Société canadienne des auteurs, compositeurs et éditeurs de musique (SOCAN)

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Consultation sur un cadre moderne du droit d’auteur pour les intermédiaires en ligne

Le 31 mai 2021

Introduction

  1. La SOCAN (Société canadienne des auteurs, compositeurs et éditeurs de musique) est heureuse de participer à la consultation du gouvernement du Canada sur la création d’un cadre moderne du droit d’auteur pour les intermédiaires en ligne.
  2. La SOCAN est la plus importante organisation de gestion de droits au Canada. Elle compte plus de 170000 membres auteurs, compositeurs et éditeurs de musique ainsi que plusieurs dizaines de milliers d’entreprises licenciées partout au pays. La SOCAN octroie des licences pour le droit d’exécution et le droit de reproduction des œuvres musicales, ainsi que pour le droit d’exploitation pour les arts visuels. La SOCAN a pour mission de percevoir et de répartir les redevances à ses membres et aux organismes internationaux de gestion des droits avec lesquels elle a conclu des ententes réciproques.
  3. Dans le cadre des activités de la SOCAN, nous négocions avec les intermédiaires en ligne qui utilisent la musique de notre répertoire pour nous assurer que les auteurs-compositeurs et les éditeurs de musique sont payés lorsque leur musique est exécutée, communiquée ou reproduite en ligne.
  4. Ces dernières années, la diffusion en continu en ligne a connu une croissance explosive. En 2015, les redevances perçues par la SOCAN pour la diffusion en continu en ligne se sont élevées à 15,5 millions de dollarsNote de bas de page 1. En 2019, ces perceptions avaient augmenté en flèche de 455 % pour atteindre 86,1 millions de dollarsNote de bas de page 2. Nous prévoyons que cette tendance haussière sur 12 mois se poursuivra en 2020, notamment parce que les Canadiens sont restés à la maison pendant la pandémie de COVID-19.
  5. Il est important que ces chiffres ne soient pas interprétés comme signifiant que cette croissance est le reflet de l’équité de la rémunération du secteur de la diffusion en continu en ligne. Elle indique simplement que les utilisateurs auprès desquels la SOCAN collecte des données connaissent une croissance exponentielle.
  6. La croissance des intermédiaires en ligne s’accompagne toutefois d’une baisse des revenus perçus auprès des diffuseurs dits «traditionnels», soit la radio, la télévision et la câblodistribution. Il est impératif d’assurer que les créateurs canadiens soient équitablement rémunérés pour l’exploitation commerciale croissante de leurs œuvres par des intermédiaires en ligne et que l’industrie culturelle canadienne ne soit pas laissée pour compte. La portée des exceptions au droit d’auteur applicables aux intermédiaires en ligne contribue à trouver le bon équilibre dans l’application d’une saine politique culturelle.
  7. Cette croissance entraîne des réflexions et des changements dans les régimes étrangers de droit d’auteur. Par exemple, l’Office américain du droit d’auteur a récemment publié une révision de sa section sur les exonérations et a constaté que «l’équilibre prévu à l’origine a été déséquilibré [en faveur des intermédiaires en ligne]»Note de bas de page 3, et ce, bien qu’il ait adopté un régime d’avis et retrait plus strict que le régime d’avis et retrait en vigueur au Canada. Entre-temps, dans l’Union européenne, la directive sur le droit d’auteur dans le marché unique numérique exige des changements importants dans les systèmes de droit d’auteur des États membres, notamment la suppression des protections de type «safe harbour» pour les plateformes de partage de contenu en ligneNote de bas de page 4.
  8. Bien que cela dépasse le cadre de cette consultation, la SOCAN estime qu’il est important que la réforme du droit d’auteur se fasse en complément des réformes de la radiodiffusion afin d’assurer que les intermédiaires en ligne, qui ont connu une croissance et un succès sans précédent au Canada, partagent ce succès avec les créateurs canadiens en investissant et en contribuant de manière significative au développement du contenu canadien, tout comme le font les radiodiffuseurs «traditionnels», et en assurant une promotion appropriée du contenu canadien sur leurs plateformes.

Synopsis

  1. Le gouvernement du Canada sollicite des commentaires sur quatre sujets : (1) clarifier les exonérations prévues pour les intermédiaires; (2) exiger une rémunération par l’entremise d’un régime de licences collectives; (3) accroître la transparence en matière de rémunération et (4) renforcer les outils d’application de la loi pour lutter contre la violation du droit d’auteur en ligne.
  2. Un résumé des recommandations de la SOCAN est présenté ci-après.
    • Clarifier les exonérations
      • Le libellé des exonérations actuelles est trop large et pas suffisamment spécifique, car il ne permet pas d’établir une distinction adéquate entre les intermédiaires en ligne neutres et les intermédiaires en ligne actifs. Seuls les intermédiaires en ligne neutres qui agissent de manière passive, technique et automatisée à l’égard des contenus protégés par le droit d’auteur devraient être protégés.
      • Les exigences en matière d’exonération pour «stockage» sont déphasées des réalités de l’application en ligne. Le seuil devrait être abaissé de telle sorte que, dès lors qu’un intermédiaire reçoit une notification d’infraction de la part d’un ayant droit ou qu’il a connaissance de faits ou de circonstances où l’infraction serait apparente, la protection de l’exonération pour «stockage» ne s’applique plus.
      • La Loi sur le droit d’auteur devrait fixer des normes pour que les intermédiaires élaborent et mettent en œuvre des politiques traitant du rapport des infractions et des mécanismes correspondants pour traiter ces rapports. Le respect de ces politiques et des obligations du régime «d’avis et avis» devrait être une condition de la protection par exonération.
    • Rejeter les licences obligatoires – Une licence collective élargie (« LCE ») doit être examinée plus en détail
      • Nous rejetons la notion d’une licence obligatoire parce qu’elle supprime le droit exclusif des ayants droit de choisir avec qui ils font des affaires. Un tel empiétement sur le droit exclusif des ayants droit rompt l’équilibre de la Loi sur le droit d’auteur et ne peut être corrigé en remplaçant les droits exclusifs par un droit à rémunération.
      • Une LCE risque de priver les ayants droit de leur capacité à faire valoir leurs droits exclusifs. La SOCAN soutient qu’une étude plus approfondie des LCE est nécessaire.
    • Exiger la transparence des intermédiaires en ligne
      • Le fait d’exiger des intermédiaires en ligne qu’ils assurent le suivi et divulguent certaines informations financières et en matière d’utilisation permettra d’assurer une rémunération équitable pour les utilisations du contenu en ligne, ainsi que des répartitions plus précises de la part de la SOCAN à ses clients et membres.
    • Fournir des outils d’application du blocage de site et de la désindexation dans le cadre de la Loi sur le droit d’auteur.
      • Ces recours devraient être inclus dans la loi afin de créer un processus simplifié et un outil d’application efficace et rapide pour combattre les violations en ligne.

4.1 Clarifier les exonérations prévues pour les intermédiaires

  1. L’application des exonérations aux intermédiaires en ligne est déraisonnablement large, avec peu d’exclusions ou de clarifications de la portée de cette protection.

4.1.1 Revoir le critère de connaissance aux fins d’exonération

  1. L’exigence de connaissance qui s’applique à l’exonération pour «stockage» est l’article 31.1 (5), qui exige que l’intermédiaire ait connaissance d’une décision d’un tribunal compétent selon laquelle une copie d’une œuvre hébergée dans la mémoire numérique est en violation du droit d’auteur. Cette exigence de connaissance n’est pas adaptée à une application efficace en ligne, car elle ne tient pas compte de la facilité avec laquelle les contrevenants peuvent migrer le contenu numérique vers d’autres emplacements sur Internet et ainsi poursuivre leurs activités illicites.
  2. Le seuil de connaissance requis à l’article 31.1 (5) devrait être abaissé de la connaissance d’une ordonnance du tribunal à une connaissance réelle ou constructive de la contrefaçon, de sorte qu’une fois qu’un intermédiaire reçoit un avis de contrefaçon d’un titulaire de droits ou a connaissance de faits ou de circonstances où la contrefaçon serait apparente, la protection de l’exonération de «stockage» ne s’applique plus.
  3. Les intermédiaires devraient pouvoir bénéficier d’une exonération que s’ils n’ont pas connaissance réelle ou ne pouvait avoir raisonnablement connaissance de l’activité illicite compte tenu des circonstances.

4.1.2 Clarifier le rôle que peuvent jouer les intermédiaires exonérés de responsabilité

  1. Il est important que les dispositions légales relatives aux exonérations prennent en considération la nature de la participation des intermédiaires au contenu des communications. Seuls les intermédiaires en ligne neutres qui agissent de manière passive, technique et automatisée à l’égard des contenus protégés par le droit d’auteur devraient être protégés.
  2. Le libellé actuel de l’article 31.1 (1), tel que «… prestation de services liés à l’exploitation d’Internet…» et «fournir des moyens permettant la télécommunication ou la reproduction d’une œuvre…» est vague et doit être renforcé pour indiquer expressément que seuls les services opérant comme un «simple canal de diffusion», de manière passive, technique et automatisée, puissent bénéficier d’une exonération. Il s’ensuit que l’exonération pour la «mise en antémémoire» décrite par les articles 31.1 (2) et 31.1 (3) n’est pas non plus suffisamment précise et crée une incertitude.
  3. Le libellé actuel de l’article 31.1 (4) décrivant l’objet et la nature des activités d’un hôte («en vue de permettre [la] télécommunication [d’une œuvre]… fournit à une personne une mémoire numérique pour qu’elle y stocke une œuvre») comporte également des lacunes. L’exonération pour les intermédiaires doit clairement être limitée aux intermédiaires qui agissent de manière passive, technique et automatisée.
  4. Les intermédiaires qui participent à la sélection et à l’organisation («curating»), à la monétisation (par la publicité ou d’autres moyens) ou qui profitent d’une autre manière du contenu ne devraient pas être inclus dans les définitions légales des services de réseau, des services d’hébergement et des services d’outils d’information protégés par les exonérations.

4.1.3 Adopter de nouvelles obligations pour les intermédiaires admissibles

  1. La Loi sur le droit d’auteur devrait être modifiée afin d’imposer aux intermédiaires des normes minimales pour l’élaboration et la mise en œuvre de politiques relatives au signalement des infractions et de mécanismes correspondants pour traiter ces rapports.
  2. Le Loi sur le droit d’auteur devrait être modifié pour faire dépendre la disponibilité des exonérations du respect par les intermédiaires de ces normes et des obligations d’«avis et avis».

4.2 Exiger une rémunération par l’entremise d’un régime de licences collectives

  1. Le document de consultation présente deux options concernant l’octroi de licences collectives : (i) un régime de licence obligatoire et (ii) un régime de licences collectives étendues.
  2. Un système de licence obligatoire est un pas en arrière pour le cadre du droit d’auteur au Canada. L’octroi de licences obligatoires créerait une exception au droit exclusif des ayants droit d’autoriser l’utilisation de leurs œuvres.
  3. Les licences obligatoires ne moderniseront pas le cadre du droit d’auteur. Elles pencheraient dangereusement vers l’érosion du droit d’auteur en supprimant le principe de négociation de gré à gré et en réduisant l’utilisation de la propriété intellectuelle à un exercice d’indemnisation. Nous contestons l’affirmation selon laquelle un tel régime assurerait une rémunération équitable aux ayants droit, en particulier en cette ère numérique où la technologie évolue à un rythme plus rapide que le temps nécessaire à la mise en place du régime.
  4. Un régime de licences obligatoires tel que décrit dans le document de consultation constituerait une violation des obligations du Canada en vertu des traités internationaux, plus particulièrement du test des trois étapes tel qu’énoncé dans la Convention de Berne et l’entente sur les ADPICNote de bas de page 5.
  5. La licence collective étendue (LCE) est un concept distinct qui devrait faire l’objet d’un examen plus approfondi. L’inquiétude vient du fait que la LCE peut priver un ayant droit de sa capacité à faire valoir ses droits – une pierre angulaire du droit exclusif de l’ayant droit. La LCE ne peut pas être mise en œuvre comme une solution globale, sans discernement, pour tous les sujets et toutes les industries culturelles, car elle irait également à l’encontre des obligations du Canada relatives à la Convention de Berne.
  6. Il est possible que, dans certaines circonstances, une LCE puisse avoir une certaine application, mais cela dépendra du sujet des œuvres et des industries correspondantes. Une étude plus approfondie et une analyse minutieuse sont nécessaires au-delà de cette consultation.
  7. La SOCAN a examiné la soumission de la SCPCP et les soumissions d’ACCORD sur la copie privée et convient que le régime de copie privée devrait être modifié pour s’appliquer à la fois aux supports et aux appareils d’enregistrement audio.

4,3 Transparence accrue en matière de rémunération

  1. SOCAN recommande que tous les intermédiaires en ligne suivent et divulguent des informations telles que celles énumérées dans la section 4.3.1 du document de consultation. La SOCAN reçoit certaines de ces informations de la part de certains intermédiaires en ligne, mais tous les intermédiaires en ligne ne fournissent pas le même niveau d’information que les autres. Les divulgations obligatoires amélioreraient à la fois la capacité de la SOCAN à négocier équitablement des ententes de gré à gré avec les intermédiaires en ligne afin d’obtenir une rémunération équitable et l’exactitude des répartitions à ses clients et membres.

4,4 Clarifier ou renforcer les outils d’application de la Loi pour lutter contre la violation du droit d’auteur en ligne

  1. La SOCAN soutient qu’une base légale et une procédure pour les injonctions contre les intermédiaires en ligne sont nécessaires pour traiter adéquatement les violations en ligne.
  2. Les outils de lutte contre les violations prévus dans la Loi sur le droit d’auteur ne sont pas bien adaptés aux violations en ligne. Il n’a jamais été aussi facile de commettre une infraction et il n’a jamais été aussi difficile de faire respecter le droit d’auteur qu’aujourd’hui. Les violations en ligne sont omniprésentes, envahissantes et rapides. Une fois qu’un ayant droit a envoyé un avis à un intermédiaire en ligne pour qu’il transmette à l’un de ses utilisateurs un avis d’infraction présumée, cet utilisateur peut soit avoir déjà créé un nouveau compte pour poursuivre ses activités illicites ou simplement ignoré l’avis d’infraction au droit d’auteur qui lui a été transmis. Dans les deux cas, l’avis n’a pas mis fin à l’activité illicite.
  3. L’outil d’application typique n’est pas une méthode idéale pour traiter les violations en ligne, en particulier lorsque le contrevenant présumé est situé à l’extérieur du Canada ou que son identité est inconnue. Dans de telles circonstances, il est souvent coûteux et peu pratique d’obtenir un jugement pour violation du droit d’auteur par le biais d’une procédure judiciaire. En général, soit l’activité illicite persiste pendant que l’action suit son cours devant le tribunal, soit le contrevenant présumé a fermé son service et a recommencé ailleurs. La charge est trop lourde pour les ayants droit dans cet environnement numérique. Une méthode d’application efficace pour les infractions en ligne est une méthode qui met immédiatement un terme à l’infraction de manière claire et équilibrée, avec l’aide de l’intermédiaire en ligne.
  4. Récemment, les tribunaux canadiens ont confirmé que les injonctions de blocage de sites et de désindexation sont des recours équitables à la disposition des ayants droit pour faire valoir leurs droits, que l’intermédiaire en ligne soit ou non responsable de la violation du droit d’auteurNote de bas de page 6. La Loi sur le droit d’auteur devrait expressément permettre de telles injonctions sans égard à la responsabilité à l’encontre des intermédiaires, y compris les injonctions dites «prospectives» ou «dynamiques» qui permettent une certaine flexibilité afin de couvrir les infractions répétées et les cas où le même site web devient disponible avec une adresse IP différente immédiatement après la délivrance de l’injonction.
  5. Toutefois, bien que certains de ces recours puissent être offerts aux ayants droit par la jurisprudence, il n’existe pas de processus standard. Ces recours devraient être inscrits dans la Loi sur le droit d’auteur afin d’établir un cadre juridique clair.
  6. Les violations en ligne sont omniprésentes dans un environnement numérique qui évolue rapidement. Les ayants droit doivent disposer d’un mécanisme d’application qui corresponde à cette nouvelle réalité. Nous recommandons donc que les mécanismes d’application du blocage et de la désindexation des sites soient clairement définis dans la Loi sur le droit d’auteur afin de rationaliser ces processus et de fournir aux ayants droit un outil efficace et rapide pour lutter contre la contrefaçon en ligne.

Conclusion

  1. Les soumissions ci-dessus permettent d’atteindre les objectifs fixés par le gouvernement dans ce document de consultation, notamment :
    • La clarification des protections d’exonération facilitera l’épanouissement du marché numérique en apportant une certitude quant aux quelques cas où l’exonération s’applique.
    • Renforcer les outils d’application du droit d’auteur et imposer certaines exigences de transparence aux intermédiaires en ligne protège et encourage l’utilisation de contenus protégés par le droit d’auteur en ligne.
  2. La SOCAN remercie le gouvernement du Canada d’avoir sollicité des commentaires sur ce sujet important et serait heureuse de développer ses points et ses positions lors de futures réunions ou consultations.