Table ronde du Comité consultatif de l’espace (CCE) sur l’avenir du Canada dans l’espace

Hôtes du CCE : Lucy Stojak, Michael Pley et Stephan Germain

Priorités

  1. Développer le secteur spatial du Canada;
  2. Innovation et exploration de l'espace;
  3. Renforcer les partenariats internationaux à long terme;
  4. Inspirer la prochaine génération;
  5. Contribuer à notre compréhension de la Terre;
  6. Améliorer la qualité de vie des Canadiens;
  7. Préserver une nation sûre et sécurisée.

Faits saillants

L’industrie se transforme et un urgent appel à l’action se fait sentir dans le but de redynamiser le secteur canadien de l’espace par l’entremise d’une stratégie spatiale permettant une programmation prévisible et équilibrée, tout en apportant la flexibilité nécessaire afin de s’adapter aux technologies émergentes et aux modèles d’affaires en évolution.

Des lois et règlements avant-gardistes sont nécessaires à court terme afin de tenir la cadence des nouvelles technologies, et le Canada a l’occasion de devenir un chef de file. Il est possible de proposer des changements éventuels au cadre actuel des télécommunications et de la télédétection, de même que des lois concernant les activités spatiales émergentes, telles que l’entretien en orbite et l’exploitation minière dans l’espace.

Il demeure primordial d’inspirer les générations présentes et futures et plusieurs approches peuvent être envisagées, lesquelles comprennent le renouvellement des activités d’éducation et de sensibilisation de l’Agence spatiale canadienne, la prise en compte de nouvelles approches novatrices visant à stimuler l’intérêt des jeunes et une collaboration accrue avec les groupes d’éducation et de sensibilisation. Il faudrait également envisager de jeter un pont entre le système d’éducation et le secteur canadien de l’espace à l’intention des étudiants inspirés, en mettant en place des défis et des compétitions.

La recherche et l'engagement à apprendre des autres organismes publics de sensibilisation (par exemple, Planetary Society, Actua, Let's Talk Science) peuvent être nécessaires pour déterminer le degré de connaissance du public concernant le secteur spatial et les intérêts du public et pour définir des outils de communication efficaces (p. ex. plateformes Web afin de cibler les jeunes). Les jeunes Canadiens, par exemple, sont généralement captivés par les pionniers des temps modernes (comme Elon Musk) et peuvent être moins conscients et inspirés au sujet des missions phares du Canada (p. ex. la mission de la constellation RADARSAT).

On propose l’adoption d’une approche spatiale multidisciplinaire intégrant les sciences sociales et les études juridiques. Le nombre de Canadiens en STIM est important, mais peu d’étudiants se tournent vers les études spatiales. Le Canada pourrait envisager la création d’un institut de la politique spatiale en collaboration avec les intervenants, à l’instar d’autres pays (p. ex. l’Université George Washington aux É.-U. et l’Institut européen de la politique spatiale).

Principaux éléments et défis concernant la mise en œuvre

Environnement en évolution : Le secteur canadien de l’espace est à la croisée des chemins, et il est préférable qu’il traverse cette épreuve dès maintenant. La stratégie spatiale devra faire preuve d’adaptabilité afin de tenir compte de la cadence du développement technologique, de l’évolution des modèles d’affaires et des nouveaux écosystèmes. En raison du passage aux satellites à haut débit et des constellations hybrides LEO-GEO, le secteur traditionnel de la fabrication de satellites où le Canada a une force considérable a des difficultés car les opérateurs retardent leurs commandes satellitaires sur le marché GEO pour s'adapter à la flexibilité requise par le marché en mutation (p. Ex. Un seul satellite commercial GEO commandé cette année par rapport à la moyenne typique de 20 à 25 satellites par an). En l'absence de nouveaux programmes gouvernementaux, cela crée une crise à court terme dans le marché de la fabrication de systèmes satellitaires, exacerbé par des pays concurrents de l'espace qui investissent dans le développement de nouveaux produits pour se ré-outiller dans le contexte du marché en évolution.

Continuité et harmonisation des programmes : Il faut assurer le maintien à long terme des activités de programme. Le Canada pourrait envisager de se lancer dans une suite de missions exécutées à intervalles réguliers : dix missions de nanosatellites par an, une mission de petits satellites tous les deux ans et une grande mission internationale tous les cinq ans. L’harmonisation des programmes et la coordination du financement (CRSNG, Mitacs, PARI-CNRC) doivent assurer la continuité de la formation, indispensable à la recherche appliquée, ainsi que des démonstrations et, enfin, permettre d’amener de nouveaux produits et services innovants sur le marché.

Cadres juridiques et leadership mondial : Les lois et règlements nationaux doivent être envisagés de manière à faciliter la création de certitudes et d’une stabilité au sein de l’environnement commercial, et non pas la compliquer. Le Canada doit poursuivre sa collaboration avec ses partenaires internationaux et les pays partageant ses objectifs par l’entremise de forums multilatéraux, comme le Comité des Nations Unies pour l’utilisation pacifique de l’espace extra-atmosphérique (UN COPUOS), afin de faire valoir ses intérêts nationaux et le Canada doit être le chef de file international en matière de développement de règles et de normes pour s’assurer que ses intérêts sont pris en compte (p. ex. débris spatiaux, arsenalisation de l’espace, exploitation minière dans l’espace).

Planification des investissements : Les investissements doivent cibler le soutien de la prochaine génération de technologies (p. ex. technologie satellite de bande V, technologie d’exploitation minière des astéroïdes, entretien en orbite). Le Canada doit prendre des décisions concernant les principales forces et capacités dans lesquelles il doit investir. La mission de la Station spatiale internationale tire à sa fin, et de nouvelles occasions d’exploration planétaire se présenteront. Le Canada sera invité à participer aux efforts de collaboration, et le gouvernement du Canada doit être prêt afin de réagir rapidement et de ne pas manquer d’occasions.

Accroissement du financement : Le Canada exerce une influence démesurée dans l’espace, mais il pourrait bien perdre du terrain à long terme. Le financement général du Canada dans le secteur spatial doit être examiné et revu à la hausse de manière à ce que l’industrie canadienne de l’espace puisse demeurer concurrentielle par rapport aux autres pays investissant massivement dans ce secteur.

Approvisionnement en matière de défense : Étant donné que les forces militaires figurent souvent parmi les entités consacrant le plus de fonds aux technologies spatiales, il serait possible de tirer parti de l’approvisionnement en matière de défense spatiale pour redynamiser le secteur spatial et soutenir l’achat de biens et services canadiens. On laisse entendre que les contrats d’acquisition devraient toujours être ouverts et concurrentiels, mais garantir qu’une partie du travail se déroule au Canada.Les processus d’approvisionnement sont lents et les programmes en planification depuis des années doivent être lancés afin de soutenir la croissance du secteur spatial.

Sciences spatiales : Les missions scientifiques dans l’espace produisent d’importantes retombées nous permettant d’approfondir notre compréhension de la Terre, notamment de notre impact sur l’environnement. Il est nécessaire de maintenir le financement des sciences et des équipes scientifiques une fois que les instruments ont été mis au point et envoyés dans l’espace. Malgré les désaccords, on laisse entendre que le Canada devrait envoyer des charges utiles sur des satellites internationaux au lieu d’envoyer ses propres satellites scientifiques. Les deux derniers programmes scientifiques étaient des microsatellites uniques (MOST et SCISAT) qui étaient des sources de fierté canadienne. Il n'y a pas eu de nouvelle mission scientifique lancée au Canada depuis 2003 et on interprète le tout comme un manque de soutien envers la communauté scientifique.

Démarrage et mise à l'échelle : Le gouvernement peut soutenir les entreprises en phase de démarrage en leur offrant des occasions et de l’expérience de vol, en faisant office de premier client ou de client principal, en développant les écosystèmes par l’entremise de programmes (p. ex. Catapult au Royaume-Uni) et de réformes réglementaires (p. ex. Luxembourg). Afin de tenir la cadence des avancées technologiques, il est de plus en plus important de faire la démonstration de technologies dans l’espace et de parvenir rapidement à un niveau de maturité technologique de 9. Le soutien du développement des superconstellations représente une occasion pour les PME canadiennes, mais la recherche d’une plateforme permettant de tester de nouvelles technologies demeure un défi.

Principales idées et conclusions

Programme spatial équilibré : Une stratégie à long terme est nécessaire afin d’effectuer la transition depuis une approche basée sur les programmes. Une telle stratégie doit comprendre un ensemble de programmes phares (p. ex. la Station spatiale internationale et la mission Constellation RADARSAT) bien en vue, de même que des programmes adaptés de moindre envergure afin de stimuler les entreprises et de permettre aux universités de développer des compétences et des talents.

Accent mis sur l’action : Le soutien du gouvernement pourrait être nécessaire afin de redynamiser le secteur spatial et de conserver l’expertise au Canada; un tel soutien permettrait de développer des technologies clés et de faciliter la préparation à la prochaine génération de technologies perturbatrices (p. ex. mégaconstellations).

Modernisation des lois et règlements : Il faudra peut-être revoir et mettre à jour les règlements existants en matière de télécommunications et de télédétection ainsi que mettre en place rapidement de nouveaux mécanismes de réglementation afin de protéger les intérêts du Canada. Des lois et règlements modernisés et souples sont nécessaires pour encadrer les activités commerciales dans l’espace, de même que les technologies et possibilités émergentes (p. ex. stations spatiales privées, entretien en orbite, exploitation minière dans l’espace, transport privé dans l’espace, tourisme spatial). L'idée d'un institut de politique spatiale a été proposée comme un point focal au sein du gouvernement pour faire face à la tâche d'assurer un cadre réglementaire dynamique.

Partenariats : Il est primordial de tirer parti des ressources financières et des écosystèmes en place par l’entremise d’accords avec des partenaires internationaux et des organisations existantes, y compris des réseaux provinciaux, mais également de chercher des occasions d’établir des accords de partage des coûts ou des programmes conjoints.

Renouvellement des efforts de sensibilisation : Il est nécessaire de disposer de programmes d’éducation et de sensibilisation solides afin d’inspirer la prochaine génération; le programme en la matière de l’Agence spatiale canadienne devrait être rétabli et comprendre une participation active des intervenants en éducation et en sensibilisation du public (sociétés spatiales, musées et bibliothèques canadiens). Le Canada pourrait envisager l’utilisation d’une partie des fonds contracuel aux organismes publics de sensibilisation; et, le gouvernement pourrait réévaluer l’influence que l’Agence spatiale canadienne serait en mesure d’exercer sur l’éducation et le soutien aux écoles (p. ex. par l’entremise de ressources en ligne ou de séances d’apprentissage à l’intention des professeurs).

Développement des compétences et des talents : Même si les astronautes et les activités spatiales du Canada demeurent une importante source d’inspiration, les compétitions et les événements (p. ex. le Apps Challenge de la NASA, les marathons de programmation, competitions de fabrication de fusée et les programmes de mise au point de cubesats) peuvent également s’avérer efficaces pour inspirer la prochaine génération et favoriser le développement des talents au Canada.

Mégadonnées et accessibilité : On s’attend à ce que l’avènement de satellites pour les superconstellations produise un flot de données : il est possible que la création de nouveaux partenariats soit nécessaire afin de soutenir la connaissance mondiale, de même que pour répondre aux défis mondiaux (changements climatiques, surveillance environnementale). Il sera primordial de détenir une expertise en informatique et d’élaborer une stratégie permettant d’intégrer les données captées depuis l’espace à d’autres sources de données afin d’en augmenter l’utilité et l’accessibilité pour le public par l’entremise de politiques en matière de données ouvertes. L'idée d'une «initiative New Space» a été proposée, dans laquelle le gouvernement peut favoriser les démarrages et agir en tant que client d'ancrage pour des données qui répondent aux besoins du Canada et qui sont ensuite exploités pour les exportations.

Participants

  • Alain Aubertin – Consortium de recherche et d'innovation en aérospatiale au Québec
  • Martin Aubé – Ministère de l'Économie, de la Science et de l’Innovation Québec
  • Richard Boudreault – Sigma Energy Storage Inc.
  • Nathan De Ruiter – Euroconsult
  • Natalia Larrea Brito – Euroconsult
  • Carl Demchuck – RockÉTS
  • Karl Doetsch
  • Chantelle Dubois – Space Generation Advisory Council
  • Marie-Eve Ducharme – Nüvü Caméras Inc.
  • Eric Edwards – Xiphos Technologies
  • Jacques Giroux – ABB Bomen Inc.
  • Kate Howells – The Planetary Society
  • Ram S. Jakhu – Université McGill, Centre for Research of Air and Space Law
  • Virendra Jha – VRSpace Consultants Inc.
  • David Kendall – Comité des Nations Unies pour l’utilisation pacifique de l’espace extra-atmosphérique
  • Alexandra Kindrat – Aerospace Program for the Lester B Pearson School Board
  • John Landovskis – Advantech Wireless Inc.
  • Julie Mandar – ABB Bomen Inc.
  • Joanna Boshouwers – MDA
  • Marina Mississian – COM DEV Canada, Honeywell Aerospace
  • Ewan Reid – Mission Control Space Services Inc.
  • Warren Soh – Magellan Aerospace
  • Mathieu Trudelle – Canada Economic Development for Québec Regions
  • Gregg A. Wade – Collège militaire royal du Canada, Département de physique
  • Jane Diane Bachynski – MPB Communications Inc.