Ontario - Cour Supérieure de Justice faillites et insolvabilité (Motifs)

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RÉFÉRENCE : Stephen Francis Podgurski, 2020 ONSC 2552
No DE DOSSIER DE LA COUR : 31-2597721
DATE : 20200427

COUR SUPÉRIEURE DE JUSTICE DE L’ONTARIO

CONCERNANT :    

L’AFFAIRE DE LA PROPOSITION DE STEPHEN FRANCIS PODGURSKI (de la ville de Courtice, dans la région de Durham, dans la province de l’Ontario)

LA SURINTENDANTE DES FAILLITES, partie requérante

ET :

STEPHEN FRANCIS PODGURSKI, débiteur

ET :

BDO CANADA LIMITÉE, syndic autorisé en insolvabilité

DEVANT : le juge en chef G.B. Morawetz

PROCUREURS :

Stéphanie Lauriault, représentante du Procureur général du Canada
Pamela Huff, représentante de l’Institut d’insolvabilité du Canada
Stephen Francis Podgurski, partie non représentée

DATE D’AUDITION : le 24 avril 2020 (par vidéoconférence)

DATE DE PUBLICATION : le 27 avril 2020

MOTIFS

Contexte

[1] La surintendante des faillites (« la surintendante ») dépose une requête afin d’assurer une certaine souplesse dans l’administration de tous les dossiers d’insolvabilité en Ontario qui subissent les répercussions économiques de la COVID19. Elle demande à cette fin une ordonnance pour a) augmenter le nombre de défauts de paiement ou prolonger le délai pouvant entraîner l’annulation présumée d’une proposition de consommateur; et b) prolonger les délais fixés dans certaines dispositions de la Loi sur la faillite et l’insolvabilité, L.R.C. (1985), ch. B-3, (la « LFI ») et des Règles générales sur la faillite et l’insolvabilité (C.R.C., ch. 368) (les « Règles générales »). (Les dispositions de la LFI et des Règles générales sont précisées à l’annexe A.) La surintendante a l’intention de demander une ordonnance semblable à chaque province et à chaque territoire au Canada.

[2] Les mesures d’allègement demandées relèvent de la compétence de la Cour. Il s’agit d’une solution temporaire à certains problèmes causés par la COVID-19 et ses répercussions sur le système d’insolvabilité. Ces mesures sont prévues sous réserve de toute mesure que le Parlement, le gouverneur en conseil ou, s’il y a lieu, l’assemblée législative peut décider de prendre à cette fin.

[3] L’Institut d’insolvabilité du Canada et l’Association canadienne des professionnels de l’insolvabilité et de la réorganisation appuient la position adoptée par la surintendante.

PARTIE I – FAITS

[4] En Ontario, le gouvernement a déclaré l’état d’urgence le 17 mars 2020 en vertu du décret n518/2020 (Règlement de l’Ontario 50/20), pris en application de l’article 7.0.1 de la Loi sur la protection civile et la gestion des situations d’urgence, L.R.O., 1990, chap. E9. L’état d’urgence, qui devait prendre fin le 14 avril 2020, a été prolongé jusqu’au 12 mai 2020.

[5] Les délais de prescription et les dispositions visant les délais pour prendre une mesure dans une instance en Ontario prévus par une loi, un règlement, une règle, un règlement municipal ou administratif ou une ordonnance du gouvernement de l’Ontario ont été suspendus pour la durée de l’urgence, rétroactivement au 16 mars 2020.

[6] Chaque province et chaque territoire du Canada a pris diverses autres mesures pour contribuer à ralentir la propagation de la COVID19. Ces mesures, qui se répercutent sur la société dans son ensemble, ont donné lieu à des retards importants. La procédure d’insolvabilité ne fait pas exception.

[7] Le respect des délais prévus dans la LFI par les professionnels de l’insolvabilité, les débiteurs, les créanciers et les intervenants est entravé en raison de la situation d’urgence en cours et des mesures de confinement connexes.

PARTIE II – Questions soulevées

[8] Le point important soulevé dans la requête est la question de savoir si la Cour peut exercer son pouvoir discrétionnaire et, dans l’affirmative, si elle devrait le faire afin d’autoriser les mesures d’allègement demandées par la surintendante, notamment :

  1. Augmenter le nombre de défauts de paiements ou prolonger le délai pouvant entraîner l’annulation présumée d’une proposition de consommateurs aux termes du paragraphe 66.31(1) de la LFI;
  2. prolonger les délais prévus aux articles 51, 66.15 et 102 de la LFI pour la tenue d’une assemblée de créanciers;
  3. prolonger les délais prévus aux paragraphes 105(4) et (10) des Règles générales pour la tenue d’une séance de médiation;
  4. prolonger le délai prévu au paragraphe 170.1(3) de la LFI pour renvoyer une affaire au tribunal;
  5. déclarer que l’ordonnance s’applique à tous les dossiers de faillite actifs, les propositions en vertu de la section I actives et les propositions en vertu de la section II actives ainsi qu’à tous les dossiers de faillite et les propositions devant être déposés auprès de la surintendante jusqu’au 30 juin 2020;
  6. dispenser de l’obligation de déposer un avis de requête comme l’autorise le paragraphe 187(12) de la LFI.

[9] La surintendante estime que la Cour a compétence pour autoriser ces mesures d’allègement et qu’elle devrait exercer son pouvoir discrétionnaire pour le faire compte tenu de la situation actuelle provoquée par la pandémie de COVID19.

[10] Les mesures d’allègement demandées sont accueillies pour les motifs énoncés ci-après.

PARTIE III – Arguments

[11] La prolongation du délai fixé pour accomplir une action ou une chose pour une période correspondant à la période de suspension vise à figer dans le temps les choses là où elles en étaient au moment où la période de suspension a pris effet, comme si l’interruption n’était jamais survenue.

[12] En sollicitant ces mesures d’allègement, la surintendante définit certains termes clés :

  • « période d’urgence » : période commençant le 13 mars 2020 et se terminant le 30 juin 2020, étant entendu que les dates de début et de fin sont comprises dans cette période;
  • « période de suspension » : période commençant à la date de l’ordonnance du tribunal et se terminant le 30 juin 2020, étant entendu que les dates de début et de fin sont comprises dans cette période.
  • « proposition de consommateur active » (proposition en vertu de la section II) visée par les mesures d’allègement demandées : proposition en vertu de la section II déposée auprès du BSF jusqu’à la fin de la période d’urgence, à l’exclusion de toute proposition en vertu de la section II qui a été annulée ou réputée annulée ou qui a été entièrement exécutée le jour ou avant le jour du prononcé de la présente ordonnance;
  • « dossier de faillite actif » visé par les mesures d’allègement demandées : dossier de faillite déposé auprès du Bureau du surintendant des faillites (« le BSF »);
  • « proposition concordataire active » (proposition en vertu de la section I) visée par les mesures d’allègement demandées : proposition en vertu de la section I déposée auprès du BSF jusqu’à la fin de la période d’urgence.

Répercussions de la COVID19 sur l’insolvabilité

Répercussions sur les débiteurs consommateurs

[13] La surintendante soutient qu’en raison des bouleversements provoqués par la COVID19, les débiteurs consommateurs subissent davantage de pressions financières et ont plus de difficulté à satisfaire aux exigences que leur impose la loi pour être protégés de leurs créanciers. Lorsqu’un débiteur consommateur ne fait pas les versements prévus dans sa proposition, leur proposition peut être réputée annulée par l’effet de la loi. Le débiteur perd alors la protection conférée par la suspension des procédures et les droits des créanciers sont rétablis pour le montant de leur réclamation, déduction faite des dividendes qu’ils ont reçus. De plus, le débiteur n’a pas le droit de déposer une autre proposition sans l’autorisation du tribunal. Par ailleurs, en cas d’annulation d’une proposition de consommateur par un failli, ce débiteur consommateur est réputé avoir déposé une cession en faillite.

[14] La surintendante soutient en outre que de nombreux débiteurs consommateurs accusaient déjà avant la COVID19 des retards dans les versements prévus dans leur proposition et elle s’attend à ce que le nombre de défauts de paiement pour les propositions de consommateur augmente considérablement.

[15] Selon la preuve présentée par la surintendante, 288 939 Canadiens ont une proposition de consommateur active en vertu de laquelle ils se sont engagés, par contrat, à faire régulièrement des versements à l’actif au bénéfice de leurs créanciers.

Répercussions sur l’administration de l’insolvabilité

[16] La surintendante affirme que des débiteurs, des créanciers et des syndics autorisés en insolvabilité (« SAI ») ont fait part au BSF de leurs préoccupations concernant la difficulté de respecter les délais et les exigences de la LFI dans la situation actuelle provoquée par la COVID19.

[17] La surintendante fait valoir que, d’un point de vue pratique, la tenue d’assemblées des créanciers et de séances de médiation par téléconférence, lorsqu’il est impossible de le faire par vidéoconférence, pose problème en ce qui concerne la vérification de l’identité et la communication de documents et de rapports en temps opportun. Il est possible que le quorum ne soit pas atteint si les créanciers travaillant à distance n’ont pas reçu l’avis de l’assemblée.

[18] Les tribunaux de l’Ontario sont ouverts, mais ils fonctionnent à un rythme réduit et variable. Les délais de prescription et les délais procéduraux ont été suspendus en Ontario et dans certaines autres provinces pour la durée de l’état d’urgence ou de la crise de santé publique déclarés par chaque province. Ces suspensions sont rétroactives à des dates en mars.

[19] Aucun amendement d’urgence ni aucune ordonnance d’urgence ayant une incidence sur les échéanciers et les délais fixés dans la LFI n’a été rendue jusqu’à présent.

[20] La surintendante souligne que la LFI ne prévoit en soi aucun mécanisme direct permettant de résoudre sans recourir à une ordonnance du tribunal les problèmes soulevés dans la requête. Par conséquent, elle demande à la Cour d’autoriser des mesures d’allègement pour les résoudre.

Pouvoirs d’intervention de la surintendante

[21] En vertu de l’alinéa 5(4)a) de la LFI, la surintendante peut intervenir dans toute affaire ou toute procédure devant le tribunal. Elle exerce des pouvoirs et des fonctions très vastes, entre autres la surveillance des affaires et des actifs régis par la LFI. C’est en vertu de ce pouvoir que la surintendante intervient dans les 451 536 dossiers d’insolvabilité ouverts, qui comprennent l’ensemble des propositions de consommateur actives, les propositions concordataires actives et les dossiers de faillite actifs.

Mesures d’allègement demandées

a) Allègement des seuils établis pour l’annulation réputée des propositions de consommateur

Fondement juridique de la compétence du tribunal : par. 66.31(1) de la LFI

[22] En ces temps exceptionnels, en raison de l’incertitude causée par la COVID19, la surintendante demande une ordonnance qui donnerait une plus grande marge de manœuvre aux débiteurs consommateurs, dont bon nombre subissent une perte de revenu.

[23] La surintendante demande une ordonnance pour modifier les délais prévus au paragraphe 66.31(1) de la LFI en cas de défaut de paiement. Cette mesure donnerait une certaine marge de manœuvre aux débiteurs consommateurs en permettant jusqu’à trois défauts de paiement supplémentaires ou un délai de trois mois entre le 13 mars 2020 et le 31 décembre 2020 avant l’annulation réputée de la proposition de consommateur.

[24] En vertu des alinéas 66.31(1)a) et b) de la LFI, une proposition de consommateur est réputée être annulée dans le cas où les paiements prévus par la proposition ne sont pas effectués :

Annulation présumée - défaut de paiement

66.31 (1) À moins que le tribunal n'en ait décidé autrement ou qu'une modification de la proposition n'ait été déposée antérieurement, la proposition de consommateur est réputée être annulée :

a) dans le cas où les paiements prévus par la proposition doivent être effectués mensuellement ou plus fréquemment, le jour où le débiteur est en défaut pour une somme correspondant à au moins trois de ces paiements;

b) dans le cas où les paiements doivent être effectués moins fréquemment que mensuellement, à l'expiration d'un délai de trois mois suivant le jour où le débiteur est en défaut par rapport à n'importe quel paiement.

[25] La surintendante souligne que ces défauts de paiement entraîneront une annulation en vertu de la loi, « à moins que le tribunal n’en ait décidé autrement ». Elle fait valoir que le paragraphe 66.31(1) de la LFI confère expressément à la Cour la compétence pour modifier les critères prévus aux alinéas 66.31(1)a) et b) concernant les défauts de paiement.

[26] La surintendante estime que les autres options offertes par la LFI aux débiteurs consommateurs sont insuffisantes ou peu pratiques en réponse à la crise actuelle provoquée par la COVID19.

[27] En vertu de l’article 66.37 de la LFI, une proposition de consommateur active peut être modifiée, à condition que la modification soit faite avant l’annulation présumée et que l’option proposée soit viable. Ainsi, avant de recommander une modification, l’administrateur doit estimer que le débiteur sera en mesure d’exécuter la proposition modifiée.

[28] Toutefois, la surintendante est d’avis qu’en raison de la COVID19, il est pratiquement impossible pour les débiteurs ayant récemment perdu leur source de revenu de déterminer le moment de leur retour au travail, voire de savoir s’ils y retourneront et gagneront le revenu nécessaire pour effectuer les versements prévus dans la proposition. Essentiellement, la capacité de remboursement des débiteurs consommateurs dépend d’un événement incertain sur lequel ils n’ont aucune prise.

[29] Par ailleurs, en vertu du paragraphe 66.31(6) de la LFI, l’administrateur peut envoyer un avis du rétablissement dans les 30 jours suivant la date de l’annulation présumée d’une proposition de consommateur. Cet avis, envoyé au séquestre officiel et à l’ensemble des créanciers, rétablit d’office la proposition de consommateur 60 jours après la date de l’annulation présumée à moins qu’un créancier ne s’y oppose. Contrairement aux exigences en matière de vote lors de l’approbation d’une proposition, l’opposition d’un seul créancier entraînera dans ce cas le non-rétablissement de la proposition.

[30] Le rétablissement ne remédie pas aux défauts de paiement ni ne modifie les modalités de la proposition de consommateur.

b) Compétence conférée à un tribunal de prolonger un délai

Fondement juridique de la compétence du tribunal : par. 187(11) de la LFI

[31] Le paragraphe 187(11) de la LFI prévoit ce qui suit :

Le tribunal peut prolonger le délai
(11) Lorsque la présente loi restreint le délai fixé pour accomplir une action ou chose, le tribunal peut prolonger ce délai, avant ou après son expiration, aux termes, s'il en est, qu'il estime utile d'imposer.  

[32] La surintendante soutient que le paragraphe 187(11) de la LFI confère au tribunal de la faillite le pouvoir discrétionnaire de prolonger le délai pour accomplir une action ou une chose, avant ou après son expiration, à moins qu’il en soit prévu autrement de façon explicite.

[33] La surintendante demande que le délai prévu pour la tenue d’une assemblée des créanciers par le SAI fasse l’objet d’une prolongation correspondant à la période de suspension pour les propositions de consommateur actives, les propositions concordataires actives et les dossiers de faillite actifs.

[34] La surintendante estime que la LFI assure une certaine souplesse pour la prolongation ou l’ajournement des assemblées des créanciers par le séquestre officiel ou le président d’assemblée. Toutefois, il est possible que cette souplesse ne soit pas suffisante pour répondre aux besoins dans le contexte actuel de la crise de la COVID19.

[35] La surintendante demande aussi la prolongation du délai de 45 jours prévu dans les Règles générales pour la tenue des séances de médiation en cas de difficultés liées à l’établissement du revenu excédentaire du failli ou d’opposition à sa libération pour certaines raisons.

[36] La LFI assure une certaine souplesse pour le report ou l’ajournement des séances de médiation, mais cette souplesse est plutôt limitée puisque la nouvelle date doit se situer dans les 10 jours suivant le report ou l’ajournement en question.

[37] Fait important, la surintendante souligne que l’objectif de l’ordonnance générale visant à prolonger les délais durant la période d’urgence n’est pas d’ajourner toutes les assemblées des créanciers ou les séances de médiation jusqu’après cette période, mais plutôt de donner plus de temps aux intervenants pour tenir ces réunions importantes.

[38] La surintendante affirme qu’une prolongation générale des délais concernant la tenue des assemblées des créanciers et des séances de médiation dans tous les dossiers d’insolvabilité actifs durant la période d’urgence assurerait la souplesse requise dans certaines situations provoquées par les mesures de confinement en lien avec la COVID19 et éviterait toute injustice ou tout préjudice involontaire.

Renvois au tribunal à reporter après la période d’urgence

[39] En vertu du paragraphe 170.1(3) de la LFI, le SAI doit demander sans délai au tribunal de fixer une date d’audience en cas d’échec de la médiation ou de manquement du failli aux conditions prévues par l’entente consécutive à la médiation.

[40] La surintendante estime que la prolongation du délai à l’intérieur duquel le SAI doit déposer une demande auprès du tribunal allégera probablement le fardeau des tribunaux. En effet, bon nombre de ces questions pourraient se résorber avec le temps, ce qui réduirait la nécessité de déposer des demandes auprès du tribunal. Si les SAI attendent la fin de la période d’urgence pour déposer des demandes, les tribunaux pourront être plus fonctionnels et les affaires non résolues pourront être traitées dans le cadre du cours normal des affaires.

c) Ordonnance devant s’appliquer à tous les dossiers d’insolvabilité actifs ainsi qu’aux dossiers déposés auprès du BSF jusqu’au 30 juin 2020

Fondement juridique de la compétence du tribunal : compétence inhérente

[41] La surintendante demande que l’allègement des procédures sollicité s’applique non seulement aux dossiers d’insolvabilité actifs à la date de l’ordonnance, mais aussi à ceux déposés auprès du BSF jusqu’à la fin de la période d’urgence. Cette mesure viserait à assurer un traitement équitable à toutes les parties intéressées touchées par les mesures de confinement liées à la COVID19.

[42] La LFI ne prévoit pas expressément la possibilité pour un tribunal de la faillite de rendre une ordonnance exécutoire portant sur des affaires dont il n’a pas été saisi. La surintendante affirme que la Cour supérieure de justice de l’Ontario peut le faire en exerçant sa compétence inhérente.

[43] Le paragraphe 183(1) de la LFI confère leur compétence à la Cour supérieure de justice de l’Ontario ainsi qu’aux autres tribunaux de la faillite au Canada :

Tribunaux compétents
183 (1) Les tribunaux suivants possèdent la compétence en droit et en equity qui doit leur permettre d'exercer la juridiction de première instance, auxiliaire et subordonnée en matière de faillite et en d'autres procédures autorisées par la présente loi durant leurs termes respectifs, tels que ces termes sont maintenant ou peuvent par la suite être tenus, pendant une vacance judiciaire et en chambre :

[44] La surintendante soutient que le paragraphe 183(1) de la LFI a pour effet de préserver expressément la compétence équitable et subordonnée d’un tribunal supérieur conférée au tribunal de la faillite. Le paragraphe confirme également la compétence inhérente du tribunal supérieur, définie dans l’article 96 de la Loi constitutionnelle de 1867 et confirmée au paragraphe 11(2) de la Loi sur les tribunaux judiciaires. Il s’agit d’un outil utilisé avec parcimonie auquel on peut faire appel dans le contexte de l’administration de la LFI.

PARTIE IV – Loi et analyse

[45] La COVID19 a manifestement d’énormes répercussions économiques sur le Canada. Elle touche des milliers de débiteurs insolvables et leurs créanciers, qui ont fait part de nombreuses préoccupations à la surintendante. Des organisations professionnelles comme l’Institut d’insolvabilité du Canada et l’Association canadienne des professionnels de l’insolvabilité et de la réorganisation ont signalé certains problèmes à la surintendante, qui demande des mesures d’allègement afin de les résoudre.

[46] En statuant sur la requête de la surintendante, il est essentiel de prendre en compte l’incidence des mesures d’allègement demandées sur les débiteurs insolvables et leurs créanciers. Il faut également s’assurer de ne pas porter indûment atteinte aux droits fondamentaux des parties pendant la période de suspension.

[47] Il faut aussi reconnaître que les questions juridiques soulevées dans la requête sont inhabituelles. La Cour est consciente que le Parlement, lorsqu’il a adopté les nombreux délais fixés par la LFI, visait expressément l’administration des propositions concordataires, des propositions en vertu de la section II et des dossiers de faillite de façon générale.

[48] Toutefois, il faut aussi reconnaître qu’en adoptant la LFI et en y apportant des modifications au fil des ans, le Parlement n’aurait jamais pu prévoir les répercussions d’une pandémie comme celle de la COVID19.

[49] La requête soulève de nombreuses questions pratiques pour lesquelles le tribunal doit fournir une orientation et des réponses concrètes. Il existe des précédents pour ce qui est d’adopter une approche pratique. À maints égards, la LFI est une loi relevant du droit commercial dont l’administration repose en grande partie sur les gens d’affaires. Par conséquent, il ne faudrait pas donner aux objections techniques une portée plus grande que ce qui est nécessaire pour bien interpréter la LFI – voir McCoubrey (1924), 5 C.B.R. 248 (C.S. Alb.) et Camirand Ltée v. Gagnon (1924) 4 C.B.R. 344 (C.S. Qc).

a) Allègement du seuil pour l’annulation présumée des propositions de consommateur

[50] En ce qui a trait à la mesure d’allègement demandée concernant le seuil pour l’annulation présumée des propositions de consommateur, la Cour accepte les prétentions de la surintendante selon lesquels les autres options offertes par la LFI aux débiteurs consommateurs sont insuffisantes ou irréalistes en réponse à la crise actuelle provoquée par la COVID19 et les mesures de confinement qui en résultent. J’accepte que l’article 66.31 établit le fondement juridique de l’ordonnance demandée. Une ordonnance du tribunal peut atténuer l’effet automatique des défauts de paiement à condition qu’elle soit rendue avant l’annulation présumée.

[51] L’ordonnance du tribunal a une incidence exceptionnelle. Toutefois, comme le souligne la surintendante, les circonstances actuelles sont exceptionnelles et la Cour estime que les mesures d’allègement demandées par la surintendante sont raisonnables dans les circonstances. C’est pourquoi la Cour accueille cette demande.

[52] Pour rendre sa décision, la Cour a aussi pris en compte le fait que les mesures d’allègement susmentionnées ne s’appliquent pas aux propositions annulées ou présumées annulées ou qui ont été exécutées intégralement jusqu’à aujourd’hui.

a) Prolongation des délais

[53] En ce qui a trait à la prolongation des délais susmentionnés, il s’agit de déterminer si le paragraphe 187(11) confère à la Cour le pouvoir discrétionnaire voulu pour accéder à la demande.

[54] La surintendante est d’avis que le tribunal peut autoriser ce type de mesure d’allègement, car les dispositions de la loi n’interdisent pas explicitement au tribunal de prolonger le délai fixé pour accomplir une action ou une chose.

[55] La plupart des affaires dans lesquelles la Cour a examiné la portée du paragraphe 187(11) portent sur la prolongation de délais dans des causes portées en appel pour rejet de réclamations. Dans plusieurs affaires, le tribunal a déterminé que si le paragraphe 187(11) était en contradiction avec une disposition particulière de la LFI – par exemple le paragraphe 135(4), selon lequel le destinataire d’un avis doit faire appel du rejet d’une réclamation dans les 30 jours suivant sa signification –, la disposition particulière prévaut et le tribunal ne peut autoriser la prolongation prévue au paragraphe 187(11) – voir Truax Carsley & Co. (1930), 12 C.B.R. 28 (C.S. Qc); Glen Woollen Mills Limited (1939), 20 C.B.R. 162 (C.S. Ont.); St. Pierre (1963), 5 C.B.R. (N.-É.) 61 (C.S. Qc); King (1990), 79 C.B.R. (N.-É.) 169 (C.S. C.-B.); et Fredrickson (1994), 29 C.B.R. (3e) 135 (C.B.R. Man.).

[56] Ces affaires comportent une caractéristique distincte, car les dispositions pour lesquelles la surintendante demande des mesures d’allègement ne prévoient aucun délai pour le dépôt d’une demande de prolongation. Cette distinction a été mentionnée dans des décisions rendues en appel à la suite du dépôt d’un avis de contestation par un syndic en vertu du paragraphe 81.2 [[sic]] – voir, par exemple, St. Pierre Automotive Products Co. v. Sylvain et Lafaive, supra et Weinberg (1969), 14 C.B.R. (N.É.) 182 (C.S. Ont.); voir aussi Rizzo Shoes (1989) Limited (1995), 29 C.B.R. (3e) 270 et Keystone Forest Products Limited v. Garibaldi Building Supplies Ltd. (Receiver of) (1995), 32 C.B.R. (33e) 139. Il convient de souligner que dans Rizzo et Keystone, le tribunal a exprimé sa réticence à prolonger les délais, en précisant toutefois que la prolongation pourrait être autorisée si les circonstances le justifiaient.

[57] Il convient de commenter davantage une décision. Dans IDG Environmental Solutions Inc. (1993), 16 C.B.R. (3e) 317 (Règl. Ont.) (« IDG »), le tribunal a statué qu’il ne pouvait accorder aucune prolongation après le délai pour le dépôt de l’état de l’évolution de l’encaisse en vertu de paragraphe 187(11).

[58] Dans cette affaire, IDG avait présenté le 31 décembre 1992 un avis d’intention de déposer une proposition. L’état de l’évolution de l’encaisse n’a été déposé que le 15 janvier 1993.

[59] Le paragraphe 50.4(2) de la LFI stipule que « dans les dix jours suivant le dépôt de l’avis d’intention […], la personne insolvable dépose […] auprès du séquestre officiel » un état de l’évolution de l’encaisse et les autres documents prévus au paragraphe.

[60] Le registraire Ferron a mentionné que contrairement au paragraphe 50.4(9), le paragraphe 50.4(2) ne prévoit aucune prolongation du délai pour le dépôt des documents. Il faut donc invoquer d’autres dispositions de la LFI pour pouvoir prolonger le délai. Le registraire a ensuite fait référence au paragraphe 187(11) :

[Traduction]

[7] J’estime que ce paragraphe ne s’applique pas ici. Le paragraphe 187(11) s’applique uniquement dans les cas où aucun événement prévu par la loi ne se produit entre-temps en conséquence du défaut. Or, dans cette affaire, un événement très important se produit, soit la faillite du débiteur. (italiques ajoutés)

[9] Dans les circonstances, la faillite de la personne insolvable est automatique et, par l’effet de la loi, immédiate à l’expiration des 10 jours suivant le dépôt de l’avis d’intention dans les cas où l’état de l’évolution de l’encaisse n’est pas déposé. Aucune requête ni aucune action de quiconque n’est requise pour que la personne insolvable soit réputée faillie.

[12] À l’heure actuelle, c’est-à-dire à la date de la requête, la personne insolvable est en faillite, des droits sont reconnus et ses actifs ont été dévolus. Un tribunal qui rendrait une ordonnance nunc pro tunc prolongeant le délai pour tenter de remédier au défaut après le dépôt de l’état de l’évolution de l’encaisse mettrait fin à une cession et abrogerait les droits – acquis ou découlant de la faillite – des créanciers et d’autres parties. C’est ce qui, comme l’a souligné la Cour, devient l’événement se produisant en conséquence de l’expiration des dix jours mentionnés au paragraphe 2.

[62] En revanche, dans les dispositions invoquées par la surintendante pour demander la prolongation, il n’y a aucun événement entraînant une faillite. L’événement dont a fait état le registraire Ferron en lien avec le paragraphe 50.4(8) n’existe pas dans les circonstances décrites par la surintendante.

[62] Il est d’ailleurs significatif que l’obligation prévue au paragraphe 50.4(2) incombe à la personne présentant la proposition, alors que l’obligation contenue à l’article 66.15 incombe aux SAI. Il semblerait injuste que, dans le cas d’une faillite automatique, le consommateur subisse la conséquence liée au défaut pour une infraction au paragraphe 50.4(2) alors que c’est un administrateur qui n’a pas accompli une action requise en vertu de l’article 66.15.

[63] En outre, dans Casa Verde Health Centre Inc. (1993), 22 C.B.R. (3e) 24, le juge Ground de la Cour de l’Ontario (Division générale), sans donner de motifs, a prolongé le délai pour déposer l’état de l’évolution de l’encaisse nunc pro tunc, vraisemblablement en s’appuyant sur le paragraphe 187(11) pour rendre l’ordonnance.

[64] Compte tenu des circonstances exposées par la surintendante dans sa requête, la Cour estime qu’il est approprié d’autoriser la mesure d’allègement demandée pour prolonger les délais.

[65] Il est également possible d’autoriser les mesures d’allègement demandées en exerçant la compétence inhérente du tribunal. La compétence inhérente des cours supérieures de justice provinciales constitue un pouvoir vaste et diversifié. On a déjà dit qu’il s’agit d’un pouvoir pouvant être exercé [traduction] « dans toute situation où la justice l’exige » (Gillespie v. Manitoba [Atty. Gen.], 2000 MBCA 1, par. 92), et que [traduction] « rien ne devrait être en dehors de la compétence de la Cour supérieure, hormis ce qui semble expressément y échapper » (Board v. Board [1919] A. C., 956, par. 1718, vicomte Haldane).

[66] Récemment, la Cour suprême du Canada a examiné la compétence inhérente des cours supérieures dans Endean c. Colombie-Britannique, 2016 CSC 42 :

[23] La compétence inhérente des cours supérieures est cruciale au regard du rôle qui leur est confié, à elles qui constituent la pierre angulaire de notre système judiciaire. Cette compétence procède de la nature même de ces tribunaux en tant que cours supérieures de justice. On peut la définir comme une [traduction] « réserve ou [un] fonds de pouvoirs » ou une « source résiduelle de pouvoirs » à laquelle une cour supérieure « peut puiser au besoin lorsqu’il est juste ou équitable de le faire et, en particulier, pour veiller à l’application régulière de la loi, empêcher les abus, garantir un procès équitable aux parties et rendre justice » : I. H. Jacob, « The Inherent Jurisdiction of the Court » (1970), 23 Curr. Legal Probs. 23, p. 51, cité et approuvé, p. ex., dans les arrêts Ontario c. Criminal Lawyers’ Association of Ontario, 2013 CSC 43, [2013] 3 R.C.S. 3, par. 20; R. c. Caron, 2011 CSC 5, [2011] 1 R.C.S. 78, par. 24; et MacMillan Bloedel Ltd. c. Simpson, [1995] 4 R.C.S. 725, par. 29-31.

[67] L’ambigüité de la doctrine est compliquée par le fait que la pandémie de COVID19 constitue une crise de santé publique inédite qui pose un défi en constante évolution pour l’administration de la Cour supérieur de justice de l’Ontario.

[68] Dans 80 Wellesley St. E., Ltd. v. Fundy Bay Builders Ltd., [1972] 2 O.R. 280 (C.A.), affaire souvent citée, la Cour d’appel de l’Ontario a statué que, sous réserve de dispositions contraires expressément prévues, la compétence inhérente du tribunal est sans limites et sans restrictions en droit substantiel et dans les affaires civiles. La Cour d’appel a établi le fondement jurisprudentiel de cette décision :

[Traduction]

Dans Michie Estate and City of Toronto et al., [1968] 1 O.R. 266 aux pages 268 et 269, 66 D.L.R. (2e) 213, aux pages 215 et 216, le juge Stark, après avoir examiné les dispositions pertinentes de la Judicature Act, de même que la jurisprudence et la doctrine, a affirmé ce qui suit :

Il semble clair que la Cour suprême de l’Ontario possède une compétence étendue et universelle sur toutes les questions de droit substantiel, à moins que l’organe législatif ne la prive de sa compétence universelle en adoptant des dispositions législatives sans équivoque. La règle de droit régissant la compétence des cours supérieures a été établie dès 1667 dans l’affaire Peacock v. Bell and Kendall (1667), 1 Wms. Saund. 73, à la page 74, 85 E.R. 84 :

(…) Et la règle en matière de compétence veut que rien n’est censé échapper à la compétence d’une cour supérieure à l’exclusion de ce qui semble y échapper expressément; et, inversement, que rien n’est censé relever de la compétence d’une cour inférieure à l’exclusion de ce qui fait l’objet d’allégations expressément formulées en ce sens. »

[69] Toutefois, la doctrine n’est pas illimitée : elle est soumise à des restrictions fondées sur la législation et sur l’objet. Ainsi, elle ne peut être appliquée en cas de contradiction avec une loi ou un règlement. Par ailleurs, la compétence inhérente se limite à tout exercice répondant à l’objet sous-jacent de la doctrine, c’est-à-dire régulariser et protéger l’administration de la justice. La compétence inhérente devrait être exercée « avec circonspection » – voir c. Caron, 2011, CSC 5, par. 28 [[sic]].

[70] Dans Endean, la Cour suprême affirme qu’un juge devrait déterminer la portée des pouvoirs expressément conférés par la loi « avant de s’aventurer dans cette zone – importante, mais nébuleuse – de pouvoirs résiduels » (Endean, par. 24) et d’exercer sa compétence inhérente. À la lumière de cette analyse, la Cour estime qu’il est à la fois nécessaire et approprié d’exercer sa compétence inhérente pour répondre à la requête de la surintendante.

[71] Dans les circonstances très exceptionnelles actuelles, la jurisprudence donne peu d’orientation. Nous faisons face à l’inconnu et devons trouver une réponse équitable et pratique.

c) Ordonnance s’appliquant à tous les dossiers d’insolvabilité actifs

[72] À la lumière de l’examen de la demande de mesures d’allègement pour prolonger les divers délais et appliquer l’ordonnance à tous les dossiers d’insolvabilité actifs ainsi qu’aux dossiers déposés auprès du BSF jusqu’au 30 juin 2020, la Cour n’a relevé aucune disposition législative interdisant expressément à une cour supérieure d’accéder à la demande de la surintendante. Contrairement à la situation observée dans IDG, il ne s’agit pas d’un manquement des administrateurs à leurs obligations qui entraîne automatiquement la faillite. Il y a un vide législatif entourant les événements, le cas échéant, découlant d’une omission d’accomplir une action.

[73] Ayant conclu qu’aucune disposition législative n’empêche d’autoriser les mesures d’allègement demandées, la Cour estime qu’il s’agit d’une occasion où il est approprié et nécessaire d’autoriser les mesures d’allègement demandées par la surintendante. Il ne faut toutefois pas oublier que la compétence inhérente doit être exercée avec circonspection, lorsqu’il est approprié et nécessaire d’autoriser les mesures d’allègement demandées par la surintendante.

Ordonnance prévoyant une dispense de l’obligation de signification

Fondement juridique de la compétence du tribunal : par. 187(12) de la LFI

[74] Enfin, la surintendante demande à la Cour de rendre une ordonnance prévoyant une dispense de l’obligation de signifier le dossier de requête à chaque partie intéressée et celle de le verser dans chaque dossier de la cour visé.

[75] Dans les circonstances actuelles, il est déraisonnable d’exiger que la surintendante donne avis de sa requête dans les 451 536 dossiers d’insolvabilité actifs – soit tous les dossiers de proposition de consommateur actifs, de propositions concordataires actives et de faillite actifs – renfermant chacun une liste de créanciers distincte. Il est donc justifié pour la Cour de prévoir une dispense de l’obligation de signification prévue dans la LFI.

[76] La Cour est convaincue qu’il est approprié de dispenser la surintendante des exigences de signification susmentionnée, conformément au paragraphe 187(12) de la LFI.

PARTIE V – Ordonnance demandée

[77] La surintendante demande respectueusement les mesures d’allègement exposées ciaprès.

[78] Pour les fins de la présente ordonnance :

  1. la « période d’urgence » commence le 13 mars 2020 et se termine le 30 juin 2020, étant entendu que les dates de début et de fin sont comprises dans cette période;
  2. la « période de suspension » commence à la date de l’ordonnance du tribunal et se termine le 30 juin 2020, étant entendu que les dates de début et de fin sont comprises dans cette période.
  3. toutes les « propositions concordataires actives » (propositions en vertu de la section I) s’entend de toutes les propositions en vertu de la section I déposées auprès du Bureau du surintendant des faillites (« le BSF ») jusqu’à la fin de la période d’urgence;
  4. toutes les « propositions de consommateur actives » (propositions en vertu de la section II) s’entend de toutes les propositions en vertu de la section II déposées auprès du BSF jusqu’à la fin de la période d’urgence, à l’exclusion des propositions en vertu de la section II qui ont été annulées ou présumées annulées ou qui ont été entièrement exécutées le jour ou avant le jour du prononcé de la présente ordonnance;
  5. tous les « dossiers de faillite actifs » s’entend de tous les dossiers de faillite déposés auprès du BSF jusqu’à la fin de la période d’urgence, à l’exclusion des dossiers de faillite pour lesquels le failli a obtenu sa libération le jour ou avant le jour du prononcé de la présente ordonnance.

Affaires applicables aux propositions concordataires actives

  • Le délai prévu à l’article 51 de la LFI pour la tenue d’une assemblée de créanciers devant avoir lieu durant la période d’urgence soit prolongé par la période de suspension.

Affaires applicables aux propositions de consommateur actives

  • Le délai prévu à l’article 66.15 de la LFI pour la tenue d’une assemblée de créanciers devant avoir lieu durant la période d’urgence soit prolongé par la période de suspension.
  • Aucune proposition de consommateur active ne sera présumée annulée en vertu de l’article 66.31 de la LFI, à moins que le débiteur consommateur ne soit en défaut :
    1. dans le cas où les paiements prévus par la proposition de consommateur active doivent être effectués mensuellement ou plus fréquemment, le jour où le débiteur consommateur est en défaut de payer un montant représentant à au moins trois versements, plus un montant additionnel équivalent à trois versements en lien avec des défauts survenus entre le 13 mars 2020 et le 31 décembre 2020; ou
    2. dans le cas où les paiements prévus par la proposition de consommateur active doivent être effectués moins fréquemment que mensuellement, à l’expiration d’un délai de trois mois après le jour où le débiteur consommateur a été en défaut de payer tout montant à l’exception des paiements dus entre la période du 13 mars 2020 et le 31 décembre 2020, soit six mois suivants la date à laquelle le débiteur consommateur est en défaut.

Affaires applicables aux dossiers de faillite actifs :

  • L’obligation incombant au syndic de demander sans délai au tribunal une date d’audience durant la période d’urgence, en vertu du paragraphe 170.1(3) de la LFI, fera l’objet d’une prolongation correspondant à la période de suspension.
  • Le délai prévu à l’article 102 de la LFI pour la tenue d’une assemblée des créanciers devant avoir lieu durant la période d’urgence fera l’objet d’une prolongation correspondant à la période de suspension.
  • Les délais prévus aux paragraphes 105(4) et (10) des Règles générales pour la fixation d’une séance de médiation devant avoir lieu durant la période d’urgence feront l’objet d’une prolongation correspondant à la période de suspension.
  • Toute partie intéressée pourra demander au tribunal de mettre fin aux mesures d’allègement prévues dans la présente ordonnance à l’égard de toute procédure en donnant un avis de cinq jours au syndic, au BSF et à toute autre partie susceptible d’être touchée par l’ordonnance demandée.

PARTIE VI – Disposition

[79] En conséquence, les mesures d’allègement demandées par la surintendante sont accueillies. Une ordonnance à cet effet a été signée.

[80] À l’exception de l’avis à Stephen Podgurski, les ordonnances ont été rendues sans avis aux créanciers ou aux débiteurs touchés dans le contexte des requêtes de substitution de syndics.

[81] La publication de l’ordonnance sur le site Web du BSF est suffisante dans les circonstances actuelles pour aviser les parties intéressées de leurs droits découlant de l’ordonnance de la Cour.

[82] La Cour remercie les procureurs pour leurs observations fort utiles.

[83] Compte tenu du fait que la requête a été accueillie, la Cour ordonne que ces motifs soient portés à l’attention des ministères touchés, à des fins d’information dans l’éventualité où les mesures d’allègement seraient nécessaires audelà du 30 juin 2020.

 

 

 

 

_______« G.B. Morawetz, J.C. »

Juge en chef G.B. Morawetz

 

Date : Le 27 avril 2020 


Annexe A - Textes législatifs

Loi sur la faillite et l’insolvabilité

Convocation d'une assemblée des créanciers

51 (1) Le syndic convoque immédiatement une assemblée des créanciers - qui doit avoir lieu dans les vingt et un jours suivant le dépôt de la proposition auprès du séquestre officiel aux termes du paragraphe 62(1) - en adressant, de la manière prescrite, à chaque créancier connu et au séquestre officiel, au moins dix jours avant
l'assemblée, les documents suivants :

Assemblée des créanciers

66.15 (1) Le séquestre officiel peut, dans les quarantecinq jours suivant le dépôt de la proposition de consommateur, enjoindre à l'administrateur de convoquer une assemblée des créanciers.

Idem

(2) L'administrateur convoque une assemblée des créanciers:

a) soit dès que le séquestre officiel lui enjoint de le faire aux termes du paragraphe ( 1 );

b) soit à l'expiration des quarante-cinq jours suivant le dépôt de la proposition, si des créanciers représentant en valeur au moins vingt-cinq pour cent des réclamations prouvées lui en font alors la demande.

L'assemblée doit avoir lieu dans les vingt et un jours suivant sa convocation.

Annulation présumée - défaut de paiement

66.31 (1) À moins que le tribunal n'en ait décidé autrement ou qu'une modification de la proposition n'ait été déposée antérieurement, la proposition de consommateur est réputée être annulée:

a) dans le cas où les paiements prévus par la proposition doivent être effectués mensuellement ou plus fréquemment, le jour où le débiteur est en défaut pour une somme correspondant à au moins trois de ces paiements;

b) dans le cas où les paiements doivent être effectués
moins fréquemment que mensuellement, à l'expiration d'un délai de trois mois suivant le jour où le débiteur est en défaut par rapport à n'importe quel paiement.  

Première assemblée des créanciers

102 (1) Sous réserve du paragraphe (1.1), il incombe au syndic de se renseigner sur les noms et adresses des créanciers du failli et, dans les cinq jours qui suivent la date de sa nomination, il adresse, de la manière prescrite, au failli, à tout créancier connu, ainsi qu'au surintendant, un avis de la faillite, en la forme prescrite, et de la première assemblée des créanciers devant être tenue au bureau du séquestre officiel de la localité du failli, dans les vingt et un jours suivant la nomination du syndic, mais, s'il l'estime utile, le séquestre officiel peut autoriser la tenue de l'assemblée au bureau de tout autre séquestre officiel, ou à l'endroit que le séquestre officiel peut fixer. 

À jour au 2 avril 2020
Dernière modification le 1 novembre 2019

Faillite et insolvabilité
PARTIE V Administration des actifs
Assemblées des créanciers
Article 102

170.1

Convocation par le tribunal

(3) En cas d'échec de la médiation ou de manquement du failli aux conditions prévues par l'entente consécutive à la médiation, le syndic demande sans délai au tribunal de fixer une date d'audience à tenir dans les trente jours suivant la date de convocation ou à la date postérieure que le tribunal peut fixer, les dispositions de la présente partie relatives aux demandes de libération s'appliquant avec les adaptations nécessaires.

187

Le tribunal peut prolonger le délai

(11) Lorsque la présente loi restreint le délai fixé pour accomplir une action ou chose, le tribunal peut prolonger ce délai, avant ou après son expiration, aux termes, s'il en est, qu'il estime utile d'imposer. 

Le tribunal peut dispenser de certaines exigences concernant les avis

(12) Lorsque, de l'avis du tribunal, les frais qu'entraîne la préparation de déclarations, de listes de créanciers ou d'autres documents dont la présente loi exige l'expédition avec les avis aux créanciers, ou lorsque les frais d'envoi de pareils documents ou avis ne sont pas justifiables dans les circonstances, le tribunal peut permettre d'omettre ces documents ou d'en omettre une partie ou d'expédier les documents ou avis de la façon qu'il estime indiquée.

L.R. (1985), ch . B-3, art. 187; 1992, ch. 1, art. 20, ch. 27, art. 66; 2004, ch. 25, art. 87.

Règles générales sur la faillite et l’insolvabilité

105

(4) Sur réception d'une demande de médiation d'un syndic conformément aux paragraphes 68(6) ou (7) ou 170. 1(1) de la Loi, accompagnée de l'état des revenus et dépenses le plus récent établi par le failli en la forme prescrite, le séquestre officiel confie le dossier au médiateur qui fixe les date, heure et lieu de la médiation. La médiation a lieu dans les 45 jours suivant la réception par le séquestre officiel de la demande de médiation.

(10) En cas de report ou d'ajournement de la médiation, la nouvelle date se situe dans les 10 jours suivant celui où la médiation a été reportée ou ajournée.