Société des auteurs de radio, télévision et cinéma (SARTEC)

The information on this Web page has been provided by external sources. The Government of Canada is not responsible for the accuracy, reliability or currency of the information supplied by external sources. Users wishing to rely upon this information should consult directly with the source of the information. Content provided by external sources is not subject to official languages and privacy requirements.

Mémoire soumis par la société des auteurs de radio, télévision et cinéma (SARTEC) au Gouvernement du Canada

Dans le cadre de la consultation sur la façon de mettre en œuvre l'engagement du Canada de prolonger la durée de protection générale du droit d'auteur en vertu de l'ACEUM

Mars 2021

Nos histoires font le succès de nos écrans

Consultation sur la façon de mettre en œuvre l'engagement du Canada de prolonger la durée de protection générale du droit d'auteur en vertu de l'ACEUM

SARTEC, mars 2021

Table des matières

  1. La société des auteurs de radio, télévision et cinéma (SARTEC) : Présentation
  2. Prolongation de la durée de protection du droit d'auteur au Canada : un ajustement (factuellement et juridiquement) nécessaire
  3. Impossibilité juridique d'imposer une formalité à titre de condition à la jouissance ou à l'exercice des droits d'auteur au cours de la période de prolongation de la durée de protection générale du droit d'auteur au Canada
  4. L'ajout de nouvelles exceptions aux droits d'auteur en raison de la prolongation de la durée du droit d'auteur contreviendrait aux obligations du Canada aux termes de l'ACEUM
  5. Position de la SARTEC en regard des « mesures d'accompagnement » proposées
    1. Extension du régime des titulaires introuvables aux œuvres non publiées
    2. Élargissement du Régime canadien des titulaires introuvables aux œuvres inaccessibles sur le marché
    3. Autres mesures proposées par le Document de consultation
  6. Mesures d'accompagnement au bénéfice des auteurs cohérentes avec la prolongation de la durée du droit d'auteur
  7. Conclusion
  8. Annexe : Mémoire de la Société des auteurs de radio, télévision et cinéma (SARTEC) au Comité permanent de l'Industrie et au Comité permanent du Patrimoine canadien à l'occasion de l'examen quinquennal de la Loi sur le droit d'auteur, décembre 2018 (annexe revue en juin 2019)

La société des auteurs de radio, télévision et cinéma (SARTEC) : Présentation

La Société des auteurs de radio, télévision et cinéma (SARTEC) a été fondée en 1949 pour regrouper les auteurs canadiens qui écrivent en français nos œuvres radiophoniques, télévisuelles et cinématographiques, et protéger leurs intérêts professionnels, moraux et économiques. En décembre 2020, ils élisaient leur 24e présidente, Chantal Cadieux, sixième femme à présider l'association depuis ses origines.

Reconnue au Québec comme la représentante exclusive des auteurs en langue française dans le secteur du film depuis 1989 et des adaptateurs en doublage depuis 2007Note de bas de page 1, la SARTEC est aussi accréditée, depuis 1996Note de bas de page 2 comme l'agent négociateur exclusif des auteurs de langue française à la radio, à la télévision, au cinéma et dans l'audiovisuel, au Canada, tant pour leur travail d'écriture que lorsqu'ils effectuent leur propre recherche. Regroupant environ 1500 membres, la SARTEC négocie leurs ententes collectives, conseille les auteurs sur leurs contrats, contribue au respect de leur travail, leur offre divers services et les représente auprès de nombreux forums.

La SARTEC est membre de l'Affiliation internationale des syndicats d'auteurs (IAWG), de la Confédération internationale des sociétés d'auteurs et compositeur (CISAC), de la Coalition pour la diversité des expressions culturelles (CDEC), de la Coalition pour la culture et les médias (CCM) et de l'Observatoire du documentaire. En 2020, la SARTEC créait le Prix Jacques-Marcotte du meilleur scénario de long métrage.

Les 24 présidentes et présidents de la SARTEC depuis ses origines sont :

1945
Ovila Légaré
1946
Robert Choquette
1948
Louis Morisset
1949
René-O Boivin
1955
Jean-Louis Roux
1956
Fernand Séguin
1956
Jean-Louis Roux
1963
Marcel Dubé
1967
Richard Pérusse
1969
Claude Lacombe
1974
Gilles Richer
1975
Bernard Houde
1976
Françoise de Repentigny
1978
André Dubois
1982
André Ménard
1982
Robert Gurik
1984
Jean-Pierre Plante
1992
Louise Pelletier
1996
Suzanne Aubry
2000
Annie Piérard
2002
Marc Grégoire
2008
Sylvie Lussier
2014
Mathieu Plante
2020
Chantal Cadieux

À l'occasion de la présente consultation sur la façon de mettre en œuvre la prolongation de la durée de protection générale du droit d'auteur au Canada, la SARTEC soumet respectueusement les présentes représentations préparées conjointement avec la Société des auteurs dramatiques (SACD) et la Société civile des auteurs multimédia (SCAM).

1. Prolongation de la durée de protection du droit d'auteur au Canada : un ajustement (factuellement et juridiquement) nécessaire

L'octroi d'une protection par droit d'auteur pendant la vie de l'auteur puis pour une certaine période de temps après l'année de son décès (aussi désignée « post mortem auctoris » ou « pma ») résulte d'un compromis entre l'octroi d'une protection perpétuelle, comme c'est le cas du droit de propriété, et d'une protection d'une durée plus limitée, parfois morcelée et souvent sujette au respect de conditions de forme. La solution retenue depuis plus d'un siècle par l'ensemble des pays parties à la Convention de Berne pour la protection des œuvres littéraires et artistiques (la « Convention de Berne ») Note de bas de page 3 est d'accorder une protection d'au moins cinquante ans pma en interdisant d'assujettir ce droit minimum à quelque condition de forme que ce soit y compris l'enregistrement Note de bas de page 4.

Une telle durée vise à permettre à l'auteur de bénéficier et faire bénéficier au moins à ses héritiers immédiats des retombées économiques découlant de l'exploitation de ses œuvresNote de bas de page 5. Le Canada a donc adopté cette période minimale de protection dans sa loi de 1921Note de bas de page 6. Or, selon les données de statistique Canada, l'espérance moyenne de vie des Canadiens a augmenté d'au moins 22 ans depuis 1921Note de bas de page 7, si bien que l'ajustement requis par l'ACEUM ne reflète que partiellement cette évolution de l'espérance de vie.

Le rapport du Comité permanent de l'industrie, des sciences et de la technologie (le « Comité INDU »)Note de bas de page 8 note par ailleurs avec justesse que la durée générale du droit d'auteur est, au Canada, plus courte que celle accordée par la plupart des principaux partenaires économiques, laquelle a été prolongée d'au moins 20 ans depuis un quart de siècle notamment, au Mexique Note de bas de page 9 , aux États-Unis Note de bas de page 10 ainsi que dans tous les pays membres de l'Union européenneNote de bas de page 11.

C'est pourquoi l'article 20.63 (« Durée de la protection du droit d'auteur et des droits connexes »)Note de bas de page 12 , de l'Accord Canada-États-Unis-Mexique (« ACEUM ») Note de bas de page 13 exige du Canada qu'il octroie aux ressortissantsNote de bas de page 14 américains et mexicains une durée de protection générale du droit d'auteur sur les œuvres qui ne soit pas inférieure à soixante-dix ans pma . La SARTEC comprend que cette obligation n'est plus remise en question par le Gouvernement.

2. Impossibilité juridique d'imposer une formalité à titre de condition à la jouissance ou à l'exercice des droits d'auteur au cours de la période de prolongation de la durée de protection générale du droit d'auteur au Canada

Le document intitulé « Une consultation sur la façon de mettre en œuvre la prolongation de la durée de protection générale du droit d'auteur au Canada : document de consultation » (le « Document de consultation »), réfère à une recommandation du Comité permanent de l'industrie, des sciences et de la technologie (le « Comité INDU ») Note de bas de page 15 évoquant la possibilité d'assujettir à une formalité d'enregistrement préalable d'une œuvre auprès de l'Office de la propriété intellectuelle du Canada (« l'OPIC ») l'exercice des droits d'auteur sur cette œuvre au cours de la période de prolongation de 20 ans à la durée de protection générale du droit d'auteur. Or, bien que le Document de consultation mentionne qu'une telle approche « soulève d'importantes questions au regard des obligations internationales du Canada, de même qu'à l'égard des coûts que devraient assumer les titulaires de droits ainsi que des redondances administratives potentielles» - ce avec quoi la SARTEC est en parfait accord - il ne semble toutefois pas l'écarter de façon claire et définitive.

Pour cette raison, la SARTEC croit essentiel de rappeler que tous les traités en matière de droits d'auteur auxquels l'ACEUM renvoie expressémentNote de bas de page 16 interdisent formellement l'imposition de quelque formalité que ce soit comme condition à la jouissance et à l'exercice des droits d'auteurs garantis par ces traités par ces autres ressortissantsNote de bas de page 17 ce qui, dans le cas de l'ACEUM, vise évidemment l'obligation d'accorder une protection minimale de 70 ans pma aux ressortissants américains et mexicains.

Afin de dissiper tout doute sur cette question, il importe de rappeler que le Canada ne peut recourir à l'exception dite de « comparaison des durées  » énoncée au § 7(8) de la Convention de Berne afin de tenter d'imposer une formalité d'enregistrement aux œuvres des ressortissants américains et mexicains puisque les lois américaines et mexicaines doivent elles-mêmes accorder (et accordent déjà) une protection d'une durée au moins équivalente, soit 70 ans pma Note de bas de page 18.

L'exigence d'une formalité d'enregistrement afin de prolonger la durée de protection de 50 à 70 ans pma au Canada ne pourrait donc être valablement appliquée qu'aux seules œuvres dont l'auteur est un ressortissant canadien et, selon le cas, à celles de ressortissants de pays accordant une durée de protection inférieure à 70 ans pma et auxquels le Canada déciderait volontairement d'accorder, sans y être tenu, une protection de 70 ans pma Note de bas de page 19 La SARTEC ose cependant croire que le Canada ne considérerait jamais accorder aux œuvres des auteurs canadiens un niveau de protection moindre que celui qu'il doit accorder aux œuvres de ressortissants étrangers.

Dès lors, quoi qu'aient pu suggérer certains des intervenants ayant pris part au récent examen parlementaire de la Loi sur le droit d'auteur du canada (la « Loi canadienne »)Note de bas de page 20, imposer quelque condition de forme à la prolongation de la durée du droit d'auteur tel que le requiert l'ACEUM contreviendrait aux obligations du Canada en vertu de l'ACEUM et des autres traités précités.

En conclusion, puisque toutes les parties à l'ACEUM encourent l'obligation de protéger les œuvres des ressortissants des autres parties pour une période d'au moins 70 ans pma, si un titulaire de droit d'auteur sur une œuvre dont l'auteur est un ressortissant des États-Unis ou du Mexique réclame une protection au Canada, la Loi canadienne devra lui assurer une protection d'au moins 70 ans pmasans que ce titulaire n'ait à se plier à quelque formalité.

3. L'ajout de nouvelles exceptions aux droits d'auteur en raison de la prolongation de la durée du droit d'auteur contreviendrait aux obligations du Canada aux termes de l'ACEUM

Le Document de consultation invite aussi le public à commenter l'ajout de possibles mesures dites « d'accompagnement » visant à atténuer les conséquences qualifiées de « négatives » que pourrait avoir la prolongation du droit d'auteur, ces mesures visant à « améliorer l'accès » aux œuvres dites « orphelines » et à celles « inaccessibles sur le marché », et pourraient prendre la forme, soit de « modèles de rémunération »Note de bas de page 21, soit d'exceptions, l'un comme l'autre permettant l'utilisation de telles œuvres sans l'autorisation des titulaires contre rémunération, dans le premier cas, et sans rémunération, dans le second.

D'abord, la SARTEC s'étonne que le Document de consultation envisage comme intrinsèquement négatif, et donc susceptible de devoir faire l'objet de « mesures d'atténuation », l'un des trop rares amendements à la loi bénéficiant aux auteurs. La SARTEC réitère que le Canada doit cesser de s'incliner devant les groupes de pression réclamant sans cesse de nouvelles limitations et exceptions aux droits des auteurs qui se sont multipliés à un rythme effréné depuis la révision de la loi de 1988, passant d'une demi-douzaine, avant cette révision, à près une quarantaine avec la révision de 2012, soit presque sept (7) fois plus, tant et si bien qu'elles occupent maintenant près de 40% de la codification officielle de la loi.

Il importe donc, d'entrée de jeu, de rappeler que l'ACEUMNote de bas de page 2222 tout comme les autres traités auxquels le Canada est parti n'admet la création de limitations ou d'exceptions que de façon parcimonieuse et que si celles-ci se conforment strictement au « test en trois étapes » exigeant qu'une partie « restreigne » toute exception à (1) certains cas spéciaux (2) qui ne portent pas atteinte à l'exploitation normale de l'œuvre (3) ni ne causent un préjudice injustifié aux intérêts légitimes du détenteur du droit. Or, on voit mal en quoi le simple fait de prolonger la durée des droits d'auteur pour la durée minimale exigée par les engagements internationaux du Canada puisse, de quelque manière, se qualifier de « cas spécial » ou, puisse faire en sorte qu'une utilisation donnée d'une œuvre ne porte plus atteinte à l'exploitation normale d'une œuvre ou ne cause plus un préjudice injustifié aux intérêts légitimes des titulaires du droit d'auteur à compter de cette période de prolongation.

Chacun des trois points précités suffit, à lui seul, à prévenir l'adoption de quelque limitation ou exception justifiée par une telle prolongation minimale de la durée de protection du droit d'auteur, ce que fait explicitement le Document de consultation.

Il est, à cet égard, significatif que l'Union européenne n'ait assujetti la prolongation de vingt-ans pma du droit d'auteur à aucune mesure d'atténuationNote de bas de page 23.

Quant à l'exception contenue à l'article 108 h)Note de bas de page 24 du Title 17 of the United States Code (la « Loi américaine »)Note de bas de page 25 édictée par l'article 104 du Sonny Bonno Act et permettant aux bibliothèques et services d'archives (dont ceux des établissement d'enseignement à but non lucratif) d'effectuer certaines utilisations de certaines catégories d'œuvres ou d'enregistrements sonores à des fins de préservation, d'étude ou de recherches pendant la période de prolongation de 20 ans résultant de cette loi (« l'Exception de prolongation américaine » ) : La Loi canadienne comporte déjà de (trop) nombreuses exceptions accordées, notamment ou spécifiquement, aux bibliothèques, services d'archives, musées et institutions d'enseignement et dont la portée combinée surpasse largement et a bien des égards celle des exceptions visées par l'article 108 h) de la Loi américaine, ne serait-ce qu'en raison du fait que toutes les exceptions canadiennes précitées peuvent être invoquées à tout moment au cours de la durée du droit d'auteur et non seulement au cours des 20 dernières années de cette protection.

Dès lors, même si l'ACEUM permettait au Canada d'adopter des exceptions visant à réduire les effets résultant de la prolongation de la durée de protection par droits d'auteur, ce qui n'est, selon nous, pas le cas, cela serait de toute façon inutile et, partant, injustifiable en regard du cumul des exceptions que comporte déjà la Loi canadienne.

En fait, la SARTEC réitère que, plutôt que de chercher prétexte de la moindre mise à jour requise par ses engagements internationaux afin de créer de nouvelles exceptions visant à en amenuiser les effets, le Canada devrait, tout au contraire, s'atteler à rendre la Loi canadienne conforme à ces engagements en élaguant de la Loi canadienne toute exception non conforme à ceux-ci.

4. Position de la SARTEC en regard des « mesures d'accompagnement » proposées

Sans d'aucune manière remettre en question les commentaires et conclusions qui précèdent, la SARTEC estime important d'ajouter les quelques remarques suivantes en regard des options évoquées par le gouvernement dans le Document de consultation :

a) Extension du régime des titulaires introuvables aux œuvres non publiées

La décision de divulguer ou non une œuvre, par sa publication ou une autre forme de mise à la disposition du public, est d'ailleurs un aspect éminemment sensible et, partant, très important, des droits exclusifs et morauxNote de bas de page 26 conférés aux auteurs. Aucune exception ne devrait donc permettre l'exploitation d'une œuvre non publiée sans que cela ne soit justifié par des motifs sérieux et sans s'assurer de poser des limites et conditions strictes à une telle exception.

La SARTEC souligne par ailleurs que, tout comme cela est présentement le cas de l'article 77 (« Titulaires introuvables ») de la Loi canadienne (le « Régime canadien des titulaires introuvables »), ni l'Exception de prolongation américaineNote de bas de page 27, ni la Directive sur les œuvres orphelinesNote de bas de page 28 (la « Directive sur les œuvres orphelines ») n'autorisent d'utilisation d'œuvres non publiées.

Pour ces raisons et celles mentionnées au point 4 c), ci-après, La SARTEC est donc d'avis que rien ne justifie d'étendre le Régime canadien des titulaires introuvables aux œuvres non publiées ni de créer de nouvelles exceptions visant de telles œuvres.

b) Élargissement du Régime canadien des titulaires introuvables aux œuvres inaccessibles sur le marché

La SARTEC considère aussi, pour les raisons mentionnées au prochain point, que rien ne justifie d'étendre l'application du Régime canadien des titulaires introuvables, aux œuvres inaccessibles sur le marché.

c) Autres mesures proposées par le Document de consultation

La plupart des exceptions comprises dans la Loi canadienne ne posent malheureusement aucune limitation , du moins explicite, visant à assurer qu'elles ne s'appliquent qu'aux seules œuvres publiées ou à celles qui ne sont pas ou plus disponibles sur le marché (ou « œuvre indisponible »), seules trois dispositions de la Loi canadienne stipulant ne pas s'appliquer aux œuvres indisponiblesNote de bas de page 29, et trois autres aux œuvres non publiéesNote de bas de page 30. Cela a notamment permis à la Cour Suprême du Canada d'en venir à la conclusion assez étonnante suivant laquelle le fait qu'une œuvre ne soit pas publiée constituait un facteur favorisant l'application de l'exception d'utilisation équitable à celle-ciNote de bas de page 31.

Il en résulte malheureusement donc que la majorité des exceptions contenues dans la Loi canadienne puissent déjà potentiellement s'appliquer à des œuvres non publiées et à des œuvres disponibles.

Par ailleurs, une comparaison entre les exceptions déjà contenues dans la Loi canadienne, d'une part, et celles contenues dans l'Exception de prolongation américaine, dans la Directive sur les œuvres orphelines et à l'article 8 (« Utilisation d'œuvres et autres objets protégés indisponibles dans le commerce par les institutions de patrimoine culturel ») de la Directive sur le droit d'auteur et les droits voisins dans le marché unique numérique Note de bas de page 32 (la « Directive sur les œuvres indisponibles »), d'autre part, conduit à conclure que l'effet combiné des articles 29Note de bas de page 33, 29.24, 29.4 à 30.5 et 30.71 de la Loi canadienne (et, plus particulièrement, de ses articles 30.1, 30.2 (1), 30.01, 30.02 et 30.4) recouvre l'essentiel de ce que visent les exceptions américaines et européennes précitées (les « Exceptions US/UE »)Note de bas de page 34, et même d'avantages à certains égards, et fréquemment à des conditions moins strictes que celles imposées par les Exceptions US/UENote de bas de page 35.

De ce qui précède découle que, même si l'adoption des « mesures d'accompagnement » envisagées par le Document de consultation pouvait se justifier sur le fondement de la prolongation de la durée de protection du droit d'auteur, ce qui ne peut être le cas, cela conduirait à plusieurs redondances et, pour ce qui est des aspects de ces mesures créant effectivement des exceptions qui n'existent pas déjà, aggraverait encore davantage la position du Canada en regard de ses obligations internationales, dont aux limites qu'impose le test en trois étapes de l'ACEUM et des autres traités auquel le Canada est parti.

5. Mesures d'accompagnement au bénéfice des auteurs cohérentes avec la prolongation de la durée du droit d'auteur

La SARTEC soumet que les mesures d'accompagnement les plus cohérentes et pertinentes à une prolongation du droit d'auteur sont celles favorisant l'atteinte des objectifs qui sous-tendent une telle prolongation, c'est-à-dire de permettre aux auteurs de faire en sorte que leurs héritiers puissent bénéficier des retombées économiques découlant de l'exploitation de leurs œuvres compte tenu de la réputation bâtie par l'auteur et son œuvre tout au cours de sa vie.

À cet effet, la Loi canadienne a hérité de la loi anglaise de 1911 une disposition d'ordre public faisant en sorte que toute cession ou licence exclusive qu'un auteur a pu consentir au cours de sa vie, autrement que par testament, prenne fin automatiquement et de plein droit 25 ans après son décès, tout droit ainsi cédé ou concédé devenant la propriété de la succession de l'auteur Note de bas de page 36. Dès lors, toute prolongation de la durée des droits d'auteur se fait exclusivement au bénéfice de la succession de l'auteur et non de ses cessionnaires ou licenciésNote de bas de page 37.

Cette disposition, parfois surnommée « disposition Dickens », vise à prendre en compte le fait que plus un auteur en est au début de sa carrière, plus il peut être conduit à céder l'ensemble de ses droits sur ses œuvres à des conditions ne lui étant pas des plus favorables, que l'auteur et ses œuvres peuvent acquérir une réputation de plus en plus grande avec le temps, y compris lors du décès de l'auteur qui peut amplifier l'intérêt du public pour ce dernier et son œuvre. La rétrocession des droits à la succession de l'auteur, vingt-cinq après son décès, offre donc la possibilité à ses héritiers de renégocier les conditions afférentes à l'exploitation des œuvres de l'auteur en prenant en compte la valeur ayant pu avoir été acquise par celles-ci.Note de bas de page 38

La Loi américaine comporte de son côté, depuis sa révision de 1976 prolongeant la durée des droits d'auteur suivant la norme d'alors de 50 ans pma, des dispositions d'ordre public permettant aussi aux auteurs (ou, s'ils sont alors décédés, à leurs héritiers) de résilier les cessions ou licences (exclusives ou non) qu'ils ont pu antérieurement accorder à l'égard de leurs œuvres, mais non pas à compter de la date du décès de l'auteur mais plutôt au cours d'une période de 35 à 40 ans suivant la date de la cession ou de la licence concernéeNote de bas de page 39, période jugée suffisante pour permettre au cessionnaire ou licencié, qui doit recevoir un PRÉAVIS suffisant de cette résiliation, afin de pouvoir amortir les investissements consacrés à l'exploitation de l'œuvre et bénéficier des profits pouvant en résulter. Cette approche permet donc de reconsidérer les conditions de chaque contrat à sa propre échéance et ce, potentiellement plus d'une fois au cours de la période de protection de l'œuvre, une première fois par l'auteur et une seconde, par sa succession.

Cette approche, évoquée par certains témoins dans le cadre du processus de révision de la loi, mériterait certainement d'être considérée par le gouvernement canadien a titre de mesure d'accompagnement pertinente à la prolongation de la durée du droit d'auteur, l'espérance de vie des auteurs (et non seulement celle de leurs successeurs) s'étant bien évidemment aussi accrue, leur permettant de ce fait de pouvoir renégocier les conditions d'exploitation de leurs œuvres, comme l'a d'ailleurs (notamment) fait Paul McCartney en juin 2017. Note de bas de page 40

L'Union européenne a quant à elle mis récemment en place un processus permettant aussi aux auteurs et artistes de résilier les cessions ou licences exclusives mais uniquement en cas de non-exploitation des droits ainsi cédés ou concédés après l'écoulement d'un délai raisonnable suite à la conclusion du contratNote de bas de page 41. Ce droit de résiliation permet, comme celui des lois canadienne et américaine, aux auteurs ou à leurs héritiers de mieux bénéficier du produit de leurs œuvres et, de ce fait, de favoriser leur disponibilité dans le commerce, évitant de devoir recourir à des exceptions pour atteindre cet objectif.

Finalement, le Sonny Bonno Act de 1998 comportait lui aussi une mesure d'accompagnement visant à faire bénéficier les auteurs des effets de la prolongation à 70 ans pma de la durée des droits aux États-Unis, laquelle incitait les producteurs d'œuvres audiovisuelles à négocier diligemment et de bonne foi avec les scénaristes, réalisateurs et interprètes de ces œuvres afin de convenir entre eux d'un mécanisme de partage équitable des revenus découlant de l'exploitation de ces œuvres au cours de la prolongation de 20 ans résultant de cette loi.Note de bas de page 42

Conclusion

À l'occasion de l'examen quinquennal de la Loi sur le droit d'auteur en 2018, la SARTEC déclarait être satisfaite que le Canada se soit engagé, dans l'accord AEUMC, à étendre à 70 ans la durée de protection du droit d'auteur suivant le décès de l'auteur, et ce, comme le veut la norme dans la plupart des pays.

Le Canada a maintenant l'obligation, sous l'ACEUM, de prolonger cette durée sans l'assujettir à quelque formalité que ce soit, et il ne doit pas chercher à atténuer les effets de cette prolongation par l'ajout ou la modification d'exception ou d'autres mesures similaires.

Le Canada pourrait toutefois prendre exemple des États-Unis et de l'Union européenne afin d'adopter des mesures cohérentes avec l'objectif que sous-tend une telle prolongation en permettant aux auteurs de maximiser le bénéfice de l'exploitation de leurs œuvres tout au long de leur période d'exploitation, y compris au cours de leur vie et lors des 20 dernières années de protection.

À l'occasion de l'examen quinquennal de la Loi sur le droit d'auteur, la SARTEC soumettait, par ailleurs, l'importance d'éliminer les exceptions injustes dont souffrent les auteurs au Canada, d'étendre le régime de la copie privée aux œuvres audiovisuelles, de maintenir la titularité initiale du scénariste, à titre de coauteur, sur l'œuvre cinématographique, et d'améliorer le respect de la propriété intellectuelle audiovisuelle. Ce mémoire, encore d'actualité, est joint en annexe.Note de bas de page 43

Annexe : Mémoire de la Société des auteurs de radio, télévision et cinéma (SARTEC) au Comité permanent de l'Industrie et au Comité permanent du Patrimoine canadien à l'occasion de l'examen quinquennal de la Loi sur le droit d'auteur, décembre 2018 (annexe revue en juin 2019)

Décembre 2018 (annexe revue en juin 2019)

La SARTEC soumet le présent mémoire au Comité permanent du Patrimoine canadien en complément au mémoire soumis au Comité permanent de l'industrie, des sciences et de la technologie (« Comité de l'industrie ») à l'occasion du présent examen quinquennal de la Loi sur le droit d'auteur (« Loi »).

Dans son mémoire au Comité de l'industrie, la SARTEC demande d'éliminer les exceptions injustes dont souffrent les auteurs, d'étendre le régime de la copie privée aux œuvres audiovisuelles, de maintenir la présomption de titularité initiale sur l'œuvre cinématographique, d'étendre sa durée de protection et d'améliorer le respect de la propriété intellectuelle audiovisuelle, notamment pour résoudre la problématique du piratage.

À l'occasion de son « étude du modèle de rémunération pour les artistes et les créateurs », il est essentiel que le Comité dispose de renseignements complémentaires sur le travail des auteurs comme scénaristes. Nous constatons actuellement que la rémunération des auteurs pour l'écriture et la diffusion de leurs œuvres tend à diminuer malgré la multiplication des plateformes.

Avant de vous soumettre nos recommandations pour moderniser la Loi en faveur de notre culture et de notre économie, permettez-nous de vous donner plus de renseignements sur la mission de la SARTEC, sur le travail de ses membres, sur leur mode de rémunération et sur les difficultés accrues qu'ils éprouvent à exercer leur métier.

La mission de la SARTEC

La Société des auteurs de radio, télévision et cinéma (SARTEC) défend depuis 1949 les intérêts professionnels, économiques et moraux des auteurs de l'audiovisuel en langue française au Canada. Reconnue en vertu de la législation provinciale (1989) et fédérale (1996) sur le statut de l'artiste, elle intervient auprès des pouvoirs publics, négocie des ententes collectives, conseille les auteurs, contribue au respect de leur travail et leur offre divers autres services.

Elle regroupe aujourd'hui plus de 1450 auteurs, travailleurs autonomes, qui imaginent et écrivent, entre autres, nos œuvres cinématographiques et télévisuelles.

La profession de scénariste

Les scénaristes sont des auteurs qui inventent et écrivent des œuvres dramatiques pour le cinéma et la télévision, de même que des documentaires. L'auteur de fiction crée le récit, en décrit les personnages, leurs intentions, leurs comportements, leurs relations, leurs dialogues, leur souffle, leur évolution, leur naissance, voire leur mort. Il énonce précisément le film à faire scène par scène, notamment avec ses lieux, sa temporalité, son environnement sonore. Certains scénaristes prévoient même les œuvres musicales préexistantes que nous entendrons en regardant le film ou en écrivent les chansons.

Alfred Hitchcock disait que pour faire un bon film, il faut trois choses : un bon scénario, un bon scénario et un bon scénario.

Une fois complétée et financée, l'œuvre du scénariste déclenche toute la fabrication de l'œuvre audiovisuelle à faire. Son œuvre guidera des dizaines, voire des centaines de collaborateurs.

Le réalisateur en dirigera les interprètes, les concepteurs visuels et sonores, de même que les techniciens. Les choix de sa direction influenceront le style, le rythme, le ton et le son du film, complétant ainsi la création de l'œuvre audiovisuelle. À cet effet, nous croyons que la loi devrait préciser, conformément à la jurisprudence canadienne, que le scénariste et le réalisateur sont présumés être les premiers cotitulaires du droit d'auteur de l'œuvre audiovisuelle. Enfin, il arrive aussi que le scénariste réalise le film à faire à partir de son propre scénario.

Le scénariste travailleur autonome assume souvent seul le risque de la création de son œuvre dramatique, le scénario. C'est un art en soi. Pour que ce métier continue à exister au Canada, il faudra qu'il soit rémunéré en gardant l'auteur associé à la vie économique de l'oeuvre pour maintenir son goût du risque de la création. La Loi doit lui permettre d'amortir ce risque pour continuer de créer et lui assurer des revenus décents dans l'économie numérique. Elle doit offrir à nos enfants qui en ont le désir, le talent et le courage de pouvoir rêver, eux aussi, de devenir scénaristes.

Nos membres écrivent les séries comme fugueuse (Michelle Allen), faits divers (Joanne Arseneau), toupie et binou (Dominique Jolin), l'écrivain public (Michel Duchesne), les hauts et les bas de sophie paquin (Richard Blaimert), 19-2 (Joanne Arseneau, Réal Bossé, Danielle Dansereau, Claude Legault), des films comme la passion d'augustine (Marie Vien), le déclin de l'empire américain (Denys Arcand), les rois mongols (Nicole Bélanger) et des documentaires comme ados, sexe et confidences (Louis-Martin Pepperall) et l'érotisme et le viel âge (Fernand Dansereau).

Nous comptons parmi nos membres des auteurs célèbres ici et à travers le monde, dont les œuvres sont diffusées sur tous les écrans (salles, télévisions traditionnelles et écrans numériques), mais avant de devenir nos Denis Arcand et Xavier Dolan en cinéma, ou nos Fabienne Larouche en télévision, il y a toute une communauté d'auteurs dont nous devons assurer le respect.

Voyons comment et pourquoi la SARTEC a négocié pour eux des ententes collectives.

Les conditions minimales négociées par la SARTEC

Nombreux sont nos membres qui témoignent régulièrement que, sans les normes minimales qu'a négociées la SARTEC avec les producteurs, ils seraient incapables de négocier des conditions d'engagement acceptables pour exercer leur métier. L'auteur du scénario veut tant que son œuvre dramatique devienne audiovisuelle - c'est précisément ce pourquoi il l'écrit - que plusieurs céderaient leur droit pour une bouchée de pain en échange de voir leur scénario porté à l'écran, pour vivre ensuite avec l'amertume de ne pas être associés au succès de ce qu'ils ont créé, au point souvent d'abandonner le métier.

C'est pourquoi les ententes collectives de la SARTEC, négociées avec les producteurs ou leurs associations en vertu de la législation canadienne sur le statut de l'artiste et de la Loi, interdisent la cession de droits, mais octroient aux producteurs, moyennant le paiement d'un cachet d'écriture, d'un cachet de production et le versement de redevances, les licences nécessaires permettant au producteur de produire et d'exploiter l'œuvre audiovisuelle découlant du scénario, encadre la possibilité de licences à d'autres fins, et réservent aux auteurs la possibilité de percevoir des redevances - du producteur ou de sociétés de gestion collectives – pour des diffusions au Canada et ailleurs dans le monde, afin de demeurer associés à la vie économique de l'œuvre.

Nos ententes avec les producteurs comprennent notamment une « réserve de rémunération » permettant à une société de gestion collective comme la SACD et la SCAM de percevoir, pour les scénaristes, des redevances pour la diffusion de leurs œuvres auprès des diffuseurs francophones de tous les pays (incluant le Canada).

En ce qui a trait aux droits de diffusion, la SACD et la SCAM ont des ententes avec les diffuseurs du Québec, de France, de Belgique, de Suisse, mais aussi d'Espagne, de Pologne, de Bulgarie et d'Italie pour certains diffuseurs, mais pour les droits de retransmission, de copie privée, etc. les ententes impliquent davantage de pays.Note de bas de page 44 Généralement, la SACM et la SACD ne couvrent que les pays francophones.

Il faut donc distinguer les redevances directement perçues des producteurs par la SARTEC de celles perçues par la SACD ou la SCAM : pour toute vente à un diffuseur non couvert par la SACD ou la SCAM, que ce soit ici ou à l'étranger, les ententes collectives de la SARTEC prévoient que l'auteur a droit à un pourcentage de la part-producteur (souvent 5%).

En télévision, ce pourcentage s'applique aux recettes brutes du producteur, alors qu'en cinéma, il s'agit des recettes nettes (après remboursement des investisseurs). Si les redevances en provenance du producteur sont fréquentes en télévision, elles sont plus rares en cinéma, à moins qu'elles ne découlent d'autres droits que ceux prévus dans les licences de base. Par exemple, le droit de diffuser un film est dans la licence de base, mais celui d'autoriser un remake, non. L'auteur peut alors notamment avoir négocié une part des revenus bruts. Les redevances versées par les producteurs à la SARTEC pour les auteurs peuvent inclure le paiement de reprises (pour les ententes avec des producteurs-diffuseurs), des ventes à des pays non francophones, des ventes de DVD, etc.

Pour les droits de diffusion des œuvres sur le territoire canadien francophone, la SARTEC reçoit un rapport mensuel de la SACD/SCAM des répartitions. Les œuvres produites hors des contrats SARTEC n'y figurent pas, mais elles sont peu nombreuses. Nos membres dont les œuvres sont diffusées en Europe reçoivent aussi des redevances d'Europe pour la diffusion de leurs œuvres et pour la copie privée.

Malheureusement aujourd'hui encore, le régime de copie privée audiovisuelle n'existe pas au Canada, alors que les développements technologiques favorisent le piratage, privant les ayants droit canadiens de revenus. C'est pourquoi nous demandons, entre autres, au gouvernement de permettre aux Canadiens de percevoir aussi, au Canada, des redevances pour la copie privée et de moderniser la Loi pour améliorer le respect de la propriété intellectuelle audiovisuelle.

Recommandations de la SARTEC

À l'occasion du présent examen quinquennal de la Loi sur le droit d'auteur (la « Loi »)Note de bas de page 45, la SARTEC soumet essentiellement cinq recommandations :

1. Éliminer les exceptions injustes dont souffrent les auteurs

Le nombre d'exceptions aux droits des auteurs n'a cessé d'augmenter pour passer de 6 avant 1988, à près de 40, occupant 64 des 162 pages - ou 40% - de la Loi. Plus du tiers de ces exceptions s'appliquent aux œuvres audiovisuelles. Au cours des dernières décennies, le gouvernement s'est en effet incliné devant des groupes de pression demandant d'être exemptés de l'application de la Loi.

Il convient de revoir le bien fondé et les effets de ces exceptions en tenant compte de l'objectif fondamental de la Loi, qui est de conférer aux auteurs les droits et recours nécessaires pour leur assurer une rémunération décente en contrepartie de l'exploitation de leurs œuvres. Rappelons que ces exceptionsNote de bas de page 463 ne sont pas des « droits des utilisateurs »Note de bas de page 47 et que leur accumulation, généralement sans versement de contreparties, place le Canada en défaut de ses obligations conventionnelles. Aussi, un examen rigoureux des conséquences de ces exceptions sur l'exploitation normale des œuvres et les intérêts légitimes des ayants droit s'impose.

2. Étendre le régime de la copie privée aux œuvres audiovisuelles

Le régime de la copie privée ne s'applique qu'aux enregistrements sonores d'œuvres musicalesNote de bas de page 48, alors que l'évolution des technologies de reproduction numérique favorise les reproductions non autorisées d'œuvres audiovisuelles.

Comme la majorité des pays (+80%) comportant ce régimeNote de bas de page 49 , le Canada devrait l'étendre aux reproductions d'œuvres audiovisuelles, quels qu'en soient les supports, incluant les équipements, et peu importe à quelles fins la copie est effectuée : l'écouter, la regarder en différéNote de bas de page 50 ou la reproduire sur un autre supportNote de bas de page 51.

Le Canada devrait aussi abolir le nouveau régime de copie privée aux termes de l'article 29.22 (« Reproduction à des fins privées ») ou, à défaut, l'assujettir à des redevances équitables pour le conformer à ses engagements internationauxNote de bas de page 52.

3. Maintenir la titularité initiale sur l'œuvre cinématographique

Comme pour toute catégorie d'œuvre, la Loi ne précise pas l'identité du titulaire initial des droits d'auteur sur l'œuvre cinématographique, mais elle stipule que, sauf exception, ce titulaire est « l'auteur » de l'œuvreNote de bas de page 53. Ces deux principes fondamentaux de la Loi n'ont jamais été remis en question.

La jurisprudence canadienne identifie le « scénariste » et le « réalisateur » comme coauteurs de l'œuvre cinématographiquesNote de bas de page 54, conclusion en parfaite consonance avec les traités auxquels le Canada est parti, dont la Convention de Berne. Cette reconnaissance est le fruit de multiples études de comités d'expertsNote de bas de page 55 aux fins de la révision de Stockholm de la Convention de Berne, en 1967, dont résulte l'article 14 bis .

Nos ententes collectives reposent sur cet état de droit. Cela n'empêche pas les producteurs d'exploiter les œuvres fondées sur les scénarios des membres de la SARTEC qui acceptent qu'elles le soient, à des conditions justes et équitables, ce que leur statut d'auteur leur permet de négocier, collectivement et individuellement. C'est la raison première des droits d'auteur partout dans le monde.

La situation canadienne est d'ailleurs la règle et non l'exception, les lois de nombreux pays reconnaissant la qualité d'auteur aux scénaristes et aux réalisateurs.

Certains cherchent toutefois à remettre en question cet état de droit pour y apporter des modifications radicales afin que le producteur de l'œuvre cinématographique soit dorénavant désigné comme étant le titulaire initial des droits d'auteur, voire son auteur!

Ces demandes visent à changer l'état du droit, et non à le confirmerNote de bas de page 56.

La SARTEC s'oppose donc vivement à toute tentative de dénaturer la Loi pour conférer à d'autres qu'aux auteurs d'une œuvre audiovisuelle sa titularité initiale. Elle ne demande qu'à confirmer l'état du droit et, dans ce cas, elle appuie la proposition de l'ARRQNote de bas de page 57 qui est aussi en phase notamment avec celles de la DGC, de la SACD/SCAM et de la WGC.

4. Durée de protection

La SARTEC est satisfaite que le Canada se soit engagé, dans le nouvel accord AEUMC, à étendre dans la Loi à 70 ans la durée de protection du droit d'auteur suivant le décès de l'auteur, comme le veut la norme dans la plupart des pays.

5. Améliorer le respect de la propriété intellectuelle audiovisuelle

La situation canadienne en matière de respect des droits d'auteurs, particulièrement sur Internet, est extrêmement préoccupante. Pour démontrer la sincérité de ses engagements envers la promotion de sa culture, le gouvernement doit adopter des mesures permettant aux ayants droit de combattre les contrefaçons de masse en s'inspirant des meilleures pratiques à cette finNote de bas de page 58. La SARTEC demande d'abord qu'un régime d'avis et retrait soit instauré pour que les fournisseurs de services Internet (« FSI ») soient tenus de retirer tout contenu dont l'utilisation n'a pas été autorisée. De plus, les atténuations de responsabilité des FSINote de bas de page 59 ayant l'effet pervers de les démotiver à résoudre les problèmes que leurs services rendent possibles, il convient de réviser les dispositions restreignant leur responsabilitéNote de bas de page 60.

Les FSI sont les mieux placés pour prévenir le piratage de masse, et il ne devrait pas leur être permis de se prévaloir d'atténuation de responsabilité dès qu'ils savent que leurs services sont utilisés à des fins illicites. Enfin, il faudrait pouvoir les obliger à bloquer tout accès à tout site permettant le piratage, et à éliminer ces sites des résultats de leurs moteurs de recherche. 

Annexe

Amendements proposés (en lien avec le point 3)

a) Amendements proposés (version à jour en juin 2019)

Présomption de propriété

34.1 (1) Dans toute procédure civile engagée en vertu de la présente loi où le défendeur conteste l'existence du droit d'auteur, l'œuvre, la prestation, l'enregistrement sonore ou le signal de communication, selon le cas, est, jusqu'à preuve contraire, présumé être protégé par le droit d'auteur.

(2) Sauf en ce qui concerne les œuvres cinématographiques, dans toute procédure civile engagée en vertu de la présente loi où le défendeur conteste la qualité du demandeur, l'auteur, l'artiste-interprète, le producteur ou  le radiodiffuseur, selon le cas, est, jusqu'à  preuve contraire, réputé être titulaire de ce droit d'auteur.

(3) Dans toute procédure civile engagée en  vertu de la présente loi au regard d'une  œuvre cinématographique où le défendeur conteste la qualité du demandeur, le  scénariste et le réalisateur sont présumés être les co-auteurs de l'œuvre cinématographique  et, sous réserve d'une preuve contraire, sont  présumés être les cotitulaires du droit  d'auteur sur cette œuvre.

Aucun enregistrement

(2)  Dans toute contestation de cette nature, lorsque aucun acte de cession du droit d'auteur ni aucune licence concédant un intérêt dans le droit d'auteur n'a été enregistré sous l'autorité de la présente loi :

a) dans le cas d'une prestation, d'un enregistrement sonore, d'un signal de

Presumptions respecting copyright and ownership

34.1 (1) In any civil proceedings taken under this Act in which the defendant puts in issue the existence of the copyright , copyright shall be presumed, unless the contrary is proved, to subsist in the work, performer's performance, sound recording or communication signal, as the case may be.

(2) Except in respect of cinematographic works, in any civil proceedings taken under this Act in which the defendant puts in issue the title of the plaintiff with respect to the copyright, the author, performer, maker or broadcaster, as the case may be, shall, unless the contrary is proved, be presumed to be the owner of the copyright.

(3) In any civil proceedings taken under this  Act with respect to a cinematographic work  and in which the defendant puts in issue the  title of the plaintiff to the copyright in such  work, the scriptwriter and the director shall  be presumed to be the co-authors of the  cinematographic work and, unless the  contrary is proved, shall be presumed to be  the co-owners of the copyright in such work.

Where no grant registered

(2) Where any matter referred to in subsection (1) is at issue and no assignment of the copyright, or licence granting an interest in the copyright, has been registered under this Act, communication ou d'une œuvre autre qu'une œuvre cinématographique,

(i) si un nom paraissant être celui de l'artiste-interprète de la prestation, du producteur de l'enregistrement sonore, du radiodiffuseur du signal de communication ou de l'auteur de l'œuvre y est imprimé ou autrement indiqué, de la manière habituelle, la personne dont le nom est ainsi imprimé ou indiqué est, jusqu'à preuve contraire, présumée être l'artiste-interprète, le producteur, le radiodiffuseur ou l'auteur; et

(ii) si aucun nom n'est imprimé ou indiqué de cette façon, ou si le nom ainsi imprimé ou indiqué n'est pas le véritable nom de l'artiste-interprète, du producteur, du radiodiffuseur ou de l'auteur, selon le cas, ou le nom sous lequel il est généralement connu, et si un nom paraissant être celui de l'éditeur ou du titulaire du droit d'auteur y est imprimé ou autrement indiqué de la manière habituelle, la personne dont le nom est ainsi imprimé ou indiqué est, jusqu'à preuve contraire, présumée être le titulaire du droit d'auteur en question;

b) dans le cas d'une œuvre cinématographique,

(i) si des noms paraissant être ceux du scénariste et du réalisateur y sont indiqués de la manière habituelle, ces personnes sont présumées, jusqu'à preuve contraire, être les co-auteurs de l'œuvre cinématographique et les cotitulaires du droit d'auteur sur l'œuvre en question; et

(ii) si un nom paraissant être celui du producteur d'une œuvre cinématographique y est indiqué de la manière habituelle, cette personne est présumée, jusqu'à preuve contraire, être le producteur de l'œuvre cinématographique pour les fins de l'article 5(1) b) de la présente loi.

(a) in the case of a performer's performance,  a sound recording, a communication signal or a work other than a cinematographic work,

(i) if a name purporting to be that of the performer of the performer's performance, the maker of the sound recording, the broadcaster of the communication signal or the author of the work is printed or otherwise indicated thereon in the usual manner, the person whose name is so printed or indicated shall, unless the contrary is proved, be presumed to be the , performer, maker or broadcaster or the author; and

(ii) if no name is so printed or indicated, or if the name so printed or indicated is not the true name of the performer, maker, broadcaster or author or the name by which that person is commonly known, and a name purporting to be that of the publisher or copyright owner is printed or otherwise indicated thereon in the usual manner, the person whose name is printed or indicated as described in subparagraph (ii) shall, unless the contrary is proved, be presumed to be the owner of the copyright in question; and

(b) in the case of a cinematographic work,

(i) if names purporting to be those of the scriptwriter and director appear in the usual manner, the persons so named shall be presumed, unless the contrary is proved,  to be the co-authors of the cinematographic work and the co-owners of the copyright in the work; and

(ii) if, on a cinematographic work, a name purporting to be that of the maker of the cinematographic work appears in the usual manner, the person so named shall, unless the contrary is proved, be presumed to be the maker of the cinematographic work.