Document de consultation : Consultation sur le droit d'auteur à l'ère de l'intelligence artificielle générative

1. Introduction : Un marché en transformation

Le marché numérique a récemment subi une transformation avec la prolifération de systèmes d'intelligence artificielle (IA) générative et leur utilisation massive par le public. Ces systèmes peuvent générer de nouveaux contenus créatifs sous une grande variété de formes et même de qualité comparable à celle d'œuvres créées par de talentueux artistes. Ils peuvent notamment générer des textes (p. ex. ChatGPT), des images (p. ex. DALL-E), et de la musique (p. ex. MusicGen), souvent déclenchés par de courtes instructions des utilisateursNote de bas de page 1. Les systèmes d'IA générative fonctionnent au moyen de modèles entraînés à partir de vastes ensembles de données, qu'il s'agisse de textes, d'images ou d'autres types de données. Ces modèles, grâce à diverses techniques d'apprentissage automatique, permettent de construire une représentation des tendances identifiées dans les données d'entraînementNote de bas de page 2.

Dans la foulée d'une utilisation généralisée d'outils d'IA générative, de plus en plus d'intervenants des industries créatives soulèvent des préoccupations quant aux répercussions de cette technologie sur le cadre du droit d'auteur. Un certain nombre d'intervenants considèrent que l'IA mine la capacité des titulaires de droits de consentir à l'utilisation de leurs œuvres, de recevoir le crédit qui leur est dû ainsi qu'une juste rémunérationNote de bas de page 3. Ils se préoccupent plus particulièrement de l'utilisation non rémunérée d'œuvres protégées par le droit d'auteur dans le développement des systèmes d'IA, par la possibilité que les contenus générés par l'IA violent les droits d'auteur d'œuvres existantes, et par le manque de recours légaux concrets pour les titulaires de droitsNote de bas de page 4. La récente évolution des technologies d'IA survient dans un contexte où le virage numérique posait déjà d'importants défis pour les industries créatives, un secteur dont la contribution à l'économie canadienne s'est élevée à environ 60 milliards de dollars en 2022Note de bas de page 5.

Pour sa part, une grande partie de l'industrie de l'IA continue d'exprimer des préoccupations quant à l'incertitude entourant l'application du cadre du droit d'auteur dans le contexte de l'IA. Selon certains intervenants de l'industrie de l'IA et certains chercheurs, cette incertitude pourrait avoir pour effet de refroidir les investissements à l'échelle nationale, en plus de freiner la capacité du Canada de saisir les occasions dans ce domaine, notamment en tant que destination pour le développement et l'entraînement des modèles d'IANote de bas de page 6. Grâce à la Stratégie pancanadienne en matière d'intelligence artificielle, le gouvernement a positionné le Canada comme un chef de file mondial de l'IA. Cette stratégie a été lancée en 2017 avec un investissement initial de 125 millions de dollars, et le gouvernement a continué d'y investir des fonds, dont 443,8 millions de dollars annoncés en 2021Note de bas de page 7. Ces investissements financent des organisations comme Scale AI, un consortium dirigé par des entreprises qui travaille sur des chaînes d'approvisionnement fondées sur l'IA au Canada. Le consortium Scale AI a le potentiel d'apporter une contribution de plus de 16,5 milliards de dollars à l'économie canadienne d'ici 2028 et de créer plus de 16 000 nouveaux emplois hautement spécialisésNote de bas de page 8.

Alors que les industries créatives commencent à subir directement les répercussions de l'IA générative en raison de la mise en marché de systèmes d'IA de plus en plus perfectionnés, le gouvernement cherche à mobiliser davantage les intervenants et la population canadienne sur les questions de politique relatives au droit d'auteur en ce qui concerne l'IA. Au cours des dernières années, l'intersection des technologies d'IA et du droit d'auteur a été au cœur de consultationsNote de bas de page 9 et de travaux législatifsNote de bas de page 10, mais aussi d'un certain nombre de poursuites judiciaires dans plusieurs paysNote de bas de page 11. Cette question continue d'ailleurs de susciter de vives discussions à l'échelle mondiale. En 2021, le gouvernement du Canada a mené une Consultation sur un cadre moderne du droit d'auteur pour l'intelligence artificielle et l'Internet des objets, où l'on demandait aux intervenants de fournir des commentaires sur trois ensembles de questions de politique ayant trait à l'IANote de bas de page 12 :

  • Fouille de textes et de données – c.-à-d. si des modifications devraient être apportées pour clarifier la façon dont le cadre du droit d'auteur s'applique à l'utilisation d'œuvres et d'autres objets (p. ex. prestation d'un artiste-interprète ou un enregistrement sonore) protégés par le droit d'auteur dans l'entraînement des systèmes d'IA;
  • Titularité et propriété des œuvres produites par l'IA – c.-à-d. comment le cadre du droit d'auteur devrait s'appliquer aux œuvres produites par l'IA ou créées avec l'aide de l'IA;
  • Violation et responsabilité en matière d'IA – p. ex. déterminer les personnes responsables lorsque des œuvres générées par l'IA violent les droits d'œuvres protégées par le droit d'auteur.

Le gouvernement a reçu 38 mémoires portant sur au moins un de ces domainesNote de bas de page 13. Les intervenants ont largement commenté l'utilisation d'œuvres protégées par le droit d'auteur aux fins de l'entraînement des systèmes d'IA. Les intervenants du secteur des technologies, les chercheurs et les groupes d'utilisateurs ont généralement plaidé en faveur d'une exception à la violation du droit d'auteur, étant d'avis que l'utilisation d'œuvres dans le cadre des activités de fouille de textes et de données (FTD) ne devait pas nécessiter d'autorisation supplémentaire de la part des titulaires de droitsNote de bas de page 14. Les intervenants des industries créatives étaient toutefois d'avis qu'une telle exception n'était pas souhaitable, car elle empêcherait les titulaires de droits d'obtenir une juste rémunération pour l'utilisation de leurs œuvres dans le cadre des activités de FTDNote de bas de page 15. En ce qui concerne les deux autres ensembles de questions de politique, plusieurs intervenants étaient d'avis qu'il était trop tôt pour prendre position au sujet de la titularité et de la propriété des œuvres produites par l'IA, et très peu de mémoires ont abordé les questions concernant la violation du droit d'auteur et la responsabilité qui en découle que soulève l'IA.

Depuis la consultation de 2021, le gouvernement est demeuré actif et engagé à l'égard des questions de politique liées à l'IA. En juin 2022, il a déposé au Parlement la Loi sur l'intelligence artificielle et les données (LIAD) au moyen du projet de loi C-27, lequel comprend un certain nombre d'obligations pour le développement et le déploiement responsables de l'IA au CanadaNote de bas de page 16. En réponse à l'évolution rapide de l'IA générative, le Canada a lancé une consultation en août 2023, et a récemment publié un code de conduite pour le développement et la gestion de systèmes d'IA générativeNote de bas de page 17. Alors que la LIAD établirait des normes intersectorielles générales pour le développement, le déploiement et l'utilisation de l'IA au Canada, sa portée consisterait à compléter les cadres juridiques existants, dont le cadre du droit d'auteur, et non à servir de mécanisme pour répondre aux nombreuses préoccupations concernant l'incidence de l'IA sur le contenu créatif.

1.1 Objectif de cette consultation

La présente consultation a pour objectif de poursuivre l'important travail de recherche des faits déjà entamé, plus particulièrement en vue d'éclairer la politique sur le droit d'auteur à une époque où le contenu, même s'il peut sembler créatif et original, peut être facilement généré par un système d'IA. Les Canadiennes et Canadiens sont donc invités à réfléchir aux différents éléments de la politique sur le droit d'auteur à la lumière de leur plus récente expérience de l'IA générative. Le présent document reprend la Section 2 du document de consultation de 2021Note de bas de page 18, en y apportant certaines modifications afin de refléter les événements qui se sont produits depuis. Il est à noter que bien que le marché et les technologies aient évolué depuis 2021, les questions de politique sur le droit d'auteur demeurent essentiellement les mêmes. Bien que la présente consultation se concentre sur ces questions de droit d'auteur, le gouvernement reconnaît que certains intervenants ont soulevé des préoccupations quant aux répercussions de l'IA sur les créateurs et les industries créatives qui vont également au-delà du droit d'auteur en tant que tel.

Le gouvernement invite les intervenants à faire part de leurs points de vue sur les orientations stratégiques en matière de droit d'auteur qui sont décrites dans le présent document, ainsi que sur les éléments de preuve de nature technique. Les types de preuves techniques recherchées dans le cadre de cette consultation comprennent des renseignements sur : la façon dont le contenu protégé par le droit d'auteur est recueilli et encodé dans les ensembles de données d'entraînement; la façon dont les ensembles de données d'entraînement sont utilisés dans le développement de systèmes d'IA; la question de savoir si les ensembles de données d'entraînement font partie des systèmes d'IA une fois l'entraînement terminé; la participation des humains au développement et au déploiement des systèmes d'IA; et la façon dont les entreprises et les consommateurs utilisent les systèmes d'IA ainsi que les œuvres assistées ou générées par l'IA. De plus, le gouvernement sollicite des commentaires sur les développements législatifs et jurisprudentiels liés à l'IA et au droit d'auteur dans d'autres pays, car le Canada demeure à l'affût des approches qu'adopte la communauté de droit d'auteur à l'échelle mondiale et qui pourraient répondre aux besoins d'un marché du droit d'auteur fonctionnel.

Dans son examen des options stratégiques liées au droit d'auteur en ce qui concerne l'IA, le gouvernement recherchera un équilibre entre les deux principaux objectifs suivants :

  • Appuyer l'innovation et l'investissement dans l'IA et d'autres technologies numériques et émergentes dans tous les secteurs au Canada. L'IA a un potentiel énorme pour la société si elle est utilisée de façon éthique et responsable, et pourrait également stimuler la croissance de la productivité dans l'ensemble de l'économie.
  • Appuyer les industries créatives du Canada et préserver l'incitation à créer et à investir prévue par les droits énoncés dans la Loi sur le droit d'auteur (la Loi) au Canada y compris afin d'être rémunérés adéquatement pour toute utilisation d'œuvres ou d'autres objets du droit d'auteur.

2. Discussion

Les développements dans le domaine de l'IA soulèvent un large éventail de questions de politique relatives au droit d'auteur qui ont une incidence sur l'innovation, l'investissement et la rémunération des titulaires de droits d'auteur au Canada. Étant donné que l'essor de l'IA générative est le motif principal de cette consultation, ce document se concentre sur les systèmes d'IA qui utilisent des modèles d'apprentissage automatiqueNote de bas de page 19.

Les principales questions liées à la politique du droit d'auteur peuvent être regroupées en trois catégories. La première catégorie porte sur la fouille de textes et de données (FTD) et l'entraînement des modèles d'apprentissage automatique, qui nécessitent la reproduction de grandes quantités de données, y compris celles extraites de contenus protégés par le droit d'auteur (section 2.1). Cela comprend des questions sur l'impact sur les titulaires de droits en vertu de la Loi, y compris le moment et la manière dont les titulaires de droits pourraient ou devraient être rémunérés pour l'utilisation de contenus protégés par le droit d'auteur comme intrants dans le développement de l'IA. La deuxième catégorie porte sur la capacité croissante des systèmes d'IA de générer ou d'aider à générer du contenu créatif, dont des textes, des images et de la musique (section 2.2.). Cela comprend des questions sur la manière d'attribuer et de déterminer la protection de droit d'auteur sur le contenu généré par l'IA et le contenu créé avec l'aide de l'IA. La troisième catégorie porte sur l'utilisation et la commercialisation de systèmes d'IA, ainsi que la responsabilité en cas de violation au droit d'auteur (section 2.3). Cela comprend des questions concernant la détermination des personnes responsables lorsque le contenu généré par l'IA porte atteinte à des œuvres protégées par le droit d'auteur.

2.1 Fouille de textes et de données (FTD)

La fouille de textes et de données (FTD) consiste en la reproduction et l'analyse de grandes quantités de données et d'informations, y compris celles extraites de contenus protégés par le droit d'auteur, afin d'identifier des tendances et de faire des prédictionsNote de bas de page 20. La FTD est une étape essentielle dans la formation de modèles d'apprentissage automatiqueNote de bas de page 21. Cette technique permet au modèle « d'apprendre » à reconnaître et à reproduire des tendances qui lui permettront d'accomplir certaines tâches, notamment de générer de la poésie, de la musique ou des œuvres d'art. Au-delà de l'IA générative, la FTD peut également faire progresser la science et aider les entreprises à résoudre des problèmes, à innover et à créer davantage de valeur.

Suite à l'essor des outils d'IA générative tels que ChatGPT et DALL-E, plusieurs titulaires de droits ont exprimé des inquiétudes croissantes concernant l'utilisation de contenus protégés par le droit d'auteur par les développeurs dans la formation de modèles d'apprentissage automatique, sans que les titulaires de droits y consentent ou reçoivent le crédit et la compensation qui leur sont dusNote de bas de page 22. Certains titulaires de droits ont commencé à proposer des licences pour la FTDNote de bas de page 23, mais il reste difficile de faire valoir leurs droits et d'obtenir une rémunération pour l'utilisation de contenus protégés par le droit d'auteur dans le cadre des activités FTD. D'un autre côté, l'industrie de l'IA souligne les opportunités économiques pour le Canada et soutient que le cadre du droit d'auteur devrait permettre l'utilisation de contenu protégé par le droit d'auteur pour la formation de modèles d'apprentissage automatique. En raison de la grande quantité de données souvent impliquées dans la formation de tels modèles, en particulier lorsqu'elles proviennent d'Internet, l'obtention de toute autorisation nécessaire auprès des titulaires de droits pour reproduire des œuvres ou d'autres objets dans le cadre de ces activités pourrait représenter un fardeau importantNote de bas de page 24.

Alors que le gouvernement vise à équilibrer la promotion de l'innovation et de la créativité, la principale question de politique en matière de droit d'auteur soulevée dans cette section est de savoir si des modifications devraient être introduites dans la Loi pour clarifier comment le cadre du droit d'auteur s'applique aux activités de FTD et, le cas échéant, quels devraient être ces modifications. Plus précisément, le gouvernement cherche à mieux comprendre comment la Loi pourrait ou devrait répondre aux préoccupations soulevées par les créateurs, tout en s'assurant qu'elle ne représente pas un obstacle majeur à l'innovation en matière d'IA. La Loi existe pour promouvoir la création et la distribution de contenu, pour favoriser l'investissement et la création d'emplois, pour promouvoir une juste récompense pour les créateurs, et pour créer un marché prospère qui offre aux consommateurs un choix et un accès à un contenu diversifiéNote de bas de page 25. La Loi atteint généralement cet équilibre en accordant aux auteurs des droits exclusifs sur leurs œuvres, qui empêchent les tiers de reproduire l'entièreté ou une partie substantielle des œuvres, tout en limitant ces droits au moyen de plusieurs exceptionsNote de bas de page 26.

Deux exceptions actuelles à la violation du droit d'auteur pourraient potentiellement s'appliquer dans le contexte de l'activité de FTD, soit 1) l'exception relative à l'utilisation équitable pour la recherche à l'article 29 et 2) l'exception relative aux reproductions temporaires pour les processus technologiques à l'article 30.71Note de bas de page 27. L'utilisation équitable permet l'utilisation de contenu protégé par le droit d'auteur qui pourrait autrement constituer une violation du droit d'auteur sous certaines conditionsNote de bas de page 28. Un tribunal canadien a appliqué cette exception dans le contexte d'une activité de FTD concernant un « robot Web ». Dans cette affaire, le robot recueillait des textes et des photos à partir de sites Web pour alimenter le propre site Web du défendeurNote de bas de page 29. Le tribunal a conclu que cette activité violait le droit d'auteur, toutefois, il est incertain que la même analyse puisse s'appliquer à d'autres types d'activités de FTD menées à des fins différentes.

Pour ce qui est de l'exception relative aux processus technologiques, la Commission du droit d'auteur du Canada a interprété cette disposition comme suit: « cette disposition vise les copies qui se font automatiquement ou sans le contrôle direct de l'utilisateur », et qui sont automatiquement supprimées une fois le processus technologique terminéNote de bas de page 30. Comme dans le cas de l'utilisation équitable, il y a une incertitude quant à savoir si et dans quelle mesure cette exception s'appliquerait à diverses activités de FTD. Par exemple, bien que certaines activités de FTD puissent exiger la production de copies éphémères, d'autres activités de FTD peuvent exiger que des copies d'ouvrages soient conservées indéfiniment, ce qui rendrait cette disposition inapplicable.

Outre les droits économiques, la Loi accorde également aux auteurs certains droits moraux sur leurs œuvres, y compris, compte tenu des usages raisonnables, le droit de se voir reconnaître comme auteur lorsque leur œuvre est reproduite ou utilisée d'autres manières énumérées. L'utilisation d'œuvres protégées par le droit d'auteur pour l'entraînement de systèmes d'IA peut donc soulever des questions quant au besoin de prévoir une obligation de divulguer le contenu utilisé dans le processus d'entraînement de l'IA. Toutefois, la tâche de distinguer le contenu protégé du contenu non protégé peut s'avérer difficile et soulève des questions quant à ce qui serait raisonnable dans les circonstances.

2.1.1 Mobilisation des intervenants – activités précédentes

En réponse à la consultation de 2021, les intervenants ont fourni de nombreux commentaires sur l'utilisation d'œuvres protégées par le droit pour l'entraînement des systèmes d'IA. Les intervenants du secteur des technologies, les chercheurs et les groupes d'utilisateurs étaient généralement d'avis qu'il fallait clarifier que l'utilisation des œuvres dans le cadre des activités de FTD ne devrait pas exiger l'autorisation supplémentaire des titulaires de droit, soit en élargissant l'exception relative à l'utilisation équitable ou en créant une nouvelle exception. Ils ont fait valoir que les activités de FTD ne s'inscrivent pas dans la portée de la protection du droit d'auteur, car le processus ne repose pas sur l'expression créative sous-jacente au contenu protégé par le droit d'auteur, ni n'exploite ce contenu. Ils soutiennent également que le fait de permettre l'accès à une plus grande variété de contenus plus récents et protégés par le droit d'auteur dans le développement des technologies d'IA contribuera à favoriser l'innovation et à réduire les biais dans les algorithmes d'IA qui résulteraient d'une utilisation de données d'entraînement se limitant au contenu du domaine publicNote de bas de page 31. Le contenu dans le domaine public ne reflète pas l'évolution de la sensibilité culturelle et la diversité des voix.

À l'inverse, les industries créatives ont fait valoir qu'une exception explicite à la violation du droit d'auteur pour les activités de FTD ne serait pas souhaitable, car elle empêcherait les titulaires de droits de recevoir une juste rémunération pour l'utilisation de leurs œuvres. Quoi qu'il en soit, ils étaient d'avis que toute modification à la Loi à cet égard serait prématurée, car cela pourrait nuire au développement de solutions d'octroi de licences sur le marché dans l'industrie naissante de l'IANote de bas de page 32.

Les points de vue des intervenants lors de la consultation de 2021 étaient très semblables à ceux exprimés devant le Comité permanent de l'industrie et de la technologie (INDU) lors de l'examen parlementaire de 2018-2019 relativement à la Loi sur le droit d'auteur. Les entreprises du secteur des technologies et les chercheurs estimaient que les exceptions existantes dans la Loi ne convenaient pas bien aux besoins de la FTDNote de bas de page 33. Pour leur part, la communauté des titulaires de droits ont formulé peu de commentaires au sujet de la FTD au cours de l'examen, mais ont généralement exprimé l'avis qu'il y a trop d'exceptions dans la Loi et que des exceptions supplémentaires pourraient les priver de revenus ou nuire à leur capacité d'exploiter leurs œuvresNote de bas de page 34.

2.1.2 Approches ailleurs dans le monde

Dans les dernières années, certains des principaux partenaires internationaux du Canada ont accru la clarté dans leur juridiction que l'utilisation d'œuvres protégées par le droit d'auteur dans le cadre de certaines activités de FTD ne viole pas le droit d'auteur. Certains ont choisi d'introduire dans leur législation des exceptions à la violation du droit d'auteur qui visent spécifiquement la FTD. Par exemple, le Japon et Singapour ont tous deux mis en œuvre des exceptions d'une large portée qui couvrent les activités de FTD, tandis que la Suisse et le Royaume-Uni ont mis en œuvre des exceptions plus restreintes qui se limitent aux activités de FTD menées, respectivement, à des fins de recherche scientifique et de recherche non commercialeNote de bas de page 35. Depuis juin 2023, le Royaume-Uni collabore également avec les utilisateurs et les titulaires de droits pour produire un code de pratique sur le droit d'auteur et l'IA qui aura pour but de faciliter l'accès à des licences pour la fouille de donnéesNote de bas de page 36.

En outre, l'Union européenne (UE) a adopté en 2019 une directive qui exige que ses États membres prévoient deux exceptions obligatoires en matière de FTD, l'une s'appliquant aux organismes de recherche et aux institutions du patrimoine culturel pour les activités de FTD à des fins de recherche scientifique (article 3), et l'autre s'appliquant à quiconque et pour toutes les autres utilisations (article 4). Les titulaires de droits peuvent choisir d'exclure leur contenu de l'application de l'exception élargie prévue à l'article 4, notamment par le biais de conditions contractuelles et au moyen de procédés lisibles par machine pour le contenu en ligneNote de bas de page 37.

Aux États-Unis, la législation sur le droit d'auteur ne prévoit aucune exception portant explicitement sur la FTD. Toutefois, certains tribunaux d'appel ont fourni des directives sur la mesure dans laquelle les copies faites dans le cadre d'activités de FTD constitueraient une utilisation équitableNote de bas de page 38. Des poursuites récemment engagées aux États-Unis par des créateurs de contenu pour l'utilisation de leurs œuvres dans l'entraînement des systèmes d'IA pourraient fournir des éclaircissements sur l'application du principe d'utilisation équitable dans ce contexteNote de bas de page 39. D'autres précisions sur cette question pourraient aussi découler de la consultation sur le droit d'auteur et l'IA qu'a lancée le US Copyright Office en août 2023, qui sollicite notamment les commentaires des intervenants au sujet de la FTDNote de bas de page 40.

Enfin, il est pertinent de noter qu'en décembre 2022, le ministère israélien de la Justice a émis un avis concluant qu'en dehors de certaines circonstances (p. ex. l'entraînement d'un système d'IA portant sur les œuvres d'un seul auteur), l'utilisation de contenus protégés par le droit d'auteur aux fins de FTD est autorisée dans la plupart des circonstances en vertu de ses doctrines existantes sur le droit d'auteur, et sera généralement couverte par sa doctrine d'utilisation équitableNote de bas de page 41.

2.1.3 Appel de données probantes et directions possibles pour le Canada

À la lumière de la récente évolution du marché ayant trait à l'utilisation des systèmes d'IA, le gouvernement cherche à obtenir plus d'information sur la nature des activités de FTD au Canada et à recueillir les points de vue des intervenants sur la question de savoir s'il est nécessaire d'apporter des clarifications au cadre du droit d'auteur en ce qui concerne les activités de FTD. À cette fin, le présent document de consultation énonce les questions suivantes qui se posent dans l'élaboration d'éventuelles mesures de politique du droit d'auteur concernant la FTD :

  • Que signifierait une plus grande clarté de la FTD dans le droit d'auteur au Canada pour l'industrie de l'IA et les industries créatives?
  • Des activités de FTD sont-elles menées au Canada? Pourquoi est-ce le cas ou non?
  • Les titulaires de droits font-ils face à des défis en ce qui concerne l'octroi de licences de leurs œuvres pour les activités de FTD? Le cas échéant, quelles sont la nature et la portée de ces défis?
  • Quels types de licences de droit d'auteur pour les activités de FTD sont proposés, et comment ces licences répondent-elles aux besoins des personnes qui mènent des activités de FTD?
  • Si le gouvernement devait clarifier la portée des activités permises de FTD, quelle devraient en être la portée et les mesures de sauvegarde? Quel serait l'impact d'une telle exception sur votre industrie et vos activités?
  • Les développeurs de systèmes d'IA devraient-ils être tenus de tenir des registres ou de divulguer les contenus protégés par le droit d'auteur qui ont été utilisés pour la formation des systèmes d'IA?
  • Quel niveau de rémunération serait approprié pour l'utilisation d'une œuvre dans les activités FTD?
  • Existe-t-il des approches en matière de FTD dans d'autres pays qui pourraient éclairer l'examen de cette question au Canada?

Tous les commentaires sur la question de savoir si et comment clarifier le traitement des activités FTD dans le cadre du droit d'auteur sont encouragés, y compris des idées supplémentaires, des analyses juridiques, ainsi que des preuves et données probantes.

2.2 Titularité et propriété des œuvres produites par l'IA

Grâce à la FTD de plus en plus sophistiquée, à l'apprentissage automatique et à d'autres progrès technologiques, l'IA peut maintenant créer du contenu qui est difficile à distinguer de celui créé par des personnes humaines. La création d'une œuvre ou d'un autre objet du droit d'auteur par l'IA peut comporter un certain degré d'apport humain, soit par les programmeurs ou les utilisateurs donnant des instructions à une application d'IA pour qu'elle exécute sa tâche. Par exemple, la génération de contenu créatif par les systèmes d'IA générative survient souvent à la suite de courtes instructions des utilisateurs. Au fil des années, la capacité des systèmes d'IA à générer de façon indépendante des œuvres ou d'autres objets du droit d'auteur a augmenté et cela devrait continuer. Il existe maintenant de nombreuses applications d'IA qui peuvent écrire des scénarios de films, des logiciels et de la musique avec peu d'apport humain au-delà du développement de l'IA elle-même.

Bien que la Loi ne définisse pas explicitement le terme « auteur », la jurisprudence canadienne sur le droit d'auteur laisse entendre qu'un auteur doit être une personne physique qui exerce son talent et son jugement dans la création de l'œuvre, reflétant le fait que la Loi lie la durée de protection à la vie et à la mort d'un auteurNote de bas de page 42. Un humain peut apporter suffisamment de compétences et de jugement dans une œuvre produite avec l'aide des technologies d'IA pour être considéré comme l'auteur de l'œuvre. Cependant, il est beaucoup moins probable que ce critère soit rempli pour les œuvres produites par des systèmes d'IA générative, tels que ChatGPT et DALL-E, générées uniquement à partir de courtes instructions données par des utilisateurs humains.

Ces développements rapides de la technologie de l'IA, combinés à son application florissante dans divers secteurs de l'économie, ont amené le gouvernement à se demander si la Loi est adaptée pour répondre aux questions de la titularité et de la propriété des œuvres produites par l'IA ou assistées par l'IA. De plus, même si la Loi est appropriée pour traiter de ces questions, le gouvernement examine si des précisions supplémentaires concernant la titularité et la propriété de ces œuvres pourraient être fournies pour créer plus de certitude sur le marché. En examinant ces questions, le gouvernement vise à s'assurer que la Loi appuie les créateurs et les industries créatives au Canada, la compétitivité du Canada en matière d'IA, tout en favorisant l'innovation et l'accès au contenu créatif.

Comme nous l'expliquons plus en détail ci-dessous, il pourrait y avoir des façons de clarifier la propriété initiale des œuvres produites par l'IA ou assistées par l'IA en réexaminant la façon de définir un auteur, ou même sans se fonder sur le concept d' « auteur »Note de bas de page 43. Pour certaines œuvres (p. ex. des œuvres d'employés) et d'autres objets du droit d'auteur (p. ex. une prestation ou un enregistrement sonore), la Loi prévoit déjà un premier titulaire du droit d'auteur autre qu'un auteurNote de bas de page 44. Toutefois, compte tenu des divers degrés de contribution humaine au développement et à l'utilisation des technologies d'IA, la question de déterminer qui seraient les auteurs et premiers titulaires appropriés d'œuvres générées ou assistées par l'IA (p. ex. entre les personnes qui développent, déploient ou utilisent l'IA) demeure ouverteNote de bas de page 45.

2.2.1 Mobilisation des intervenants – activités précédentes

En réponse à la consultation de 2021, un large éventail d'intervenants ont fait valoir que le fait d'accorder une protection aux œuvres générées par l'IA irait à l'encontre de la promotion de la créativité humaine, un objectif qui est au cœur du cadre canadien du droit d'auteurNote de bas de page 46. Quoi qu'il en soit, de nombreux intervenants ont jugé qu'il serait prématuré, pour le Canada, de prendre position quant à la titularité et la propriété des œuvres générées par l'IA. Ils étaient d'avis que cet enjeu devrait plutôt être abordé une fois que le développement et le déploiement des systèmes d'IA auront atteint un état plus avancé, car une intervention précoce pourrait entraîner des conséquences imprévuesNote de bas de page 47. Certains de ces intervenants, y compris au sein des industries créatives, étaient toutefois ouverts à explorer la possibilité d'offrir une « légère » protection du droit d'auteur pour les œuvres générées par l'IA (p. ex. en s'inspirant des régimes de protection pour les autres objets du droit d'auteur) dans les cas où les circonstances le justifieraientNote de bas de page 48. Seulement quatre mémoires reçus appuyaient véritablement une forme de protection du droit d'auteur pour les œuvres générées par l'IA. Les points de vue des intervenants lors de la consultation de 2021 étaient semblables à ceux exprimés lors de l'examen parlementaire de 2018-2019 relatif à la Loi sur le droit d'auteurNote de bas de page 49.

Par ailleurs, il est pertinent de noter que depuis la consultation de 2021, certains universitaires et commentateurs ont soulevé des préoccupations au sujet de l'enregistrement par l'Office de la propriété intellectuelle du Canada (OPIC) d'œuvres générées par l'IANote de bas de page 50. L'enregistrement d'une œuvre au Canada fournit une preuve réfutable que cette œuvre est protégée par le droit d'auteur et que la personne qui l'enregistre est le titulaire de ce droit.Note de bas de page 51 Dans le cadre de l'administration du registre des droits d'auteur, l'OPIC n'examine pas les revendications formulées dans les demandes d'enregistrement des droits d'auteur.

2.2.2 Approches ailleurs dans le monde

Les approches dignes de mention dans d'autres juridictions pour régler les questions de titularité des œuvres générées par l'IA sont celles du Royaume-Uni, de l'Irlande et de la Nouvelle-Zélande, qui attribuent la titularité d'œuvres générées par ordinateur à la personne qui a pris les dispositions nécessaires à la création de l'œuvre créée. La Copyright Designs and Patents Act du Royaume-Uni stipule que « dans le cas d'une œuvre littéraire, dramatique, musicale ou artistique générée par ordinateur, l'auteur est considéré comme la personne qui prend les dispositions nécessaires à la création de l'œuvreNote de bas de page 52 » [notre traduction]. Récemment, l'UK Intellectual Property Office a lancé une consultation sur la question de l'IA et la propriété intellectuelle, sollicitant notamment les points de vue des intervenants au sujet de la protection du droit d'auteur pour des œuvres générées par ordinateur sans auteur humain. Le gouvernement du Royaume-Uni, dans sa réponse à cette consultation, a annoncé sa décision de ne pas modifier la législation existante, car il n'y avait aucune preuve à l'appui d'un quelconque préjudice que pourrait causer la protection d'œuvres générées par ordinateur, alors que l'utilisation de l'IA pour générer des contenus créatifs en était encore à une étape précoceNote de bas de page 53. Aux États-Unis, les œuvres réalisées sans aucune contribution créative de la part d'un être humain ne peuvent être protégées par le droit d'auteur, mais les œuvres contenant des éléments d'origine humaine combinés à des images générées par l'IA peuvent l'être, pour autant que les contributions de l'IA soient le résultat d'une conception mentale originale de la part de l'auteur.Note de bas de page 54

2.2.3 Appel de données probantes et approches possibles pour le Canada

Les capacités de l'IA de générer du contenu créatif continuent d'évoluer, avec des ramifications incertaines pour les créateurs, les titulaires de droits, les innovateurs et les utilisateurs de contenu. À la lumière de la récente évolution du marché ayant trait à l'utilisation de systèmes d'IA, le gouvernement invite les intervenants à faire part de leurs points de vue et à présenter des éléments de preuve en réponse aux questions suivantes :

  • L'incertitude entourant la titularité ou la propriété d'œuvres et d'autres objets du droit d'auteur produits par l'IA ou à l'aide de l'IA a-t-elle une incidence sur le développement et l'adoption de technologies d'IA? Si oui, comment?
  • Le gouvernement devrait-il proposer toute clarification ou modification du régime de titularité et de propriété pour tenir compte des œuvres générées par l'IA ou à l'aide de l'IA? Si oui, comment?
  • Existe-t-il des approches dans d'autres pays qui pourraient éclairer l'examen de cette question au Canada?

Le gouvernement sollicite les points de vue des intervenants sur trois approches que pourrait envisager le Canada afin de dissiper les incertitudes entourant la titularité et la propriété des œuvres générées par l'IA ou à l'aide de l'IA. Chacune de ces approches aurait des conséquences fondamentalement différentes pour le marché, et introduirait des questions de politique accessoires uniques à résoudre. Ces trois approches sont présentées à des fins de discussion et n'excluent pas d'autres approches possibles qui pourraient être révélées à la suite d'une analyse plus poussée et des réponses des intervenants aux questions ci-dessus.

  • Préciser que la protection de droit d'auteur ne s'applique qu'aux œuvres créées par des êtres humains. Grâce à cette approche, il serait clair que toute œuvre générée par l'IA sans la contribution créative minimum d'un auteur humain tomberait immédiatement dans le domaine public pour que d'autres l'utilisent sans permission requiseNote de bas de page 55. Cependant, lorsqu'un auteur humain utilise une IA pour produire une œuvre et, ce faisant, apporte son talent et son jugement à l'œuvre, ce dernier en serait l'auteur et le premier propriétaire, et l'œuvre ne tomberait pas immédiatement dans le domaine public. Bien que cette approche puisse apporter une certaine clarté pour les participants au marché et les tribunaux, la difficulté de distinguer les contributions humaines des contributions non humaines aux œuvres assistées par l'IA demeurerait un défi.
  • Attribuer la titularité d'œuvres générées par l'IA à la personne qui a pris les dispositions pour que l'œuvre soit créée. Cette approche serait similaire au cadre du droit d'auteur du Royaume-Uni. Pour ce faire, il faudrait établir des facteurs permettant de faire la distinction entre les œuvres créées à l'aide de l'IA qui respectent le seuil de la titularité humaine et celles qui ne le respectent pas. Cette approche pourrait faire en sorte que les œuvres générées par l'IA bénéficient de la même protection de droit d'auteur que les œuvres créées par des êtres humains.
  • Créer un nouvel ensemble de droits uniques pour les œuvres générées par l'IA. Une telle approche accorderait des droits économiques sur les œuvres générées par l'IA à une personne n'ayant fourni aucune contribution originale à de telles œuvres (p. ex. les personnes qui développent, déploient ou utilisent les systèmes d'IA), sans considérer cette personne comme un auteurNote de bas de page 56. Il faudrait des éléments de preuve supplémentaires pour établir quels droits nouveaux et différents subsisteraient dans de telles œuvresNote de bas de page 57, et pour guider un certain nombre de choix de politique, y compris la durée appropriée de la protection et les recours en cas de violation. La Loi comporte des précédents en ce qui concerne l'octroi de droits à des personnes autres que l'auteur d'une œuvre. Par exemple, la Loi accorde des droits au producteur d'un enregistrement sonore, c'est-à-dire la personne qui effectue la première fixation de sonsNote de bas de page 58.

Tous les commentaires sur la question de savoir si et comment clarifier la titularité et la propriété des œuvres générées par l'IA ou créées avec l'aide de l'IA dans le cadre du droit d'auteur sont encouragés, y compris des idées supplémentaires et d'autres approches possiblesNote de bas de page 59, des analyses juridiques et des preuves et données probantes.

2.3 Violation et responsabilité en matière d'IA

La violation et la responsabilité entourant les œuvres générées par l'IA constituent le troisième domaine de politique qui soulève des questions en matière de droit d'auteur. Compte tenu de la nouveauté des technologies de l'IA, les tribunaux canadiens n'ont pas encore rendu de jugement sur les questions relatives à la responsabilité en cas de violation pouvant découler de l'utilisation de l'IA, soit par les intrants utilisés pour former une IA, soit par les extrants générés par un système d'IA sous forme d'œuvres. Cette section se concentre sur la possibilité pour l'IA de générer des œuvres qui contreviennent au droit d'auteur d'autres œuvres, ou qu'une application d'IA elle-même soit considérée comme ayant violé un droit d'auteur.

Tout d'abord, il pourrait être difficile pour un titulaire de droit d'auteur, qui allègue une violation de l'application d'IA ou de l'œuvre générée par l'IA, d'identifier la ou les personnes responsables et d'établir la responsabilité devant un tribunal. La détermination de la responsabilité et de la violation peut devenir de plus en plus complexe à mesure que le niveau de participation humaine aux œuvres générées par l'IA diminue et que la capacité de l'IA à créer des œuvres de façon autonome augmente. Des incertitudes concernent les violations directes, mais aussi les violations à une étape ultérieure, qui se produisent lorsqu'une personne sait ou devrait savoir qu'une copie d'une œuvre constitue une violation du droit d'auteur et commet un geste en relation avec cette copie qui contrevient à la LoiNote de bas de page 60. Dans le contexte de l'IA, une violation à une étape ultérieure pourrait se produire lorsque les utilisateurs de l'IA distribuent un contenu qu'ils ont demandé à un système d'IA de générer, si ce contenu viole un droit d'auteur.

Une autre considération à cet égard est liée à l'établissement de la violation par reproduction. Le demandeur doit établir que la partie qui a violé le droit d'auteur a eu accès à l'œuvre originale, que l'œuvre originale était la source de la copie et qu'une partie importante de l'œuvre a été reproduiteNote de bas de page 61. L'IA présente de nombreux défis pour l'établissement de ces faits, car il peut être difficile de déterminer si un programmeur, un utilisateur, une autre partie ou l'IA elle-même a accédé à l'œuvre du demandeur dans le processus de création ou de contribution à la création d'une œuvre qui viole le droit d'auteur, et si l'accès par l'une de ces parties peut être imputé aux autres. Il peut être encore plus difficile d'établir qu'une partie importante d'une œuvre a été reproduite au cours de ce processus.

Dans ce contexte, le gouvernement demande aux intervenants de fournir des preuves supplémentaires pour aider à orienter l'examen de la question de savoir s'il faut modifier la Loi afin de fournir plus de clarté sur le marché. L'élimination de l'ambiguïté dans ces domaines stratégiques pourrait avoir un effet positif sur le marché, faciliter une application plus efficace du droit d'auteur et soutenir davantage l'innovation et l'investissement dans l'IA. Alors que des discussions internationales au sujet de la responsabilité d'une violation par une œuvre générée par l'IA ont lieu, dans plusieurs pays et à l'OMPI,Note de bas de page 62 aucun pays ne semble avoir apporté de modifications à sa loi sur le droit d'auteur afin de clarifier davantage la question de la violation et de la responsabilité en ce qui concerne l'IA.

2.3.1 Mobilisation des intervenants – activités précédentes

Le gouvernement sollicite particulièrement les points de vue des intervenants sur la responsabilité en cas de violation d'un droit d'auteur dans le contexte de l'IA, puisque dans le cadre de la consultation de 2021, seulement 12 mémoires ont abordé cette question, et ce, de façon très brève. Certains intervenants étaient d'avis que les dispositions actuelles de la Loi étaient suffisantes, tandis que d'autres ont indiqué que des éléments de preuve supplémentaires étaient nécessaires concernant les façons dont l'IA était utilisée avant de pouvoir examiner les régimes de violation et de responsabilité en matière de droit d'auteurNote de bas de page 63. Quelques intervenants ont toutefois fourni des points de vue plus détaillés. Un intervenant de l'industrie de la musique a suggéré la mise en œuvre d'une exigence de tenue de dossier pour les personnes participant au développement et au déploiement de systèmes d'IANote de bas de page 64. De plus, les associations de bibliothèques ont recommandé, en l'absence d'une protection des œuvres générées par l'IA, la mise en œuvre de mécanismes de contrôle pour s'assurer que tout contenu généré par l'IA qui porte atteinte au droit d'auteur d'une œuvre soit retiré de la circulation par le propriétaire du système d'IA ayant produit le contenuNote de bas de page 65.

2.3.2 Demande de données probantes concernant la responsabilité

Avant de considérer si le cadre du droit d'auteur du Canada devrait être clarifié concernant la violation par les applications d'IA, les œuvres générées par l'IA, et les œuvres créées avec l'aide de l'IA, ainsi que la responsabilité qui en découle, le gouvernement souhaite recevoir à la fois des preuves supplémentaires et des recommandations sur les mesures possibles. Pour faire progresser les discussions de politique, le gouvernement invite les intervenants à fournir des réponses aux questions suivantes :

  • Y a-t-il des préoccupations quant à l'application des critères juridiques existants pour démontrer qu'une œuvre générée par l'IA viole un droit d'auteur (p. ex. des contenus générés par l'IA qui incluent la reproduction complète ou une partie substantielle d'une œuvre utilisée aux fins d'activités de FTD menées sous licence ou d'une autre façon)?
  • Quels sont les obstacles lorsqu'il s'agit de déterminer si un système d'IA a accédé à un contenu précis qui est protégé par le droit d'auteur ou a copié ce contenu afin de générer l'extrant qui porte atteinte à ce droit?
  • Lorsqu'elles commercialisent des applications d'IA, quelles mesures les entreprises prennent-elles pour atténuer les risques de violation de droit d'auteur par des œuvres générées par l'IA?
  • Devrait-on clarifier davantage la responsabilité dans les cas où une œuvre générée par l'IA viole les droits d'une œuvre déjà protégée par le droit d'auteur?
  • Existe-t-il des approches dans d'autres pays qui pourraient éclairer l'examen de cette question au Canada?

Tous les commentaires sur la question de savoir si et comment clarifier la violation et la responsabilité en matière d'IA sont encouragés, y compris des idées supplémentaires, des analyses juridiques et des preuves et données probantes.

3. Conclusion

Le gouvernement invite tous les commentaires qui fournissent des points de vue ou des preuves supplémentaires concernant ces questions ou d'autres questions concernant les politiques de droit d'auteur liées à l'IA. Les commentaires pourraient comprendre des réactions aux approches possibles discutées, des suggestions d'autres options ou d'autres preuves et données probantes. Pour participer, veuillez soumettre vos commentaires dans notre formulaire de consultation en ligne au plus tard le 15 janvier 2024. L'utilisation de ce formulaire est nécessaire afin de faciliter l'accessibilité du contenu en temps opportun. Les commentaires reçus au moyen de ce formulaire seront rendus publics une fois la consultation terminée. Si vous avez des questions, veuillez communiquer avec nous par courriel à l'adresse copyrightconsultations-consultationsdroitdauteur@ised-isde.gc.ca.