était une première expérience en gestion de propriété intellectuelle : ses dirigeants se sont donc fait un devoir de se renseigner non seulement sur les brevets, mais aussi sur le processus de négociation d'une licence (avec un partenaire aguerri à leurs côtés!) et sur les redevances à verser. De l'aveu même de Guillaume Werstink, agent de recherche à l'UQAR, « il est rare qu'une PME sans aucune expérience en PI embarque dans un projet ». Et non seulement SM Suspension a acquis une licence d'utilisation de la technologie du Pr Boumédiène, mais elle s'est engagée à être responsable de tout développement futur, ce qui pourrait signifier des brevets de perfectionnement, donc de nouvelles sources de revenus.

Il faut donc voir le transfert de technologie comme un effort collectif qui rallie :

  • une équipe de chercheurs menée par un professeur;
  • un bureau de valorisation de la recherche d'un établissement d'enseignement;
  • une société de valorisation (dans le cas du Québec);
  • une entreprise et ses partenaires.

Et n'oublions pas l'importance de faire preuve de vision : cibler un besoin dans un secteur précis et chercher une solution à un problème bien concret.

Des exemples comme celui-là sont légion dans les établissements d'enseignement au Canada, et se retrouvent dans tous les secteurs industriels. Et même, de plus en plus, on parle d'innovations sociales qui sont transférées dans le milieu – elles fournissent des solutions à des défis sociaux pour le bien des gens et des communautés. Et tout cela pour améliorer notre quotidien!

Remerciements à Duc Levan, ex-directeur principal, Développement des affaires, à ALIGO, et à Guillaume Werstink, agent de recherche à l'UQAR, pour leur contribution remarquable à cet article.

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